22 octobre 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Eléments essentiels de l'intervention initiale de M. François Mitterrand, Président de la République, à la conférence Nord-Sud de Cancun au Mexique, jeudi 22 octobre 1981

Cette réunion n'aurait pas de signification si ses participants n'étaient pas convaincus - surtout par ces temps de crise - que tous les pays du monde sont interdépendants. Or, ils agissent, pour la plupart, comme s'ils ne l'étaient pas. Ce qui a réalisé des coalitions d'intérêts qui, par définition, changent avec l'intérêt. Certes, l'effort de concertation réalisé dans les institutions internationales, ou autour d'elles et, particulièrement, à l'ONU, a permis de réels progrès. Pourtant celle-ci constatait elle-même, dans sa résolution 34/138 du 8 février 1980, qu'en dépit de grands efforts, je cite, faits par de nombreux pays, il n'y a eu que des progrès limités £ c'est pourquoi, elle a invité l'ensemble de nos pays à engager entre eux, je cite encore des négociations globales afin d'assurer la restructuration des relations économiques internationales.
- C'est l'utilité d'une réunion comme celle-ci que de s'inscrire dans cette perspective, en nous fournissant l'occasion de comparer nos analyses et je l'espère, de préparer une réponse commune aux questions posées. Avant que ne s'engage notre débat, j'insisterai sur la méthode.\
Je crois que beaucoup sera fait si nous parvenons à nous entendre sur le sens des mots et le contenu des formules. 1 - Par exemple, qu'appelons-nous négociations globales ? Quels rôles respectifs joueront l'assemblée des Nations unies et institutions spécialisées ? Quel rôle entendons-nous jouer ici-même ? Les négociations globales supposent-elles la création de nouvelles institutions ?
- J'indique, dès maintenant, que mon sentiment est que rien ne sera possible si tout n'est pas mis sur la table, les besoins du Sud comme les besoins du Nord, les besoins du Nord comme les besoins du Sud. Les facteurs structurels permanents aussi bien que les circonstances conjoncturelles, mais qu'il serait imprudent de multiplier les instruments bureaucratiques et de fabriquer de nouveaux services avant d'avoir tiré des services existants - le cas échéant réformés - tout ce qu'ils peuvent donner.
- 2 - Autre exemple : Qu'appelle-t-on un programme énergétique ? Le gouvernement de la Banque mondiale a esquissé cinq solutions allant du plus au moins : filiale énergie, enveloppe financière, lignes de crédits, fonds fiduciaires restent classiques sans exclure toute autre mesure qui résulterait de nos imaginations ...
- J'exprimerai mon opinion : si l'on admet que nous sommes d'accord pour qu'un tel programme prenne forme, évitons d'en minimiser l'ampleur et les moyens, sans nous enfermer dans une formule préétablie : c'est en ce sens que nous nous prononcerons.\
3 - Troisième exemple : Faut-il choisir entre le développement spontané du commerce et le renforcement organisé de l'aide ? Ne vaut-il pas mieux tenter plutôt de les harmoniser afin de substituer au -rapport de forces, qui n'a rien su résoudre, une approche intelligente et concertée ?
- On n'aura parlé de rien, en-tout-cas, tant qu'on n'aura pas abordé franchement l'_état extraordinairement précaire dans lequel se trouvent les pays pauvres producteurs de matières premières - et parfois dépendants de la production d'une seule matière - soumis à la spéculation et non aux lois d'un marché libre, ballotée par les variations des taux de change et incapables, de ce fait, de s'engager dans des contrats durables de co-développement. Il nous semble, quant à nous, qu'il s'agit là d'un problème majeur.
- Ma conclusion sera que, pour la France, l'essentiel est de donner plus d'unité au monde qui est le nôtre dans le plus grand respect de ses diversités. Nous abordons cette conférence de Cancun avec le souci de contribuer à sa réussite, qui sera assurée si chacun ici apporte la plus grande ouverture d'esprit et la plus grande précision dans la définition des méthodes.\