25 août 1987 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Conférence de presse conjointe de M. François Mitterrand, Président de la République, et de M. Felipe Gonzalez, Président du gouvernement espagnol, à l'issue de leur rencontre à Latché le 25 août 1987, sur la coopération bilatérale dans la lutte contre le terrorisme et sur la défense européenne. (Quelques passages inaudibles sur la bande magnétique).

Mesdames et messieurs,
- M. Felipe Gonzalez va repartir dans quelques moments en Espagne. Nous avons eu des conversations qui ont commencé vers 12h15 et qui se sont poursuivies pratiquement sans interruption jusqu'à maintenant. Nous pouvons vous en parler si vous désirez nous poser des questions. C'est l'objet essentiel de la réunion de cet après-midi, sans quoi quelque plaisir que j'en aie, je ne vous aurais pas attendu ici et vous n'auriez pas eu à vous déranger pour venir si loin de vos bases. Mais on a pensé que la présence du Premier ministre espagnol vous donnerait l'occasion de poser des questions intéressantes pour l'avenir de l'Europe ou pour les relations bilatérales entre l'Espagne et la France.
- Cette réunion s'inscrit dans toute une série de rencontres qui auront tendance à se multiplier avant la fin de cette année, puisqu'au mois d'octobre le Roi d'Espagne viendra à Paris pour une inauguration propre à l'Espagne. Bien entendu ce sera l'occasion pour le Roi de rencontrer les dirigeants français. Il y aura aussitôt après des réunions de travail franco-espagnoles qui se tiendront à Annecy. D'autre part, début novembre, M. Felipe Gonzalez reviendra à Paris, il verra qui il voudra, et en particulier le Premier ministre et naturellement le Président de la République. Puis nous aurons les rencontres dans le -cadre de la Communauté européenne, Copenhague en particulier. Ce qui veut dire que nous aurons vraiment de nombreuses occasions de mettre au point, de préciser, d'affûter les dispositifs politiques touchant à la construction de l'Europe d'un commun accord entre l'Espagne et la France. Je vous dis cela comme préambule, pour que vous compreniez que nous avions quand même pas mal de choses à nous dire, indépendamment du fait que j'ai grand plaisir à recevoir, une nouvelle fois ici, mon ami Felipe Gonzalez, puisque nous rappelions tout à l'heure qu'il y a onze ans, nous étions au même endroit mais pas dans la même situation. Nous imaginions ce qu'il serait possible de faire pour nos pays, nous devons continuer d'imaginer, mais nous avons plus à faire. Ce qui est finalement très intéressant. Je pense que M. Felipe Gonzalez souhaitera vous dire quelques mots et surtout il est tout à fait disponible pour répondre à vos questions. Il était accompagné de très peu de collaborateurs, comme moi-même car il ne s'agit pas d'une rencontre officielle - enfin c'est toujours officiel forcément, quand le Premier ministre d'Espagne et le Président de la République Française se rencontrent, cela a un côté officiel - mais il y a tout un aspect de relations amicales, de relations personnelles, de confiance mutuelle qui donnent à ces rencontres politiques une signification plus complète, c'est cette signification là la signification principale, parce que pour le reste, je viens de vous le dire, d'ici la fin de l'année, nous aurons d'autres occasions d'aborder méthodiquement les questions. Si, monsieur le Premier ministre, vous souhaitez maintenant vous adresser aux journalistes espagnols et français qui se trouvent ici, ils en seront très contents.\
Felipe GONZALEZ.- J'étais ici il y a onze ans, dans cet endroit si agréable et pour moi, ce n'est pas seulement pour moi une occasion pour le souvenir, c'est pour repasser aussi tous les événements pour l'histoire de mon pays et pour les choses qui se sont passées. J'ai rencontré ici, avec le Président Mitterrand, et pour moi c'est un grand plaisir, une bonne occasion pour faire cette réflexion du passé, du présent et du futur de l'Europe et des relations entre nos deux pays.
