30 mai 1990 - Seul le prononcé fait foi
Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, sur le rôle de l'OCDE dans les échanges commerciaux, l'aide aux pays de l'est et l'environnement, Paris, le 30 mai 1990.
Mesdames,
- messieurs,
- Je suis vraiment très sensible à votre présence. Plusieurs d'entre vous nous ont déjà fait l'honneur de venir ici dans des circonstances semblables. Quant aux autres, qu'ils sachent qu'ils sont de la même manière les bienvenus. Conformément à une tradition maintenant bien établie, nous sommes là, dans ce palais de l'Elysée, à l'occasion du Conseil ministériel de votre grande organisation. Mais j'avoue que j'ai toujours grand profit et beaucoup de plaisir à vous rencontrer d'année en année.
- On me dit que vous avez beaucoup travaillé aujourd'hui, mais je pense que c'est aussi votre habitude. Sur la croissance, la croissance qui n'est pas une fin en soi, mais l'un des moyens pour vivre dans une société plus juste. Or le chômage, et particulièrement le chômage de longue durée, demeure trop élevé partout, particulièrement dans quelques-uns de nos pays. Il nous faut donc redoubler d'efforts pour améliorer la qualification des femmes et des hommes, pour valoriser ce que l'on appelle d'un terme maintenant usuel les ressources humaines. Il est bon que vous ayez travaillé là-dessus.
- J'ajoute que le risque d'une résurgence des tensions inflationnistes exige une attention constante, parce que globalement l'épargne reste insuffisante, les taux d'intérêts trop élevés et les déséquilibres extérieurs préoccupants. Les déficits des uns, les excédents des autres par leur niveau, parfois excessifs, contribuent à menacer la stabilité des marchés financiers et des changes. Je rappellerai simplement pour mémoire, vous connaissez parfaitement cette matière, que cela souligne une fois de plus le grand besoin d'un vrai système monétaire international souple, ordonné, capable d'atténuer les fluctuations, de réduire les incertitudes, de renforcer la confiance. Je n'ignore pas que beaucoup a été fait dans ce sens depuis quelques années. Il reste encore un beau chemin à faire.\
A la fin de cette année, l'achèvement du nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales, lancé il y a quatre ans en Uruguay, permettra, je l'espère, de faire reculer toutes les formes de protectionnisme. J'insiste sur le "toutes" si ce n'est de mettre fin aux tentations de recourir à des pratiques commerciales unilatérales. Honni soit qui mal y pense, mais en dépit des affirmations de principes, le protectionnisme très malin trouve toutes les formes les plus subtiles pour vaincre les bonnes volontés réelles ou apparentes.
- Nous devons, en particulier, programmer la réduction des soutiens publics à l'agriculture dans ce qu'ils ont d'excessif. Cette réduction ne pourra se faire que si elle est concrète, équilibrée, progressive, si elle concerne tous les soutiens qu'ils soient directs ou indirects, intérieurs ou externes aux frontières. C'est un débat auquel j'ai souvent pris part et je ne sais à qui je devrais donner la palme : qui subventionne le plus, je n'ose pas dire qui subventionne le moins !
- Je souhaite aussi des résultats probants dans le domaine des disciplines commerciales et des échanges de services et un accès plus grand pour les pays en développement à nos marchés.\
On m'a dit aussi - ce qui est normal - que vous avez beaucoup parlé de l'Est. A l'heure où les changements survenus dans ces pays nous rassurent - si nous en doutions, ce qui n'était pas le cas - sur la valeur de la démocratie.
- Ces pays placent en nous des espérances. Visiblement ils recherchent un modèle qui ressemblerait au nôtre et il serait d'un autre côté illusoire de croire que le seul passage à l'économie de marché permettra comme cela par automatisme surprenant à ces pays de surmonter leur retard. Aussi comment ne pas se réjouir qu'aient été signés hier, dans cette salle, les statuts de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Exactement dans le même sens, je vous félicite pour la création d'un centre de coopération avec les économies européennes de transition. L'OCDE pourra ainsi apporter à ces pays le meilleur d'elle-même : son système d'information, son expérience, son expertise, bref son savoir-faire dans le domaine de l'économie de marché.
- L'effort que nous consacrons afin d'aider l'Europe du centre et de l'est ne doit pas détourner notre attention des problèmes persistants et particulièrement graves que vivent les autres régions de la planète. Voilà pourquoi je me permets de vous le dire, c'est une pensée qui ne m'a pas quitté depuis maintenant neuf ans. Dans ses fonctions, l'aide au développement doit demeurer au coeur de nos préoccupations. C'est notre intérêt.
