12 mars 1987 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'issue du sommet franco-espagnol, sur l'adhésion de l'Espagne à la CEE, les relations franco-espagnoles, le terrorisme et la proposition d'une conférence sur la sécurité en Méditerranée, Madrid, jeudi 12 mars 1987.

Je remercie les membres du gouvernement espagnol, Felipe Gonzalez et son gouvernement, ses collaborateurs, du très bon travail qui a permis la réussite de ce sommet entre l'Espagne et la France, car c'est un sommet réussi. Ce n'est pas la fin d'un processus : il n'y a pas de fin dans les relations de deux pays voisins, amis, participant l'un et l'autre et pleinement à la Communauté économique et européenne. C'est l'histoire qui proposera, dans les années à venir, de nouvelles échéances, mais nous abordons cet avenir dans les meilleures conditions et nous devons un grand remerciement aux responsables espagnols comme nous devons remercier le peuple espagnol. Certes, nous n'avons pas eu l'occasion, dans ces journées laborieuses, de le rencontrer directement, comme cela me fut donné en d'autres circonstances, mais, au travers de la presse espagnole, nous apercevons bien de quelle façon amicale et soutenue est reçue la délégation française.
- Cela étant dit, je pense qu'il convient d'examiner maintenant le fond des choses telles qu'elles ont été traitées pendant ces trente-six heures de travail : une séance plénière, qui vient de se terminer, entre les deux délégations m'a permis de me tenir au courant de ce qui avait été accompli. Je pense qu'il appartient aux représentants de la presse de tous pays ici présents, de nous poser, à M. le Président du gouvernement espagnol et à moi-même, les questions de leur choix. Je crois qu'il convient maintenant de commencer.\
QUESTION.- (Christian Galois, correspondant permanent de RMC, ici à Madrid) J'aurais voulu vous demander monsieur le Président, s'il existe toujours, et si oui, de quelle -nature et de quelle grandeur sont-elles, des divergences sur la position espagnole et française à propos de la restructuration de l'Europe, dans le -cadre des propositions de M. Delors, dans le -cadre de l'Acte unique qui doit permettre un marché, donc, unique en 1992 £ je pense que l'Espagne souhaitait que cette restructuration soit l'occasion de rééquilibrer la Communauté en direction du sud £ je ne suis pas sûr que la France partage exactement l'enthousiasme espagnol à cet égard ?
- LE PRESIDENT.- Nous ne sommes pas ici dans un sommet européen, nous sommes ici dans un sommet franco-espagnol, et nous n'avons pas compétence pour trancher au nom de l'Europe tout entière. La question traitée entre nous est de savoir si nous sommes en mesure d'aborder les problèmes qui se posent à nous au sein de la Communauté dans un -état d'esprit d'entente ou, si l'entente n'est pas pré-établie, de conciliation.
- Tel est le cas dans de très nombreux domaines. Je pense au système monétaire européen, la France y est, l'Espagne n'y est pas. Un jour sans doute le problème sera-t-il posé. L'adhésion à la Communauté suppose l'acceptation des obligations, acceptées par dix autres pays avec nous et donc la discipline, les orientations, la volonté de réussir l'Acte de Luxembourg pour la création d'un marché intérieur unique, le 1er janvier 1992. Ceci suppose aussi un certain nombre d'actes intermédiaires pour y parvenir et ce n'est pas si facile. Parmi les problèmes posés à la Communauté tout entière, et bien entendu particulièrement à l'Espagne et à la France, il y a le problème des fonds structurels.
