15 avril 2016 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les efforts gouvernementaux en faveur des entreprises et de l'emploi, à Venette le 15 avril 2016.


Madame la ministre,
Monsieur le président du Conseil départemental,
Mesdames, messieurs les parlementaires, élus,
Monsieur BURELLE,
Les membres du conseil d'administration, les personnels de ce centre de recherche ici à Venette.
J'avais plusieurs raisons de venir aujourd'hui. Premièrement, parce que c'est votre anniversaire. Non pas le vôtre au sens personnel monsieur BURELLE mais c'est l'anniversaire de votre groupe. Et il y a des âges que l'on atteint avec bonheur £ et pour la vie d'une entreprise, 70 ans c'est tout jeune.
Nous connaissons aussi les vicissitudes, les risques, les aléas et les efforts qu'il faut faire et que votre famille accomplit pour que l'entreprise se situe à la fois au niveau mondial et reste toujours dans l'esprit familial qui a été le sien.
Parmi les raisons que j'avais aussi de venir ici, c'était de saluer l'effort de recherche que vous avez engagé et qui permet à votre entreprise et d'ailleurs aussi à vos clients de développer une performance industrielle tout à fait remarquable, dans de nombreux secteurs mais notamment l'industrie automobile.
Vous avez aussi voulu, même si la réglementation vous y a incité, faire que la performance industrielle soit au service de l'environnement. C'était à la fois une contrainte et en même temps un pari - celui que vous avez réussi - faire que l'intelligence puisse utiliser ce que la raison devait conduire à décider au niveau mondial ou au niveau européen pour notre propre santé, pour en faire un atout de plus sur le plan industriel.
Je voulais aussi en venant saluer l'implantation que vous aviez décidée avec votre conseil d'administration, venir ici à Venette, près de Compiègne dans l'Oise. Vous aviez pressenti que la région allait s'agrandir car vous voyez tout, vous devinez tout, vous anticipez tout et vous saviez qu'il fallait donner à cette grande région une image, qui est d'ailleurs profondément la sienne, de développement industriel et de recherche exceptionnelle.
Et puis il y a cet investissement, avec ALPHATECH, qui représente 65 millions d'euros et qui vous permet et c'est l'ultime raison de ma présence ici d'accueillir plus de 600 salariés. Vous l'aviez confessé vous-même, ils sont tous en CDI sauf deux - je les rencontrerai tout à l'heure.
Vous avez créé plus de 200 emplois depuis 2014. Et je sais que vous avez encore des projets de développement.
Il est donc possible de conjuguer un haut niveau d'investissement, une recherche de très grande performance, un territoire qui ne fait pas forcément parti au départ au niveau mondial de ce que l'on choisit - et qui, pourtant, en a tous les atouts £ et en même temps de créer des emplois et des emplois durables.
L'ouverture de ce centre de recherche marque une nouvelle étape de l'histoire de votre entreprise, qui s'est caractérisée longtemps et vous l'avez rappelé par ce qu'on appelait à l'époque le tout-à-l'égout, l'assainissement, le ramassage des ordures et de déchets, aujourd'hui on appelle cela l'environnement. Cela représentait l'essentiel de vos activités - vous m'avez dit près de 50 % lorsque vous avez pris la tête de votre entreprise. Aujourd'hui c'est une activité qui demeure, mais qui n'en fait plus que 10 %. Ce serait un drame si ces 10 % signifiaient un déclin mais en réalité, votre entreprise a connu une expansion, un développement grâce à sa diversification et notamment dans l'automobile.
Aujourd'hui, vous avez des investissements partout dans le monde, vous avez multiplié les implantations à l'étranger tout en gardant les centres de recherche dans notre pays et je voulais ici vous en exprimer ma gratitude.