- Il n'y aura pas je pense de croissance harmonieuse sans une amélioration durable du niveau de vie de ces pays. Alors un meilleur accès des produits de ces pays à nos marchés, une stabilisation autant qu'il est possible des cours des produits de base. Que signifie un effort qui peut être anéanti par une décision prise à des milliers de kilomètres de là et qui ruine absolument toute tentative de planification dans l'effort d'un pays du tiers-monde ? L'aide publique au développement reste plus que jamais selon moi une nécessité. J'aurai l'occasion de le rappeler lors du prochain sommet des grands pays industrialisés.\
J'attends aussi que la conférence des pays les moins avancés qui se réunira à Paris en septembre aboutisse à la fixation d'objectifs prioritaires assortis d'engagements précis et contraignants et de mécanismes de suivi efficaces : que les pays de l'OCDE consacrent 0,7 % de leur produit intérieur brut aux pays en développement dont 0,15 % aux pays les plus pauvres, voilà ce qui a été déterminé il y a déjà plusieurs années. On progresse si lentement qu'il y a de quoi désespérer ceux qui attendent et ceux qui souffrent. De même, je voudrais consacrer mon effort et je souhaite que vous consacriez le vôtre pour l'allègement du poids de la dette. Nous avons déjà beaucoup fait en ce sens il y a deux ans puis au Sommet des Sept à Paris l'an dernier.
- Maintenant, il s'agit d'alléger le fardeau de la dette des pays que l'on appelle intermédiaires. Ces pays ont souvent de réelles capacités de croissance, certains mettent en place des politiques courageuses et en tous cas risquées et le service des dettes les écrase. Je suis convaincu que votre organisation et que ses états-membres qui viennent d'adopter une déclaration sur la coopération pour le développement dans la décennie 1990, sauront accorder leurs actes à leurs intentions. Je vous déclare que la France le fera.\
Une de vos préoccupations majeures, et j'en aurai fini, concerne l'environnement. Là aussi, il faut dépasser les déclarations d'intention, il faut réussir à obtenir une coopération internationale vraiment contraignante ou bien nous parlons pour ne rien dire. Justement vous avez inscrit à l'ordre du jour de vos prochains travaux, l'étude approfondie d'une meilleure intégration des politiques économiques et des politiques d'environnement. Le secret de la réponse à venir est dans ce lien et je vous sais gré d'avoir décidé d'agir avec vos compétences et votre résolution sur ce problème si difficile.
- Là-dessus on pourrait parler à longueur de journée. Unissons nos efforts. L'environnement ne connaît pas de frontières par définition, c'est la planète et au-delà de la planète, l'espace qui se trouve en péril et c'est notre planète et c'est notre espace.
- Voilà, mesdames et messieurs, ce que je voulais vous dire. Je forme des voeux pour les succès de vos travaux. Je vous redis le plaisir que j'ai de vous recevoir et celui que j'aurai si Dieu nous prête vie, Dieu et d'autres circonstances, vous retrouver l'année prochaine.\
- messieurs,
- Je suis vraiment très sensible à votre présence. Plusieurs d'entre vous nous ont déjà fait l'honneur de venir ici dans des circonstances semblables. Quant aux autres, qu'ils sachent qu'ils sont de la même manière les bienvenus. Conformément à une tradition maintenant bien établie, nous sommes là, dans ce palais de l'Elysée, à l'occasion du Conseil ministériel de votre grande organisation. Mais j'avoue que j'ai toujours grand profit et beaucoup de plaisir à vous rencontrer d'année en année.
- On me dit que vous avez beaucoup travaillé aujourd'hui, mais je pense que c'est aussi votre habitude. Sur la croissance, la croissance qui n'est pas une fin en soi, mais l'un des moyens pour vivre dans une société plus juste. Or le chômage, et particulièrement le chômage de longue durée, demeure trop élevé partout, particulièrement dans quelques-uns de nos pays. Il nous faut donc redoubler d'efforts pour améliorer la qualification des femmes et des hommes, pour valoriser ce que l'on appelle d'un terme maintenant usuel les ressources humaines. Il est bon que vous ayez travaillé là-dessus.
- J'ajoute que le risque d'une résurgence des tensions inflationnistes exige une attention constante, parce que globalement l'épargne reste insuffisante, les taux d'intérêts trop élevés et les déséquilibres extérieurs préoccupants. Les déficits des uns, les excédents des autres par leur niveau, parfois excessifs, contribuent à menacer la stabilité des marchés financiers et des changes. Je rappellerai simplement pour mémoire, vous connaissez parfaitement cette matière, que cela souligne une fois de plus le grand besoin d'un vrai système monétaire international souple, ordonné, capable d'atténuer les fluctuations, de réduire les incertitudes, de renforcer la confiance. Je n'ignore pas que beaucoup a été fait dans ce sens depuis quelques années. Il reste encore un beau chemin à faire.\
A la fin de cette année, l'achèvement du nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales, lancé il y a quatre ans en Uruguay, permettra, je l'espère, de faire reculer toutes les formes de protectionnisme. J'insiste sur le "toutes" si ce n'est de mettre fin aux tentations de recourir à des pratiques commerciales unilatérales. Honni soit qui mal y pense, mais en dépit des affirmations de principes, le protectionnisme très malin trouve toutes les formes les plus subtiles pour vaincre les bonnes volontés réelles ou apparentes.
