17 novembre 2016 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la fonction publique, à Lyon le 17 novembre 2016.


Madame la Ministre,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires, Elus,
Mesdames, Messieurs qui représentez ici l'Etat,
Monsieur le Préfet, qui nous accueillez ici, dans l'Hôtel de la Préfecture, que le Conseil départemental met à la disposition de l'Etat et qui symbolise ce que l'administration représente dans notre pays.
Je tenais à être présent aujourd'hui, à l'occasion des Ateliers « Ma fonction publique se réinvente », à l'initiative d'Annick GIRARDIN. J'ai souhaité que cette rencontre puisse associer aussi largement que possible les fonctionnaires qui représentent l'Etat, les collectivités territoriales, les hôpitaux, c'est-à-dire tout ce qui fait que nous sommes ensemble dans la République.
Il y a quelques semaines à peine, nous célébrions les 70 ans du statut de la fonction publique, qui avait été créé le 17 octobre 1946, sous l'autorité des chefs de Gouvernement de la Libération, c'est le Conseil national de la Résistance qui en avait eu l'initiative. Ce statut de la fonction publique qui est le cadre d'organisation et de fonctionnement des personnels de nos services publics.
Etre fonctionnaire, ce n'est pas un métier comme un autre. Quels que soient ici vos cadres d'emploi, vos administrations, votre place dans la hiérarchie, vous servez l'intérêt général et assurez quotidiennement la continuité du service public, à destination de tous, sans exception, usagers, citoyens, entreprises, associations, tout ce qui fait le lien dans la République.
Quand j'évoque les citoyens, je pense à nos compatriotes de tous les âges, de toutes les conditions, celles et ceux qui vivent dans les villes, les quartiers ou dans l'espace rural, à nos compatriotes ultramarins ou ceux qui vivent loin de France, qui sont pleinement citoyens français à l'étranger et qui veulent aussi avoir des fonctionnaires partout dans le monde qui puissent assurer la présence de l'Etat.
Etre fonctionnaire, c'est prendre toute sa part dans ce qui est le plus essentiel : la cohésion de la Nation. Etre fonctionnaire, c'est avoir le visage de la solidarité et de l'action.
La fonction publique est aussi au service de l'économie, c'est une dimension que l'on ne souligne pas suffisamment. Oui, c'est l'administration sous toutes ses formes qui permet également d'avoir des infrastructures de qualité, des réseaux de transport, de former par l'Education nationale, mais aussi par tous les lieux de formation professionnelle, d'offrir aussi des prestations de santé à travers nos hôpitaux, d'assurer la sécurité, de faire que notre économie puisse être soutenue, protégée et qu'elle puisse être également attractive.
La fonction publique ne doit jamais être opposée au secteur privé. La fonction publique permet au secteur privé, c'est-à-dire à de nombreuses activités professionnelles, d'être soutenues, accompagnées, aidées, à travers un certain nombre de dispositifs, souvent jugés trop lourds, mais qui, s'ils n'existaient pas, empêcheraient parfois l'initiative, la création d'emplois, l'investissement, l'exportation.
Etre fonctionnaire, c'est aussi être présent sur tous les territoires, notamment les plus fragiles et de permettre l'égalité d'accès aux services. Je sais ce que ressentent bon nombre de nos compatriotes, notamment dans les zones rurales : un sentiment d'abandon, de ne pas avoir accès aux services les plus essentiels, santé, parfois communication, transport. Ce sentiment peut parfois avoir comme conséquence une forme de rupture à l'égard de la République.
Je sais aussi combien il y a dans nos quartiers l'impression - qui, quelquefois est aussi utilisée, instrumentalisée - d'être relégué. Qui fait le lien, qui assure la continuité territoriale, qui fait en sorte que nous puissions être dans le même ensemble, qui permet à tous les territoires d'être solidaires entre eux ? C'est la fonction publique, dans toutes ses dimensions, fonction publique d'Etat, fonction publique territoriale, fonction publique hospitalière.
Alors, il y en a qui s'interrogent sur le statut de la fonction publique. Quel est son sens aujourd'hui ? Est-ce que c'est un privilège hérité de l'Histoire, celle de la Résistance, de la libération, de la reconstruction du pays, de l'affirmation de l'Etat ? Ou est-ce que c'est un cadre qui permet justement, s'il est adapté, s'il est continuellement modernisé, de faire en sorte que notre pays soit plus fort et que notre fonction publique puisse être pleinement efficace ?