Votre société a depuis 15 ans plus que doublé ses effectifs : 25.000 personnes, quadruplé le nombre de ses usines : 120 usines dans 30 pays et 20 sites en France. Vous m'avez là-encore confié que vous faisiez le tour de tous vos sites, de toutes vos usines - à côté de quoi l'agenda du Président de la République est finalement une douce promenade. Je ne sais pas si vous disposez des mêmes moyens de transport, donc c'est dire l'investissement que vous devez faire avec votre famille. Vous savez avec votre frère, combien nous sommes présents chaque fois que je me déplace pour promouvoir l'industrie française. Il le fait au nom de l'entreprise et au nom des responsabilités qu'il a dans l'organisation patronale. Et je voulais là-aussi le remercier.
Vous avez donc très tôt perçu, car c'est cela le rôle du chef d'entreprise et de ceux qui l'accompagnent, que l'industrie automobile malgré toutes les difficultés qu'elle pouvait rencontrer, les développements qu'elle devait assumer, les concurrences qu'elle devait rencontrer, pouvait être un facteur de développement considérable pour votre entreprise PLASTIC OMNIUM. Vous l'avez fait dans l'idée que le respect de l'environnement et notamment la qualité de l'air était en réalité ce qui allait vous permettre de donner à l'industrie automobile des chances supplémentaires.
Depuis 2008, vous proposez aux constructeurs automobiles la solution, non : la meilleure solution. Celle qui assure un traitement efficace des rejets d'oxyde d'azote des moteurs diesel. Vous en avez parlé, l'avenir du diesel dépend beaucoup de vous, de cette capacité que vous aurez justement à démontrer qu'il n'y a pas de rejets d'oxyde d'azote et que la qualité de l'air n'est pas mise en cause. Vous avez des centaines de brevets et vous êtes l'une des trois entreprises qui, dans le monde, maîtrise cette technologie.
Pour garder cette capacité d'innovation, il va falloir et il a fallu investir. Investir beaucoup et investir encore. Sur la période 2014-2018, donc déjà entamée £ vous avez un programme de 1 milliard 700 millions d'euros d'investissement. Et là-aussi, je voulais souligner ce que représente pour notre pays cet effort d'investissement.
C'est vrai que vous ne demandez rien à l'Etat et je salue cette démarche. Mais en même temps l'Etat peut faire même ce qu'on ne lui a pas demandé. J'ai veillé notamment à ce que le crédit impôt recherche puisse être sanctuarisé, c'est-à-dire qu'il puisse être non seulement prolongé mais confirmé, conforté dans toutes ses modalités, même étendu £ parce que je sais ce que représente le crédit impôt recherche pour une entreprise comme la vôtre et pour notre industrie en général. C'est un avantage comparatif car ce dispositif n'existe nulle part sauf en France.
On me dit « oui mais en France, l'impôt sur les sociétés est plus élevé qu'ailleurs ». Nous faisons en sorte d'harmoniser notre fiscalité en Europe. Mais le crédit impôt recherche permet de donner aux entreprises bien sûr celles qui font l'effort d'innovation et de recherche des conditions financières, c'est-à-dire fiscales particulièrement avantageuses.
Nous avons aussi et vous l'avez souligné cet avantage : une main d'uvre de qualité, des chercheurs de très bon niveau et là encore, ils sont présents ici dans l'Oise, ici à Compiègne pour assurer la vie de leurs familles et accueillis dans les meilleures conditions avec des établissements universitaires, dont notamment un particulièrement réputé. C'est aussi cette capacité d'attractivité qui permet d'avoir ce niveau de la recherche, car ici il y a beaucoup de chercheurs qui sont finalement sur un marché mondial ou en tout cas sur un marché européen, et qui peuvent être un moment attirés par d'autres conditions. Il a fallu leur assurer et je remercie tous ceux qui y ont contribué le meilleur accueil, parce que c'est l'attractivité de la France qui est en cause. Il y a ici des talents étrangers puisque je crois savoir qu'il y a 28 nationalités qui sont représentées dans ce centre de recherche.
Notre avenir, c'est-à-dire la reconquête, la croissance passe par l'investissement et c'est la raison pour laquelle le gouvernement il y a un an presque exactement a lancé le sur-amortissement. C'est-à-dire de faire en sorte que les entreprises qui investissent puissent amortir plus vite et même mieux, de façon à ce que cela leur procure une baisse de l'impôt sur les sociétés et une stimulation pour leurs choix d'investissement.
