2 février 1990 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, sur la responsabilité et la place des jeunes dans la marche pour l'unité européenne entre l'Est et l'Ouest, Paris, le 2 février 1990.

Je suis très heureux de vous recevoir ici ce soir.
- J'avais été convié par Harlem Désir et les différents organisateurs à prendre part d'une façon ou d'une autre à votre rencontre. J'ai pensé que la meilleure façon de faire c'était de vous recevoir ici même pour ajouter à la symbolique de cette rencontre entre les jeunes de l'Est et de l'Ouest la signification qui est liée à la Présidence de la République française, c'est-à-dire le lieu où tous les Français et leurs amis doivent normalement se retrouver.
- Vous venez, comme il vient d'être dit, de pays différents, l'Est et l'Ouest. C'est d'ailleurs votre définition, c'est pourquoi vous êtes ensemble afin de vous connaître, de confronter vos points de vue, d'étudier ce que peut être l'avenir, comparer vos expériences et affermir votre solidarité.
- Je suis reconnaissant à Harlem Désir et à ceux qui l'aident d'avoir pris une initiative de ce genre. Les frontières ont trop souvent été considérées comme une façon de séparer les peuples au-delà de la politique et de la sécurité, séparer les esprits, séparer les cultures. Dès lors que s'établit entre les cultures européennes que nous représentons, ce dialogue, on s'aperçoit à quel point nous sommes, vous êtes, filles et fils de la même histoire, de la même aventure, d'un même continent, le plus petit de la planète, de peuples qui se sont connus, appréciés, aimés, détestés, combattus. Leur histoire est un immense mélange d'événements contradictoires et pourtant on peut discerner dans ce magma comme une sorte de marche qui se dessine peu à peu vers l'unité. Laquelle unité n'est possible assurément que sur la base de quelques idées simples ressenties par tout le monde, par tous les êtres humains sur la terre, qui s'appellent la liberté, la solidarité, la justice et la paix.\
Donc, il faut que vous serviez ces grandes idées, vous êtes là pour cela et c'est bien ce qui ressortait des exposés rapides de vos trois amis que je suis heureux de saluer et dont les propos m'ont ému. Je ne veux pas ajouter un discours à d'autres, je veux simplement que vous sachiez que pendant ces quelques instants où vous êtes ici, vous devez vous sentir à l'aise. C'est ici que se prennent les décisions fondamentales de l'avenir de la France et je veux que vous vous sentiez étroitement associés, en harmonie avec les desseins du peuple français dans la ligne de 1789 admirablement relayée par les peuples de l'Est en 1989. Je tiens à vous rendre hommage à vous toutes et à vous tous, c'est vous qui avez exprimé l'histoire contemporaine, c'est vous qui en avez été les porte-parole et votre tâche est loin d'être terminée.
- Vous connaîtrez des heures difficiles, vous les surmonterez par la rigueur de l'esprit, par la profondeur des convictions, par l'ardeur au service des idéaux qui sont les vôtres et vous avez l'histoire pour vous. D'ailleurs, vous avez bien vu de quelle façon les peuples répondaient et même souvent précédaient par une sorte de mouvement intérieur qui exprimait sans doute des décennies de désespoir et d'abandon.
- Alors je vais vous dire bonne chance. Je souhaite vraiment que vos dialogues aient été utiles, mais enfin c'est présupposé ! Le seul fait d'être ensemble c'est déjà un immense progrès et quand on cherche à comprendre, quand on a le sens de l'unité de l'Europe il y a beaucoup à se dire.
- Soyez remerciés d'être venus jusqu'ici, je souhaite à chacun de vos peuples d'accéder à la démocratie pleine et entière, à la liberté et que tous ensemble nous soyons capables de bâtir les fondements de la paix dans l'Europe profondément renouvelée dans laquelle nous vivons aujourd'hui.\