- Les derniers mots ont été dès hier de mon côté, pour préciser que nous avons parlé non seulement de notre relation bilatérale et de son développement depuis quelques années mais aussi de la construction européenne, soit dans le domaine de la réalisation de l'Acte unique avec toute la complexité budgétaire, financière pour l'Europe, après l'élargissement des objectifs de coopération politique en matière de sécurité de cette idée de l'Europe. Ce n'est pas une idée partagée de la même manière par tout le monde, mais je crois que c'est une idée partagée par l'Espagne et la France d'une manière très proche. On a surmonté beaucoup d'obstacles et on se trouve dans une situation à mon avis très bonne pour la coopération soit dans le domaine bilatéral, soit dans le domaine multilatéral de la construction européenne.\
LE PRESIDENT.- Je crois que maintenant vous pourriez, mesdames et messieurs, poser les questions de votre choix. Ensuite nous laisserons M. Felipe Gonzalez regagner son pays.
- QUESTION.- Vous avez parlé de la France et de l'Espagne, vous avez parlé d'autres questions internationales ?
- LE PRESIDENT.- Peu, l'Europe était déjà un beau sujet.
- QUESTION.- Le problème basque a-t-il été soulevé ce matin monsieur le Président ?
- LE PRESIDENT.- Dans les relations franco-espagnoles, nous avons été naturellement conduits à parler du problème basque - le problème basque en tant que tel, c'est une affaire espagnole, le problème basque français, c'est autre chose - mais du terrorisme et de la lutte qu'il convient de mener contre toutes les formes de terrorisme, y compris celui-ci.
- QUESTION.- Monsieur le Président, il y a aujourd'hui 80 basques espagnols qui étaient installés en France, qui ont été remis à la police espagnole à la frontière, malgré cela les attentats de l'ETA continuent, alors pensez-vous qu'il faut continuer dans cette voie, ou bien essayer d'autres formes d'interventions comme par exemple les entrevues avec les protagonistes, avec l'ETA qui demande une négociation ?
- LE PRESIDENT.- Je ne peux pas vous donner une opinion sur chaque cas personnel touchant ces personnes expulsées, il appartient d'ailleurs à la justice de répondre à ces choses. Mais la décision prise de ne pas permettre que se perpétue le terrorisme, que la France ne soit pas un refuge stratégique pour le maintien ou le développement du terrorisme en Espagne, je crois cela nécessaire. Cela sera poursuivi. Quant à la façon pour l'Espagne d'aborder ce problème politique interne, cela n'est pas de mon domaine. Seul M. Felipe Gonzalez pourrait y répondre, mais nous considérons que le terrorisme n'est jamais une bonne façon de dialoguer. Nous nous l'interdisons à nous-mêmes et nous n'acceptons pas que le terrorisme puisse trouver en France en quoi que ce soit une base d'attaque. Voilà toute la signification de cette politique qui a été inaugurée dans les années 1983 - 1984.
- QUESTION.- A l'époque, vous avez procédé à des extraditions, c'est-à-dire à une procédure judiciaire. Aujourd'hui le Parti socialiste à l'air de condamner un petit peu l'utilisation de l'urgence absolue, est-ce que vous pensez qu'il faut continuer comme cela ou bien revenir à des procédures ?
- LE PRESIDENT.- Je vous répète que les procédures judiciaires sont toujours les meilleures. Mais je ne peux pas me prononcer sur tel ou tel cas dont je n'ai pas eu à examiner le fond. Simplement, j'estime que tout ce qui peut être fait judiciairement mais aussi le cas échéant administrativement, s'il s'agit de faire reculer le terrorisme, s'impose.
- QUESTION.- (en espagnol)
- Felipe GONZALEZ.- On m'interroge sur les possibilités d'un dialogue pour chercher à régler les problèmes du terrorisme.
- On a avancé beaucoup dans la lutte contre le terrorisme, même s'il y a des attentats, même s'il y a toujours le risque, pour un responsable politique, de dire une chose comme cela, et d'avoir demain un assassinat ou une bombe. Il n'y a aucune possibilité de négociations politiques - si on entend ou compend pour ces négociations politiques une partie du pouvoir représentatif de l'Etat espagnol, pour les institutions espagnoles vis-à-vis du phénomène du terrorisme. On ne peut pas négocier sur la co-action, il y a des organes de représentation de la souveraineté nationale qui ne peut pas céder au chantage du terrorisme. Alors la coopération française a été très importante, cela reste très important pour nous dans le combat contre le terrorisme. On avance, même s'il y a des actions terroristes, et je crois que cela continuera regrettablement, mais on va arriver à mon avis... (inaudible) de ces problèmes.\
QUESTION.- Vous allez parler peut-être aussi des problèmes agricoles, je suppose, avec les manifestations paysannes du sud de la France...
