19 mai 1989 - Seul le prononcé fait foi
Rencontre conjointe et informelle avec la presse de M. François Mitterrand, Président de la République, et de M. Brian Mulroney, Premier ministre du Canada, Ottawa, vendredi 19 mai 1989.
Mesdames,
- Messieurs,
- Devant présider au mois de juillet prochain, les 14, 15 et 16 juillet le sommet des Sept plus grands pays industriels, j'ai à la fois obéi à un début de tradition qui veut que le responsable de l'année rende visite à ses collègues pour préparer ce sommet et au besoin que j'avais de rencontrer sur d'autres plans le Premier ministre, M. Mulroney, comme je le ferai demain du Président des Etats-Unis, M. Bush. La raison principale de mon voyage tient essentiellement à la préparation de ce sommet des grands pays industriels, mais la coïncidence du calendrier veut que nous avons aussi à préparer ensemble deux autres sommets. Celui de Dakar - la francophonie -, de Bruxelles - celui de l'OTAN -. Tout cela va occuper les jours qui viennent, je serai rentré lundi à Paris et, dès mercredi, nous repartirons pour Dakar £ le lundi suivant, nous serons à Bruxelles. Vous voyez, nous avons du pain sur la planche. Nous avons également à discuter d'un certain nombre de questions bilatérales qui touchent directement aux intérêts du Canada et de la France. Je remercie M. Mulroney pour son hospitalité. Ce n'est pas la première fois, et j'en use assez souvent. J'ai plaisir à me retrouver au Canada. Depuis quelques années, c'est presque devenu un rituel et je ne m'en plains pas j'aurais, je le pense, d'autres occasions de revenir et nos amis qui nous reçoivent aujourd'hui seront toujours les bienvenus en France. Je salue en même temps la presse française et la presse canadienne qui veulent bien nous écouter, et qui veulent peut-être aussi parler.\
QUESTION.- Monsieur, doit-on s'attendre la semaine prochaine dans le cadre du Sommet de la francophonie à ce que vous ayez d'autres initiatives pour alléger le fardeau de la dette, des pays africains en particulier ?
- LE PRESIDENT.- J'avais fixé - je n'avais pas besoin de faire beaucoup d'efforts pour cela, cela s'imposait de soi-même - j'avais fixé comme première question à traiter à Paris, la question de l'endettement, condition sine qua non du développement. Et puisque l'occasion m'en est donnée, cette même question sera traitée dans d'autres circonstances et avec d'autres partenaires très directement intéressés à Dakar. C'est donc un sujet qui est vraiment à l'ordre du jour.
- QUESTION.- On va en parler, mais peut-on s'attendre à des initiatives concrètes la semaine prochaine ?
- LE PRESIDENT.- Il y aura des initiatives. Vous voulez dire que vous pensez que l'on parle pour ne rien dire quelquefois ? Eh bien, ce n'est pas notre objectif.\
QUESTION.- Est-ce qu'il va être question de sous-marins nucléaires ou autres dans vos conversations avec M. Mulroney ?
- LE PRESIDENT.- J'ai l'impression que c'est un sujet un peu dépassé, non ? Vous ne suivez pas l'actualité, monsieur. Enfin je veux dire l'actualité canadienne.
- QUESTION.- Le Canada cherche quatre nouveaux sous-marins conventionnels...
- LE PRESIDENT.- Conventionnels ? J'espère qu'il aura de bonnes idées le Canada.
- QUESTION.- Monsieur le Président vous avez demandé une réunion du G5 et du G7...
- LE PRESIDENT.- Non je n'ai pas dit cela. J'ai vu cette interprétation ici ou là, mais je ne l'ai pas dit. J'ai dit que c'était de l'ordre de la compétence des G5 et des G7. C'est à eux de traiter çà, mais je n'ai pas demandé leur réunion. De toute manière, elles auront lieu, mais je n'ai pas demandé de réunion particulière.
- QUESTION.- Mais vous avez..
- LE PRESIDENT.- ... Ecoutez monsieur, j'ai parlé à la télévision, donc mes propos sont facilement contrôlables. Je n'ai pas demandé de réunion, mais ce sont des instances qui ont été crées pour cela.
- QUESTION.- Monsieur le Président, pensez-vous que l'on peut résoudre les problèmes, les divisions à l'intérieur de l'OTAN sur les questions des missiles en Allemagne de l'Ouest ?
