22 mai 1982 - Seul le prononcé fait foi

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Discours de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'Assemblée nationale ivoirienne, Abidjan, samedi 22 mai 1982.

Monsieur le président,
- Mesdames et messieurs les députés,
- Je mesure, croyez le bien, l'honneur que vous me faites en m'accueillant aujourd'hui à l'Assemblée nationale ivoirienne. Il s'y ajoute, permettez-moi de le souligner, le plaisir particulier qu'éprouve l'ancien parlementaire que je suis, à se trouver parmi vous. J'ai siégé - vous avez bien voulu le rappeler, monsieur le Président - au Parlement français pratiquement depuis la libération de mon pays, c'est-à-dire pendant plus de trente-cinq ans.
- J'ai eu le privilège d'y rencontrer le président Houphouet-Boigny auquel me lie depuis lors une profonde amitié. Maintes fois, au-cours de ces années, nous avons rapproché et confronté nos conceptions, échangé nos points de vue et particulièrement sur l'évolution du continent africain. Et nous avons si souvent parlé de la Côte d'Ivoire qu'il me semble aujourd'hui assez bien la connaître. Ainsi votre Assemblée, mesdames et messieurs, m'est en quelque sorte familière.
- Vous avez bien voulu citer certains passages de mes écrits au-cours d'une vie politique affrontée à bien des événements. J'ai été sensible à l'éloge, j'en ai corrigé naturellement ce que l'amitié, la fidélité, pouvaient apporter en sus £ après tout, ce sera l'histoire qui jugera notre action.
- Vous avez rappelé ce que j'écrivais en 1938 : j'étais un jeune étudiant et il s'agissait de l'Anschluss, de l'arrivée de Hitler sur le sol de l'Autriche. Vous évoquiez tout à l'heure les premiers écrits qui me portaient vers l'examen de l'Afrique noire, les conditions de son existence, de sa réalité politique, de ses aspirations légitimes : je ne démontrais pas une clairvoyance particulière.\
Je suis toujours resté fidèle à ce principe, trouvé dans les pensées de Blaise Pascal qu'il faut un point fixe pour juger. Après y avoir quelque temps réfléchi, j'ai choisi quelques points fixes en petit nombre. L'histoire va, vient et revient. On n'y peut rien comprendre si l'on n'est pas resté sur le point fixe qui permet de la juger après avoir tenté d'en saisir le sens. Sans doute en-raison de ma formation - peut-être y étais-je porté par un mouvement naturel - j'avais pensé que le respect de la liberté de chaque individu et, au-delà, de chaque groupe d'individus, des sociétés naturelles jusqu'à la nation, constituait un point fixe. Cette liberté, c'était ceux qui combattaient pour elle qui en avaient fait le choix. Et non pas les autres. Il convient donc de se tourner d'abord vers les peuples, vers les masses souffrantes en lutte mais courageuses de leur espoir, et chercher dans ces peuples et dans ces luttes le secret de la ténacité et les racines de l'expérience. Pas plus qu'il n'était acceptable qu'un pays put par le seul appoint de la force, de la force la plus brutale mettre un terme à l'indépendance d'un autre, pas davantage il n'était acceptable qu'un pays colonisé ne put accéder par son simple choix à la pleine responsabilité qui s'appelle l'indépendance nationale. Le temps est toujours nécessaire, qui fait son oeuvre : encore faut-il ménager les étapes, sans jamais perdre de vue le point fixe qui permet de juger et d'apprécier les évolutions, sans jamais perdre sa route. C'est ce que j'essaie de faire dans mon pays avec quelques points fixes, pas davantage. Il n'est pas nécessaire d'en posséder tellement pour savoir comment conduire sa vie et celle de son peuple. Ces points fixes sont celui de la justice sociale, celui de l'indépendance, celui du refus de toute forme d'exploitation de l'homme par l'homme, en sachant qu'à l'époque où nous sommes cette exploitation trouve son terrain principal dans les forces de domination économique. Il est bien entendu qu'il n'est pas de solution économique à aucun problème du monde si ne s'y ajoute la dimension culturelle, et, dans la juste acceptation du terme, de dimension spirituelle.
- C'est vous dire, monsieur le président, combien les mots d'accueil et d'amitié que vous venez de prononcer me vont tout droit au coeur, et je vous en remercie.\
Tout le monde s'accorde, en Afrique et dans le monde, à reconnaître à la Côte d'Ivoire, aux hommes et aux femmes de ce pays, les vertus de clairvoyance et de modération qui favorisent la stabilité et le consentement de votre société à l'évolution aujourd'hui acquise vers l'indépendance et depuis lors vers le progrès et vers la paix.
