7 octobre 2016 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la réforme de la Justice, à Dijon le 7 octobre 2016.


Monsieur le garde des Sceaux,
Mesdames, messieurs les parlementaires et élus,
Monsieur le maire de Dijon,
Messieurs les chefs de cours,
Monsieur le directeur,
Madame,
Mesdames, messieurs,
Je suis très flatté d'être le premier Président de la République à venir ici, à l'Ecole nationale des greffes.
Il est vrai qu'elle n'est ouverte que depuis 1974, mon mérite est moins grand. Mais venir là où se forment les directeurs de greffe, les greffiers et les collaborateurs de la justice, c'est à la fois reconnaître votre mission, votre tâche et en même temps, vous exprimer notre gratitude par rapport au choix que vous avez fait de servir la justice, à la fois comme accueil des justiciables - parce que ce sera vous, les premiers visages que celles et ceux qui ont à rentrer dans un tribunal pour des raisons ou pour d'autres, ce sont vos visages qui vont être les premiers et vos paroles qui vont être les premières prononcées -, ensuite dans la technicité même de votre métier, qui fera que la procédure sera respectée et nous savons combien elle est exigeante.
Et en plus, nous avons voulu faire une réforme, la justice du 21ème siècle. Vous serez pleinement, vous dans vos fonctions tout au long du 21ème siècle, même si l'âge de la retraite ne sera pas repoussé pour autant, contrairement à certaines promesses qui vous sont faites, vous ne les entendez pas, mais vous allez être pleinement dans la justice du siècle qui s'ouvre et qui est un siècle où le besoin de justice est très grand.
La justice civile, il y a tant de règlements de conflits, il y a tant de litiges, il y a tant de situations personnelles, aussi bien sur le plan familial que sur le plan social ou même sur le plan des relations entre locataires et propriétaires. Donc vous êtes pleinement dans la vie.
Puis, il y a la justice pénale qui appelle là encore une vigilance particulière, puisque vous assistez les magistrats, juges d'instruction. Pour les juges qui ont à prononcer des peines et à assurer des condamnations et c'est le juge d'application des peines qui a cette fonction vous faites en sorte que tous les actes de procédures puissent être les plus conformes au droit pour ne pas être entachés. Donc votre rôle est très important.
Justice du 21ème siècle, parce que nous avons voulu la rendre plus accessible, c'est-à-dire plus simple, plus rapide mais surtout plus humaine. C'est essentiellement vos métiers, ce sont les greffiers qui vont assurer cette accessibilité de tous à la justice. Donner la bonne information, faire comprendre le droit, être attentif au bon déroulement des procédures, accompagner autant qu'il est possible, jusqu'au procès parfois et faire en sorte que la justice puisse être comprise. Car si elle n'est pas comprise, elle devient contestée et à ce moment-là, c'est un pilier du droit qui vient à être ébranlé.
Nous avons donc ensemble à faire que la justice soit à la fois une institution, elle l'est et j'aurai encore à être le garant de son indépendance et je l'exprimerai devant un syndicat de magistrats tout à l'heure. Mais la justice, c'est aussi un service public qui doit être efficace et qui doit être autant qu'il est possible moderne. Là encore, on ne peut pas prétendre être une justice du 21ème siècle si les moyens matériels ne sont pas accordés.
Est-ce que les greffiers doivent travailler avec les règles quand je dis les règles c'est à tous les sens du terme ou les méthodes d'hier ou d'avant-hier ? A l'évidence, la dématérialisation, l'informatisation vont considérablement changer et heureusement la justice, sans qu'elle perde son caractère serein pour les décisions qui sont rendues, mais incontestable pour le justiciable.
Donc vous allez être pleinement dans ces missions et il faut que vous soyez accompagnés vous aussi à travers les moyens qui sont mis à votre disposition. D'abord, c'est la formation et le rôle de l'école, une école donc créée en 1974 avec sûrement des perspectives d'effectifs qui n'étaient pas celles que nous connaissons aujourd'hui, j'allais dire tant mieux. Une école qui s'est donc élargie continuellement, commencée dans une caserne, si j'ai bien compris et qui aujourd'hui a eu un prolongement avec des bâtiments modernes inaugurés en 2011 c'est bien cela ? Ah 2007 j'avais vu la plaque de monsieur MERCIER, mais il était venu après peut-être. - Quelquefois un bâtiment est fait et on l'inaugure quelques années plus tard. Donc ce bâtiment est moderne, cette école est vaste et justement, elle peut faire face au défi qui est le sien, qui est le défi démographique.
Je devrai dire le défi budgétaire puisque pour assurer autant de recrutements et pour faire en sorte que vous puissiez être formés dans l'une des quatre écoles qui relèvent de la justice et que nous soutenons, avec les personnels qui s'y dévouent, avec aussi les enseignants. C'est bien que nous soyons dans une ville universitaire parce que les liens peuvent aussi être enrichis, car aucune école ne doit être fermée et aucune université ne doit considérer qu'elle n'a pas à prodiguer aussi son savoir au-delà de ses murs.