- LE PRESIDENT.- Je suis confiant. C'est une confiance raisonnée. Mais je suis confiant, je pense que l'Alliance a toujours des problèmes difficiles devant elle. Celui-ci en est un, mais j'ai dit précisément à Paris hier, qu'à mon avis, cela serait réglé sans conflit particulier. C'est un pronostic, çà vaut ce que cela vaut : c'est comme pour les matchs de football...\
QUESTION.- Monsieur le Président, la semaine prochaine à Dakar, le Canada a l'intention de discuter de questions sur l'environnement. Est-ce que la France partage ces préoccupations et quelles seront les principales préoccupations de la France lors du Sommet de la francophonie ?
- LE PRESIDENT.- Nous avons, nous ne sommes pas les seuls puisque nous sommes avec 23 partenaires, et le Canada a suivi ça de très près - nous avons signé à La Haye une résolution que je crois d'une extrême importance puisqu'elle prévoit un système, une procédure : la création d'une autorité mondiale qui pourrait intervenir sous certaines conditions pour régler les atteintes à l'environnement. C'est vous dire qu'ayant fait parti du groupe qui a demandé le plus, je suis toujours disponible pour entendre de nouvelles suggestions. Vous savez que ce sont 24 pays qui ont signé cela et que 9 autres pays les ont rejoints depuis. Je suis convaincu qu'à Dakar, de nombreux pays africains viendront s'ajouter à la liste. C'est donc une préoccupation que je partage entièrement. J'ai placé précisément, comme prioritaires au débat du Sommet de Paris, les problèmes de l'endettement - donc du développement - et le problème de l'environnement. A Dakar l'environnement est inscrit comme un problème majeur.\
QUESTION.- Monsieur le Président, le mouvement Québec français nous a fait remettre par votre ambassadeur une lettre personnelle, vous demandant à Dakar de faire preuve d'un peu plus de leadership en particulier dans le domaine des communications, dans la science et la technique : c'est relié à l'affaire de l'Institut Pasteur. Est-ce que vous êtes d'accord avec la pression des Québécois qui considèrent que la France fait preuve d'un peu de négligence dans cette question là ?
- LE PRESIDENT.- Mais non. L'Institut Pasteur est un organisme indépendant du gouvernement français, et nous avons été très fâché d'apprendre qu'il avait décidé d'éditer sa brochure, sa revue, en langue anglaise. Et nous sommes intervenus comme nos amis canadiens qui ont très bien fait de s'en formaliser. Je ne pense pas qu'il y ait de négligences des pouvoirs publics français. Simplement, un peu partout, les institutions privées ou semi-publiques en prennent à leur aise. Ils ont tort. Et nous entendons bien, non pas leur faire la leçon, mais les conduire à avoir une meilleure conscience de la défense de leur langue.
- QUESTION.- N'est-il pas vrai, monsieur le Président - c'est du moins ce que l'on a interprété ici - qu'il a fallu que le Québec se meuve pour que la France se réveille ?
- LE PRESIDENT.- Pourquoi est-ce que le Québec serait plus attaché à la langue française que la France ?
- QUESTION.- C'est ce que dit le Président du mouvement "Québec français".
- LE PRESIDENT.- Oui, je le respecte infiniment, mais cela peut lui arriver de dire n'importe quoi. Ce qui est vrai, c'est que le Québec a vite et bien réagi, tout de suite. Il n'a pas perdu de temps. De ce point de vue-là, on a admiré la rapidité des réflexes. Cela ne veut pas dire pour autant que la France s'est désintéressée de ce sujet.\
QUESTION.- Monsieur le Président, est-ce que vous avez parlé avec le Premier ministre, M. Mulroney, de la situation en Chine ? Sinon, quel est votre sentiment sur ce qui se déroule en ce moment en Chine ?
- LE PRESIDENT.- On n'a pas encore eu l'occasion. Vous savez on a parlé une heure. On était préoccupés par les quatre points de notre ordre du jour dont nous n'avons approfondi que deux : le Sommet de Paris et le Sommet de Dakar. On a réservé pour la fin de la soirée le Sommet de Bruxelles et la relation bilatérale. On n'a donc pas encore abordé les autres questions qui viendront sans doute au cours de la conversation. C'est un peu comme cela une improvisation : vous voulez rattraper les questions qui n'ont pas été posées hier !...