- L'Etat s'est édifié dans ce pays sous la conduite du président Houphouet-Boigny. L'Etat s'est identifié à la constance de son action mais aussi à celle des hommes de qualité dont il s'est entouré. Cet Etat est un Etat solide et reconnu. En pénétrant dans cette Assemblée, mon regard s'est fixé sur quelques visages connus de moi-même depuis l'origine de ce combat et il m'est agréable d'avoir commencé la journée en compagnie du président Denise auquel me réunissaient déjà dans les années 1947, 1948, 1950 les interminables conversations de ceux qui bâtissaient l'avenir. Et voilà que cet avenir c'est maintenant notre passé, et c'est aussi notre présent. C'est aussi la République de Côte d'Ivoire, un Etat qui s'adapte à l'évolution de la société, ainsi qu'en témoignent les réformes que vous avez -entreprises, notamment par le dernier congrès de votre parti.
- Parmi les institutions qui animent la République ivoirienne, le rôle de votre Assemblée est et sera toujours essentiel. C'est ici que peut se mener le dialogue auquel à-juste-titre vous êtes attachés. C'est ici que se conduit la réflexion qui nourrit les décisions. C'est ici que se préparent les évolutions, que se renforce l'unité de la nation dans la diversité de vos appartenances sociales, des régions et des coutumes que vous représentez. Votre responsabilité est grande, mesdames et messieurs - je le sais d'expérience -, vous qui avez été choisis par les populations auxquelles vous appartenez, choisis aussi par la détermination politique de vos organisations qui vous ont manifesté leur confiance. Vous exprimez des opinions, des souhaits mais aussi des appréhensions. Ceci ne va pas sans difficulté, sans contrainte dans un pays qui, en dépit du chemin parcouru, a encore beaucoup à faire et doit compter avec un environnement difficile. Je sais que vous vous acquittez de cette responsabilité avec sérieux et enthousiasme, que votre Assemblée a de l'allant, que nombreux sont en son sein les femmes et les hommes qui exercent leur premier mandat, tandis que d'autres apportent le lot de leur expérience.\
Je me plais donc à rendre hommage à travers vous à votre République qui, sous l'impulsion du président Félix Houphouet-Boigny, a pris le parti de l'évolution vers une démocratie adaptée à vos socités et à la résolution des problèmes qui sont ceux de votre continent. Et comment ne pas évoquer le climat si particulier qui permet qu'ici soit aménagée une ouverture aux idées, aux croyances, aux cultures venues de l'extérieur, sans abandonner en quoi que ce soit le meilleur d'une tradition, cette tradition africaine du dialogue qui trouve ici sa meilleure expression et qui accueille la contradiction, pour enrichir le débat.
- Tradition d'accueil aussi : combien de vos frères africains ont trouvé en Côte d'Ivoire les moyens d'existence que leur pays ne pouvait pas toujours leur assurer. Combien de communautés étrangères se sont établies parmi vous librement, à l'abri des difficultés qui les ont éloignées de leur pays. Et je connais l'attachement que vous portez à votre culture, à vos coutumes, à vos langues, à vos croyances et particulièrement à vos croyances religieuses qui cohabitent heureusement. Je comprends bien votre volonté de les préserver, en ménageant tout ce qui peut rapprocher les Ivoiriens dans leur unité nationale.
- L'attrait d'Abidjan, dont le modernisme est le symbole d'un incontestable développement, ne vous empêche pas, chaque fois que cela vous est possible, de retourner au village pour retrouver avec une vie réellement communautaire le sens de la famille et la solidarité du groupe. Tant il est vrai que le développement de la Côte d'Ivoire serait incomplet et n'aurait guère de signification sans la conservation de votre culture propre, de votre identité.