- Nous devons, en particulier, programmer la réduction des soutiens publics à l'agriculture dans ce qu'ils ont d'excessif. Cette réduction ne pourra se faire que si elle est concrète, équilibrée, progressive, si elle concerne tous les soutiens qu'ils soient directs ou indirects, intérieurs ou externes aux frontières. C'est un débat auquel j'ai souvent pris part et je ne sais à qui je devrais donner la palme : qui subventionne le plus, je n'ose pas dire qui subventionne le moins !
- Je souhaite aussi des résultats probants dans le domaine des disciplines commerciales et des échanges de services et un accès plus grand pour les pays en développement à nos marchés.\
On m'a dit aussi - ce qui est normal - que vous avez beaucoup parlé de l'Est. A l'heure où les changements survenus dans ces pays nous rassurent - si nous en doutions, ce qui n'était pas le cas - sur la valeur de la démocratie.
- Ces pays placent en nous des espérances. Visiblement ils recherchent un modèle qui ressemblerait au nôtre et il serait d'un autre côté illusoire de croire que le seul passage à l'économie de marché permettra comme cela par automatisme surprenant à ces pays de surmonter leur retard. Aussi comment ne pas se réjouir qu'aient été signés hier, dans cette salle, les statuts de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Exactement dans le même sens, je vous félicite pour la création d'un centre de coopération avec les économies européennes de transition. L'OCDE pourra ainsi apporter à ces pays le meilleur d'elle-même : son système d'information, son expérience, son expertise, bref son savoir-faire dans le domaine de l'économie de marché.
- L'effort que nous consacrons afin d'aider l'Europe du centre et de l'est ne doit pas détourner notre attention des problèmes persistants et particulièrement graves que vivent les autres régions de la planète. Voilà pourquoi je me permets de vous le dire, c'est une pensée qui ne m'a pas quitté depuis maintenant neuf ans. Dans ses fonctions, l'aide au développement doit demeurer au coeur de nos préoccupations. C'est notre intérêt.
- Il n'y aura pas je pense de croissance harmonieuse sans une amélioration durable du niveau de vie de ces pays. Alors un meilleur accès des produits de ces pays à nos marchés, une stabilisation autant qu'il est possible des cours des produits de base. Que signifie un effort qui peut être anéanti par une décision prise à des milliers de kilomètres de là et qui ruine absolument toute tentative de planification dans l'effort d'un pays du tiers-monde ? L'aide publique au développement reste plus que jamais selon moi une nécessité. J'aurai l'occasion de le rappeler lors du prochain sommet des grands pays industrialisés.\
J'attends aussi que la conférence des pays les moins avancés qui se réunira à Paris en septembre aboutisse à la fixation d'objectifs prioritaires assortis d'engagements précis et contraignants et de mécanismes de suivi efficaces : que les pays de l'OCDE consacrent 0,7 % de leur produit intérieur brut aux pays en développement dont 0,15 % aux pays les plus pauvres, voilà ce qui a été déterminé il y a déjà plusieurs années. On progresse si lentement qu'il y a de quoi désespérer ceux qui attendent et ceux qui souffrent. De même, je voudrais consacrer mon effort et je souhaite que vous consacriez le vôtre pour l'allègement du poids de la dette. Nous avons déjà beaucoup fait en ce sens il y a deux ans puis au Sommet des Sept à Paris l'an dernier.
- Maintenant, il s'agit d'alléger le fardeau de la dette des pays que l'on appelle intermédiaires. Ces pays ont souvent de réelles capacités de croissance, certains mettent en place des politiques courageuses et en tous cas risquées et le service des dettes les écrase. Je suis convaincu que votre organisation et que ses états-membres qui viennent d'adopter une déclaration sur la coopération pour le développement dans la décennie 1990, sauront accorder leurs actes à leurs intentions. Je vous déclare que la France le fera.\
Une de vos préoccupations majeures, et j'en aurai fini, concerne l'environnement. Là aussi, il faut dépasser les déclarations d'intention, il faut réussir à obtenir une coopération internationale vraiment contraignante ou bien nous parlons pour ne rien dire. Justement vous avez inscrit à l'ordre du jour de vos prochains travaux, l'étude approfondie d'une meilleure intégration des politiques économiques et des politiques d'environnement. Le secret de la réponse à venir est dans ce lien et je vous sais gré d'avoir décidé d'agir avec vos compétences et votre résolution sur ce problème si difficile.
- Là-dessus on pourrait parler à longueur de journée. Unissons nos efforts. L'environnement ne connaît pas de frontières par définition, c'est la planète et au-delà de la planète, l'espace qui se trouve en péril et c'est notre planète et c'est notre espace.
- Voilà, mesdames et messieurs, ce que je voulais vous dire. Je forme des voeux pour les succès de vos travaux. Je vous redis le plaisir que j'ai de vous recevoir et celui que j'aurai si Dieu nous prête vie, Dieu et d'autres circonstances, vous retrouver l'année prochaine.\