- Je pense que, dans le mouvement général du monde et par référence à ce que la France a vécu il y a deux siècles très exactement, je pense que la liberté est en train de faire sauter les murs les plus épais. Mais cela ne se fera pas sans que les murs résistent. C'est un grand combat pour l'humanité.\
- Messieurs,
- Devant présider au mois de juillet prochain, les 14, 15 et 16 juillet le sommet des Sept plus grands pays industriels, j'ai à la fois obéi à un début de tradition qui veut que le responsable de l'année rende visite à ses collègues pour préparer ce sommet et au besoin que j'avais de rencontrer sur d'autres plans le Premier ministre, M. Mulroney, comme je le ferai demain du Président des Etats-Unis, M. Bush. La raison principale de mon voyage tient essentiellement à la préparation de ce sommet des grands pays industriels, mais la coïncidence du calendrier veut que nous avons aussi à préparer ensemble deux autres sommets. Celui de Dakar - la francophonie -, de Bruxelles - celui de l'OTAN -. Tout cela va occuper les jours qui viennent, je serai rentré lundi à Paris et, dès mercredi, nous repartirons pour Dakar £ le lundi suivant, nous serons à Bruxelles. Vous voyez, nous avons du pain sur la planche. Nous avons également à discuter d'un certain nombre de questions bilatérales qui touchent directement aux intérêts du Canada et de la France. Je remercie M. Mulroney pour son hospitalité. Ce n'est pas la première fois, et j'en use assez souvent. J'ai plaisir à me retrouver au Canada. Depuis quelques années, c'est presque devenu un rituel et je ne m'en plains pas j'aurais, je le pense, d'autres occasions de revenir et nos amis qui nous reçoivent aujourd'hui seront toujours les bienvenus en France. Je salue en même temps la presse française et la presse canadienne qui veulent bien nous écouter, et qui veulent peut-être aussi parler.\
QUESTION.- Monsieur, doit-on s'attendre la semaine prochaine dans le cadre du Sommet de la francophonie à ce que vous ayez d'autres initiatives pour alléger le fardeau de la dette, des pays africains en particulier ?
- LE PRESIDENT.- J'avais fixé - je n'avais pas besoin de faire beaucoup d'efforts pour cela, cela s'imposait de soi-même - j'avais fixé comme première question à traiter à Paris, la question de l'endettement, condition sine qua non du développement. Et puisque l'occasion m'en est donnée, cette même question sera traitée dans d'autres circonstances et avec d'autres partenaires très directement intéressés à Dakar. C'est donc un sujet qui est vraiment à l'ordre du jour.
- QUESTION.- On va en parler, mais peut-on s'attendre à des initiatives concrètes la semaine prochaine ?
- LE PRESIDENT.- Il y aura des initiatives. Vous voulez dire que vous pensez que l'on parle pour ne rien dire quelquefois ? Eh bien, ce n'est pas notre objectif.\
QUESTION.- Est-ce qu'il va être question de sous-marins nucléaires ou autres dans vos conversations avec M. Mulroney ?
- LE PRESIDENT.- J'ai l'impression que c'est un sujet un peu dépassé, non ? Vous ne suivez pas l'actualité, monsieur. Enfin je veux dire l'actualité canadienne.
- QUESTION.- Le Canada cherche quatre nouveaux sous-marins conventionnels...
- LE PRESIDENT.- Conventionnels ? J'espère qu'il aura de bonnes idées le Canada.
- QUESTION.- Monsieur le Président vous avez demandé une réunion du G5 et du G7...
- LE PRESIDENT.- Non je n'ai pas dit cela. J'ai vu cette interprétation ici ou là, mais je ne l'ai pas dit. J'ai dit que c'était de l'ordre de la compétence des G5 et des G7. C'est à eux de traiter çà, mais je n'ai pas demandé leur réunion. De toute manière, elles auront lieu, mais je n'ai pas demandé de réunion particulière.
- QUESTION.- Mais vous avez..
- LE PRESIDENT.- ... Ecoutez monsieur, j'ai parlé à la télévision, donc mes propos sont facilement contrôlables. Je n'ai pas demandé de réunion, mais ce sont des instances qui ont été crées pour cela.
- QUESTION.- Monsieur le Président, pensez-vous que l'on peut résoudre les problèmes, les divisions à l'intérieur de l'OTAN sur les questions des missiles en Allemagne de l'Ouest ?