Je réponds donc à cette question : oui, il faut un statut de la fonction publique. Oui, nous avons besoin de le faire évoluer. Il n'est d'ailleurs pas monolithique ou immuable, comme certains le prétendent. Différents gouvernements, depuis 30 ans, ont su l'adapter, il y a eu 255 modifications législatives. Il faut dire qu'en France, en termes de modifications législatives, nous sommes des champions et l'inflation ne nous fait pas peur. Mais cela signifie aussi que nous sommes toujours capables de corriger, de faire évoluer, de moderniser, de faire comprendre qu'il ne peut pas y avoir les mêmes services rendus de la même manière, à mesure que les technologies avancent et que nous avons aussi besoin d'ouvrir la fonction publique.
Il est légitime aussi de rappeler que le statut de la fonction publique, ce sont des droits et des devoirs pour les fonctionnaires.
Des droits et des devoirs. Il est légitime que les agents de la fonction publique, parce qu'ils remplissent des missions particulières ici vous savez de quoi il s'agit, je vois vos uniformes, je sais vos responsabilités, je connais les missions que vous accomplissez il est très important, dès lors que l'on sert l'intérêt général, de pouvoir avoir des garanties - des impératifs même - d'impartialité, d'indépendance de neutralité.
Le fonctionnaire est soumis à des obligations. Il doit être donc protégé des pressions politiques, économiques, voire religieuses. Parce que c'est cette indépendance-là, cette garantie-là qui nous permet d'être dans un Etat républicain et laïc. Encore faut-il que le statut s'adapte aux attentes nos concitoyens et aux besoins de l'économie comme de la société, aussi aux différentes générations. Parce que le service public assure finalement, de la petite enfance jusque au terme de l'existence, l'accompagnement de la vie et de la fin de vie. Il assure que chaque génération sera prise en compte.
Je l'ai dit, il était très important aussi qu'il y ait le rappel des devoirs. C'est le sens de la loi relative à la déontologie des fonctionnaires, qui a été votée au mois d'avril dernier, qui permet un meilleur encadrement des cumuls d'activité entre le public et le privé, reconnaît aussi les lanceurs d'alerte dans la fonction publique, quand il y a matière à mettre en cause un certain nombre de fonctionnements particulièrement graves. Cette loi renforce aussi la protection dont bénéficient les agents en cas d'agressions ou de procédures devant les juridictions.
Je veux un moment m'arrêter sur ce point. Il y a des violences quotidiennes que subissent les fonctionnaires, qu'elles soient verbales ou physiques. Je pense à la police, à la gendarmerie, mais il y a d'autres fonctionnaires qui sont victimes de comportements inacceptables. Tous les agents qui sont en contact avec la population, dans l'Education nationale comme dans les milieux hospitaliers, doivent avoir cette protection de la part de l'Etat, doivent avoir le soutien, doivent avoir l'assurance que chaque fois qu'ils sont eux-mêmes agressés, c'est l'Etat qui est lui-même attaqué.
C'est la raison pour laquelle, je ne tolérerai, avec le Gouvernement, aucun de ces actes et ils devront être je salue ici les représentants de la Justice soumis à la justice qui, en toute indépendance, fera son travail.
Il est très important que les fonctionnaires aient cette solidarité à leur endroit. Je sais que dans certains lieux, c'est difficile et qu'avec certaines personnes, il y a de plus en plus de difficultés. Nous devons donc assurer que la solidarité sera totale.
Le texte, dont je viens de parler, réaffirme les devoirs. Le premier, c'est le devoir d'exemplarité et de neutralité. Les fonctionnaires doivent être irréprochables. C'est la condition de leur efficacité et du lien de confiance avec les Français. Les principes de laïcité, de neutralité sont désormais inscrits dans le statut des fonctionnaires. Is doivent être pris en compte dans la formation professionnelle de tous les agents publics et ne souffrir d'aucun compromis. Parce que dans notre République, le fonctionnaire ne doit pas faire connaître ce qui est sa conviction ou sa croyance, dans l'exercice de ses missions.