- Vous avez parlé de la restructuration de l'Europe, ce n'est pas le seul problème posé, mais c'est important. Dans les conversations entre les ministres, comme dans celles que j'ai eues, en présence de M. le Premier ministre français, avec le chef du gouvernement espagnol, nous avons pu constater que la volonté était de rechercher, entre le souhait de l'Espagne d'aller au plus haut niveau possible des augmentations prévues ou souhaitées par M. Delors en qualité de Président de la Commission européenne, et la position française qui se situe à un souhait de rester dans des normes budgétaires jugées raisonnables, avec un bon espoir d'y aboutir, la voie moyenne. Voilà une preuve de bonne collaboration.\
`Suite réponse sur la restructuration de l'Europe`
- Quant au devenir du Marché commun agricole, vous savez que la France y tient. Le traité de Rome est fondé sur cette politique agricole commune, sur un certain type de société rurale. Nous n'avons absolument pas lieu de craindre que l'Espagne puisse ne pas partager nos vues dans ce domaine, car nous sommes issus du même type de civilisation rurale, même si nos productions ne sont pas toujours - et tant mieux - les mêmes. Elles sont trop souvent déjà concurrentes, et même sur ces problèmes-là, nous avons au cours des dernières années, et tout à fait récemment, abouti à des considérations communes qui marquent un grand progrès pour harmoniser les politiques de la pêche, les politiques des fruits et légumes, les politiques de la viticulture, tout cela à l'intérieur de la Communauté. Car s'il y a dialogue entre l'Espagne et la France, il s'agit de mettre en oeuvre un traité européen qui engage douze pays, pas simplement les deux nôtres. Voilà ce que je puis vous répondre.\
QUESTION.- Vous avez sans doute parlé de problèmes de sécurité. L'Espagne et la France sont deux pays qui ne font pas partie du commandement militaire intégré de l'OTAN et qui ont une grande responsabilité dans la sécurité de l'Europe du sud-ouest. Comment cette coopération va-t-elle se dérouler ? La date d'entrée de l'Espagne dans l'UEO a-t-elle été décidée ?
- LE PRESIDENT.- Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce qui vient d'être dit, car les décisions à prendre relèvent de la souveraineté espagnole, les décisions françaises sont déjà acquises et souvent depuis longtemps. En effet la France appartient à l'UEO, souhaite en développer l'activité et les compétences. Elle appartient à l'OTAN depuis l'origine, elle n'appartient pas au commandement militaire intégré de l'alliance `Alliance atlantique`. Depuis longtemps aussi, ce sont des faits acquis, nous n'avons pas l'intention d'y revenir. Est-ce que l'Espagne, sur ce terrain-là, souhaitera, après son référendum sur l'OTAN, fixer des structures différentes de celles de la France, à l'intérieur de l'OTAN ou semblables, c'est l'affaire du peuple espagnol, ce n'est pas la mienne. Et donc je laisse le Président du gouvernement espagnol s'exprimer là-dessus. Je crois en tout cas, et cela a été constaté au cours des travaux qui viennent de s'achever, que l'Espagne et la France sont vraiment sur la même longueur d'onde.\
QUESTION.- (Luis Bassets, correspondant d'El Pais à Paris.) Je voulais vous demander ce que vous pensez des deux versions différentes et souvent contradictoires qui ont été données à l'opinion publique espagnole concernant le protagonisme français dans le processus d'adhésion de l'Espagne à la CEE et dans l'amélioration des relations bilatérales. Selon l'une de ces versions, c'est le Président de la République qui a été le moteur de l'amélioration des relations et de l'adhésion de l'Espagne à la CEE, et selon l'autre version, exprimée hier soir à Madrid par le Premier ministre `Jacques Chirac`, il s'agirait précisément du contraire.
- LE PRESIDENT.- Je ne pense pas que ce soit à M. Felipe Gonzalez que vous vous adressiez. Eh bien ! Monsieur, je ne m'engagerai pas sur ce terrain. Nous sommes tous ici, les Français de la délégation, les représentants de la France, et non pas de telle ou telle partie, de telle ou telle fraction, de telle ou telle tendance. Nous sommes à l'étranger, dans un pays ami, nous sommes dans une négociation internationale, nous sommes les représentants de la France.
- C'est la France, et non pas tel ou tel gouvernement, qui en 1982 a commencé d'examiner, avec le gouvernement espagnol, la résolution des contentieux et notamment des deux principaux, terrorisme basque et adhésion de l'Espagne au Marché commun, adhésion à laquelle la France s'était jusque-là opposée.
- C'est la France qui, en 1984, en France, à Fontainebleau et sous ma présidence du Conseil européen, a terminé le débat sur cette fameuse adhésion, adhésion qui a été fixée pour le 1er janvier 1986. Ce n'est pas tel gouvernement, c'est la France.
- C'est la France qui, en 1985, a signé un pacte d'amitié avec l'Espagne. C'est la France qui cette année-là a commencé d'extrader des personnes présumées criminelles ou terroristes.
