24 janvier 1984 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'issue de sa visite à l'Institut national du sport et de l'éducation physique (INSEP) à Vincennes, mardi 24 janvier 1984.

QUESTION.- Monsieur le Président, quelle est la signification de votre longue visite à l'INSEP ? Aujourd'hui, vous avez vu tous les jeunes athlètes qui s'entraînent dans la perspective, bien entendu, des Jeux olympiques de 1988.
- LE PRESIDENT.- C'est un spectacle passionnant dans une maison où l'on enseigne la valeur éducative, remarquable aussi bien sur le -plan physique que sur le -plan intellectuel, avec les valeurs morales que cela représente. J'observe en même temps que l'on a su, à travers le temps, construire des bâtiments, aménager des salles, et maintenant réaliser un complexe sportif qui supporte la comparaison avec les meilleures salles d'Europe. Tout cela marque bien une capacité de la France, de sa jeunesse, de ses athlètes, pour une préparation qui exige beaucoup de ténacité, de patience, d'efforts, de constance qui sont des vertus. Je désirais les voir. C'est ce que j'ai fait cet après-midi.\
QUESTION.- En allant plus loin dans le temps, monsieur le Président, la candidature de la France pour organiser les Jeux olympiques de 1992, qu'en pensez-vous et que pensez-vous de l'avancement de ce dossier ?
- LE PRESIDENT.- S'il s'agit de la candidature de la France, j'ai déjà eu l'occasion de dire au président du Comité olympique international que je serais heureux que le choix se fixât sur notre pays. Mais la réalité c'est qu'une ville doit être candidate. Pas un pays, une ville. En l'occurrence, Paris a déjà fait savoir qu'elle posait sa candidature et je trouve cela excellent. Je ferai naturellement ce qui convient pour que l'Etat puisse contribuer de son mieux à la réalisation de ce projet. Ceci mérite encore, vous le comprenez bien, des études très sérieuses, en-particulier sur le -plan financier. Mais l'idée est une idée forte. Ce serait un grand rendez-vous dans notre pays. Ce serait un motif d'exaltation, de volonté de réussite pour nos athlètes, et ma foi, à Paris, ce serait fort bien. On va voir, on va s'y mettre. Je sais que déjà, Mme le ministre `Edwige Avice` y travaille, s'y prépare. Encore faut-il réunir des conditions qui commandent le travail à faire maintenant.
- QUESTION.- Paris a de bonnes chances, monsieur le Président, à votre avis ?
- LE PRESIDENT.- M. Samaranch, président du comité international, m'en a parlé il y a déjà deux ans et demi. S'il m'en a parlé, ce n'était pas pour rien. C'est bien parce qu'il avait dans la tête que la France, et Paris en-particulier, serait un bel endroit pour le rendez-vous de 1992. Je souhaite très vivement qu'on s'engage dans cette voie. Je pense qu'une collaboration peut s'établir entre la ville de Paris, la région et l'Etat, le gouvernement. En tout cas, personnellement je le souhaite. Reste, je le répète, les études, et particulièrement l'évaluation des coûts. C'est un souci normal pour ceux qui gouvernent.\
QUESTION.- Monsieur le Président, vous avez aussi inauguré la salle Marie-Thérèse Eyquem dans ce complexe sportif de l'INSEP, est-ce que cela a une signification particulière pour le sport féminin pour vous ? quelle est la place du sport féminin par-rapport au sport en général en France ?
