7 février 1985 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à la mairie de Beauvais, jeudi 7 février 1985.

Monsieur le maire,
- Mesdames et messieurs,
- J'ai entrepris de visiter toutes les régions de France £ j'ai commencé il y a déjà plus de trois ans en me rendant en Lorraine, je suis à peine arrivé à la moitié d'entre elles, et c'est comme une sorte de relief qui s'offre à moi, ici à Beauvais en Picardie, pour considérer ce qui a été fait, examiner ce qui le sera £ cette visite en Picardie a pour moi valeur d'observation, de constat pour que le nouveau point de départ puisse s'amorcer dans les meilleures conditions.
- J'aurai l'occasion de visiter une région que je connais bien sur le -plan personnel mais qui cette fois-ci m'offrira l'occasion de rencontrer les responsables élus, de visiter les lieux de travail, de pénétrer d'un peu plus près cette Picardie, tel est le nom de la région diverse parfois contradictoire, attirée vers Paris ou éloignée comme vous venez de le dire, monsieur le maire, de telle sorte qu'il est assez difficile, peut-être plus difficile qu'ailleurs, de dessiner un plan cohérent. C'est pourtant la tâche de la région et de l'Etat.
- J'aurai l'occasion aussi au cours de ces deux journées, particulièrement à Amiens lorsque je m'adresserai aux élus régionaux, de décrire d'une façon plus générale et plus circonstanciée l'ensemble des dispositions qui peuvent être prises. Donc je ne m'attarderai pas, ce matin à Beauvais, sur cet aspect des choses. Tout au plus, esquisserai-je une réponse aux questions tout à fait concrètes qui m'ont été posées par le Maire de cette ville que je suis heureux de rencontrer à nouveau. J'ai eu vraiment dans le passé de très heureuses circonstances qui m'ont permis d'être reçu à la maison, de partager le repas, de connaître la famille, non seulement celle de M. Amsallem mais aussi celle de plusieurs de mes amis de l'Oise et de Beauvais : donc je me trouve un peu, enfin assez, à l'aise parmi vous. Il s'agit maintenant de responsables élus comme moi-même. Quel que soit le -plan où nous nous plaçions, nous avons en charge les intérêts publics, et je dois dire que l'on peut considérer d'où je suis, que Beauvais est bien géré avec amour, avec attention, avec sérieux, ce qui ajoute au plaisir que j'ai d'être parmi vous.\
Vous avez évoqué quelques dossiers. Je l'ai dit, nous allons les survoler : car c'est à Amiens que je dois traiter ces choses, et je ne veux pas isoler Beauvais du contexte et de l'envisonnement. C'est surtout le problème de la zone blanche qui est préoccupant. A cet égard, j'ai l'intention de demander au gouvernement de hâter une nouvelle définition, spécialement pour les aides de la DATAR. En effet, vous avez été dans le passé, rattachés, en somme, à la région parisienne si bien que pratiquement les intérêts particuliers - mais tout à fait importants - de Beauvais, de sa région sont perdus dans la masse, ne se distinguent plus, apparaissent en bref comme secondaires ou circonstanciels par -rapport à l'essentiel. Il faut en finir avec cette situation, et nous y appliquons : j'en dirai davantage demain.
- Pour les relations et communications par voie de chemins de fer ou par route, oui, vous venez de décrire une situation qui ne sera pas aisément corrigée parce que cela nécessite de grands investissements. L'ensemble du département et la région est déjà traversé par une voie importante, une deuxième est déjà en cours. Mais ici-même, particulièrement si vous n'avez pas en effet l'électrification nécessaire pour rejoindre Paris, cela parait tout à fait anormal à l'époque où nous sommes. Mais voilà, il faut partager les crédits, et l'ensemble du réseau de la SNCF est très exigeant c'est-à-dire que vous n'êtes pas les seuls dans ce cas, il appartient à la Société nationale `SNCF` et au gouvernement de trancher, c'est-à-dire de choisir où sont les priorités. Ce n'est pas de mon domaine, je pourrai simplement m'en faire l'avocat. Le TGV sera très important pour l'ensemble de la région de ce qui est au nord de Paris, non seulement comme voie nationale mais aussi comme voie internationale puisque, comme vous le savez, nous prévoyons des prolongements en Belgique, en Allemagne, et le cas échéant en Hollande. Mais vous êtes si proches de Paris que ce n'est pas ce type de transport qui modifiera votre mode d'existence. Cela ne vous est pas indifférent de savoir ce que deviendra votre région, sans doute, d'autant plus qu'il me semble me souvenir que le Maire de Beauvais est en même temps Président de la région. Mais tous ces problèmes nous les traiterons ultérieurement. Je voulais simplement en en faisant -état, vous montrer que je ne veux pas être ignorant des problèmes qui vous préoccupent. Je crois pouvoir être plus positif dans ma réponse : oui, vous aurez ces crédits d'équipement. Il faut que vous en finissiez avec cette grande -entreprise qui va permettre à votre ville et à sa région immédiate de disposer d'un équipement majeur, naturellement important essentiellement pour chacun d'entre vous, chacune de vos familles.\
Vous avez enfin évoqué le retour à Beauvais des tapisseries, la fabrication à laquelle votre ville s'était illustrée à travers les temps. Je n'oublie que je suis ici dans une très vieille ville de France, que cela fait bien vingt siècles que vous existez, et j'ai aperçu en montant l'escalier quelques costumes significatifs d'une société active, sympathique et attachée à l'histoire commune, de notre histoire nationale : la résistance nationale a connu ici l'un de ses moments majeurs.
