7 mai 2015 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la réforme du collège, les nouveaux programmes scolaires et sur le numérique à l'école, à Paris le 7 mai 2015.

Mesdames les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Recteurs,
Mesdames, Messieurs les Elus,
Mesdames, Messieurs les Représentants de la Communauté éducative,
Chers collégiens,
Puisque je sais qu'il y en a, ici, plusieurs dizaines, puisque c'est pour eux-aussi que nous lançons ce plan numérique, après cette large concertation qui a été menée par la ministre et par ses services, pour que chacune, chacun puisse faire entendre à la fois ses espoirs, ses interrogations, ses propositions, et parfois ses inquiétudes, le Plan que nous allons présenter avec les membres du Gouvernement est un plan qui s'inscrit dans la refondation de l'école.
J'ai voulu que notre pays puisse avoir confiance dans son avenir, parce que c'est son premier devoir. J'ai voulu que l'école soit la priorité du Gouvernement, parce que c'est son obligation. Pour traduire ces deux exigences, faire que la jeunesse soit notre avenir, faire que l'Ecole soit le levier pour permettre justement la réussite, nous avons refondé l'Ecole. Parce que pendant tant d'années, il y avait eu une dégradation de moyens, une dévalorisation même de l'Ecole, et des interpellations qui avaient été adressées y compris aux enseignants. J'ai voulu que nous puissions engager d'une autre façon, avec une autre méthode et davantage de moyens, les façons de faire l'Ecole et donc de faire la réussite de notre pays.
La priorité a d'abord été donnée au premier degré, là, où s'acquièrent les apprentissages fondamentaux, avec le rétablissement d'une cinquième matinée de cours à l'école. Ce fut la réforme des rythmes scolaires. On en avait beaucoup entendu parler ! Cela a été long à mettre en uvre mais aujourd'hui, qui, sérieusement pourrait remettre en cause ce qui a été engagé ? Faire que nous ayons autant de jours d'école que nos voisins. Alors que jusqu'à présent, nos enfants ne bénéficiaient -si je puis dire- que de 144 journées, et ailleurs c'était plus de 180. Nous avons aussi voulu sanctuariser, c'est-à-dire préserver l'Education nationale des contraintes budgétaires que nous avions pu rencontrer et des moyens ont même été dégagés pour que l'Education prioritaire, celle qui s'adresse justement aux territoires les plus fragiles, aux familles les moins favorisées, pour qu'il puisse y avoir davantage de ressources pour celles et ceux qui en ont le plus besoin. Nous avons également voulu scolariser davantage d'élèves de moins de trois ans.
Nous avons rétabli la formation des maîtres, et recruté 30.000 enseignants depuis 2012. Le sens de cet investissement éducatif est de donner au plus grand nombre d'élèves le plus grand nombre de chances pour réussir, sans jamais renoncer à l'excellence.
Il y en a qui pensent, dans notre pays ils en ont bien le droit que lorsqu'on donne à tous, on donne moins à certains. C'est une vision fausse ! Ce n'est pas notre conception de l'égalité. On peut donner de l'excellence à tous. Il n'y a rien à craindre de pouvoir faire de notre démocratie un modèle de diffusion du savoir et de la connaissance. Nous voulons maintenant faire une réforme du collège c'est ce qu'engage la ministre de l'Education nationale pour nous inscrire dans ce même processus : permettre qu'il y ait plus de chances données à plus d'élèves en France.
Comment y parvenir ? D'abord en donnant davantage d'autonomie aux établissements. C'était demandé, c'était quelquefois craint, et je sais que cela peut susciter des réserves, mais lorsque l'on va dans un établissement j'étais aux Mureaux cet après-midi avec la ministre, dans un établissement qui est dans le réseau d'Education prioritaire ce que veut l'établissement, c'est de pouvoir disposer de ressources, de personnels, d'enseignants, mais aussi avoir une capacité de décision pour que la Communauté éducative puisse prendre les bonnes décisions. Cette autonomie n'est pas une mise en cause de ce que nous connaissons aujourd'hui ! C'est un acte de confiance envers les enseignants.
La réforme, également, introduit des heures de travail en petit groupe pour accompagner les élèves, pour utiliser leurs talents, leurs ressources par des pratiques différenciées. La réforme du collège donne plus de place aux langues vivantes. Tous les collégiens pourront commencer une première langue dès le cours préparatoire, et une seconde en 5ème. Il va donc y avoir 25 % de temps d'apprentissage des langues en plus au collège.
Il y en a qui s'inquiètent, il y a toujours des gens qui s'inquiètent, même de rien. C'est là qu'ils ont le plus d'inquiétude, c'est le rien, parce qu'ils voudraient conserver le rien. Ils imaginent que tout va changer. Non ! Ce qui va changer, c'est de donner davantage à tous les élèves. La diversité linguistique sera assurée sur tous les territoires. C'est-à-dire plus de langues proposées aussi bien pour la Langue vivante I que pour la Langue vivante II.
