11 septembre 2015 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur le rôle du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives, à Monts le 11 septembre 2015.

Madame la Ministre, Monsieur le président du Conseil régional, Mesdames Messieurs les Parlementaires, mesdames Messieurs les élus, Madame le maire de Monts, Mesdames Messieurs salariés du CEA et plus particulièrement du centre, ici, du Ripault. J'avais entendu parler de vous, je savais l'excellence du travail qui est ici effectué. Je tenais donc à venir visiter ce centre et, au-delà du centre, à dire tout le respect, tout l'hommage que je porte aux salariés du CEA, devant son administrateur général et devant le directeur des applications militaires.
Le centre du Ripault, dans cette région Centre-Val-de-Loire, est lié depuis toujours à la défense de la France, puisque, il y a bien longtemps c'était LAVOISIER qui avait créé cette poudrerie en 1786, et d'une certaine façon, vous en êtes les héritiers.
Le site a joué également, et joue encore, un rôle essentiel dans la construction, l'amélioration, le perfectionnement, de notre dissuasion nucléaire, puisque c'est ici, dans ce centre, au début des années 60, qu'il y a eu le premier montage des armes nucléaires. Depuis, vous avez connu un certain nombre d'évolutions, et vous avez contribué, avec tous les centres du CEA, de la Direction des applications militaires, ce qu'on appelle la DAM, à améliorer sans cesse la mission qui vous a été confiée depuis 1958, c'est-à-dire être capable de donner à la France la force de dissuasion qui lui permet d'être protégée, de préserver son intégrité territoriale, et de jouer le rôle que vous savez dans le monde. C'est grâce à vous, grâce aux salariés du CEA, si la France peut être une puissance, une puissance non pas pour faire la guerre, mais une puissance pour empêcher la guerre, une puissance de paix, qui parfois doit utiliser les armes pour préserver la vie des êtres humains qui sont écrasés par des dictatures ou qui sont victimes de terrorisme.
Pour que la France puisse avoir une parole qui compte dans le monde, elle doit disposer d'une capacité militaire de haut niveau. Dans cette capacité militaire il y a l'arme nucléaire. Beaucoup s'interrogent, encore aujourd'hui, sur la pertinence de disposer d'une arme nucléaire, au moment où on parle, et heureusement, de lutte contre la prolifération nucléaire ou de désarmement. La France, d'ailleurs, participe à cet enjeu-là : de la lutte contre la prolifération nucléaire. Cela a été l'objet de l'accord avec l'Iran. La France, également, désarme progressivement, mais garde toujours la capacité de pouvoir être respectée et d'utiliser la dissuasion pour prévenir des conflits, empêcher la guerre, et surtout préserver son intégrité territoriale. Si nous sommes respectés, si nous sommes crédibles, c'est parce-que ce travail mené depuis des années, continument, a contribué, a permis d'améliorer notre capacité et notre disponibilité.
Il y a toujours des réflexions qui s'engagent au sein d'une grande maison comme le CEA, et dans le cadre de cette réflexion prospective, des hypothèses avaient été avancées pour un regroupement des activités, et le centre du Ripault ne figurait pas forcément dans toutes les hypothèses. L'annonce de ce plan avait conduit à s'interroger des élus, à juste raison, des représentants du personnel, sur l'avenir du centre de Monts, et il y avait eu une émotion. Une émotion parce qu'il pouvait être entendu que le centre du Ripault n'aurait pas nécessairement la pérennité à laquelle nous sommes attachés. Il y a donc eu un dialogue, il y a eu des mobilisations, il y a eu aussi un travail, et je veux le saluer, de vos représentants, des salariés, qui ont fait en sorte de montrer quelle était aujourd'hui la pertinence de ce centre. Comment il pouvait encore s'améliorer, comment il pouvait évoluer, et comment il pouvait rester un centre indispensable pour le CEA. J'ai donc décidé d'arrêter la réorganisation envisagée et de maintenir, de préserver, le centre du Ripault pour les prochaines années.
Je sais que votre administrateur général, Daniel VERWAERDE, et le directeur des applications militaires, vous ont confirmé, lors du Comité national, ce choix. Ce choix est irréversible. Une analyse sera conduite pour en tirer toutes les conséquences, à l'occasion de la prochaine loi de programmation militaire en 2019.
J'entends parfois dire qu'il y a encore des inquiétudes, ça fait partie de la culture française, l'inquiétude. Même quand on est rassuré on veut quand même regarder, percevoir, ce qui pourrait être une menace supplémentaire. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir, en revanche, il y a toujours une mobilisation, à poursuivre, parce que rien n'est jamais acquis, nulle part s'il n'y a pas l'investissement, humain, financier, s'il n'y a pas l'engagement, s'il n'y a pas la volonté, s'il n'y a pas cette envie, celle que vous partagez d'ailleurs, d'aller toujours plus loin pour être la meilleure entreprise possible pour remplir la mission.