- C'est la France qui, en 1986, jusqu'à ce jour, a continué ce type de relations, qui a continué de les améliorer, qui a poursuivi par des initiatives heureuses, dont je me réjouis et dont je félicite l'actuel gouvernement. C'est la France qui participe en ce jour au premier sommet entre l'Espagne et la France. Voilà ce qui m'intéresse, c'est la continuité de la France, quel que soit son gouvernement, dès lors que c'est la France qui s'adresse à l'extérieur, à un pays européen. N'attendez donc pas de moi que je tranche un petit débat historique que vous êtes aussi capable et même peut-être mieux capable que moi de résoudre.\
QUESTION (Agence EFE).- Je voudrais que vous expliquiez un peu plus s'il y a eu un accord sur la création de commissions interministérielles pour étudier les petits problèmes techniques qui persistent entre les deux pays ?
- LE PRESIDENT.- J'ajouterai que je suis très heureux de voir le développement de ces rencontres bilatérales, secteur par secteur. Elles permettront de débrouiller les difficultés avant qu'elles ne se produisent, car on peut les deviner ou avant qu'elles ne s'aggravent. J'en suis très heureux, et je trouve que la méthode suivie au cours de ces derniers mois donne d'excellents résultats. J'attire l'attention en particulier sur les projets délibérés avec intelligence sur le -plan culturel et sur le -plan éducatif. On me permettra de noter particulièrement les avantages que j'attends pour nos deux pays de l'enseignement des langues, et spécialement de l'enseignement de la langue française en Espagne. Voilà des discussions qui ont eu lieu entre ministres et entre experts. Continuons, c'est la bonne direction.\
QUESTION.- Le dossier basque est un des thèmes de bonne entente, je voudrais savoir si vous vous êtes contentés de vous féliciter de la bonne coopération ou si c'est un sujet que vous avez approfondi, si vous avez pris de nouvelles décisions. Par ailleurs, l'Espagne s'est félicitée de la décision de la France de procéder à des expulsions, des reconduites d'urgence aux frontières à partir de juillet 1986, je voudrais savoir si M. Mitterrand approuve cette politique française ? ces procédures d'urgence ?
- LE PRESIDENT.- Pardonnez-moi de vous demander de vous rappeler la première question que vous m'avez demandée ?
- QUESTION.- Je voulais vous demander si la bonne coopération franco-espagnole en matière de lutte anti-terroriste, si c'est un sujet que vous avez débattu, approfondi, si vous avez pris des décisions, ou si vous vous êtes contentés de vous féliciter de cette coopération ?
- LE PRESIDENT.- Très bien. Comment voulez-vous que je n'aprouve pas une action à laquelle j'ai pris part ? Je ne reviendrai pas sur la discussion tout à fait subalterne de savoir où est la répartition des mérites. Le gouvernement français actuel a un grand mérite de pratiquer une entente étroite avec l'Espagne, comme avec d'autres pays, pour combattre le terrorisme, quel qu'il soit. Comment voulez-vous que je m'en plaigne lorsque je m'adresse à un pays démocratique qui s'appelle l'Espagne où les institutions démocratiques, les droits de l'homme, les compétences de la justice, sont parfaitement définis ?
- Les personnes qui sont extradées sont extradées dans un pays où les règles de la démocratie assurent leur sauvegarde, s'ils sont innocents, et règlent la sanction dans des conditions qui sont soumises aux lois adoptées par le peuple espagnol. Donc je n'ai rien à redire à cette pratique.
- J'ajoute qu'il existe des règles juridiques pour les extraditions. Ce qu'il faut, c'est que ces règles-là soient respectées. Dès lors qu'elles le sont, je ne vois pas de quelle façon l'on pourrait critiquer ce que le chef du gouvernement espagnol vient de rappeler comme mesures de sauvegarde, qui dépassent de loin les problèmes français et les problèmes espagnols. C'est un problème de civilisation qui nous est posé, à nous comme à l'Europe tout entière.
- QUESTION.- Monsieur le Président... je parlais plus particulièrement de l'usage fait par la France de l'Ordonnance de 1945 sur les reconduites à la frontière des étrangers jugés dangereux pour la sécurité, des expulsions et non des extraditions...
