11 septembre 2015 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les efforts en faveur des zones rurales, à Saint-Aignan le 11 septembre 2015.


Madame, messieurs les ministres,
Mesdames, messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du Conseil régional,
Monsieur le président du Conseil départemental,
Mesdames, messieurs,
Et d'abord vous madame DELORD qui nous faites l'honneur de cette invitation ici pour le 35 ème anniversaire du Parc de Beauval. François BONNEAU avait beaucoup insisté pour que je vienne jusqu'ici en me disant que c'était le plus beau parc animalier de France. Je pensais qu'il le disait parce qu'il était le Président de la région Centre mais je le constate et je pense que c'est l'un des plus beaux parcs animaliers d'Europe. Et peut-être même du monde.
Alors il était tout à fait légitime que je vienne ici pour faire non seulement le constat de ce que vous avez déjà créé, mais découvrir ce que vous voulez encore faire. Vous m'avez présenté des oiseaux, j'ai cru un moment qu'ils allaient rester parmi nous £ dans ma vie politique j'en ai rencontrés beaucoup, mais ceux-là étaient peut-être les plus difficiles à convaincre et je n'avais pas les appâts nécessaires pour y parvenir.
Je voulais venir ici parce que c'est à la fois une aventure familiale, et un succès d'entreprise. Le Parc animalier de Beauval c'est aussi le témoignage de la vitalité économique de ce qu'on appelle nos territoires ruraux. Parce que ce sont plusieurs centaines d'emplois qui ont été créés ici et qui vont encore l'être demain, et je salue ici les personnels qui se dévouent pour le Parc de Beauval.
J'ai cru comprendre que c'était la passion qui vous avait guidée madame DELORD. Il faudrait d'ailleurs que j'ai une mention spéciale pour celui ou celle qui vous a offert les deux premiers oiseaux car sans ce cadeau, sans cette volonté de vous faire plaisir il n'y aurait pas aujourd'hui le Parc de Beauval.
C'était en 1970, c'était le début d'une collection, et avec 500 spécimens vous nous l'avez rappelé votre appartement parisien n'y suffisait plus. Alors vous êtes venu ici. Ce qui confirme qu'une fois encore le territoire rural offre des possibilités de développement, de création, d'investissement, que les centres urbains ne peuvent pas offrir. Même si sans doute pour des banquiers, il aurait été plus compréhensible d'imaginer un parc à quelques kilomètres de Paris, vous, vous aviez anticipé ce que voulait le public : avoir l'espace, et avoir la possibilité de découvrir ce qu'il ne pourrait jamais connaitre dans l'environnement urbain.
Vous avez commencé avec deux salariés, j'en ai rencontré un, et vous êtes aujourd'hui 500 en haute saison. Il y a 1 million de visiteurs qui viennent à Beauval, c'est-à-dire plus qu'à Chambord. Vous avez réussi Françoise DELORD à faire mieux que François 1er.
Ce succès, nous l'avons tous compris, est celui d'une famille, une famille unie et qui partage la même passion. Rodolphe, Delphine, Sophie, vous accompagnent et c'est ainsi que nous avons ici à Beauval, non seulement des oiseaux de toutes sortes mais des gorilles, des pandas pandas venus de Chine. Je sais que ça a été une démarche très longue et que pour aboutir elle a du être conclue au plus haut niveau de l'Etat chinois et de l'Etat français.
Depuis 2012, ces pandas sont parmi les vedettes de votre parc zoologique (passage inaudible). Non seulement pour les parcs zoologiques, mais aussi parce-que cette leçon vaut pour toutes les entreprises.
Il est possible de construire un site exemplaire, de créer des emplois, et de faire rayonner la France dans le monde tout en chavirant de bonheur un grand nombre de visiteurs. Les plus jeunes, comme les plus anciens.
J'ai fait mon étude à mesure que je faisais la visite. J'ai demandé à ceux qui venaient dans ce parc d'où ils étaient. Ils étaient de partout, de Paris, de Bretagne, du sud de la France, et même de Corrèze. Je trouve toujours un Corrézien, partout.
La réussite de Beauval c'est également la réussite d'un territoire et rien n'aurait été possible sans votre obstination, celle de Rodolphe aujourd'hui, mais sans les partenariats que vous avez pu nouer avec les élus. Les élus de la région, les élus du département, les élus des communes concernées, parce que les maires successifs ont toujours eu à cur comme les élus du département et de la région, d'avoir avec vous la plus grande compréhension.
Ce qui fait que vous avez aujourd'hui des sites hôteliers qui représentent 900 lits, et Saint-Aignan développe également une capacité de restauration qui conduit à faire consommer des produits locaux. C'est un ensemble d'activités économiques que vous avez su ainsi stimuler.