Vous êtes au cur de l'indépendance nationale. J'évoquais cette responsabilité, et vous avez donc à cur de respecter les échéances et les objectifs fixés pour le nucléaire de défense, et je saluais, c'était au début de l'année, lorsque je présentais mes vux aux armées, ce qu'allait devenir la dissuasion, ce qu'elle devait encore faire pour être au plus haut niveau. J'ai parlé des expériences au laser Mégajoule, j'ai également voulu que nous puissions être dans l'installation Epure au niveau le plus élevé, mais les projets du CEA ne s'arrêtent pas à la simulation, il y a aussi le renouvellement des têtes nucléaires qui est un défi majeur. Ici, au Ripault, vous avez fabriqué, avec vos collègues du CESTA, les corps de rentrée et les éléments pyrotechniques des dernières têtes nucléaires. Ils m'ont été présentés à l'instant. Tout ne m'a pas été montré parce que j'étais suivi par des journalistes qui pouvaient éventuellement révéler des secrets, donc rien n'était vraiment activé, mais tout était admirable, et je pouvais comprendre, sans notice explicative, ce que vous pouviez faire, c'est-à-dire d'être capable justement de donner à l'arme sa capacité d'emploi, parce que c'est la condition. Vous avez aussi montré, à chaque étape, que nous pouvions réussir à maintenir, par notre volonté, par notre crédibilité, la force de dissuasion.
Le CEA est donc une entreprise vivante, intelligente au service de sa mission, mais qui participe également à la rénovation industrielle, au redressement productif que nous avons voulu engager pour notre pays.
Au CEA vous contribuez, non seulement à la réalisation des armements nucléaires français, réacteurs de propulsion nucléaire, mais vous participez également à l'expertise sur la prolifération nucléaire, et je voudrais insister là-dessus. J'évoquais l'accord avec l'Iran, et si nous avons pu avoir des informations, particulièrement fiables, pour mener à bien cette négociation - vous avez vu que, hier, le Congrès américain a approuvé l'accord, ce qui va avoir des conséquences importantes dans la région et éviter que l'Iran puisse accéder à l'arme nucléaire, mais si nous avons pu mener à bien cette négociation, et ne pas être tributaires des informations qui pouvaient nous être données, soit par les Iraniens, soit par nos alliés, et donc de déterminer nos choix en toute indépendance - c'est grâce à vous, c'est grâce à la capacité d'expertise du CEA.
De la même manière, vous nous apportez, par la recherche dans le domaine des technologies de l'énergie - ça m'a été également présenté - dans la recherche fondamentale, parce que le CEA a également cette responsabilité, et dans le soutien aux industriels, pour notamment la production du nucléaire civil, vous nous apportez des compétences qui sont indispensables. Et c'est la raison pour laquelle je voulais également visiter le laboratoire du projet Lavoisier qui, sous l'impulsion de la Région, avec la contribution de l'université, des entreprises de l'ensemble des bassins d'emplois les plus concernés, ce centre a été capable de porter des conventions avec des industriels pour préparer l'énergie de demain et notamment son stockage, stockage hydrogène en particulier, mais stockage aussi sur les piles à combustible avec PLASTIVALOIRE, très belle entreprise de la région, avec RAIGI, également implantée dans la région. Et c'est pourquoi la région était à ce point attachée au centre du Ripault, car s'il n'avait pas pu continuer son activité, s'il avait été altéré dans ses capacités, alors c'était toute l'industrie de la grande région qui aurait été finalement affaiblie, diminuée, c'eût été aussi, pour l'université, une difficulté à continuer un certain nombre de projets de recherche.
Alors vous ne devez pas vous arrêter en si bon chemin, vous devez continuer. Et, rencontrant tout à l'heure les responsables de vos syndicats, je leur ai dit quel était, maintenant, ce qui vous attendait - une perspective - car c'est toujours mieux de savoir où on va, et de pouvoir, à ce moment-là, s'engager en ayant confiance dans l'avenir. En même temps, ils m'ont dit, et c'était une phrase importante et qui vaut pour d'autres domaines, qu'ils voulaient construire avec l'entreprise, qu'ils voulaient participer pleinement à la vie de l'entreprise et vous, en étant vous-même convaincus, et c'est avec cet esprit-là, cet esprit de rassemblement, cet esprit où on essaye d'avoir le meilleur grâce à cette délibération collective, grâce à ce travail de dialogue, de concertation, que nous pouvons, et ça vaut bien au-delà du Ripault et bien au-delà du CEA, réussir ensemble.
Alors je voulais, au-delà des paroles qui étaient finalement une confirmation de ce que vous saviez déjà, mais peut-être, lorsque je m'exprime, ça a davantage encore de poids, finalement tout cela est derrière vous, et ce qui est devant vous c'est ce qui est attendu par le Président de la République, c'est-à-dire d'avoir, avec le CEA, le centre du Ripault et tous les sites du CEA, ce qui se fait de mieux en matière de recherche, en matière d'industrie, en matière de technologie, pour les secteurs de demain, et dans beaucoup de domaines.
Je visite beaucoup de sites industriels, et à chaque fois qu'il y a des progrès majeurs qui sont présentés, il y a toujours un ingénieur du CEA qui n'est pas loin, et qui dit « sans le CEA, il n'aurait pas été possible d'aller dans cette direction, pour l'hydrogène, pour le stockage de l'énergie, pour les énergies renouvelables », car vous faites aussi un travail considérable dans ce domaine, alors c'est de cette fierté-là que je voulais vous parler, cette fierté-là c'est celle que j'éprouve quand je vous vois, quand je visite un centre comme celui-là, quand je suis au CEA, donc vive le centre du Ripault, longtemps, vive la République, toujours, et vive la France.