Donc il y a eu des effectifs très importants qui ont été dégagés, puisqu'entre 2012 et 2017 je suis très prudent 940 postes de greffiers et d'agents administratifs ont été créés, dont 362 pour le seul projet de loi de finances 2017, c'est-à-dire pour l'année prochaine. Mais déjà vous me dites « la promotion qui a commencé, c'est une promotion très importante, 355 élèves ».
J'étais il y a quelques mois avec monsieur le garde des Sceaux à Bordeaux pour l'Ecole nationale de la magistrature, jamais il n'y avait eu une promotion aussi importante, plus de 360 élèves qui y étaient accueillis, c'est considérable. Ce qui d'ailleurs renvoie aussi j'imagine à des problèmes de pédagogie, parce que ce n'est pas la même chose d'enseigner à une très large promotion, - y compris pour les stages qu'il faut trouver, - que de le faire à effectif réduit. Mais on ne va pas se plaindre, même si c'est une tradition française que de se plaindre.
C'était tellement mieux avant, quand il n'y avait que 100 greffiers qui étaient formés, tellement mieux avant, quand ils n'étaient pas au niveau qui est le vôtre, quand ils étaient finalement bac +2 et seulement bac +2, c'était la règle. Mais aujourd'hui il y a un investissement, le vôtre dans cette fonction-là qui va nécessairement avoir des conséquences budgétaires pour la suite, des revendications qui vont naître compte tenu de la qualification qui est exigée, du métier qui est exercé. Le garde des Sceaux s'inquiète
Jean-Jacques URVOAS, garde des Sceaux : Pas quand il est à côté du Président
LE PRESIDENT : Non, il sait qu'il sera suivi mais c'est vrai que le métier changeant, les qualifications vont être de plus en plus exigeantes. Donc nous devons être fiers d'avoir fait confiance à la justice et à ceux qui la servent. C'est-à-dire de faire que nous puissions former sans que le niveau ne baisse, toujours une grande inquiétude. On va ouvrir les effectifs, on va augmenter les places au concours, mon Dieu ! Et s'ils étaient moins bons qu'avant ? Ce sont souvent ceux qui ont bénéficié des démographies les plus limitées qui sont les plus attachés aux sélections d'hier. Alors que nous avons absolument besoin d'avoir des générations nouvelles qui soient diverses autant qu'il est possible et même avec des cheminements qui peuvent ne pas être linéaires parce qu'il est bon que les greffiers, les directeurs de greffe puissent avoir eu aussi leur propre expérience de la vie.
D'où l'importance que nous attachons également à la formation continue et je sais qu'ici, elle est également dispensée parce qu'aussi ce mtier changeant, il est très important que les greffiers, directeurs de greffe puissent être accompagnés, suivis et qualifiés pour leur nouvelle mission.
Nous allons continuer cet effort budgétaire autant qu'il nous sera possible de diriger ce pays. Nous ne pouvons pas dire que la justice doit avoir les moyens pour faire face à toutes les missions et en même temps ne pas lui accorder à travers des ressources toujours insuffisantes.
Mais le garde des Sceaux a réussi à négocier dans cette période le meilleur budget qu'il était possible de mémoire humaine de dégager pour la justice. Mais il faut dire et il le fait avec des mots particulièrement choisis que nous partions de loin ou on partait de bas, je ne sais pas ce qu'il faut dire et qu'il y a encore, on le sait, des tribunaux qui sont dans un état, disons qu'ils ne sont pas à la hauteur du patrimoine qui est le leur et qui ne mettent pas véritablement la modernité au premier plan de leur vitrine.
Mais nous avons besoin de donner cette confiance dans la justice, pas simplement cette indépendance, cette confiance et aussi cette technicité. Pour les justiciables c'est très important, savoir qu'ils vont pouvoir avoir une réponse rapide, une réponse pénale lorsqu'elle est nécessaire, un litige civil, social quand il est ouvert depuis trop longtemps et qu'il doit trouver son dénouement. Donc c'était très important qu'on puisse accorder à ces métiers, aux vôtres, à ces professions si utiles, les moyens indispensables.
Je suis très heureux de pouvoir être là, donc de dire aux élus de la région, la présidente est là, du département, de la ville qu'il va y avoir une Ecole nationale des greffes qui ne va cesser de prendre de l'importance et qui va jouer un rôle dans les années qui viennent. Car je n'imagine pas que cette progression des effectifs s'arrête, parce que nous aurons besoin d'avoir toujours autant et pendant encore une dizaine d'années des effectifs de ce niveau, compte tenu aussi des départs à la retraite qu'il ne faut pas oublier et qui affectent gravement un certain nombre de fonctionnements de tribunaux.
Voilà pourquoi je voulais vraiment être parmi vous, vous féliciter. J'imagine que tous ceux qui sont ici sortiront brillamment et retrouveront les tribunaux, là où ils ont pu commencer à avoir une première expérience à travers les stages, pour être pleinement au service des Français. Car si la justice est rendue au nom du peuple français, vous assurez cette mission de service public pour tous les Français et je voulais ici vous en exprimer ma reconnaissance.
Merci.