- LE PRESIDENT.- Nous avons constaté que depuis l'adhésion de l'Espagne au Marché commun, l'agriculture française avait tiré un profit très important par -rapport aux années précédentes. Il y a des difficultés pour tel ou tel produit, mais dans l'ensemble le profit a été très réel pour l'ensemble des producteurs français.
- QUESTION.- (inaudible)
- Felipe GONZALEZ.- Nous sommes dans la politique communautaire mais vous savez ce n'est pas une décision espagnole, ce n'est pas une décision en tout cas communautaire, il faut comprendre. Je crois que la réflexion de fond vient d'être faite par le Président, c'est très intéressant. Il y a trois ans, quand on discutait l'intégration de l'Espagne dans la Communauté, il y avait beaucoup de difficultés, trois à quatre ans, et on faisait beaucoup de prévisions sur la balance commerciale, même dans le domaine agricole. La réalité a montré que la balance commerciale était plutôt favorable à la France, même dans le domaine agricole. C'est évident que dans tous les produits, ce n'est pas possible, ce serait vraiment gagner dix à zéro, mais dans l'équilibre, il y a une tendance à l'équilibre, avec une amélioration très claire, au profit de la France, de la balance commerciale, après l'intégration de l'Espagne dans le Marché commun, c'est une prévision juste du point de vue économique.\
`Suite sur les conséquences de l'adhésion de l'Espagne à la CEE pour les produits agricoles`
- LE PRESIDENT.- Cette observation de caractère général, qui est quand même très importante, ayant été faite et répétée, c'est vrai ce que vous avez spécifié, que votre observation s'appliquait au maïs, c'est vrai que je trouve particulièrement déplorable que les Etats-Unis d'Amérique aient voulu imposer un compromis supplémentaire à la Communauté européenne sous la menace d'un retour ou plutôt d'une accentuation du protectionnisme existant. Les institutions européennes en tant que telles, ce n'est ni l'Espagne ni la France, c'est tous ensemble, ont estimé devoir aboutir à un compromis qui, sur le -plan qui nous occupe, a des conséquences fâcheuses. Je souhaite vraiment que ce type d'action et de pression cesse et que dans un délai raisonnable il ne sera pas nécessaire de négocier la libre concurrence entre les différents producteurs. Vous avez assisté avec ce débat à une nouvelle forme du protectionnisme de ceux qui se croient les plus forts et qui le sont souvent. C'est donc une mauvaise méthode mais le compromis, comme tout compromis, présente des avantages et des inconvénients. C'est un inconvénient regrettable, je pense que ce type de réglementation, dans l'Europe de demain, devrait être éliminé car ce n'est pas raisonnable, mais les négociateurs européens ont fait cela parce qu'ils ont estimé que dans l'ensemble des choses il fallait mieux éviter une nouvelle guerre commerciale. Je comprends très bien ce que vous venez de me dire, le maïs je le connais, je connais les producteurs de maïs, ils ont souffert de cet accord, c'est dommage. Mais au total, il ne faut pas mélanger les choses. L'adhésion de l'Espagne, d'abord en soi, c'est un objectif que j'ai beaucoup recherché, je me suis réjouis d'avoir pu participer aux réunions qui ont heureusement abouti. L'adhésion de l'Espagne au Marché commun et les conséquences, disons par jeu de billard, avec les Etats-Unis d'Amérique, n'entachent en rien la nécessité de cet acte de base de l'adhésion de l'Espagne au Marché commun. Mais la Communauté en tant que puissance économique a estimé devoir tenir compte d'une autre puissance économique qui s'appelle les Etats-Unis d'Amérique, ce qui prouve que nous sommes encore loin des conditoins de commerce que chacun appelle, dit-on, de ses voeux, dans laquelle il n'y aurait plus de protectionnisme, ni ici ni là, mais il y en a encore.