Vous avez annoncé, et j'y suis sensible, de nouveaux investissements. L'investissement ce n'est pas simplement dans des machines, dans des usines, c'est absolument indispensable £ l'investissement ce n'est pas simplement dans des véhicules que les agriculteurs peuvent utiliser pour leurs travaux £ l'investissement c'est aussi dans des sites touristiques. Et chaque année vous êtes amenés à consentir des financements importants pour proposer toujours de nouvelles attractions aux visiteurs.
J'ai bien entendu votre message sur la fiscalité et je sais que les services de l'Etat regardent ces propositions avec attention. Je peux vous comprendre car il vous faut dégager de la marge financière si vous voulez continuer à proposer pour demain, 2016, c'est tout près, les cétacés qui devront être présentés, et puis également les hippopotames, c'est en ce moment, j'ai visité les travaux. Il s'agit là de masses financières importantes qui doivent être mobilisées autant qu'il est possible au coût le plus faible en privilégiant l'autofinancement.
J'ai donc fait en sorte que dans le cadre des investissements que nous voulons stimuler, il puisse y avoir un certain nombre d'avantages fiscaux qui puissent valoir pour toutes les activités et donc aussi pour la vôtre.
Cette aventure, qui est une réussite, elle est, je l'ai dit, symbolique de ce que l'on peut faire dans les territoires ruraux. Depuis ce matin, j'ai visité 3 unités qui correspondent à ce que l'on fait de mieux dans des domaines très différents.
J'étais tôt dans la matinée au CEA près de Tours, et il s'agissait dans ce centre du Ripault, qu'ici certains connaissent, de faire la démonstration que, y compris dans un espace rural nous pouvions fabriquer des éléments qui servent à la force de dissuasion, c'est-à-dire à la bombe atomique. C'est dans un territoire rural qu'il y a des chercheurs, qu'il y a des ingénieurs, qu'il y a des techniciens qui parviennent, avec ce degré de précision indispensable, à concevoir - pas simplement d'ailleurs dans l'industrie militaire, mais également dans l'industrie civile - les technologies qui nous permettront d'être les meilleurs au monde.
Je suis ensuite allé visiter une entreprise, pas loin d'ici, qui fait en sorte de fabriquer des madeleines et pas simplement des madeleines, Saint-Michel - et vous connaissez bien ces produits. Ils ne servent pas à la consommation ici des animaux, j'ai compris que la pomme était l'outil indispensable si l'on voulait pouvoir séduire les animaux présentés - mais ces galettes, ces madeleines sont fabriquées avec du blé, avec du lait, avec des ufs qui viennent de France, nous devons absolument aussi démontrer que nous pouvons être les meilleurs et nous le sommes dans l'industrie agroalimentaire. C'est une filière d'excellence, là aussi, qui nous permet de dégager près de 10 milliards d'excédents.
Enfin je suis chez vous, ici dans ce parc qui réunit chaque année plus d'un million de visiteurs. C'est cet ensemble-là qui nous permet de confirmer que nos territoires ruraux ont de l'avenir. Je sais bien qu'il y a toujours des doutes, que beaucoup s'interrogent et se demandent s'il est possible de vivre comme avant. Non, nous ne vivrons pas comme avant, nous devons vivre comme nous allons en décider pour après. Nous devons faire que le présent puisse être non pas un sujet d'inquiétude ou de nostalgie mais un sujet d'espoir et de confiance. Si je suis aussi déterminé pour développer les territoires ruraux c'est que je pense qu'ils ont plus d'atouts, plus de chances que beaucoup d'autres territoires.
La première condition, si l'on veut que la ruralité puisse avoir un avenir, c'est de faire en sorte que l'agriculture française puisse avoir tous les soutiens et toutes les conditions de son développement.
Il n'y a pas de ruralité sans agriculture. Si nous nous privons de ce que les agriculteurs nous apportent à travers des produits, à travers eux des paysages, à travers de l'excellence, à travers leurs investissements, alors ce serait la première menace sur les territoires ruraux. C'est la raison pour laquelle, avec le ministre de l'Agriculture, le Premier ministre, nous nous sommes tellement engagés à travers cette crise qui a frappé toutes les productions, même si certaines sont plus touchées que d'autres : la filière porcine, le lait, pour que nous puissions, ici en France, alléger un certain nombre de frais financiers. Mieux concevoir les normes et surtout mieux les faire appliquer £ faire que nous puissions investir pour préparer là encore l'avenir £ faire une année blanche pour que ces agriculteurs puissent être soulagés alors même que les prix ne permettent pas de les rémunérer correctement £ et que à Bruxelles, là dans ces prochains jours, le ministre de l'Agriculture - et je l'appuierais autant que je le pourrai et notamment avec le rapport que nous avons établi avec l'Allemagne - pour que nous puissions avoir des prix d'intervention qui permettent d'assurer aux agriculteurs une rémunération et donc des revenus qui leur permettent de continuer à exploiter, à vivre, à investir.