- LE PRESIDENT.- D'abord le nom de Marie-Thérèse Eyquem évoque pour moi beaucoup de résonnances, car Marie-Thérèse Eyquem a été une amie, une de mes plus proches amies à travers quinze ans, vingt ans de ma vie, jusqu'à ce qu'elle disparaisse il y a quelques années. Vous savez que sa profession, son métier, c'était précisément de servir le sport. Et je suis heureux de voir que les sportifs aujourd'hui ont pensé à elle pour célébrer sa mémoire et donner son nom à ce très beau complexe sportif que j'ai pu visiter. C'est un aspect personnel, si vous voulez, il ne m'est pas indifférent. Mais quand je suis entré dans ce complexe et que j'ai vu la qualité des réalisations dont on m'a dit, pour plusieurs des salles qui le composent, que rien n'était comparable en Europe, en-particulier pour le judo, naturellement j'en ai trouvé une légitime fierté. Ce complexe Marie-Thérèse Eyquem marque une volonté. Il célèbre la mémoire de quelqu'un qui en était digne, qui était tout effort, toute volonté, toute générosité et j'aimerais que cela servît d'exemple à tous les jeunes qui viennent y travailler.
- QUESTION.- Et le sport féminin, monsieur le Président ?
- LE PRESIDENT.- Je dois dire que dans certaines disciplines les femmes ont une réussite, encore supérieure à celle des garçons. Pas partout, bien entendu, heureusement car les garçons aussi se défendent bien. Mais dans plusieurs sports, c'est tout à fait remarquable. J'ai vu le judo, la gymnastique, la natation, je ne voudrais pas être injuste : dès qu'on commence une énumération, si l'on ne parle pas tout de suite de tous ceux qui le méritent également, on commet une injustice. Ce sont les premières disciplines qui me viennent à l'esprit et on pourrait dire aussi le basket-ball, le volley-ball. Nous avons à l'heure actuelle des championnes qui se situent au premier niveau, sans oublier l'escrime.\
QUESTION.- Qu'est-ce que vous attendez précisément des Jeux olympiques d'hiver de cette année et quelles disciplines comptez-vous suivre plus particulièrement ?
- LE PRESIDENT.- Je ne sais pas. Je suis comme tous les Français. Chaque fois j'ai un petit coup au coeur en me disant "pourvu qu'on gagne". J'ai même un peu de vanité comme tous les Français. Je dis : "on va gagner" et cela n'arrive pas toujours. Je suis déçu et je dis "la prochaine fois ce sera la bonne". Très bien. Cela arrive aussi. C'est vrai que dans les disciplines du ski, spécialement dans les disciplines les plus classiques et les plus connues, on a besoin du côté des garçons de faire un effort, de constituer une équipe. Je crois qu'on y arrive. Du côté des filles, il y a là quelques championnes qui sont parfaitement capables d'emporter des titres olympiques. Elles les auraient mérité déjà dans le passé. Elles restent disponibles, c'est une bonne chose. Je n'oublie pas les autres disciplines, le ski de fond notamment. Bref, je vais aborder ces Jeux olympiques `à Sarajevo` comme vous, comme ceux qui nous entendent en disant "cette fois-ci, il faut que la France gagne". Si elle ne gagne pas, on n'en fera pas une maladie. Les athlètes méritent estime, et après tout ce qui est important - ce n'est pas moi qui l'ai dit - c'est de participer. Je crois que c'est une vérité profonde.
- QUESTION.- Est-ce que vous continuez à jouer au tennis, parce que le sport c'est bien, mais la pratique c'est mieux ?
- LE PRESIDENT.- J'entretiens la forme. D'abord la fonction que j'exerce c'est un sport. Et en soi c'est un bon entretien.
- QUESTION.- Il n'y a pas de compétitions ?
- LE PRESIDENT.- Si vous voulez. En tout cas les Jeux ne sont pas ouverts, semble-t-il. Enfin l'entraînement pour beaucoup paraît... (inaudible). N'insistons pas sur ces comparaisons. Je suis heureux de ce que vous me dites. Assurément je m'efforce, en dehors de ce que je viens de vous dire, de respirer le bon air, de marcher, de pratiquer quelques sports qui permettent de préserver les réflexes, mais je n'ai aucune prétention, ni aucune ambition. Je suis de ceux qui ont passé le temps de la meilleure expansion physique, et l'essentiel c'est de la garder. Ce n'est pas le moindre effort, croyez-moi.\