- Le développement économique, la Côte d'Ivoire a su le conduire depuis son indépendance, de façon que je n'hésite pas à dire remarquable. En quelques années, une prospérité enviable a été assurée aux hommes et aux femmes de ce pays. Le territoire a été transformé, doté d'infrastructures, de moyens de liaisons, d'équipements. Mais ces progrès que vous devez au travail des Ivoiriens et à l'heureuse conduite des affaires du pays sur-le-plan national, ces progrès sont tributaires, quoi qu'on veuille, de l'environnement économique international. On l'a vu récemment : malgré la sagesse de votre politique et les atouts que vous avez su mettre dans votre jeu, la Côte d'Ivoire a dû affronter les contre-coups financiers de la détérioration des termes de l'échange. Vous savez qu'en la circonstance - et c'était bien normal - notre -concours vous était assuré et je me suis réjoui des bons résultats obtenus par l'action conjuguée de nos responsables et de nos experts.\
Il n'en reste pas moins, - les problèmes que nous venons d'évoquer ne font que le confirmer - que l'avènement d'un nouvel ordre économique mondial reste la condition indispensable pour le développement harmonieux de tous les continents et singulièrement des pays de l'Afrique. Quels espoirs pourriez-vous entretenir en effet si vous n'étiez pas en mesure de compter sur la solidarité des autres nations, et en premier lieu des nations les plus développées ? Or, dans la situation présente, un Etat comme la Côte d'Ivoire est directement atteint par les déséquilibres des relations économiques entre le Nord et le Sud. Tout se passe comme si quelques puissantes coalitions d'intérêts au Nord, dans les pays industrialisés, dominaient sans loi ni frein le marché des échanges, imposaient à leur guise les prix, faisaient et défaisaient (selon des lois qui ne sont même pas les lois reconnues par les économistes de cette théorie politique) les cours de vos matières premières au gré de la spéculation.
- Or, les matières premières représentent de loin la première source de revenus d'exportation du tiers monde. Et nombre de pays dépendent pour vivre de la vente d'un seul produit. Si son prix monte, ou du moins suit les coûts de production, la misère recule mais, s'il s'effondre, la misère triomphe. Pense-t-on assez à ces centaines de millions d'existences qui chaque jour dépendent des fantaisies de lointaines places boursières toujours dirigées par le seul objectif du profit immédiat ? Car rien n'est plus incertain que le prix d'une matière première ! En deux ans la tonne de cuivre est passée de 1300 livres à 500. Et le cacao, production locale importante, possède le triste record de l'instabilité : un jour à 2 dollars, il peut quelques mois après plonger jusqu'à 20 cents. Et de même le sucre, de même l'argent, dont on a pu suivre récemment les péripéties aux rebondissements rocambolesques mais aux conséquences dramatiques. Il en va ainsi du café, de toutes ces matières premières détenues par les pays dits en voie de développement et qui risquent de prendre le chemin inverse, si Nord et Sud ne se dotent pas des institutions, des concertations et ne prennent les décisions qu'imposent les circonstances.\
A cette instabilité des recettes correspond à l'évidence l'instabilité des dépenses. Ainsi en est-il de la contrainte énergétique à laquelle, je l'espère, vous échapperez à mesure que s'accroîtront les moyens et techniques dont vous disposez déjà, et auxquels nous apporterons - si vous le souhaitez - de plus en plus notre -concours. Les économies industrialisées ont subi fortement les effets de la hausse du prix du pétrole mais sait-on assez que pour le tiers monde la facture pétrolière a été multipliée par vingt entre 1970 et 1980, faute d'une négociation sur une évolution équitable du prix de l'énergie. L'économie mondiale a failli périr de coûts prévisibles et qu'elle n'avait cependant pas prévus.
- Dans ces conditions d'incertitude absolue, lorsqu'on ne connaît ni ses recettes ni ses dépenses, lorsqu'aux aléas climatiques s'ajoutent les irresponsables manoeuvres spéculatives que j'ai déjà dénoncées, comment peut-on gérer un budget ? Comment peut-on planifier ses investissements ? Comment peut-on dessiner l'avenir ? En un mot, comment peut-on se développer ?
- Certes, il ne s'agit pas de réclamer ni de mendier aux autres le droit de vivre. Tout commence à-partir de la volonté que l'on a soi-même d'assurer ce qu'il convient d'appeler les conditions de l'indépendance économique.