La ruralité c'est aussi un territoire de modernité. D'ailleurs l'agriculture est un exemple de modernité. C'est dans l'agriculture que l'on en investit le plus. C'est là qu'il faut le plus de capitaux, le plus de machines, de bâtiments, de produits nouveaux, de méthanisation. Mais la ruralité c'est ce qui permet aussi, vous en avez ici fait la démonstration, de préparer la transition énergétique, écologique £ vous avez vous-même évoqué la méthanisation £ le numérique, car de plus en plus vos spectacles, vos présentations sont ou seront sur les sites et seront développés, non pas pour substituer les visites, ou substituer la technologie aux visites, au contraire pour que les visites soient encouragées. C'est donc sur les territoires ruraux que nous pouvons installer le plus d'entreprises dès lors que les technologies peuvent être mises à leur disposition, et c'est tout l'enjeu que nous devons faire pour le haut débit, le très haut débit, et le fait que nous puissions avoir une téléphonie mobile qui puisse être accessible à tous.
Face parfois à des sentiments que je connais, parce que j'ai moi-même une longue expérience dans un territoire rural, face à cette idée que ce serait à Paris que tout se déciderait, que les villes seraient toujours plus avantagées que les espaces ruraux. Je ne veux pas opposer les territoires entre eux, c'est le pire des réflexes de beaucoup £ Nous avons besoin de métropole £ nous avons besoin d'une capitale £ nous avons besoin de chefs-lieux de régions, de départements £ nous avons besoin de villes moyennes £ nous avons besoin de bourgs-centres £ nous avons besoin de communes qui se regroupent pour assurer des services, et c'est tout l'enjeu de l'intercommunalité. C'est la raison pour laquelle j'ai voulu faire la réforme territoriale pour que nous puissions avoir toutes les conditions pour que la proximité soit assurée, et en même temps que les projets puissent être financés, parce que pour apporter un soutien à un Parc comme celui de Beauval, il faut avoir des collectivités qui ont les moyens de le faire. Et elles le font.
Il faut alors une réforme territoriale, elle est là, il faut que les collectivités s'en emparent, elles le font. Il faut aussi des dotations et les élus sont inquiets. Le propre d'un élu c'est d'être toujours inquiet, après vous, vous étonnez que la population le soit aussi !!
Le rôle d'un élu, c'est de dire ce qui ne va pas, ça c'est le plus facile. Mais c'est aussi de dire ce que l'on peut faire. J'en connais qui à Paris sont pour diminuer toutes les dépenses mais qui arrivés, sur leur territoire, se demandent où est passé l'Etat. Il faut être cohérent et moi je veux que l'Etat soit présent. Parce que si l'Etat n'est pas là, qui pourra assurer le fonctionnement des écoles, qui pourra assurer l'accès à la santé, et les maisons de santé en sont une belle illustration, et je remercie les élus de s'y être investis. Qui pourra permettre qu'il y ait davantage de technologies ? Nous avons besoin de l'Etat et des collectivités locales, parce que si les collectivités locales n'apportent pas elles mêmes leur contribution, nous ne pouvons pas venir à ces résultats-là.
Je veille donc à ce que l'Etat puisse, malgré ces périodes de contrainte budgétaire, qui valent pour tous, que nous puissions assurer l'égalité d'accès aux services. Parce-que ce qui n'est pas supportable c'est quand on habite quelque part et qu'on ne puisse pas avoir les mêmes droits, les mêmes possibilités que ceux qui vivent ailleurs. On essaie toujours maintenant de regarder ce que le voisin a, parfois en pensant qu'il a toujours plus alors qu'il faut essayer de savoir ce que l'on peut faire soi-même pour élever le niveau d'activité de notre pays Nous avons le devoir d'assurer la solidarité territoriale. C'est-à-dire qu'il y a des territoires qui sont plus fragiles que d'autres et qui doivent être soutenus. Et puis il y a des territoires qui ont une prospérité économique et qui doivent comprendre qu'ils ne pourront pas la garder si c'est le désert autour d'eux. C'est tout l'enjeu de ce rapport entre les métropoles, les régions, les départements, les villes chef-lieu et le territoire rural. Chacun a besoin de l'autre. Le territoire rural ne pourra pas vivre s'il n'y a pas des villes dynamiques. La preuve, d'où viennent vos visiteurs ? Ils viennent de toutes les grandes villes de France comme de l'espace rural, et ce qu'ils veulent c'est avoir le même niveau de service, et c'est ça qui fait que pour l'espace rural, il y a un supplément à assurer.