- QUESTION.- Les problèmes de la pêche ont été résolus ?
- LE PRESIDENT.- Oui pas mal. Je crois que oui. Déjà les accords qui avaient été esquissés il y a trois ans, et puis les plus récents d'ailleurs, y compris avec le Maroc maintenant, avec des pays tiers, cela a pris bonne tournure.\
QUESTION.- On a... (inaudible) aux Espagnols que la France n'a pas de principe... (inaudible) de la coopération anti-terroriste. ... la décision de l'ETA, ses dettes restent encore en France. D'autre part on a constaté que presqu'un tiers de Basques... (inaudible) à l'Espagne on été relâchés par le gouvernement espagnol parce qu'on n'a pas trouvé de culpabilité et certains d'entre eux ne peuvent rentrer en France, expulsés par la... (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Vous avez pu remarquer que j'ai pris en vous répondant, ou en répondant à vos collègues, chaque fois pris la précaution d'indiquer que je ne pouvais pas me prononcer sur les cas individuels. J'ai moi-même préconisé la lutte concertée contre le terrorisme, sur ce terrain et sur les autres terrains, notamment sur celui-là dont nous parlons. Et il a été procédé, au temps des gouvernements précédents, à des remises à des autorités espagnoles, de diverses personnes suspectées de terrorisme. Elles sont passées devant les tribunaux. Je ne sais pas si vous vous souvenez, ces tribunaux avaient acquitté certains d'entre eux, ce qui est de bonne procédure, ça c'est le jeu de la démocratie. Il y avait des suspicions, ces suspicions dans certains cas ont été vérifiées, il y a eu condamnations £ dans d'autres cas elles ne l'ont pas été et il y a eu acquittement.
- Il faut bien se garder naturellement de tout esprit de système et lorsque le cas serait celui d'espagnols qui se trouveraient en France, soit depuis peu, soit depuis longtemps en y vivant normalement dans le respect des lois du pays bien entendu, il faut être très attentif aux mesures qui seraient prises et qui seraient les mesures répressives. J'ai observé comme vous que la justice espagnole dans ce cas là montrait qu'elle savait rester une justice puisqu'elle a innocenté les personnes en question. Je l'aurais traité comme toute affaire dans ce domaine avec le plus grand scrupule. Chaque fois qu'on me signale des cas de ce genre, je m'efforce de rester dans le -cadre de ces principes.
- QUESTION.- (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Vous n'allez pas supposer que les autorités françaises ont arrêté et renvoyé en Espagne les petits et qu'ils ont protégé les chefs terroristes, ce serait vraiment une imputation inacceptable. Je suppose que les chefs de cette action terroriste sont mieux protégés que les autres, ils savent mieux se mettre à l'abri, que des recherches de police ont donc rencontré des obstacles plus durs à franchir, il n'y a pas d'autre explication que cela, toute autre serait injurieuse.\
QUESTION.- Dans le -cadre européen il a été question de la possible incorporation de l'Espagne au système monétaire européen ou à la ... (inaudible)
- LE PRESIDENT.- Oui nous en avons parlé. Nous avons beaucoup parlé de ces sujets. Je faisais valoir à mon ami M. Felipe Gonzalez que pour moi l'avancée principale de l'Europe dans l'avenir et le présent, dans l'avenir immédiat, c'était le renforcement du système monétaire, la réalité donnée à l'écu, monnaie européenne, au souhait que je forme de voir d'autres monnaies européennes adhérer à ce système, particulièrement la monnaie espagnole - c'est moi qui m'exprime, je n'engage pas là le gouvernement espagnol quand j'exprime un souhait - et que parallèlement certains progrès pourraient être faits pour marquer une volonté qui entrerait dans les faits pour un embryon de défense européenne. Et qu'il fallait que ces deux avancées, monétaire et défense, soient marquées de façon sensible dans les mois prochains. Bien entendu nous avons également parlé des fonds structurels, c'est-à-dire la politique régionale. On a parlé de la politique sociale, nous avons parlé de la politique de fabrication en commun d'un certain nombre d'armements quand on parle de défense, mais aussi d'une technologie avancée quand on parle de la science et de l'industrie. Nous avons abordé tous ces problèmes.\
QUESTION.- Qu'est-ce que vous appelez, monsieur le Président, un "embryon de défense européenne" ?