Il y a toujours des entreprises qui ne savent pas si c'est le bon moment, s'il ne faut pas encore attendre. Ce sur-amortissement venait à expiration ce mois-ci et j'ai décidé de le prolonger un an de plus pour que nous puissions, avec la reprise ce qui s'est maintenant installée, avoir ce coup d'accélérateur pour l'investissement.
J'ai également voulu qu'à partir du 1er avril, les entreprises comme les vôtres, c'est-à-dire des grandes entreprises qui sont confrontées au marché international, puissent avoir le plein effet du pacte de responsabilité £ et donc qu'il puisse y avoir une baisse des cotisations pour les employeurs qui ont des salariés payés entre 1,6 et 3,5 fois le SMIC. Une baisse de près de 2 points des cotisations familiales remboursés intégralement par l'Etat, de façon à ce que il y ait là encore cette possibilité de recruter davantage - ce que vous avez fait.
Et puis il y a cette alliance pour l'industrie du futur que nous avons lancée et dans laquelle vous êtes partie prenante C'est une démarche originale puisqu'elle regroupe les grandes entreprises industrielles de notre pays, les fédérations professionnelles, les syndicats de salariés pour imaginer ce que va être l'industrie de demain et même anticiper pour qu'elle soit aussi l'industrie d'aujourd'hui. La Banque publique d'investissement, dont le succès est remarquable puisqu'elle a quasiment doublé ses interventions, consacre à ce projet d'alliance pour l'industrie du futur 8 milliards d'euros.
L'industrie du futur, pas besoin de la représenter dans des images ou dans de la virtualité, elle est ici, chez vous dans ce centre de recherche. J'y ai vu l'impression 3D, avec l'extrusion soufflage, avec ces robots particulièrement impressionnants et qui supposent une main d'uvre de très grande qualité. Et on voit que l'industrie du futur, ce n'est pas une industrie où il n'y aurait plus d'hommes et de femmes pour la servir. C'est aussi l'alliance entre l'opérateur, le technicien, l'ingénieur et la machine, le robot et le matériel particulièrement innovant pour fabriquer des produits de très haute qualité.
C'est sans doute parce qu'il y a eu l'ensemble de ces efforts, parce qu'il y a eu l'ensemble de ces politiques, parce qu'il y a eu aussi des entreprises qui n'ont pas attendu que l'on prenne telle ou telle décision mais qui se sont engagées parce que c'était leur vocation, c'était leur mission, c'était leur passion que nous pouvons avoir des résultats aujourd'hui qui nous permettent de dire que ça va mieux dans notre pays, même s'il y a encore beaucoup à faire. Mais si ça va mieux, c'est grâce à tous ceux qui ont par leur talent, par leur travail, par leur labeur, quelquefois par leur sacrifice permis que nous en soyons là.
Comment dire que ça va mieux : la croissance est repartie - 1,2 % l'année dernière, sans doute davantage encore cette année, mais nous ne devons pas nous satisfaire de ces niveaux-là. Votre entreprise d'ailleurs à des taux de croissance bien supérieurs. L'investissement repart. C'est la clé de tout. On a vu que les ventes de machines outils avait progressé dans les deux derniers trimestres de 2015 de plus de 6 %, que la fourniture des équipements industriels avait également progressé sur la même période de 5 %. C'est le signe qu'il se produit une nouvelle donne dans notre économie.
Et puis il y a les emplois. Ceux que vous avez créés font partie de ces 80.000 emplois nets qui ont été obtenus lors de l'année 2015. C'était la première fois depuis 6 ans qu'il y avait cette création nette d'emplois. Nous devons là-encore faire davantage et nous devons aussi dans le même temps améliorer notre déficit commercial - c'est le cas et pas simplement avec la baisse du prix du pétrole £ et rétablir nos comptes publics. Nous sommes à 3,5 % de la richesse nationale en 2015 et nous serons à moins de 3 en 2017.
