13 juin 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Intervention de M. François Mitterrand, Président de la République, à la mi-temps de la finale de la coupe de France de football, Parc des Princes, samedi 13 juin 1981.

Monsieur le président,
- mesdames,
- messieurs,
- Je voudrais tout d'abord vous exprimer le plaisir que me procure ma présence ici ce soir. J'aime le sport, ce n'est un secret pour personne. Et j'apprécie particulièrement le football, sport d'équipe, sport spectaculaire, sport populaire. Je me réjouis donc d'assister à cette finale qui oppose deux clubs prestigieux du football français : - l'un, Bastia, dont il m'est arrivé de parler avec M. Zuccarelli, maire de cette ville, et dont je n'oublie pas la fameuse épopée européenne qui lui a permis, à la surprise générale, d'atteindre la finale de la coupe de l'UEFA, il y a trois ans. - L'autre, Saint-Etienne, j'allais dire "les verts", club prestigieux du football français, qu'il m'est arrivé de voir jouer plusieurs fois, y compris - c'était il n'y a pas si longtemps - sur le terrain de Geoffroy Guichard.
- Je tiens, à cette occasion, à vous féliciter, monsieur le président, vous et l'équipe dirigeante de votre fédération, pour votre action si dynamique qui vous a permis d'accroître considérablement vos effectifs et de rester ainsi la plus importante fédération unisport de France, malgré la concurrence acharnée de sports individuels très en vogue, comme le tennis ou le ski. En tant que dirigeants sportifs, vous n'êtes pas de ceux qui s'endorment sur leurs mandats ou qui se recroquevillent sur des schémas anciens : vous travaillez, vous aimez, vous formez des cadres et je m'en réjouis pour votre sport.\
Le sport, les activités physiques et sportives ne sont pas seulement un spectacle, loin de là, même si ce spectacle est souvent passionnant.
- Le sport, c'est à mes yeux un projet éducatif. Je souhaite que l'éducation physique et sportive devienne une dimension essentielle de notre éducation. On ne peut pas prendre de risques avec l'équilibre physiologique de nos enfants, nos adolescents, en leur ménageant si peu d'heures d'activité physique chaque semaine quand on les laisse souvent plus de 30 heures assis dans leurs classes.
- Le sport, c'est aussi un projet culturel. Nous avons à lutter contre les hiérarchies et les tabous. Notre culture est un tout et je m'émerveille personnellement des capacités d'expression et de création de tant de sportives et de sportifs qui savent nous séduire par la beauté de leurs gestes. Il y a là pour les hommes et les femmes de notre pays un vaste domaine d'épanouissement et d'émancipation à explorer. Je souhaite qu'il s'ouvre au plus grand nombre sans discrimination sociale.
- Le sport, c'est enfin un projet associatif : plus de 9 millions de Françaises et de Français licenciés dans près de 120000 clubs et associations sportives. Voilà le tissu qu'il nous faut, non seulement préserver, mais aussi renforcer. Et, de ce point de vue, que les choses soient bien claires. Je n'entends pas que tout ce qui fait que le sport est synonyme de joie, de jeux et de liberté soit étouffé par quelque organisation étatique que ce soit. J'entends bien au contraire, élargir les espaces de liberté du mouvement sportif. Mais cela ne peut se faire que dans le respect mutuel de l'indépendance du mouvement sportif et de la mission des pouvoirs publics.
- S'il doit y avoir une politique sportive, ambitieuse, généreuse, il ne saurait exister un sport politique. Chacun à sa place, nous ferons du bon travail pour le sport de notre pays.
- Je vous dis cela d'autant plus aisément à vous, monsieur le président, que je connais, pour l'avoir pratiqué, votre sens du dialogue et votre volonté d'agir pour le développement démocratique des activités physiques et sportives dans notre pays. Un grand projet pour le sport dans notre pays, telle est notre ambition. Nous la réaliserons avec l'ensemble des fédérations sportives qui, comme la vôtre, oeuvrent sans relâche depuis des années et en qui nous trouverons, j'en suis persuadé, des interlocuteurs désireux de tout faire, avec nous, pour que la France soit, enfin, une grande nation sportive.\