- LE PRESIDENT.- Ce dont nous discutons avec l'Allemagne, c'est bien le cas. Il existe à l'heure actuelle une défense qui continue d'être celle que nous préconisons, celle qui s'exerce dans le -cadre des alliances. A l'intérieur de l'Alliance atlantique, la France dispose, vous le savez, d'un statut particulier puisqu'elle n'appartient pas au commandement intégré de l'OTAN, et que nous avons une politique de dissuasion stratégique, de dissuasion nucléaire. Ces éléments là existent et il existe déjà une défense à laquelle participent un certain nombre de pays européens, pas les douze, pas tous, il y a un pays neutre. Mais on ne peut pas appeler cela une défense européenne, proprement européenne. Il existe une défense occidentale d'autre part, dotée des systèmes nucléaires britanniques et français.
- On ne peut pas parler de défense européenne. Et cependant c'est dans tous les esprits. Que de fois ai-je répété il faut en finir avec Yalta, c'est un nom symbole parce que sur le -plan historique il faudrait être un peu précis et parler peut-être plus de Téhéran que de Yalta, mais enfin, n'entrons pas dans ces choses. Il faut donc que l'Europe se donne les moyens de son existence et l'existence tient pour beaucoup aux conditions de sa sécurité donc de sa propre défense, qui n'est pas antinomique avec l'alliance défensive à laquelle nous appartenons. Sur cette défense là, ce sont surtout pour l'instant des projets, et on peut vraiment employer l'expression "l'embryon de défense européenne" lorsque l'on parle d'un début de troupes communes entre l'Allemagne et la France, comme on pourrait en parler entre l'Espagne et la France, l'Allemagne et puis les autres pays de l'Europe, ceux qui le veulent, personne n'est forcé de prendre part à cette construction. C'est aux autres de répondre et en particulier à notre illustre hôte d'aujourd'hui.\
QUESTION.- M. Gonzalez, est-ce que vous avez fait part à M. Mitterrand de nos progrès au sujet des négociations sur les bases américaines en Espagne ?
- Felipe GONZALEZ.- Nous avons parlé directement mais si vous voulez connaître mon opinion, je crois que l'on va arriver à un accord, ça c'est logique, il y a une décision du peuple espagnol, en referendum, et je crois que cela a été une option... (inaudible). Le peuple espagnol a décidé la permanence de l'Espagne dans l'Alliance atlantique et en même temps il s'est prononcé sur certaines conditions. Je crois qu'on va y arriver dans les relations bilatérales avec les Etats-Unis et... (inaudible) l'Alliance atlantique, on va régler les problèmes de coordination. C'est compatible en tout cas pour affirmer... avec l'Alliance atlantique mais aussi avec le renforcement des piliers européens de l'Alliance, par conséquent nous voulons partager cette réflexion. Les nouvelles dimensions d'une certaine défense, d'une certaine idée de la défense européenne dans la... (inaudible) mais aussi de cette Europe politique unie. Les premiers sont en train de se donner, nous savons l'intérêt de participer dans cette réflexion et on verra qu'elle est la meilleure procédure de participation, mais pour l'Espagne c'est une idée positive.
- QUESTION.- (inaudible)
- Felipe GONZALEZ.- Nous avons déjà parlé de ce problème de la défense européenne. Je dis qu'il y a une logique. Pour moi, il y a deux conceptions différentes de cette construction de l'Europe. Il y a une conception... (inaudible) pour les pays qui partagent cette conception, c'est très évident que les problèmes de la défense sont des problèmes très importants. On ne peut pas parler de ces développements politiques de l'Europe si on ne tient pas compte des problèmes de la défense. L'Espagne est dans cette position. Nous ne voulons pas que l'Europe reste seulement une zone de libre échange et même nous avons un peu plus d'ambition qu'un marché commun.
- QUESTION.- Est-ce que l'Espagne dans un cas comme cela pourrait rester protégée par un parapluie nucléaire ?
- LE PRESIDENT.- Qu'est-ce que cette histoire de parapluie nucléaire ?