- Je sais à quel point vous êtes attachés à ces traditions, c'est une bonne chose, une bonne chose de rappeler qu'à partir des premières ethnies qui parvinrent à Beauvais et qui établirent la ville, je crois que cela s'appelait les "Bellovacs", eh bien ! vous avez perpétué. L'histoire de ces vingt siècles représente bien des hauts et bien des bas : qui peut y échapper dans l'histoire ou bien dans la vie personnelle ? Mais enfin vous êtes là, cette ville se développe, elle témoigne, sa population est active, elle lutte pour la vie, elle ne veut pas être absorbée par la grande concentration urbaine si voisine, elle veut être tout à fait significative du renouveau de la région à laquelle elle appartient. Eh bien ! Je suis là, moi, pour seconder vos efforts, et ces efforts véritables, c'est à vous de les faire : il ne faut pas imaginer que l'Etat ou le Président de la République peuvent se substituer à vous. Ce serait d'ailleurs une très mauvaise formule : encore faut-il que nous nous tenions les coudes, de façon que l'Etat et les pouvoirs publics à l'échelon national puissent reléguer les efforts réels, véritables et le plus souvent réussis des responsables locaux et régionaux.\
Vous avez commencé votre allocution, et vous le deviez, après m'avoir adressé quelques compliments auxquels j'ai été sensible, par le drame essentiel qu'est celui du chômage.
- J'ai eu l'occasion de le dire en diverses circonstances : le chômage c'est aussi un mal européen, un mal européen pour la société occidentale. Personne, en vérité, n'y échappe vraiment. Sans doute quelques pays comme la Suisse ou la Suède ont-ils mieux résisté à la vague : encore s'agissait-il de pays qui avaient su réaliser leur modernisation à temps. Mais l'ensemble des pays européens est frappé par ce désastre pour les même raisons, avec des variations d'un pays à l'autre, assurément ces variations ne jouant pas dans l'analyse objective, même si elle reste cruelle, au détriment de la France. L'Allemagne au cours de ces dernières années a légèrement distancé la France, légèrement, 120000 travailleurs de moins au chômage en Allemagne, pour une population quand même plus importante, encore les derniers mois risquent-t-ils d'inverser la statistique. La France se trouve sur le -plan du chômage, elle-même, violemment et cruellement frappée. Mais par comparaison - ce qui montre bien que lorsqu'on veut soigner ce mal, il faut autant que possible recourir à des raisonnements sérieux - les autres souffrent plus encore que nous. Faut-il penser à la Grande-Bretagne qui a quelque trois millions et demi de chômeurs, qui n'aperçoit pas la fin de son mal en raison de sa crise économique ? La France est dans une situation économique très supérieure à celle de la Grande-Bretagne. Et ce ne sont pas les seuls.
