7 mai 1986 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration à la presse de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'issue du sommet des pays industrialisés de Tokyo, à son arrivée à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, mercredi 7 mai 1986.

J'ai vu, comme vous savez, vos confrères à Tokyo hier. Je ne pense pas qu'il soit utile de reprendre ce qui a été dit et qui a été sans aucun doute répercuté dans vos papiers ce matin ou dans les télévisions et les radios. Cependant, si quelque chose vous paraît utile maintenant, je suis prêt à vous répondre naturellement.
- QUESTION.- Au moment même où votre vieil ami, car nous savons que c'est un de vos vieux amis, M. Gaston Defferre, lutte contre la mort, quelle est votre réaction, quel est votre sentiment ?
- LE PRESIDENT.- J'ai appris cet accident. Depuis ce moment-là je me suis tenu constamment informé auprès de sa femme, qui est également une amie très proche. J'éprouve le sentiment, s'il ne devait pas se relever, d'une très grande perte pour la France, et, pour moi, d'une grande peine.
- QUESTION.- Vous allez vous rendre à Marseille ?
- LE PRESIDENT.- Certainement.
- QUESTION.- Vous y allez aujourd'hui, monsieur le Président ?
- LE PRESIDENT.- Je ne sais pas encore.\
QUESTION.- A propos du sommet de Tokyo, quelle est votre impression générale ?
- LE PRESIDENT.- C'est toujours un exercice un peu hardi que de vouloir résumer en peu de mots les travaux de trois journées. Je dirai cependant, puisque vous me posez la question, que, me plaçant du point de vue de la France, trois avancées significatives sont tout à fait conformes à nos voeux, et sont pour une large part le résultat de notre action depuis plusieurs années, car la politique et l'intérêt d'un pays exigent naturellement du temps.
- Le plus remarquable, me semble-t-il, est que l'on ait enfin enregistré, dans ce sommet de 1986, les normes d'une politique monétaire entre les participants, d'une politique monétaire internationale. Quand je songe aux difficultés que la France a connues lorsqu'elle a proposé qu'on mette un peu d'ordre dans les mouvements erratiques des monnaies, le scepticisme qui a accompagné cette proposition, la peine que Jacques Delors, désigné à cet effet, a eu à réunir les uns, les autres dans un comité des Sept, le temps qu'il a fallu pour rédiger des propositions qui obtiennent l'accord général, je dois considérer le résultat de Tokyo comme tout à fait remarquable. Donc politique monétaire : oui, c'est une avancée certaine, conforme à nos intérêts.
- Avancée commerciale, dans la mesure où les objections de la France, que j'avais exprimées à Bonn, ont été suffisamment retenues pour que de nouveau à Tokyo, on ait posé des conditions reconnues par tous qui font qu'au mois de septembre prochain, eh bien ce seront les ministres compétents, qui détermineront la politique à suivre, c'est-à-dire le calendrier à proposer. D'autre part les Sept ne se sont pas arrogé le pouvoir de décider à la place de l'ensemble des pays qui sont directement intéressés par la réunion du GATT.
- Troisième point, pour ne pas être trop long, c'est, je le crois, la reconnaissance de la qualité spéciale et des besoins particuliers de l'Afrique au regard de l'endettement, de la politique du tiers monde, et cela naturellement est conforme à une politique constante de la France.\
QUESTION.- Et le rapprochement avec les Etats-Unis ?
- LE PRESIDENT.- Qu'est-ce que vous appelez rapprochement avec les Etats-Unis ?
- QUESTION.- A propos du terrorisme et des réactions des uns et des autres ?
- LE PRESIDENT.- Non, la résolution qui a été adoptée sur le terrorisme ressemble comme une soeur à celle qui avait été adoptée par les pays de l'Europe des douze. On pourrait y ajouter la précision, la mise au concret du nom de la Libye, non pas comme peuple mais comme Etat qui se trouve visé, particulièrement, parce qu'il s'est exposé à l'être. Mais je crois pouvoir répéter que ce qui avait été décidé et proposé au sein de l'Europe a été de nouveau retenu à Tokyo.
- QUESTION.- Monsieur le Président, en matière monétaire,... (inaudible)... et l'approbation de la France...
- LE PRESIDENT.- Oh, façonneuse, c'est en tout cas la France qui en a pris l'initiative et elle a pendant quelques années rencontré de grandes difficultés. Cela a commencé à se dénouer l'année dernière, en septembre 1985, lorsque M. Baker, le ministre américain `secrétaire au Trésor`, a pris une position qui allait dans ce sens. Pour la première fois, cela est entré dans la littérature, le communiqué et les propositions d'un sommet des pays industrialisés. Désormais c'est acquis.\
QUESTION.- Monsieur le Président, c'est la première fois que vous participez à un sommet accompagné de votre Premier ministre `Jacques Chirac` ?
- LE PRESIDENT.- Oui.
- QUESTION.- Quelles réflexions vous inspire ce premier exercice ?
- LE PRESIDENT.- J'ai toujours été, mais j'ai déjà eu l'occasion de dire cela à Tokyo, à vos confrères de Tokyo qui me posaient la même question, j'ai toujours été accompagné, c'est d'ailleurs la règle. Le Président de la République est toujours accompagné, dans une conférence internationale, par des membres du gouvernement. En l'occurrence, ça a toujours été le ministre des affaires étrangères et le ministre de l'économie et des finances. La qualité du Premier ministre ajoute naturellement un intérêt particulier à ces présences gouvernementales, mais c'est le gouvernement. Il n'y a donc pas de changement de -nature s'il y a changement de personne.
- QUESTION.- Et la coexistence ou la cohabitation, selon les uns et les autres, se porte très bien ?
- LE PRESIDENT.- Ce n'est pas le sujet. En matière de politique extérieure, comme c'était le cas à Tokyo, l'intérêt d'un pays, l'intérêt de la France passe largement avant les problèmes de politique intérieure. Merci.\