- LE PRESIDENT.- Le droit est le droit : si l'on manque au droit, on a tort. Quand on le respecte, il appartient ensuite à la justice qui est saisie de s'en tenir à ses propres règles. La France n'a pas de raison par -rapport à l'Espagne de douter de ce que les règles de justice seront respectées.\
QUESTION.- Je voudrais savoir s'il y a une convergence de vues entre les gouvernements espagnol et français sur la tenue d'une conférence sur la sécurité en Méditerranée ou la conférence internationale sur le Proche-Orient ?
- LE PRESIDENT.- L'idée d'une conférence sur la Méditerranée est une idée française. A vrai dire, cela fait longtemps que cette idée court un peu partout chez les pays riverains de la Méditerranée. A l'époque, j'avais formulé cette proposition en ne m'adressant qu'aux pays de la Méditerranée occidentale, souhaitant rester en dehors des conflits qui se déroulent sur les rivages ou à proximité de la Méditerranée orientale. Mais il n'en reste pas moins qu'il n'a pas été possible de réunir à cette époque l'Algérie et le Maroc qui n'avaient pas encore entre eux réalisé le dialogue que nous avions souhaité. M. Craxi, un peu plus tard, a repris cette idée en l'élargisant à la Méditerranée orientale, mais en s'en tenant aux mêmes critères, à savoir qu'il était difficile d'y inviter les pays mêlés à des conflits actifs. Il avait donc proposé l'extension à la Yougoslavie et à l'Egypte, et nous avons approuvé cette idée.
- Nous en avons, en effet, parlé au cours de ces rencontres, à l'initiative de M. Felipe Gonzalez lorsque je l'ai rencontré, et je pense que les ministres des affaires étrangères ont bien dû aborder ce sujet sur lequel il n'y a pas de divergence de vues entre nos deux pays. Nous le souhaitons l'un et l'autre, mais bien entendu, en prenant les précautions d'usage, puisqu'obtenir le consentement de tous ces pays-là n'est pas si aisé. En tout cas, l'approche entre la France et l'Espagne d'une politique de sécurité en Méditerranée est, je crois, la base d'un raisonnement commun.
- Quant à la Conférence internationale sur la résolution du problème du Proche et du Moyen-Orient, la France a fait connaître son sentiment, il y a déjà longtemps, en souhaitant d'ailleurs une procédure dont elle ne fait pas un préalable absolu. C'est une méthode que nous indiquons, qu'un travail préalable puisse être accompli par un groupe d'Etats, notamment les pays membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations unies.
- D'autres pays ont formulé des idées du même type. Je me souviens de nos conversations, qui ont été rendues publiques, avec l'Egypte. Je me souviens, c'est encore plus récent, des conversations que nous avons eues avec M. Gorbatchev à Moscou, et l'Union soviétique avait une approche différente mais qui tendait à la réunion d'une conférence de ce type. Et puis d'autres encore, et il semble aujourd'hui qu'un grand nombre de pays souhaitent la réunion de cette conférence internationale. Comme parmi ces pays, il y a l'Espagne et la France, la réponse est déjà apportée à l'autre question.\
QUESTION.- (Agence de presse mexicaine) L'Espagne est dans le Marché commun, ce qui entraîne une sensibilité en ce qui concerne les problèmes de l'Amérique latine. Je voudrais l'opinion de la France sur la dette extérieure et en ce qui concerne le problème de l'Amérique centrale.
- LE PRESIDENT.- Cela fait deux vastes questions, dans une seule phrase.
- Le problème de la dette a été traité si souvent, la France a pris des positions tellement publiques que je ne voudrais pas trop prolonger cette conférence de presse par le rappel de ces principes.
- Le premier de ces principes, pour parler d'une façon schématique, c'est que le rôle d'un débiteur c'est de payer ses dettes, et le rôle, autant qu'il est possible du créancier, c'est de les recevoir. Cela fait partie d'un contrat initial. Lorsque le débiteur ne peut pas, pour des raisons indépendantes de sa volonté (crise économique, problèmes de développement, promotion d'une population, pauvreté naturelle) régler ses dettes, il appartient au débiteur, soit à -titre bilatéral, soit dans des conférences internationales, d'examiner les aménagements possibles au remboursement. C'est ce que font constamment un certain nombre d'organismes existants.