Voilà ce qu'il est possible de dire et de faire. Mais l'Etat et vous le soulignez suffisamment les collectivités locales, les acteurs publics peuvent déployer les meilleures politiques, les meilleures intentions, prendre les meilleures mesures, tout dépend d'abord des acteurs économiques et sociaux, tout dépend des Français eux-mêmes. Ce sont eux qui ont la réponse.
Vous êtes l'exemple de cette alliance entre le familial et le mondial que l'on a souvent opposés en imaginant qu'aujourd'hui dans la globalisation, il n'était pas possible d'avoir des grandes entreprises qui puissent n'être la propriété que de capitaux familiaux £ et qu'il fallait sans doute ouvrir. Mais vous, vous avez voulu garder votre indépendance tout en faisant en sorte de mener la politique pour vous conduire à la taille mondiale. Entreprise familiale, entreprise mondiale.
La garantie pour nous d'avoir une entreprise familiale comme la vôtre, avec ce niveau d'équipement, c'est que nous savons que vous pouvez toujours être indépendant, que vous prenez vos décisions par rapport à vos intérêts mais aussi par rapport à l'intérêt de votre pays.
Je veux féliciter les chercheurs, les ingénieurs, les techniciens, les salariés. Je n'ai pas pu visiter l'ensemble des installations mais déjà ce que j'ai vu est impressionnant. Je vois des femmes, des hommes passionnés par leur métier, fiers de travailler dans l'industrie, dans leur entreprise et conscients qu'ils préparent l'avenir, parce que c'est ici que l'avenir dans un centre de recherche de cette qualité c'est ici que l'on invente les produits.
Tout à l'heure, nous en parlions avec monsieur BURELLE, il faut toujours penser à 20 ans. Pas à 1 an, pas à 5 ans : à 20 ans £ parce que ce qui compte ce n'est pas simplement de régler l'urgence ou même de porter des politiques dont on voit que les résultats mettent du temps, parfois trop de temps à venir. L'essentiel, c'est être capable de faire des choix aujourd'hui qui vont avoir des conséquences dans 10 ans ou dans 20 ans
Pour l'industrie automobile, quand il y a 15 ans vous avez fait ce choix, vous étiez convaincu qu'elle allait se transformer, que la taille des véhicules, que leur design, que les conditions de confort, que les conditions surtout liées à l'environnement allaient complètement bouleverser l'industrie automobile. Et pour nous au niveau de l'Etat et cela vaut aussi pour l'ensemble de ceux qui ont à prendre une décision pour les autres il faut anticiper, regarder ce que va être le monde et ce que peut faire la France.
Et quand je regarde le monde, je vois les puissances émergentes, je vois de nouveaux continents qui vont s'affirmer, je vois bien sûr les risques de concurrence, de compétition mais je vois aussi sur le plan écologique et environnemental avec le succès de la COP21 qui va se traduire dans les prochaines années -, des changements complets dans les modes de consommation, modes de transport. Je vois aussi ce que le numérique va produire, ce que les véhicules du futur vont être, ce que les villes de demain vont être. Je vois aussi ce que le travail va avoir comme évolution, comme transformation, et dans ce monde-là, la France a sa place. Elle a même une place qui est plus enviable que pour beaucoup de nos voisins, de nos partenaires ou de pays industrialisés.
Parce que nous avons une qualité de la recherche, nous avons une culture, une main d'uvre qui porte plus qu'une technicité, une façon de vivre. Nous avons des infrastructures, nous avons fait le choix aussi de l'économie de la connaissance £ et puis nous avons aussi une démographie qui finalement nous permet d'être toujours avec des générations qui se renouvellent et nous avons cette qualité française. Mais pour cela, il faut qu'il y ait cette alliance entre des dirigeants d'entreprise, des salariés et puis aussi des acteurs publics pour que nous n'ayons rien à nous demander les uns des autres, mais tout à faire ensemble et conscients de nos responsabilités, mais aussi de nos chances pour le développement de notre pays.
Merci à vous, merci pour cette visite.