- Mais, ne peut-on affirmer, dans une perspective neuve, intelligente et cohérente, qu'un grand bénéficiaire d'un nouveau cours des choses serait aussi bien ce monde industriel qui aujourd'hui se dispute les échanges à un point tel que chacun déssormais ne dispose plus que d'une part parcimonieuse ? Alors qu'aujourd'hui des millions, des centaines de millions d'êtres humains - on calculera prochainement par milliards - ont parfaitement conscience d'être capables de devenir des producteurs éclairés et qualifiés, ils deviendraient en même temps les consommateurs désignés pour tous les progrès des sociétés en mouvement.\
Comme beaucoup de mes collègues africains j'ai encore en mémoire la condamnation ferme et sans appel que le président Houphouet-Boigny a portée lors de la dernière conférence des chefs d'Etat de France et d'Afrique en novembre 1981 à Paris sur ce système aberrant. Vous savez qu'à l'instigation de votre président, cette conférence a lancé ce que j'appellerai, ce que l'on appelle déjà "l'appel de Paris" qui fixe les principes devant guider l'instauration de l'ordre nouveau des échanges. Et vous connaissez l'attachement de la France aux accords de produits et au mécanisme original du STABEX, cette invention des pays de la Communauté économique européenne `CEE`, cet outil le plus symbolique de notre solidarité. Durant toute la durée de la convention de Lomé I, ce système a parfaitement fonctionné à la satisfaction générale. Depuis deux ans, les ressources ne paraissent pas suffisantes pour répondre aux demandes. Et pourtant le dernier conseil de Libreville a décidé des mesures qui garantissent la survie du mécanisme. La France, je vous le dis, mesdames et messieurs, fera tout ce qui est en son pouvoir pour défendre, dans un premier temps, le STABEX contre les attaques dont il est l'objet et, dans un deuxième temps pour que les progrès de la solidarité entre Lomé I et Lomé II continuent de façon telle que Lomé III soit, à son tour, à la hauteur des attentes : nous propserons une suite de mesures pour enrichir le STABEX et lui redonner l'ambition et l'efficacité qui ont fait jusqu'ici sa force.\
Les pays en développement qui ont souffert de déficit extérieur à la suite de mauvaises récoltes ou de l'effondrement des prix doivent pouvoir bénéficier de la facilité de financements compensatoires du Fonds Monétaire International. Les modalités de cette "facilité" ont été depuis quelques années améliorées et cet effort doit être poursuivi. La France, je le répète, oeuvrera dans ce sens, dans les trois domaines principaux : des accords de produits, du STABEX et des facilités compensatoires. Nombre d'autres mesures doivent être prises £ il nous faudra, notamment, bien réfléchir ensemble sur la réforme souhaitable des bourses de commerce, mais l'important, c'est d'abord de coordonner nos actions. Tout aménagement réaliste du STABEX dépend des progrès ou des échecs des accords de produits. A lui seul, le STABEX ne pourra jamais supporter le poids de l'instabilité mondiale. De même tout élargissement des facilités de financement s'inscrit dans une perspective plus large d'ajustement des balances de paiements, de la gestion de l'endettement du tiers monde. Nous savons, mesdames et messieurs, que le redressement demandé avec ardeur par tous nos pays, que réclame inlassablement votre président comme je le fais moi-même, ne sera pas obtenu facilement ni rapidement. Vous avez pu constater au-cours de ces derniers mois le retrait opéré dans le domaine des aides au développement. Comme je le rappelais hier soir, après la décision américaine de réduire considérablement l'apport des Etats-Unis d'Amérique à l'Agence Internationale pour le Développement de la Banque Mondiale de nombreux autres pays ont estimé devoir agir dans le même sens restrictif et dans la même proportion. Seuls quelques pays, les pays scandinaves, pour partie la Grande-Bretagne, et la France ont décidé de maintenir intégralement leur contribution, quitte à mettre en oeuvre un plan spécial qui nous permettrait en commun de préciser qu'elle en serait la destination.\
J'ai, à Ottawa, lors de la conférence du sommet des pays industrialisés de 1981, défini ce qu'étaient selon moi les axes principaux d'une politique de développement : les garanties à apporter aux cours des matières premières £ le développement des ressources énergétiques autres que le pétrole, pour tant de pays dont le sous-sol n'offre pas cette richesse £ le développement de l'aide agricole et, surtout par les moyens de la recherche technologique l'accès à l'autosuffisance alimentaire £ l'amorce d'un nouveau système monétaire international que l'on doit juger indispensable si l'on considère les effets de la décision unilatérale prise en 1971 qui a brisé l'équilibre des accords de Bretton Woods.
- J'ai répété à Cancun cet appel et je m'y suis trouvé très aisément à l'unisson du représentant de la Côte d'Ivoire. Nous étions parmi ceux qui, avec acharnement, tentaient de se faire entendre en faveur de ce que l'on appelle - ce vocable est entré maintenant dans le langage courant - les négociations globales au sein des Nations unies. En toutes circonstances ces thèmes ont été répétés et la France tire orgueil d'être, parmi les pays industrialisés, l'un de ceux sinon celui qui possède la vue la plus large sur les besoins et les aspirations de cette fin de siècle et du début du prochain millénaire.
