21 octobre 2015 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations entre la France et le Mali, à Paris le 21 octobre 2015.
LE PRESIDENT :
Monsieur le Président de la République du Mali, cher Ibrahim,
Chère Madame KEÏTA,
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires, Elus,
Mesdames, Messieurs les chefs d'entreprise,
Mesdames, Messieurs les artistes et plus généralement les amis du Mali et de la France et cela fait déjà beaucoup de monde,
Je vous accueille, cher Président, avec grand plaisir à l'occasion de votre visite d'État qui, à bien des égards, est une visite exceptionnelle parce que vous êtes à la tête d'un pays ami de la France et parce que vous êtes vous-même un ami.
Au cours des années récentes, nos deux pays ont démontré qu'ils étaient liés par une fraternité, une fraternité d'armes. Je me souviens encore de ce 11 janvier 2013 lorsque le Président par intérim, Dioncounda TRAORÉ, m'a demandé d'intervenir. J'ai alors pris, au nom de la France, mes responsabilités et côte à côte, nos armées ont repoussé les terroristes.
J'ai en cet instant une pensée pour Damien BOITEUX. C'était le premier soldat à tomber pour la reconquête de l'intégrité du Mali. Au-delà de lui, je pense à tous ces militaires qui ont donné leur vie pour le Mali et pour la France. Je sais aussi que de nombreux soldats français ont été blessés, trois d'entre eux encore récemment meurtris dans leur chair. Ils ont sauté sur une mine et ils ont été très gravement blessés
Aujourd'hui, le travail de sécurité se poursuit grâce à l'opération Barkhane mais aussi grâce à l'armée malienne que nous formons avec nos partenaires européens. Mais le soutien que la France apporte au Mali n'est pas simplement militaire, il est aussi économique : plus de 300 millions d'euros ont été engagés pour soutenir de nombreux projets depuis 2013. Des hôpitaux, des lycées, des projets aussi concernant des villes et notamment la capitale, Bamako, ont été réalisés.
Notre soutien, il est politique et je veux saluer ici la signature de l'Accord de paix et de réconciliation et votre engagement personnel pour le faire respecter. Je veux aussi dire combien nous sommes reconnaissants à l'Algérie d'avoir permis, tout au long de ces dernières années, de porter ce projet de réconciliation et, au cours de ces derniers mois, d'avoir réussi à conclure ou faire conclure cet accord.
Vous pouvez être fier, Monsieur le Président. Pour la première fois depuis trois ans, les enfants de Kidal vont pouvoir retourner à l'école grâce au retour de l'administration malienne dans le Nord et grâce également à cet accord de réconciliation. Je salue ici aussi les représentants du Nord de votre pays.
La relation entre la France et le Mali est ancienne, profonde, j'allais dire historique. Comme souvent, c'est par la culture que beaucoup de Français connaissent votre pays, Monsieur le Président. Ali FARKA-TOURÉ, Boubacar TRAORÉ, Salif KEÏTA, Amadou et Mariam, je n'oublie pas Toumani DIABATÉ, autant d'artistes appréciés du public. La culture malienne, c'est aussi la littérature. Je pense à Amadou HAMPÂTÉ BÂ et plus récemment à Moussa KONATÉ. Je veux aussi souligner ce festival exceptionnel de photographie qui est organisé à Bamako et aussi souligner la place du cinéma, de la mode. Beaucoup d'artistes maliens sont présents avec nous ce soir et tenaient à l'être.
La créativité malienne repose sur un héritage, un passé millénaire avec un splendide patrimoine et notamment les manuscrits et les mausolées de Tombouctou. Je me souviens encore, nous étions avec la directrice générale de l'UNESCO, c'était quelques semaines après la libération du Nord-Mali et nous assistions à ce spectacle épouvantable de voir des textes sacrés, des lieux qui, jusqu'à présent, avaient été soigneusement entretenus tant ils participaient au patrimoine mondial de l'Humanité, d'un seul coup saccagés, détruits, déchirés, brûlés.
Alors, ce que les terroristes voulaient détruire, c'est ce que vous avez contribué tous ici à réhabiliter et notamment l'UNESCO que je veux saluer à travers Madame BOKOVA.
Mais le Mali a su surmonter l'épreuve de la guerre et connaître une croissance économique tout à fait impressionnante : plus de 5 % cette année après 7 % l'année dernière. Vous avez défini des priorités essentielles pour le Mali : le désenclavement, les infrastructures et l'accès des populations aux services de base je pense à l'eau et à l'électricité. L'électricité, c'est un projet aussi que nous voulons porter pour l'ensemble du continent africain.
La France a fait du Mali l'un des pays prioritaires de sa politique de développement. De nombreuses entreprises françaises travaillent au Mali. Je ne vais pas toutes les citer mais beaucoup sont représentées ici. Elles emploient et forment de nombreux Maliens. La France au Mali, ce sont à peu près 8 000 ressortissants français qui se dévouent et qui nous représentent au Mali. En deux ans, il y a eu plus de 2 000 de mes compatriotes qui se sont installés dans votre pays, signe de la confiance que nous avons voulu signifier à travers leur présence. Je veux, au-delà de leurs représentants, les remercier.
Je n'oublie pas non plus la contribution des Maliens à l'économie française. Il y a 70 000 Maliens qui vivent en France. Dans de nombreux secteurs, ils font preuve de dynamisme : je pense au bâtiment, à la restauration, à l'industrie. Nous accueillons aussi beaucoup d'étudiants. Ainsi, nous contribuons à la Francophonie ensemble et je salue ici la Secrétaire générale.
Parmi les Franco-Maliens, je ne pourrai pas citer tous ceux qui se sont illustrés soit par leur talent, soit par leur engagement, mais je veux en distinguer un plus particulièrement, Lassana BATHILY, qui a fait preuve d'un comportement exemplaire lors de l'attaque terroriste contre l'HYPER CASHER en janvier dernier. Il est ici ce soir et vous, Monsieur le Président, vous étiez aussi là le 11 janvier 2015 lors de la marche républicaine.
J'avais voulu que vous soyez à mes côtés, que nous soyons la main dans la main. Dans les photos qui restituent cette marche exceptionnelle où plus de 50 chefs d'État et de Gouvernement étaient venus manifester leur solidarité à l'égard de la France et leur attachement à la liberté, nous étions là tous les deux et nous ne pouvons pas nous détacher de l'autre.
Monsieur le Président, votre histoire personnelle symbolise les relations entre nos deux pays car vous en avez fait la révélation cet après-midi, vous étiez à l'Élysée à l'âge de 13 ans, beaucoup plus tôt que moi. Vous aviez été invité à un goûter par le Président René COTY qui
Ibrahim Boubacar KEÏTA : Madame COTY
LE PRESIDENT : Mieux encore, par Madame COTY que chacun ici connaît. Ce goûter qui était organisé l'était pour les meilleurs élèves qui s'étaient illustrés dans les établissements scolaires notamment dans votre pays, vous aviez été repéré, comme l'on dit. Je veux aussi saluer ce travail des enseignants qui contribuait justement à permettre la promotion.
Vous étiez venu ici et vous aviez découvert ce lieu. Je ne sais pas s'il a été déterminant pour votre carrière politique ensuite mais en tout cas, vous y revenez plusieurs décennies après. Et ce n'est plus pour goûter, c'est pour un dîner et ce n'est plus un jeune élève mais ce n'est pas non plus un vieux Président qui est là, c'est un sage Président, un Président aimé et qui contribue à ce que cette visite d'État puisse consacrer l'amitié entre le Mali et la France.
Vive le Mali, vive la France et vive l'amitié entre nos deux pays !