- Donc, ce mal européen, quel est son origine ? Quand on aura fait le diagnostic, on saura mieux comment guérir. J'entends dire beaucoup de choses, encore très récemment, beaucoup de solutions qui ne sont que démagogiques, qui ne reposent sur aucune analyse sérieuse. Si nous en sommes là, pour reprendre une expression que j'ai récemment employée, c'est que le chômage d'aujourd'hui, c'est l'absence de modernisation d'hier : les pays les plus modernisés, le Japon, les Etats-Unis d'Amérique, sont aussi ceux où il y a le moins de chômage. J'ai dit tout à l'heure qu'en Europe le pays qui avait à quelque chose près le moins de chômage par -rapport à nous, l'Allemagne, est un pays qui a réussi une large part de son équipement moderne. Ce sont les pays dans lesquels la formation des hommes a été la plus adaptée aux mutations de la technologie. Car la modernisation des machines n'aurait pas beaucoup de sens s'il n'y avait pas d'hommes et de femmes capables de les servir, de les animer et de les dominer. Si ce travail n'a pas été accompli pendant plusieurs décennies, comment me demander, demander au gouvernement de la République, de corriger les effets délétères de cette carence en l'espace de trois ans ?\
Certes, nous avons constaté des progrès : tous les paramètres économiques sont en bien meilleur -état qu'ils ne l'étaient en 1981. Récemment, je l'ai affirmé dans une autre ville, une ville de Bretagne. J'ai entendu beaucoup de criailleries au cours de ce que j'ai dit, et surtout un thème général, : "taisez-vous". Bon, je veux bien me taire, mais personne ne m'a dit : "ce n'est pas vrai", parce que c'est vrai ! Observez le changement dans la façon de polémiquer, et je défis quiconque de dire que ce n'est pas vrai : tous les paramètres économiques français sont en meilleure situation.
- Je sais bien qu'on peut dire : "oui, mais cela a été payé par un déficit budgétaire accru, déficit budgétaire de la nation, et d'un certain nombre d'autres collectivités", c'est vrai : il n'en reste pas moins que l'endettement intérieur qui vient compenser, si je puis dire, les déficits budgétaires, est l'un des plus faibles de tous les pays industriels, et l'un des plus faibles de l'Europe du Marché commun. Nous avons donc une marge de sécurité, des réserves suffisantes pour maîtriser cet endettement, c'est-à-dire ce déficit budgétaire qui d'ailleurs a été jusqu'à il y a 18 mois, l'un des plus faibles, le deuxième plus faible de tout le monde industriel. J'ajoute que sur le -plan de l'endettement extérieur, cette fois-ci, qui sert à compenser les déficits commerciaux, si je n'avais pas moi-même hérité de 62 milliards de déficit quant à la vente et à l'achat des marchandises, c'est-à-dire les relations commerciales de la France - il y a ce que l'on achète et ce que l'on vend - si ce déséquilibre n'avait pas été si lourd, s'il n'y avait pas déjà eu en somme le tiers de l'endettement actuel, nous aurions pu plus aisément corriger le tir. Mais cet endettement, qui est trop lourd, sur lequel il faut maintenant peser, n'en est pas moins à la mesure de nos efforts : car on ne peut le mesurer que si l'on compare avec l'-état de nos réserves. Or, nos réserves en devises sont supérieures en 1984, 1985 à ce qu'elles étaient en 1981. Ce qui veut dire que si l'on compare ce que l'on doit et ce que l'on a, nous sommes plus en mesure que la plupart des pays industriels du monde de présenter une bonne signature. La preuve en est c'est que dès que la France s'adresse, comme c'est normal dans un Etat moderne, pour lancer des emprunts on se bouscule aux guichets et la plupart des pays du monde considèrent que la France est aujourd'hui l'une des trois meilleures signatures du monde. Quand je dis cela c'est pour que l'on cesse de parler pour ne rien dire.\
La paramètre social essentiel lui, je veux dire l'emploi, l'emploi et donc son revers le chômage, continue de peser très lourdement. J'en ai dit un mot tout à l'heure : il faut nous guérir de ce mal ! Je me suis adressé à votre raison et je vous ai dit comment s'y prendre. Va-t-on improviser ? Va-t-on cesser de moderniser l'industrie, l'Etat ne disposant que de sommes limitées, celles que fournissent les contribuables : il faut toujours songer à cela lorsque l'on dit il faut donner ceci, il faut donner cela, il faut toujours penser que c'est vous qui le donnez et que l'on doit rester dans une mesure raisonnable quant à la contribution - aux prélèvements obligatoires - des citoyens.
- Ils paient de deux façons : ils paient les charges sociales - citoyens et entreprises - et ils paient leurs impôts.