- C'est la France, par exemple, qui a pris l'initiative de demander et d'obtenir des Nations unies l'examen particulier de l'endettement de l'Afrique. J'ai, lors d'un voyage encore récent au Brésil, remarqué que la France, créancier fort important de ce pays, pour le dixième de son endettement, ne répugnait pas à étudier les moyens, soit de reporter les délais, soit d'examiner les façons de faire pour que cet endettement qui doit être payé, ne le soit pas de telle sorte que le peuple brésilien en soit écrasé et que le Brésil perde du même coup tout le bénéfice de l'effort considérable de production qu'il fait chaque année.
- Je pense personnellement qu'il serait sage - mais alors là il ne s'agit pas d'une décision prise, il s'agit d'un souhait, d'une intention - que les dettes d'un certain nombre de pays très pauvres, en particulier les pays qualifiés de moins avancés, soient remises, abandonnées, et donc qu'un certain nombre de dons soient faits. Je souhaite, pour les pays qui ont les reins plus solides, les moyens de se tirer d'affaire, s'ils en ont le temps, et il faut leur en donner le temps, que des mesures d'aménagement soient prises pour faciliter un remboursement dans les années qui viennent. Cette position de la France qui, je le crois, parmi les pays industriels avancés, se situe en pointe par -rapport aux problèmes du tiers monde et à la réduction du fossé qui sépare les pays riches et les pays pauvres, nous rend sensibles à toutes propositions constructives et utiles pour régler ce problème, car finalement, les dettes, il est normal qu'elles soient payées lorsqu'on le peut.\
QUESTION.- (Presse Suisse) Après ce sommet, quels sont les problèmes les plus urgents à résoudre entre la France et l'Espagne ?
- LE PRESIDENT.- Toute société nationale ou internationale suppose des contradictions, des conflits d'intérêts. On ne peut pas exactement établir la liste des difficultés futures. La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est qu'il y en aura. Il faut donc que fonctionnent bien les institutions qui permettent de prévoir et de concilier. C'est ce que font l'Espagne et la France. C'est une démarche tout à fait normale et il est très important de constater que cela entre maintenant dans un mécanisme qui exclut les crises graves, quand ce ne serait que les a priori, les préjugés ou les jugements faussés sur les intentions des uns ou des autres. Nous travaillons ensemble, c'est tout ce qu'on peut dire. Mais je le répète, quelle est la société qui échappe à ces contradictions, il n'y en a pas. Ce serait d'ailleurs bien ennuyeux s'il n'y en avait pas. Enfin c'est une réflexion purement personnelle. Je ne cherche pas d'ennuis avec l'Espagne pour me distraire. J'ai plutôt cherché le contraire.\
QUESTION.- (Dominique Laury, d'Antenne 2) Monsieur le Président, la semaine dernière vous souhaitiez l'unité de vue sur les propositions de M. Gorbatchev. Alors je voudrais savoir si ce sommet s'est terminé par disons une unité de vue sur ce problème ?
- LE PRESIDENT.- J'en ai beaucoup parlé avec M. Felipe Gonzalez. Nous nous en sommes entretenus dès hier soir avec le Roi d'Espagne. C'est un sujet qui est dans l'air et occupe tous les esprits. Nous sommes revenus sur ce sujet ce matin, avec M. le Premier ministre français, M. le chef du gouvernement espagnol, pour constater que la démarche générale nous était commune, à savoir oui à la négociation mais, veillons-y, quand on dit oui à une négociation, cela ne veut pas dire qu'on est a priori d'accord sur ses conclusions. Il faut bien entendu s'il y a désarmement, nous le souhaitons, que ce désarmement soit contrôlé, équilibré, et se situe dans un ensemble de dispositions qui permettront à ce désarmement de ne pas être démenti, soit par la mise en jeu des forces stratégiques, soit par la mise en jeu des forces classiques ou des armes à courte portée. Voilà les sentiments que partagent, j'en suis sûr, puisque cela m'a été dit par le chef du gouvernement, et le gouvernement espagnol et le gouvernement français.\