22 juin 1984 - Seul le prononcé fait foi

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Interview télévisée de M. François Mitterrand, Président de la République, à Moscou, vendredi 22 juin 1984.

Je suis heureux de m'adresser à vous ce soir.
- Au nom de la France, je suis venu à Moscou, dans votre belle capitale, pour réaffirmer d'abord, l'amitié de toujours entre le peuple français et les peuples de l'Union soviétique, pour rechercher ensuite avec vos dirigeants les meilleurs chemins qui nous conduiront tous ensemble vers l'équilibre mondial, vers une paix solide et durable.
- L'une à l'Est, l'autre à l'Ouest de cette parties du globe, la Russie et la France ont, depuis de longs siècles, écrit des pages remarquables de l'Histoire de l'Europe.
- Frères d'armes, durant la dernière guerre mondiale, nous nous sommes battus dans les mêmes rangs contre le déferlement des forces ennemies.
- La vaillance de vos soldats, le courage et le patriotisme de votre peuple ont permis non seulement votre victoire mais aussi contribué de manière décisive à celle des alliés, de tous les alliés et à la libération de mon pays. C'est pourquoi j'irai demain à Volgorad où je témoignerai la reconnaissance de la France pour les héros de Stalingrad.
- Unis dans la guerre, soyons unis dans la paix. Défenseurs farouches de nos patries et de leur indépendance, dans la fidélité à nos alliances, sachons être les défenseurs infatigables de la paix.
- Nous devons pour cela nous parler, nous comprendre. C'est pourquoi je suis ici, chez vous.
- Je souhaite que se développent nos échanges commerciaux, technologiques, scientifiques, culturels. Je veillerai à ce que votre langue, votre culture, votre pays soient mieux connus par les Français. Nos bibliothèques sont riches de vos grands écrivains, nos discothèques de vos grands musiciens. J'ai formé ma jeunesse à la lecture de Tolstoï, Pouchkine, Tourgueniev, ou Tchekov. Vos auteurs modernes sont traduits en français. C'est l'apprentissage de votre langue dans nos écoles qu'il nous faut répandre davantage. De même, il faut que notre langue, que notre culture, que notre pays soient mieux connus de vous.\
Permettez-moi de vous parler un moment de la France.
- Terre de culture, terre d'asile, berceau des lidéaux humanistes et révolutionnaires, patrie de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen à laquelle nous sommes restés fidèles, la France est un pays de liberté. Notre système politique, économique et social est celui de la démocratie et nous y sommes très attachés.
- Liberté d'expression, liberté d'associaltion, de réunion, liberté de conscience et de croyance, droits des travailleurs, libertés syndicales.
- Je suis fier de mon pays, et vous le comprendrez, même si je sais ce qui lui manque et les progrès qu'il doit accomplir pour affronter les temps présents et futurs.
- Mais, vieille nation la France est aussi un pays moderne. Elle est le 4ème exportateur mondial et ses technologies modernes sont souvent au premier rang : transports, (le célébre TCV), avions, métros, automobiles, espace, centrales nucléaires, télécommunications, j'en passe.\
Je ne vous dis pas cela pour vanter les mérites de la France en oubliant les vôtres. Vous appartenez à un grand peuple doué d'une puissance et possédant des possibilités matérielles et culturelles considérables. Nous avons beaucoup d'estime pour vos capacités créatrices, pour vos réalisations scientifiques, pour la diversité de vos dons.
- Mais j'y reviens. Tout cela n'a de sens que si les relations pacifiques entre les peuples l'emportent sur les tensions, sur les risques de guerre. Travaillons donc à la paix par un désarmement réel, équilibré et contrôlé, par le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, par la primauté du droit international.
- Commençons par appliquer ces règles à nous-mêmes dans la franchise et le respect mutuel. Je souhaite aux peuples soviétiques paix et prospérité et je leur exprime les voeux de la France : c'est croyez-le pour vous et chacun d'entre vous un message d'amitié.\