- Si on alourdit exagérément les charges sociales et les impôts, on paralyse l'initiative. Il n'y a plus aucune espérance de gagner correctement sa vie et l'on désespère et l'on lasse les énergies. Il faut donc rester dans un domaine raisonnable. Cela commençait à devenir déraisonnable depuis 1974 avec un point de plus par an. Comme la comparaison se fait entre la somme des prélèvements d'une part et d'autre part le revenu national, le Produit intérieur brut `PIB` français, la somme de tout ce que nous gagnions en une année était atteinte ou hypothéquée à 43 % environ lorsque j'ai été élu Président de la République. Un point par an cela veut dire qu'ils étaient partis 7 ans plus tôt à 36 %. Les deux premières années, trois premières années nous avons monté nous aussi d'un point en observant exactement la même courbe, exactement la même augmentation. C'est difficile avec un train lançé à 200 à l'heure de l'arrêter en 200 mètres. Mais cette année pour la première fois depuis de très longues années nous avons diminué - ce sera ressenti en 1985 - la somme des prélèvements obligatoires de 1 %, c'est-à-dire d'une cinquantaine de milliards et de ce point de vue nous avons donné un peu plus d'oxygène aux entreprises et aux foyers, aux ménages qui pour la première fois vont voir enfin leurs économies un peu mieux servies.\
`Suite sur les économies des ménages`
- Elles seront doublement mieux servies car pour la première fois depuis très longtemps - je crois que cela va faire 20 ans - l'épargne va rapporter, l'épargne populaire j'entends. Les autres épargnes ont pu être mieux servies que l'épargne populaire. Livret A des Caisses d'Epargne, et livret rose : pour la première fois, le taux de rémunération dépasse le taux d'inflation. L'inflation qui était à 14 % en 1981 qui est maintenant à moins de 7 %, atteindra normalement 5 % en 1985. Naturellement, chaque point gagné, c'est du pouvoir d'achat qui s'accroit. Pour la première fois cette année on a vu la rémunération de l'Epargne (en moyenne 7,1 pour les livrets A, 8,1 pour les livrets roses) dépasser une inflation qui est de 6,7. Voilà, donc beaucoup de raison qui permettent de penser qu'aussi bien les ménages que les entreprises vont retrouver le moyen d'investir et le moyen de placer, d'économiser, de dépenser aussi intelligemment que possible ce qu'ils possèdent. A partir de là, on pourra faire repartir la production industrielle. Les investissements industriels qui étaient à l'-état nul depuis 1976 sont repartis de 9 à 10 % maintenant en 1984. On commence donc à sentir une sorte de frémissement économique, on sent bien que cela va partir et on ne résoudra pas le chômage sans que cela reparte.\
La charge de l'Etat, le devoir de l'Etat n'est pas de se substituer, il ne peut pas se substituer à toutes les défaillances individuelles, il ne peut pas compenser toutes les pertes des entreprises surtout des entreprises privées qui n'ont pas été en mesure d'assurer leur propre équilibre £ ce n'est pas le rôle de l'Etat. Dépenser des sommes considérables - on le fait quand même parce que nous avons un devoir social de solidarité nationale - dépenser des sommes considérables par milliards et par milliards pour soutenir des entreprises qui de toute façon seraient perdues dans les mois qui suivraient c'est en réalité, au lieu de sauver des emplois menacés, c'est condamner les emplois qui ne le sont pas encore, menacés d'être perdus dans les années qui viennent.
- Sans doute avons-nous la responsabilité d'assurer une vie décente, si ce n'est pas le cas aux 2400000 chômeurs de France. Mais je dois aussi penser à ces millions et ces millions de travailleurs qui ont un travail et auquel il faut que nous fournissions les moyens d'un travail durable par une croissance saine de façon qu'à leur tour ils ne soient pas frappés par ce mal. Je dois aussi penser à cela. Cela est possible. Nous parviendrons non seulement à empêcher l'extension du chômage, nous arriverons au moment où, d'ici peu, le chômage - qui s'est accru de 300 % entre 1974 et 1981, 35 % depuis 1981 - verra sa courbe s'infléchir peu à peu, se stabiliser, je l'espère au cours de l'année 1985 pour ensuite s'inverser.
- Cela est un travail de patience et cela ne sera possible que si les entreprises redeviennent prospères. Elles ne redeviennent prospères que si elles peuvent vendre les produits qu'elles fabriquent et elles ne vendront les produits qu'elles fabriquent sur le marché intérieur et sur le marché extérieur que si c'est à meilleur marché, si c'est de meilleure qualité. Si cela n'est pas compétitif, personne ne les achètera, et si personne ne les achète, elles feront faillite, et si elles font faillite, elles ferment, et si elles ferment, c'est le chômage. Il faut donc commencer par donner à ces entreprises - il faut qu'elles se le donnent à elle-mêmes d'abord - le moyen de supporter le choc de la concurrence internationale. C'est un rêve absurde que d'imaginer que l'on pourrait s'enfermer derrière ses frontières pour ne plus échanger, puisque à l'échange, on y perdrait. Il ne faut pas oublier que cette année nous avons battu le record absolu quant à la vente de nos produits industriels. J'ai déjà dit en d'autres circonstances qu'un Français exportait par tête d'habitant plus qu'un Japonais. Cela paraît extraordinaire de le dire cela mais c'est vrai. Nous avons battu le record absolu des ventes de nos produits industriels avec 100 milliards de francs de bénéfices cette année. Bien entendu, nous comptons également l'agro-alimentaire, mais j'aurai l'occasion d'en parler au cours de ce voyage qui traversera de grandes régions de production agricole. Donc, il y a beaucoup d'éléments positifs.