- LE PRESIDENT.- Je suis confiant. C'est une confiance raisonnée. Mais je suis confiant, je pense que l'Alliance a toujours des problèmes difficiles devant elle. Celui-ci en est un, mais j'ai dit précisément à Paris hier, qu'à mon avis, cela serait réglé sans conflit particulier. C'est un pronostic, çà vaut ce que cela vaut : c'est comme pour les matchs de football...\
QUESTION.- Monsieur le Président, la semaine prochaine à Dakar, le Canada a l'intention de discuter de questions sur l'environnement. Est-ce que la France partage ces préoccupations et quelles seront les principales préoccupations de la France lors du Sommet de la francophonie ?
- LE PRESIDENT.- Nous avons, nous ne sommes pas les seuls puisque nous sommes avec 23 partenaires, et le Canada a suivi ça de très près - nous avons signé à La Haye une résolution que je crois d'une extrême importance puisqu'elle prévoit un système, une procédure : la création d'une autorité mondiale qui pourrait intervenir sous certaines conditions pour régler les atteintes à l'environnement. C'est vous dire qu'ayant fait parti du groupe qui a demandé le plus, je suis toujours disponible pour entendre de nouvelles suggestions. Vous savez que ce sont 24 pays qui ont signé cela et que 9 autres pays les ont rejoints depuis. Je suis convaincu qu'à Dakar, de nombreux pays africains viendront s'ajouter à la liste. C'est donc une préoccupation que je partage entièrement. J'ai placé précisément, comme prioritaires au débat du Sommet de Paris, les problèmes de l'endettement - donc du développement - et le problème de l'environnement. A Dakar l'environnement est inscrit comme un problème majeur.\
QUESTION.- Monsieur le Président, le mouvement Québec français nous a fait remettre par votre ambassadeur une lettre personnelle, vous demandant à Dakar de faire preuve d'un peu plus de leadership en particulier dans le domaine des communications, dans la science et la technique : c'est relié à l'affaire de l'Institut Pasteur. Est-ce que vous êtes d'accord avec la pression des Québécois qui considèrent que la France fait preuve d'un peu de négligence dans cette question là ?
- LE PRESIDENT.- Mais non. L'Institut Pasteur est un organisme indépendant du gouvernement français, et nous avons été très fâché d'apprendre qu'il avait décidé d'éditer sa brochure, sa revue, en langue anglaise. Et nous sommes intervenus comme nos amis canadiens qui ont très bien fait de s'en formaliser. Je ne pense pas qu'il y ait de négligences des pouvoirs publics français. Simplement, un peu partout, les institutions privées ou semi-publiques en prennent à leur aise. Ils ont tort. Et nous entendons bien, non pas leur faire la leçon, mais les conduire à avoir une meilleure conscience de la défense de leur langue.
- QUESTION.- N'est-il pas vrai, monsieur le Président - c'est du moins ce que l'on a interprété ici - qu'il a fallu que le Québec se meuve pour que la France se réveille ?
- LE PRESIDENT.- Pourquoi est-ce que le Québec serait plus attaché à la langue française que la France ?
- QUESTION.- C'est ce que dit le Président du mouvement "Québec français".
- LE PRESIDENT.- Oui, je le respecte infiniment, mais cela peut lui arriver de dire n'importe quoi. Ce qui est vrai, c'est que le Québec a vite et bien réagi, tout de suite. Il n'a pas perdu de temps. De ce point de vue-là, on a admiré la rapidité des réflexes. Cela ne veut pas dire pour autant que la France s'est désintéressée de ce sujet.\
QUESTION.- Monsieur le Président, est-ce que vous avez parlé avec le Premier ministre, M. Mulroney, de la situation en Chine ? Sinon, quel est votre sentiment sur ce qui se déroule en ce moment en Chine ?
- LE PRESIDENT.- On n'a pas encore eu l'occasion. Vous savez on a parlé une heure. On était préoccupés par les quatre points de notre ordre du jour dont nous n'avons approfondi que deux : le Sommet de Paris et le Sommet de Dakar. On a réservé pour la fin de la soirée le Sommet de Bruxelles et la relation bilatérale. On n'a donc pas encore abordé les autres questions qui viendront sans doute au cours de la conversation. C'est un peu comme cela une improvisation : vous voulez rattraper les questions qui n'ont pas été posées hier !...
- Je pense que, dans le mouvement général du monde et par référence à ce que la France a vécu il y a deux siècles très exactement, je pense que la liberté est en train de faire sauter les murs les plus épais. Mais cela ne se fera pas sans que les murs résistent. C'est un grand combat pour l'humanité.\