- Je redirai tout ceci dans quelques jours, lors du sommet des pays industrialisés qui se tiendra dans mon pays, à Versailles, au début du mois de juin.
- J'aurai l'occasion, en préambule de cette conférence, de développer quelques lignes d'action en vue d'une relance nécessaire et concertée pour chercher d'autres voies que celle d'une récession permanente, le Nord et le Sud mettant en commun les moyens dont ils disposent.\
Mesdames et messieurs permettez-moi enfin de vous dire que la France, en participant aux efforts de l'Afrique, a pour objectifs essentiels la paix et la liberté. Je ne me berce pas de grands mots. J'essaie seulement de cerner avec autant de précision que possible les voies et les moyens qui nous permettent de vivre mieux, ou tout simplement de vivre. Je ferai tout ce qui sera en mon pouvoir, chaque fois qu'on le demandera à mon pays et dans la mesure de ses moyens, pour favoriser les conditions du dialogue pacifique sur tous les points chauds de la planète et - puisque je m'exprime à-partir d'Abidjan - spécialement sur l'ensemble du continent africain. J'ai débattu et je reprendrai cette conversation avec votre président, des solutions à apporter aux conflits brûlants du Sahara Occidental, de la Namibie, du Tchad, de tout ce qui se passe dans la Corne de l'Afrique, de tout ce qui peut, au-delà des continents africains, apparaître du Proche-Orient et plus loin de la guerre entre l'Irak et l'Iran. La contagion est telle qu'on peut faire le tour de la terre en trouvant partout des conflits qui s'aggravent. Au sujet du conflit le plus récent qui sollicite notre attention `conflit des Malouines`, je rappellerai la règle d'or, le point fixe du retour à la paix dans le respect du droit.\
Nous avons à parler beaucoup ensemble, pendant la durée de mon séjour en Côte d'Ivoire, comme je le ferai bientôt au Sénégal, des moyens qui devraient nous permettre de contribuer au retour à la paix, condition de la liberté et du progrès. Du Nord au Sud, de l'Est à l'Ouest, l'Afrique tout entière aspire au développement et au bien-être dont elle a combien besoin. Mais comment les Africains pourraient-ils consacrer toute leur énergie à ces gigantesques tâches s'ils ne disposaient pas des conditions que je viens d'évoquer, dont la première est la sécurité.
- Lorsqu'elle s'est engagée et sur la base des clauses qui l'engagent, la France sera présente parmi vous, étant bien entendu que vous êtes juges de l'opportunité. La France répondra à tout ce qui paraîtra devoir participer au maintien de l'équilibre de la paix en Afrique, chaque fois que par des accords mûrement délibérés nous serons parvenus à en définir les moyens. Je n'ignore pas l'inquiétude ici et là répandue par des opérations militaires, aujourd'hui ponctuelles et circonscrites mais qui peuvent esquisser d'inquiétants projets, projet de retarder l'indépendance inéluctable de la Namibie, projet de réveiller les passions et les fanatismes. Perspective en fin de compte, au travers de conflits considérés au départ comme locaux ou régionaux de préparer l'inévitable retour en force des conflits propres à l'Est et à l'Ouest, substitués de jour en jour aux problèmes du Nord et du Sud. Oui, mesdames et messieurs, nous éprouvons les mêms craintes que vous et en accord avec vous nous agirons pour favoriser la paix dans cette région du monde. C'est pourquoi nous participons activement sur le sujet de la Namibie aux travaux du groupe de contact oeuvrant pour l'aboutissement de la résolution 435 `des Nations unies`.
- Nos deux pays poursuivent le même idéal de paix et de solidarité, et je forme des voeux personnels pour que vous conduisiez au sein de cette assemblée vos travaux avec succès. La Côte d'Ivoire est le premier partenaire de la France en Afrique au sud du Sahara. Il en résulte certes des intérts réciproques. Mais c'est aussi et surtout, pour moi, la source d'une exceptionnelle relation d'amitié avec le peuple ivoirien, avec ses représentants, avec son président dont je n'ai pas besoin de souligner une fois de plus - cela est dans notre esprit comme cela est dans notre coeur - le rôle aux grandes dimensions historiques.
- Merci, mesdames et messieurs.\