Avant, c'est-à-dire il y a 20 ou 30 ans ce n'était pas un problème quand on n'avait pas le téléphone. On a connu cette période-là. Ce n'était pas un problème quand il n'y avait pas forcément tous les services qui venaient, mais aujourd'hui quand une entreprise s'installe dans un territoire rural, quand un particulier veut y vivre, , vous voulez avoir et vous avez le droit de l'exiger, les mêmes conditions d'accès aux nouvelles technologies, au service public, aux services les plus essentiels qui peuvent être d'ailleurs des services privés et je pense notamment aux services médicaux, aux services de santé, aux services également de recharge électrique parce que nous allons aussi avoir besoin d'avoir des véhicules électriques dans le cadre de la transition énergétique.
Je voulais à travers cette visite tout au long de la journée insister sur cette vitalité des territoires ruraux. S'il suffisait de donner quelques oiseaux à des citadins pour qu'ils viennent davantage investir dans nos départements,-je pense que nous allons envisager une grande volière pour arriver à ce résultat. Il y a aussi ce que nous devons faire pour appuyer vos investissements. C'est le contrat de plan entre l'Etat la région et ici il a été passé de manière satisfaisante. Cela a été un travail qui a pu mobiliser l'ensemble des élus, je veux féliciter aussi les préfets de s'y être engagés. L'Etat va mobiliser, plus de 360 millions d'euros et ce sont des crédits d'avenir. Je demande qu'ils soient le plus rapidement possible dépensés, car il n'y a pas pire constat que de regarder ensuite la consommation des crédits sur des contrats qui peuvent intéresser l'État et les collectivités, ou même des fonds européens. Utilisez les sommes qui sont prévues, et faites le vite.
C'est pour promouvoir les territoires ruraux que je présiderai lundi prochain un comité interministériel consacré à la ruralité. Ce sera à Vesoul, en Haute Saône, pour ceux qui ne connaissent pas encore très bien la géographie.
Nous réunirons ce comité interministériel pour annoncer de nouvelles décisions et pour donner cette confiance indispensable.
Nous avons besoin en effet, et votre parc nous permet d'y croire, d'audace parce qu'il en faut, y compris - je ne devrais pas donner cet encouragement pour quitter l'école quand on a une passion qui vaut tous les engagements. Mais quand on quitte l'école tôt, comme ça été votre cas Rodolphe, il faut se former continûment £ il faut apprendre encore davantage. C'est ce que vous avez fait £ ce qui fait que les banquiers vous redoutent £ que les élus vous craignent £ et que moi je n'avais pas pensé que ce serait un affrontement aussi difficile lorsque vous avez présenté vos dossiers parce que c'est très difficile de vous dire non.
Je pense que nous avons aussi besoin d'investissements, d'investissements partout, dans tous les domaines, dans le domaine culturel, et je pense à un département comme le vôtre, ici c'est une chance formidable que d'avoir ce patrimoine. J'évoquais Chambord mais je pourrais évoquer Blois, je pourrais évoquer tant de châteaux. Est-ce que nous prenons suffisamment conscience que ce sont des millions, des millions de touristes qui vont venir ?
Nous avons parlé de la Chine, l'ambassadeur de Chine était il y a peu de temps ici même. Je vais bientôt me rendre en Chine moi-même au début du mois de novembre pour préparer la conférence sur le climat.
J'ai reçu le Premier ministre chinois, qu'est-ce qu'il m'a dit ? : « préparez-vous en France, en Europe, nous allons être des centaines de millions à venir ». Vous avez d'ailleurs ici pris les devants puisque vous avez déjà un pavillon chinois. Nous allons avoir un tourisme qui va continuer d'augmenter. Mais attention, ce n'est pas une manne qui va se répandre parce que nous serions dans les plus beaux paysages. Ce qui est vrai, c'est que ça suppose des investissements, sinon les touristes viendront, mais ne s'arrêteront pas. C'est la raison pour laquelle il était si important de faire des investissements hôteliers.
C'est aussi un enjeu considérable pour l'agriculture, parce que l'agriculture doit montrer, à tous ces touristes la qualité de nos produits que nous pourrons exporter ensuite.
Alors je vous appelle à cette audace, à cette confiance, et à cette beauté £ parce que ce que vous avez fait ici madame et toute la famille DELORD c'est beau £ et parce que c'est beau, ça doit être entretenu, et vous le faites avec tendresse, avec affection, avec passion. , Mais notre pays, le monde ont aussi besoin de beauté. Ce que nous allons faire à la fin de l'année pour la conférence sur le climat - qui va se tenir à Paris - c'est de faire en sorte qu'il puisse y avoir encore un monde qui soit beau à regarder, et qui soit aussi beau à vivre. Merci