- Encore faut-il mettre un pas devant l'autre plutôt que de faire le contraire. Pour cela il faut moderniser, faire que les entreprises soient en mesure d'abord de supporter la concurrence étrangère, ensuite de la vaincre. C'est déjà le cas puisque nous venons d'équilibrer à 600 millions près, notre balance des comptes, c'est-à-dire non seulement l'échange des marchandises mais aussi l'échange des services. Nous sommes sur la bonne voie, c'est pour cela que je ne voudrais pas que l'on rebrousse chemin.\
On m'a pris quelquefois ici et là sur un ton abrupt et pour faire quoi ? pour aggraver la crise ? et simplement pour faire semblant de faire plaisir en lâchant prise en croyant que si l'on relâche l'effort on gagnera davantage. Mais non ! La vie c'est une dialectique contre la mort et une société ne prospère qu'en étant plus solide, plus dure, plus volontaire, plus énergétique, plus courageuse, plus intelligente que les autres. Abandonner ici ou là, c'est assurer de ruiner la France. D'autres s'en étaient chargés, moi je ne le ferai pas.
- Bien entendu pendant le temps de la reprise que nous avons largement, aujourd'hui, amorcée puisque l'on en constate les premiers résultats, c'est dur, c'est difficile et la solidarité nationale doit s'exercer à l'égard de ceux qui souffrent le plus. Il ne faut pas oublier que le SMIC a vu son pouvoir d'achat s'accroître d'environ 20 %, il ne faut pas oublier que les familles ont vu leur pouvoir d'achat s'accroître de 20 % ! Mais il en reste, ceux que l'on appelle les nouveaux pauvres, les chômeurs en fin de droit : avec 40 F par jour que voulez-vous qu'ils fassent ? Cela exige de la part des pouvoirs publics et de la part de la nation un effort supplémentaire. Oui, il en est qui sont très malheureux. Notre devoir est d'être auprès d'eux et de les aider.\
Mais la France ne doit pas oublier l'essentiel qui consiste à fabriquer l'instrument de sa prospérité et cet instrument, il n'existera que par l'accès aux technologies, pas simplement aux industries de pointe mais aux technologies qui permettront aussi aux industries traditionnelles de gagner la compétition internationale. C'est comme cela que l'on sauvera - on a déjà commencé de le faire - le textile. On l'a sauvé avec le plan Dreyfus en 1981, c'est ce que nous avons engagé avec la sidérurgie, c'est ce que nous faisons avec les industries et les dérivés du bois, du cuir, avec la machine outil, que sais-je encore, la chimie ainsi que parallèlement nous tentons de développer les technologies de pointe qui sont seules en mesure de nous apporter le fer de lance avec lequel en gagnera les batailles.
- Voilà, je vous explique cela très simplement mesdames et messieurs et je ne continuerai pas davantage car au cours de ce voyage j'ai l'intention de m'exprimer et de m'exprimer plusieurs fois. Ce n'est pas que je sois insensible - loin de là - aux plaintes, aux inquiétudes. Elles me sont exprimées d'abondance, vous vous en rendez bien compte. Je ne suis ni sourd, ni aveugle mais personne ne me fera changer. Il n'y a pas de clameur qui me fera modifier le comportement que j'ai choisi pour la France car je veux qu'elle gagne et je n'accepterai pas qu'on la fasse perdre. Moderniser l'instrument, former les hommes, les femmes, tous mais notamment les jeunes voilà ce dont j'aurai l'occasion de parler pendant les jours qui viennent.
- Merci mesdames et messieurs, merci monsieur le maire pour votre accueil. J'y suis sensible. Vous m'aidez moralement, psychologiquement, vous m'aidez en fait à gagner avec vous cette bataille. Soyez remerciés.
- Vive Beauvais, Vive la République, Vive la France.\