- QUESTION.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- N'extrapolez pas !\
QUESTION.- Où en sont, monsieur le Président, vos négociations avec les Anglais pour le fameux rocher ? (Rires)
- Felipe GONZALEZ.- Ah oui, sans doute, c'est la direction de l'histoire. Mais en tout cas, le problème qu'on a connu très récemment, c'est un problème - disons avec des nuances - parce qu'on a parlé dans un petit morceau du territoire qui n'est pas exactement le territoire compris dans le traité. Cela veut dire que c'était un petit morceau avec (inaudible) a été l'éclatement des conflits pour le problème des transports aériens mais vous savez, pour nous, c'est un problème spécial. Ce sont les problèmes mêmes de la reconnaissance par la voix d'un fait juridique d'une situation qui n'a pas été reconnue pour l'Espagne. Parce que c'est un territoire intermédiaire occupé pour l'avoir défait. Alors ce n'est pas exactement la situation de Gibraltar, c'est une zone intermédiaire, mais en tout cas, nous pensons que dans la direction de l'histoire, les problèmes doivent être résolus. Ils sont déjà deux. Je crois que même si on voit avec rationalité, avec patience, il y aura une solution à moyen terme.
- QUESTION.- J'ai une question sur les accords franco-espagnols dont on parle peu et le gens sont peut-être intéressés £ vous savez que le 26 septembre prochain à Nîmes, nous aurons l'alternative (inaudible) alors comment se fait-il que l'Andalousie a laissé échapper cette alternative ? (Rires)
- Felipe GONZALEZ.- J'ai fait peu d'intervention dans le domaine des alternatives. Mais en tout cas, c'est (inaudible) pour la France d'avoir (inaudible). C'est très bien, c'est une consécration parce que c'est un héritage des familles très important mais en tout cas je crois que ce serait très bien pour nous, pour le débat du Parlement européen, que je pose la question de la suppression, ce serait associer la France à cette démarche et ce serait très bien.
- LE PRESIDENT.- Moi, je ne participe pas aux courses de taureaux. Excusez-moi.
- QUESTION.- (inaudible)
- Felipe GONZALEZ.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- De toute manière, ce sport a peu de chance de devenir européen. Mais enfin, il mobilise beaucoup l'Espagne et aussi cette région de France.
- QUESTION.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- Eh bien moi je n'irai pas. J'allais un peu aux courses de vaches landaises, mais ce n'est pas pareil !
- QUESTION.- Est-ce que M. Felipe Gonzalez vous a donné la recette pour se faire réélir brillamment dans un deuxième mandat ? (Rires)
- LE PRESIDENT.- Mais jusqu'ici le problème posé à Felipe Gonzalez n'est pas du même type. Il a gagné remarquablement plusieurs élections législatives. Il le méritait.\
QUESTION.- Voulez-vous me permettre de sortir du contexte franco-espagnol, pour une question qui intéresse davantage la France et la Nouvelle-Calédonie ?
- LE PRESIDENT.- Nous ne parlerons pas de politique touchant spécialement nos pays dans une réunion de ce genre. Je vous remercie de poser cette question. Elle m'importe beaucoup.
- QUESTION.- M. Tjibaou a sollicité votre ...
- LE PRESIDENT.- Oui, il a bien fait. Mais pour ce qui touche à cette réunion qui veut que le Premier ministre espagnol soit là, que nous nous soyions entretenus de problèmes bilatéraux et de problèmes de l'Europe, cela exclut par définition que l'on puisse traiter des problèmes de nos politiques intérieures même si ce terme doit être compris par extension. Donc je ne répondrai pas, pas plus que ne le fera d'ailleurs M. Felipe Gonzalez pour lui-même à des questions de politique intérieure.\
QUESTION.- Monsieur le Président, pourquoi, plutôt ici qu'à l'Elysée ?
