29 juillet 1987 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, lors de la ratification du traité sur la liaison Transmanche à Paris, Palais de l'Élysée, mercredi 29 juillet 1987.

Madame le Premier ministre,
- Nous voici assez près aujourd'hui du terme de deux siècles d'efforts, en tout cas à la fin de la procédure constitutionnelle qui scelle notre volonté commune de réaliser enfin le tunnel sous la Manche.
- Après la réunion de Lille, où, au mois de janvier 1986, nous avions annoncé notre choix commun, le projet Eurotunnel, après la signature du Traité de Canterbury, c'est ici, à Paris, que nous allons, comme le veut la coutume, échanger les instruments de ratification du traité.
- Entre temps, un travail considérable a été accompli £ les ingénieurs et les experts financiers ont affiné le projet, les juristes ont vérifié que toutes les questions, et elles sont nombreuses, que soulèvent la construction et l'exploitation de cet ouvrage ont bien été posées et, je l'espère, résolues. Nos deux Parlements ont autorisé cette ratification et j'insiste sur cette étape, car elle illustre bien le rôle des élus dans deux des plus anciennes démocraties parlementaires du globe.
- Si le sentiment insulaire est profondément enraciné dans votre histoire et dans votre culture, madame, je ne crois pas que la réalisation que nous avons aujourd'hui décidée, soit de -nature à le faire disparaître £ c'est plutôt l'occasion pour un grand nombre d'Européens de connaître et de comprendre la Grande-Bretagne, tout comme seront plus nombreux ceux de vos compatriotes qui pourront désormais, d'une certaine façon, découvrir la France et avec elle l'Europe. Nous pourrons dire enfin que le continent cesse d'être isolé !
- L'ouvrage lui-même permettra à nos deux pays de démontrer que notre vieille Europe est toujours capable d'inventer, de se surpasser et d'étonner le monde.\
J'ai plaisir à saluer, à vos côtés, les représentants du beau Comté de Kent, le président du Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais, qui se trouve également parmi nous, et qui sait bien à quel point l'économie de sa région va bénéficier de ce grand chantier. Plusieurs dizaines de milliers d'emplois vont être créés, ce qui contribuera à l'amélioration d'une situation qui ne cesse - on le sait bien d'être préoccupante.
- Les questions relatives à la protection de l'environnement, dont nous ont saisi plusieurs associations, devront être abordées et réglées. Un important programme d'accompagnement nous permettra d'assister à l'affirmation de cette grande capitale régionale européenne qu'est Lille, qui se trouvera au coeur des réseaux autoroutiers et ferroviaires européens.
- Les discussions entre la SNCF, la Société nationale des chemins de fer français, et les British Railways progressent, et je ne doute pas de la détermination qui doit conduire nos deux gouvernements à résoudre aussi rapidement que possible les problèmes que posent, de part et d'autre de la Manche, la réalisation et l'exploitation d'une ligne ferroviaire à grande vitesse, à laquelle comme beaucoup d'autres je suis favorable. Mais, bien entendu, les retombées de cette oeuvre exceptionnelle toucheront la France toute entière et une grande partie de l'Europe continentale.
- Je l'ai indiqué souvent, je le répète ici puisque nous avons le plaisir de recevoir les hôtes étrangers et amis, l'Europe est notre avenir. Cet avenir se construit chaque jour, notamment par les grands moyens de communication qui rendent plus faciles, plus actives, les relations entre les peuples. Le Traité de Canterbury avait ouvert la voie à une réalisation qui sera sans doute la plus marquante en ce domaine d'ici la fin du siècle.
- Je souhaite que ce traité et l'acte d'aujourd'hui ne constituent que des étapes, ô combien importantes et plus que symboliques, dans la construction de l'Europe.
- Je vous remercie, mesdames et messieurs. Je remercie plus particulièrement, madame, vous qui par votre décision, et par l'élan que vous avez su donner, avez permis cette réalisation que nous célébrons en ce jour.\