Comme citoyen privé, bien sûr qu'il a le droit à la liberté religieuse comme à la liberté de conviction politique et qu'il peut avoir tous les rôles, mais dans l'accomplissement de sa mission, ce principe de neutralité et de laïcité doit être de nouveau affirmé.
La fonction publique doit également s'ouvrir aux jeunes. Bien sûr, il y a la voie des concours. J'avais été frappé qu'il y ait aussi peu d'apprentis dans la fonction publique, il y a quelques années. J'avais demandé que l'on m'en fasse le décompte, 700 apprentis dans la fonction publique de l'Etat. Pour l'année 2016, nous avons donc décidé de multiplier ce chiffre par dix. L'objectif que j'ai fixé pour 2017, c'est 10 000 apprentis. Je sais que les collectivités locales font également cet effort.
C'est très important pour que des jeunes qui n'ont pas eu forcément le parcours que l'on sait à travers les lycées d'enseignement général, que des jeunes de lycées professionnels, des centres d'apprentissage, puissent non seulement faire des stages dans l'administration, mais soient également être accueillis comme apprentis et ensuite éventuellement passent les concours. Mais il faut surtout utiliser l'expérience acquise dans la fonction publique pour entrer sur le marché du travail.
Depuis plusieurs années - je reviens à la fonction publique dans ce qu'elle a été amenée à consentir comme efforts et sacrifices - il a été demandé beaucoup aux fonctionnaires. Beaucoup dans les missions qui leur ont été confiées, dans les tâches que vous avez dû accomplir, mais aussi pour le redressement de nos comptes publics. Je n'ai pas voulu que ce soit par une diminution des effectifs, j'y reviendrai.
Je n'ai pas non plus voulu que l'on puisse ne pas demander à l'Etat de faire d'abord l'effort - alors qu'il était également demandé aux Français - pour réduire nos déficits et limiter notre dette. Parce que cela eut été mettre en cause notre souveraineté. Parce que si nous avions laissé faire - ce n'est pas simplement parce que l'Europe nous l'aurait rappelé - nous aurions été pris dans cette spirale que nous connaissons bien des politiques d'austérité et nous aurions dû demander encore davantage, toujours plus d'efforts, parce que nous aurions eu toujours plus de dette. Alors, il a été demandé pendant près de six ans aux fonctionnaires de ne pas voir leur point d'indice augmenté.
Ce gel je le sais a été difficile pour beaucoup. J'ai donc fait en sorte qu'il puisse être mis un terme à ce gel des rémunérations dans la fonction publique.
A la fin de l'année dernière, j'ai également voulu qu'un protocole puisse être établi, on l'appelle « Parcours Professionnel Carrière Rémunération ». Il marque une réelle avancée pour les agents en termes de traitements indiciaires par rapport aux rémunérations indemnitaires, pour être plus clair, de manière à améliorer les pensions de retraite. De faire en sorte aussi qu'il y ait une plus grande harmonisation dans les déroulements de carrière des agents des trois fonctions publiques pour une plus grande cohérence et une plus grande fluidité.
Je n'ai pas voulu qu'il puisse y ait une réduction des moyens de la fonction publique à l'égard de nos compatriotes. Dans le débat qui s'ouvre il y a des propositions pour diminuer de 300 000, parfois 400 000, 500 000 on ne sait plus où cela va s'arrêter le nombre des fonctionnaires, sans jamais d'ailleurs préciser où ces suppressions pourraient avoir lieu : dans les écoles, les hôpitaux, les commissariats, les armées, les services sociaux, l'université, la recherche, la justice ?
Chaque fois que l'on demande des précisions, tout est prioritaire. Comment comprendre alors qu'il faudrait diminuer de 300 000, 400 000, 500 000, 600 000 disent les plus audacieux ? Est-ce finalement de l'audace ? Car chacun sait qu'il y a cette contradiction qui ne vise pas simplement ceux qui s'expriment ainsi mais une bonne partie de nos compatriotes, voulant qu'il y ait toujours plus de service public et toujours moins de fonctionnaires, voire d'impôts.