- LE PRESIDENT.- Si c'était à l'Elysée, vous me diriez pourquoi là plutôt qu'ailleurs ? Nous nous sommes déjà rencontrés ici. C'est plus près de Madrid que de Paris. Quand Felipe Gonzalez m'a parlé de cette rencontre, il se souvenait de nos rencontres antérieures, il m'a dit "Pourquoi pas à Latché" et je pensais m'y trouver normalement puisque les vacances du mois d'août n'auraient pas été terminées. Il se trouve que par un certain nombre d'événements, je n'ai pas passé mes vacances ici, mais je dois dire que j'ai été très content d'y venir hier pour 48 heures et pour y rencontrer mon ami Felipe Gonzalez. C'était plus commode pour lui, et pour moi c'était agréable.
- QUESTION.- Vous y avez davantage rencontré le Premier secrétaire du PS que le Président de la République ?
- LE PRESIDENT.- Non, il est venu voir le Président de la République. Quand il avait à voir le Premier secrétaire du PS, il le faisait. Mais je ne suis plus Premier secrétaire du PS depuis maintenant 7 ans. Ne mélangeons pas les choses. J'ai déjà eu l'occasion de répondre à ce genre de questions.
- QUESTION.- A ce sujet, (inaudible) à l'international socialiste ?
- LE PRESIDENT.- Non, nous sommes restés dans le -cadre de nos fonctions.
- QUESTION.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- On dit tout et n'importe quoi. Ce qui est vrai, c'est que nous sommes tous les deux socialistes. Et nous sommes fidèles à nos convictions mais nous avons le sens de nos fonctions. Mes fonctions me conduisent à défendre les intérêts de la France et de tous les Français quels que soient leurs opinions politiques. Et le chef du gouvernement espagnol, sans doute est-il à la tête d'une formation politique, mais il a aussi des devoirs qu'il respecte et qui font que lorsqu'il est engagé dans une conversation internationale, il ne se comporte pas en responsable politique direct. Nous n'avons aucune peine à harmoniser ces différentes fonctions. C'est vrai que parce que nous sommes tous les deux socialistes que nous avons pu nouer des relations personnelles, plus étroites que dans le passé. Cela n'est pas inutile. Cela s'arrête là.\
QUESTION.- (inaudible)
- Felipe GONZALEZ.- (Réponse en espagnol)
- QUESTION.- Il y a une volonté politique à la tête de l'Etat français...
- LE PRESIDENT.- A la tête de l'Etat, c'est moi ! Je ne sais pas comment cela se traduit en Espagnol.
- Felipe GONZALEZ.- Je crois qu'il y a une dynamique européenne. De mon côté, il y a une expérience très intéressante. En quelques années, on a changé les situations pas seulement dans le domaine bilatéral mais on a changé aussi dans le domaine multilatéral et il y a un rapprochement des positions des deux pays pour une certaine idée de la construction de l'Europe. Par exemple, je crois qu'il y a des affinités très profondes quand on parle du développement de l'Acte unique, des politiques structurelles, des développements du marché intérieur, politique et structurel, des problèmes de financement de la Communauté européenne.
- Alors ce changement de situation, je crois, si vous voulez cela dépasse un peu une situation politique concrète. Je crois que pour l'Espagne cela va être la même chose, c'est une dynamique historique différente qu'on a commencé, et je crois qu'elle va continuer, avec sans doute des liens, des rapprochements plus profonds dans quelques situations ou moins profonds, mais dans la même direction. Et c'est cela le plus important, je crois, du phénomène.
- LE PRESIDENT.- Cela a été possible, tout ce que vient de nous être expliqué parce qu'il s'agit de démocratie et après combien de traverses. Tout cela est toujours très fragile. Il faut y mettre d'autant plus de soins. Et finalement dans tous les problèmes intérieurs, comme les problèmes internationaux, il ne faut jamais perdre de vue que la sauvegarde de nos formes de civilisations tient dans le respect scrupuleux des règles de droit. Cela vaut dans tous les domaines. Nous avons nous-mêmes souvent à traiter ces choses du point de vue du droit, il faut se soumettre au droit tel qu'il est fixé communément, là où il y a démocratie. C'est vrai pour le droit des personnes, c'est vrai aussi pour le droit des peuples, c'est vrai pour la construction de la Communauté. Il faut dire que ce sont des thèmes sur lesquels nous n'avons aucune peine à nous retrouver.
- Merci. Je vais raccompagner M. Felipe Gonzalez.\