25 février 2016 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations économiques entre la France et l'Argentine, à Buenos Aires le 25 février 2016.


Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les responsables d'entreprise,
Mesdames, Messieurs,
Je tenais presque à conclure ma visite, bien sûr trop courte, en recevant à déjeuner les chefs d'entreprises françaises installées depuis longtemps en Argentine. Je parle des entreprises françaises, mais aussi de celles qui veulent investir et qui cherchent avec des responsables d'entreprises argentines à nouer des alliances et des partenariats.
Je viens dans un contexte où le Président MACRI a voulu ouvrir une nouvelle page et donner à son pays une nouvelle image. Nous considérons que ces choix, qui relèvent du peuple argentin et des autorités de ce pays ami, doivent être accompagnés. C'est la raison pour laquelle nous voulons soutenir toutes les démarches de l'Argentine, notamment pour pouvoir accueillir davantage d'investissements venant de l'étranger, lever un certain nombre de contrôles qui pouvaient dissuader des initiatives et enfin que l'Argentine puisse accéder aux marchés de capitaux. Depuis plusieurs mois, nous faisons aussi en sorte, que puissent être trouvées des réponses, dans ce que l'on appelle le Club de Paris, de manière à ce que l'Argentine puisse être allégée quant au fardeau de ses dettes souveraines et puisse avoir la confiance des grandes institutions financières internationales.
Au cours de cette visite, nous avons établi, avec les ministres responsables et avec le Président MACRI, une feuille de route : une forme de partenariat économique renforcé. Nous ne partons pas de rien puisque nos échanges commerciaux atteignent deux milliards d'euros et que l'Argentine est notre troisième marché en Amérique latine. Nos exportations ont même progressé l'année dernière de plus de 50 % grâce, il est vrai, à la dynamique des secteurs aéronautique et pharmaceutique. Nous pouvons avoir des perspectives encore plus favorables surtout si l'on songe que vont s'ouvrir des discussions entre l'Union européenne et le Mercosur et qu'il y aura forcément des opportunités nouvelles, même s'il y aura des domaines qui seront particulièrement sensibles.
Pour la France, je l'ai indiqué, l'agriculture reste nécessairement un domaine où nous devons faire preuve de la plus grande vigilance.
Au-delà de ces échanges commerciaux, qui ont déjà leur dynamique propre, je veux saluer la chambre de commerce et d'industrie franco-argentine, l'une des plus anciennes au monde, qui a été capable d'accompagner la France et l'Argentine dans des mutations technologiques. Au départ, c'était l'industrie aéronautique qui était concernée et aujourd'hui nous sommes en train de discuter d'une coopération spatiale. Si nous voulons donner à la relation entre la France et l'Argentine un caractère scientifique, nous considérons que nous avons, avec nos établissements de recherche, avec nos universités, avec nos experts, une capacité à pouvoir mener ensemble l'innovation dans bon nombre de domaines y compris celui qui nous est forcé par le destin et par l'Histoire, je parle de la Conférence sur le climat et ce qu'elle va nécessiter comme nouveaux investissements.
Notre présence, je l'ai dit ici, est déjà significative. 200 entreprises françaises emploient 40.000 personnes et représentent une masse d'investissements de trois milliards d'euros. Je veux en saluer quelques-unes même si je me garderai bien d'être exhaustif.
Nous sommes présents dans l'agro-alimentaire, dans l'énergie, dans la production automobile et vous savez ce que représentent les marques comme DANONE,TOTAL, PEUGEOT et surtout CARREFOUR qui, ici, a une influence très grande dans les choix des consommateurs et est aussi l'un des premiers employeurs privés du pays.
Nous devons ouvrir de nouvelles pistes, j'ai évoqué les énergies renouvelables et d'une manière générale l'ensemble du développement durable. Ici, je suis accompagné par de nombreuses entreprises qui ont cette qualité d'avoir déjà anticipé par rapport aux enjeux climatiques et cette expérience d'avoir réussi en France, et ailleurs, à mettre en place toutes formes de centrales : solaires, éoliennes et même énergie marine. Je pense que cela peut être fait notamment avec le gouvernement argentin mais aussi avec les provinces et les différents Etats.
