13 décembre 1982 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'occasion de la remise de la médaille d'or du comité scientifique de la Fondation de France, Paris, Palais de la Découverte, lundi 13 décembre 1982.

Messieurs les présidents,
- Mesdames et messieurs,
- Invité à remettre la première médaille de la Fondation de France, je suis heureux que le destinataire en soit le Palais de la Découverte.
- Par la qualité de ses choix, la Fondation de France suscite le respect non seulement chez nous mais à travers le monde. J'ajoute que sa volonté de mettre les progrès scientifiques à la portée du plus grand nombre, va à la rencontre de mes préoccupations personnelles les plus profondes. Sa contribution à la science, sous votre autorité, monsieur le président Seydoux, est essentielle. Elle le sera de plus en plus.
- Je souhaite, vous le savez, que priorité soit donnée, dans un budget qu'il faut serrer de près, au budget de la recherche, de la culture et de l'éducation. Pourquoi ? Parce que ces choix sont tournés vers l'avenir, un avenir que votre fondation s'efforce, à sa manière, de préparer.\
Cette cérémonie m'est d'autant plus agréable qu'elle me donne l'occasion de saluer cette institution originale qu'est le Palais de la Découverte.
- On ne peut qu'être frappé par la coincidence de nos ambitions actuelles avec celles qui ont été à l'origine de ce projet depuis sa conception en 1934, jusqu'à son inauguration en mai 1937 par Léon Blum. En 1937, la France vivait une situation économique et sociale difficile. Elle organisait pourtant une "exposition internationale des arts techniques", la dernière d'une longue série d'expositions universelles commencée en 1855, et qui ont rythmé les grandes étapes de notre développement industriel, marquant le paysage de Paris de témoignages architecturaux devenus maintenant familiers.
- Le mouvement scientifique participait activement à ce mouvement. Pour le projet du Palais de la Découverte, Jean Perrin dont vous venez de célébrer la mémoire, avait réuni autour de lui une équipe enthousiaste où l'on retrouvait certains des plus grands savants de l'époque, je citerai parmi d'autres Emile Borel, Ernest Esclangon, Gustave Roussy, Pasteur Vallery-Radot. Et pendant près de quatre ans, cette équipe élabora un projet qui trouva d'abord abri, pendant l'Exposition, dans une aile du Grand Palais. La réussite fut telle, souvenez-vous en, vous qui l'avez vécue, que cet établissement a finalement su s'installer dans la durée sans que le succès initial fût un instant démenti.
- Vous avez su, vous, l'adapter à l'évolution des connaissances scientifiques sans compromettre le destin pédagogique et sans en perdre le pouvoir d'attraction.\
L'Exposition universelle de 1989, désormais officiellement acquise par les instances internationales, fait écho à celle de 1937. Et notre politique de développement de la recherche scientifique et de la technologie, qui s'appuie sur les forces vives de la communauté scientifique accompagne cette autre mutation sociale et politique que nous vivons.
- En son temps, Jean Perrin voulait, je le cite, "faire comprendre aux masses et aux classes dirigeantes, que favoriser la recherche est de première nécessité pour le bien public". Et nous avons le sentiment que cet héritage fastueux a bien été recueilli, que cette prémonition a bien été accomplie, au-point que cette citation nous parait, presque, maintenant un lieu commun.\
Le Palais de la Découverte est resté fidèle au projet des fondateurs. Cela ajoute à son -prix, même s'il n'a pas tout à fait évolué vers la grande université populaire que certains imaginaient au départ, ce projet qui demeure dans votre esprit et dans le mien. Celui d'une éducation scientifique tournée vers les jeunes : elle se réalise ici à travers l'approche historique qui permet de reconstituer en raccourci le cheminement expérimental de la pensée contemporaine.
- Il nous faudra prolonger cet effort, harmoniser les différentes initiatives engagées au-cours de ces dernières années, qui sont poursuivies, soit sur-le-plan du Musée national des sciences et des techniques, soit sur-le-plan du Centre mondial de l'informatique et des ressources humaines. Sans oublier ces centres de culture scientifique et technique dont les projets fleurissent dans de nombreuses régions et qui offrent également la possibilité de marquer notre époque avec autant de force que le Palais de la Découverte en son temps, dans la mesure même où il s'agit d'assurer en même temps la continuité de celui-ci.
- Oui, il importe qu'une complémentarité, qu'une coordination soit recherchée et obtenue entre ces institutions, tout en préservant l'originalité des approches de chacune, l'objectif commun devant être, comme je viens de le dire à l'instant : tourner notre jeunesse vers l'avenir, lui donner confiance dans un progrès maîtrisé, celui qui marque la -nature de l'homme, de son esprit, de sa capacité, et prolonger ainsi la tradition historique du pays, le nôtre, qui osa s'appeler un temps, le pays des Lumières.
- Messieurs les présidents, je salue en même temps M. Bernard, dont j'ai reçu le témoignage, mesdames et messieurs, j'ai tenu à participer à cette cérémonie et à remettre moi-même cette médaille d'or `de la Fondation de France`, pour souligner l'importance que j'attache, non seulement au passé, qui vaut toujours d'être célébré, mais aussi aux capacités du présent dont naissent chaque jour les virtualités, bientôt les capacités de l'avenir.\