En même temps et je crois que c'est une force dans notre pays , nous devons être capables d'avoir le meilleur système de santé, de faire tous les efforts en matière d'éducation parce que c'est l'avenir de notre pays qui se joue là, parce que l'éducation, c'est non seulement la formation, le savoir, la transmission, mais aussi la citoyenneté et donc la capacité à vivre ensemble qui se joue au moment de l'école.
La protection dont nous avons tant besoin face aux menaces qui existent, face aux actes que nous avons subis, ces attaques terroristes, face aux violences, face à ces agressions. Nous avons besoin de protection ! Le rôle de l'État est de garantir à chaque citoyen la sécurité.
Lorsque j'ai accédé à la présidence de la République en 2012, les effectifs de la fonction publique avaient beaucoup diminué dans l'éducation, dans la police, dans la gendarmerie et même dans les armées. J'avais pris des engagements pour l'Éducation nationale, pour la police et la Justice. J'ai tenu ces engagements, mais même au-delà car face aux enjeux extérieurs les guerres, les conflits, les interventions de la France, celles que j'ai eu à décider , j'ai été amené à réviser la loi de programmation militaire et à renforcer les moyens de notre défense et donc à cesser cette diminution d'effectifs qui existait dans les armées.
Pour la police, pour la gendarmerie, pour la Justice, face à ce qui était pour nous la première des obligations, protéger nos concitoyens, nous avons augmenté considérablement les effectifs de police et de gendarmerie : il y aura près de 9 000 en plus à la fin de mon mandat. Je sais que c'est long parce qu'il faut former aussi ces agents. Il en est de même pour l'Éducation nationale avec les 60 000 postes qui n'ont pas pu être mis tout de suite à disposition, parce qu'il faut faire les recrutements, parce qu'après il faut former. Mais j'ai considéré que face à la préparation de l'avenir et à la protection du présent, la fonction publique devait être non seulement préservée, mais mise au service des Français et que des priorités devaient être affirmées : éducation, sécurité, santé, emploi.
Je ne céderai pas là-dessus. Je ne participerai pas à cette surenchère qui consiste à dire que la fonction publique est une charge. Je ne dirai pas que nous pouvons augmenter le nombre de fonctionnaires, parce que nous avons aussi à faire des efforts d'efficacité, de modernité, de redéploiement partout où c'est possible et j'y reviendrai. Mais nous ne pouvons pas donner comme objectif à une Nation de diminuer le nombre des agents qui la servent et c'est la raison pour laquelle je souhaite que nous puissions faire évoluer notre fonction publique, car rien ne serait pire, au nom de la défense de ce qu'elle représente pour l'intérêt général, de la figer, de l'immobiliser. C'est pourquoi nous avons fait des réformes importantes.
En 2014, il y a eu cette loi qui a été votée pour regrouper les régions : 13 régions, ici Rhône-Alpes-Auvergne. Cela n'a pas été facile, chacun avait son idée d'abord de la carte, parce que cela changeait un certain nombre d'habitudes. Mais il était très important qu'on puisse donner à nos régions la force nécessaire pour investir, pour former, pour innover, pour développer l'emploi. Il a fallu aussi que l'administration de l'État s'adapte à cette nouvelle réalité, à cette nouvelle carte. Je sais ce que cela représentait pour beaucoup d'entre vous. C'était une nécessité que nous puissions être conformes, ce que j'avais décidé avec le gouvernement et le législateur, c'est-à-dire une nouvelle organisation territoriale et que la représentation de l'État dans les départements puisse être au mieux organisée compte tenu de ces nouvelles régions.
Je sais aussi ce qui a été demandé pour l'intercommunalité, pour les métropoles qui sont une chance pour nos territoires et pour notre économie, mais qui ne doivent pas être vécues pour les territoires ruraux comme une forme d'inégalité supplémentaire. Donc nous devons faire encore davantage dans les espaces ruraux et l'Etat doit être présent parce que c'est l'Etat qui assure la solidarité.
La seule question qui vaille est : comment rendre le meilleur service possible aux usagers ? C'était l'objet de ces journées que vous avez organisées, Madame la ministre et je vous remercie d'y avoir participé. Comment la fonction publique peut-elle garder ses principes, ceux que j'ai rappelés et en même temps, évoluer ? Comment même peut-elle faire mieux pour l'usager ? Comment pouvons-nous mener à bien des missions que nous n'avions pas jusqu'à présent, pu imaginer d'avoir à accomplir ? Comment pouvons-nous innover, associer davantage les fonctionnaires aux décisions, faire de la démocratie participative aussi un exemple dans nos fonctions publiques ?