Le deuxième domaine, c'est celui des nouvelles technologies, nos PME et je remercie celles qui ont fait le déplacement avec moi. Nos petites et moyennes entreprises, c'est également vrai en Argentine, ont une capacité d'invention, d'imagination, de créativité. Nous voulons faire le pari de l'innovation, soutenir l'innovation par des crédits à l'exportation mais aussi par une volonté de donner à ces entreprises toutes leurs chances pour être les start-up d'aujourd'hui et surtout, finalement, les grandes entreprises de demain.
Le troisième domaine c'est celui de la santé. L'Argentine a développé une industrie pharmaceutique particulièrement puissante et reconnue, et dans le domaine des biotechnologies vous avez pris de l'avance. Nous avons ici plusieurs entreprises qui travaillent depuis longtemps en Argentine et qui peuvent, justement sur les maladies nosocomiales, sur d'autres risques ou d'autres maladies, être là encore parfaitement capables de répondre à vos sollicitations.
Enfin, il y a le domaine des transports et des infrastructures où nous pouvons agir pour suivre le plan Belgrano, un plan qui a été porté par les autorités pour le développement du nord du pays, avec une volonté d'insister sur les transports et nous avons de très belles entreprises de transport en France. Nous avons aussi, je l'ai évoqué, le spatial car nous pouvons faire toutes sortes de transports y compris les transports de satellites.
Je vais terminer mon propos sur les enjeux globaux. L'Argentine et la France sont membres du G20. D'ailleurs, le G20 va bientôt se réunir dans un contexte économique où la Chine connaît un ralentissement, un certain nombre de pays émergents également et où se reposent ces questions lancinantes de la croissance, de l'emploi. Nous devons prendre en compte ces nouveaux risques, ce qui menace le monde. Ce n'est plus une crise financière, une crise bancaire comme il y a quelques années, c'est finalement une crise de confiance en soi. Les risques géopolitiques pèsent sûrement, les ministres des Affaires étrangères pourraient les évoquer, les conflits, les guerres, le prix du pétrole qui en est d'ailleurs le reflet. Tout cela affaiblit les anticipations d'investissements et de consommation et nous empêche de nous projeter comme il conviendrait dans l'économie de demain alors même que nous avons les enjeux climatiques, les enjeux technologiques, les enjeux du numérique.
Ce que nous devons donc faire, Argentine et France, au cours de ce G20, c'est remettre l'économie mondiale sur ses fondements principaux. Il faut qu'il y ait des politiques de compétitivité, c'est nécessaire et il faut aussi qu'il y ait des politiques de demande. Lorsqu'un continent comme l'Asie peut connaître un ralentissement, d'ailleurs tout relatif, il convient à ce moment-là que d'autres zones, notamment l'Europe, les Etats-Unis et l'Amérique latine puissent redonner des stimulations à la croissance. Faut-il aussi que nous puissions lutter contre un certain nombre de dérives des marchés de capitaux, de la spéculation, de l'optimisation fiscale. Et c'est la raison pour laquelle nous appuyons la candidature de l'Argentine à l'OCDE, parce que nous avons besoin d'institutions comme celles-là qui permettent d'avoir de la transparence, qui permettent aussi d'agir contre un certain nombre de paradis fiscaux et de pouvoir également lutter contre tous les trafics, lesquels trafics peuvent également entretenir le terrorisme, il faut en être conscient.
Voilà pourquoi ce voyage était si important puisqu'il permettait de renouer après trop d'années où vous n'aviez pas vu un Président de la République française ici en Argentine. Mais c'était aussi très important de venir puisqu'une nouvelle administration s'installe, puisqu'un tournant est pris, puisqu'une page est en train de s'écrire. Il fallait que vous sachiez que la France était prête à écrire avec vous cette nouvelle page.
Merci.