C'est tout l'enjeu de ce que vous avez appelé « Réinventer la fonction publique ». D'abord, en prenant le tournant du numérique. Cela passe par l'ouverture de toutes les données dans une logique de transparence, mais aussi par la généralisation de la dématérialisation qui change tout, du télétravail, des espaces de travail en commun, de web conférences. Bref, tout ce qui se fait et qui change non seulement la vie des agents, mais aussi le rapport avec les usagers.
Ce que je veux, c'est que l'administration, les fonctions publiques, les missions d'intérêt général puissent être rendues avec toute l'efficacité mais aussi tout le rapport humain indispensable. Comment allier le numérique avec l'amélioration du service et l'idée qu'il y a aussi un visage qui peut à un moment représenter l'État ? Nous y sommes parvenus. Je veux féliciter vraiment tous les agents qui contribuent à cette innovation parce que cela change la donne.
Le deuxième enjeu, c'est d'être capable de réinventer la fonction publique par rapport au développement durable, à la lutte contre le réchauffement climatique, de développer une démarche écoresponsable, respectueuse de l'environnement. Je me félicite des idées qui sont sorties de vos journées, notamment la réduction du nombre de déplacements, le covoiturage, l'organisation différente du travail administratif à travers ces web conférences. Tout peut changer aussi à travers ces nouveaux usages des technologies.
Se réinventer, c'est favoriser la mobilité des fonctionnaires. Elle doit être choisie, facilitée et elle doit être dans toutes les fonctions publiques. Rien ne doit être figé. Un des grands enjeux, au-delà de savoir si on vote de bonnes lois ou des textes trop lourds, des réformes que l'on peut accomplir, est de vérifier comment elles se traduisent véritablement pour le citoyen. Sinon c'est la parole publique, c'est l'autorité de l'État, c'est même l'intérêt général qui sont en cause.
Si ce que nous décidons, ce que le Parlement vote, prend trop de temps avant que cela se traduise pour les citoyens par un vrai changement, alors ils s'éloignent, ils s'isolent, ils en viennent à des idées dont on sait qu'elles peuvent être néfastes pour le monde et pour notre pays. L'idée de se renfermer, l'idée de penser qu'on peut faire tout seul, isolé du monde, que l'on n'a plus confiance, qu'on est abandonné, qu'on est oublié de tout, que rien ne se fait véritablement dans l'intérêt des citoyens.
Alors, si l'on veut éviter cette rupture qui ne serait pas une rupture à l'égard de dirigeants cela, ce ne serait rien , mais une rupture par rapport à la République cela, se serait beaucoup plus grave nous devons non seulement prendre des décisions, mais les traduire dans la vie concrète de nos concitoyens et c'est à vous qu'il revient de le faire.
Se réinventer, c'est aussi avoir une fonction publique qui soit à l'image de notre société, qui assure la diversité. D'abord, lutter contre les discriminations entre les femmes et les hommes, il y a encore beaucoup à faire. Faire en sorte que les personnes en situation de handicap puissent être présentes dans notre fonction publique davantage qu'aujourd'hui. Que tous nos quartiers, que toutes nos villes puissent avoir aussi pour leurs habitants la possibilité d'accéder à la fonction publique, ce qui exige une véritable politique des ressources humaines. Nous avons beaucoup à apprendre là-dessus. L'État est le plus gros employeur : la fonction publique, ce sont 5 millions de personnes quand on ajoute hôpitaux, collectivités locales et État. Alors cela doit être, pour ces employeurs-là, une très grande responsabilité.
Beaucoup ont parlé des conditions de travail, du bien-être au travail, de la qualité du travail qui est en fait la qualité du service qui est rendu aux usagers, du dialogue social, mais aussi de cette capacité à pouvoir mettre de l'innovation partout et de la participation chaque fois qu'elle est nécessaire, éviter le modèle vertical qui suppose à chaque fois des contrôles, déconcentrer davantage, faire en sorte que les crédits puissent être délégués plus vite et donc dépensés plus rapidement, qu'on évite les superpositions. Bref, aller vite et faire bien. Là aussi, les technologies peuvent nous y aider mais c'est vous qui serez les acteurs principaux.
Mesdames et Messieurs,
Je voulais donc être devant vous pour rappeler ce que la fonction publique apporte à notre pays et ce que les principes qui la gouvernent comptent pour notre cohésion nationale. Je n'accepterai pas qu'on remette en cause le statut. Je le ferai évoluer autant qu'il est possible en fonction de nos besoins. Je n'accepterai pas que l'on diminue le nombre de fonctionnaires alors même qu'il y a encore tant de besoins à satisfaire, même s'il faudra redéployer autant qu'il est nécessaire en fonction des priorités.
Je n'accepterai pas qu'on mette en cause les fonctionnaires, comme s'ils étaient un coût insupportable pour la Nation. Je ferai en sorte que nous puissions assurer une fonction publique moderne où les agents puissent être exemplaires dans les missions qu'ils exercent et c'est ainsi que nous pourrons rester ce que nous sommes, avec une fonction publique qui assure à la République sa cohésion et qui reste un repère pour les Français.
C'est parfois dans les épreuves que l'on mesure ce que représente notre fonction publique. Permettez-moi une fois encore de rappeler ce que j'ai ressenti comme témoignage de ce que vous représentez. J'ai vécu comme Président de la République, hélas, des catastrophes. J'ai vu aussi ce que peuvent représenter des attentats terribles, ceux qui ont eu lieu début de l'année 2015 puis ensuite au mois de novembre 2015, puis ensuite à Nice le 14 juillet. J'ai vu aussi d'autres événements particulièrement dramatiques.
Je pense aux victimes, je pense aux blessés, je pense à leurs familles, mais je pense aussi et c'est chaque fois cette évidence qui s'impose à la mobilisation de toute notre fonction publique dans ces moments-là, dans ces épreuves-là, à tous ces agents publics policiers, gendarmes, personnels hospitaliers, magistrats , tous ceux qui assurent les services essentiels. J'ai même vu des fonctionnaires en dehors de leur temps de service venir spontanément montrer leur engagement parce que ce qui caractérise un fonctionnaire, c'est l'engagement.
Je disais que ce n'est pas un métier comme les autres que d'être fonctionnaire, quelle que soit sa place, quel que soit son niveau dans la hiérarchie. C'est un engagement, un engagement au service de l'intérêt général, un engagement qui fait qu'on va au-delà de ses heures de travail, un engagement qui fait qu'on a une volonté de servir, servir son pays. Avec toujours cette passion de l'égalité, de faire en sorte que chacune, chacun et notamment les plus fragiles, les plus vulnérables puissent avoir accès aux prestations ou aux droits. Faire en sorte aussi que l'engagement puisse permettre à des citoyens qui en ont envie de créer une entreprise, développer l'emploi, agir pour le bien public, monter des associations, servir d'une autre façon l'intérêt général sans être pour autant membre de la fonction publique.
Il y a eu ces événements terribles et puis il y a l'action quotidienne, ce que vous accomplissez dans l'anonymat, dans la discrétion face à toutes les situations que vous pouvez connaître. Situations parfois heureuses quand il s'agit de créer, d'investir, d'innover et de faciliter l'éducation ou de soigner. Mais il y a aussi tout ce que vous devez faire pour apaiser des situations difficiles, accompagner les plus vulnérables, on l'a vu encore lorsqu'il s'est agi, par rapport aux réfugiés, de faire l'accueil qui était nécessaire si nous voulions éviter des campements qui était indignes, pour celles et ceux qui vivaient dans ces situations, indignes de la France. Je sais ce que vous avez été capables de faire aussi dans ces circonstances.
Je voulais donc vous témoigner, à l'occasion de ces journées, ma reconnaissance parce que vous assurez la vie de nos concitoyens au quotidien et parce que vous contribuez aussi à préparer leur avenir. Voilà pourquoi je souhaitais ici, au nom de la Nation toute entière, vous exprimer la reconnaissance des Français et des Françaises à l'égard de la fonction publique, à l'égard des fonctionnaires. Moi, je suis fier des fonctionnaires français.
Merci.