J'ai entendu un certain nombre, là-aussi, de peurs sur la langue allemande. Moi, je suis très attaché à l'amitié entre la France et l'Allemagne. Il ne peut pas y avoir de construction européenne, d'avancée de l'Europe s'il n'y a pas cette relation forte entre nos deux pays. Je veux donc qu'il y ait plus d'élèves Français qui apprennent l'Allemand, et aussi plus d'Allemands qui apprennent le Français. Pour y parvenir, nous allons avancer d'un an l'apprentissage de l'Allemand quand c'est la deuxième langue vivante, et nous allons donc augmenter le nombre de locuteurs Allemands.
Mais plus encore, une politique volontariste sera engagée pour promouvoir la langue allemande. Aujourd'hui, en primaire, 178.000 élèves sont initiés en Allemand. Nous ferons en sorte, en 2016, c'est-à-dire l'année prochaine, qu'il y en ait 200.000, en affectant davantage de professeurs d'école susceptibles d'enseigner l'Allemand et en faisant aussi recours à des intervenants extérieurs, que d'ailleurs la majorité précédente avait supprimés.
Au collège, ce seront environ 480.000 élèves qui apprennent désormais l'Allemand, ils seront 515.000 en 2016 grâce à une politique active d'ouverture de classes en Allemand Langue Vivante II. Pour y parvenir, nous allons créer davantage de postes de professeurs en Allemand et nous allons augmenter les recrutements dès la rentrée 2015. Il y en aura 515 contre 200 en 2010. Et pour vérifier ces objectifs - car je sais qu'il y a beaucoup de nos compatriotes qui sont attachés à la langue allemande, et pas simplement à nos frontières et qu'il y a aussi, chez nos amis allemands, une grande volonté d'avoir cet échange linguistique et qu'ils concerneront tout le territoire -, la promotion de l'Allemand en France sera assuré par un délégué ministériel qui rapprochera ce qui existe déjà l'Office pour la Jeunesse et l'Institut Goethe et travaillera aussi à promouvoir des jumelages des deux côtés du Rhin pour les écoles.
Par ailleurs, davantage d'élèves seront initiés aux langues anciennes et à l'Histoire précieuse de l'Antiquité. Car j'ai vu, là-aussi, des interrogations sur le Latin et le Grec. Je veux donc rassurer les parents, et même les élèves, tous ceux qui le souhaiteront pourront continuer à approfondir les langues latine et grecque, dès la 5ème, et pour le Grec, en 3ème, comme c'est le cas aujourd'hui pour à peu près un élève sur cinq. Ces enseignements seront accessibles à tous les collégiens qui le voudront sur tout le territoire.
Toute réforme éducative, je le sais, depuis que l'Ecole existe, suscite des débats. Ils sont légitimes parce qu'il s'agit de l'avenir, parce qu'il s'agit de nos enfants, parce qu'il s'agit de la transmission du savoir. Mais pour que ces débats aient un sens, ils doivent reposer sur des faits, sur des réalités et non sur des impressions, des sentiments et parfois des outrances. Là-aussi, pour apporter la preuve que cette réforme va avoir les moyens qui sont nécessaires pour sa mise en uvre, j'ai décidé qu'à la rentrée 2016, 4.000 postes seront créés pour le succès de cette réforme des collèges.
Reste une question : les programmes. Là-aussi, j'ai demandé qu'une large concertation puisse être ouverte par la ministre, puisque c'est une autorité indépendante, je le rappelle, composée de parlementaires, d'universitaires, d'enseignants, d'experts qui proposent les programmes, les nouveaux programmes. Ils seront donc soumis à la concertation, et notamment avec les enseignants.
Je serai très attentif au programme d'Histoire parce que d'une certaine façon, c'est ma responsabilité. C'est par l'Histoire que se forge une nation et son ouverture au monde. C'est en apprenant l'Histoire que les enfants de France mesurent ce qu'est le message de notre pays, quel est son destin et quelles sont nos valeurs. C'est le rôle de l'Ecole de rappeler les grands moments de notre passé, les grands personnages qui l'ont illustré, les uvres et les idées, les mouvements qui ont pu inspirer la Nation française, les heures glorieuses qui font notre fierté, les périodes douloureuses qui font nos débats. Tout doit être connu. Parce qu'on ne peut pas être sûr de ce que l'on est et être capable d'assurer son destin si l'on ne sait pas d'où l'on vient.
Pour être comprise, l'Histoire doit être enseignée par la chronologie. C'est la meilleure manière de donner à chacun des repères clairs. Cela vaut pour les faits comme pour les idées. Je sais que la ministre va associer à ce programme d'Histoire, un certain nombre d'auteurs, d'écrivains, d'historiens, pour que justement nous puissions avoir ce récit national qui s'accompagne toujours d'une explication du monde ! Parce que nous ne sommes pas fermés, nous ne sommes pas repliés. La France est un pays qui a toujours construit son message dans l'universalité. Nous pensons que nous avons des idées à donner au monde, et nous voulons aussi que notre Histoire soit comprise de tous pour être partagée par tous et pour qu'elle devienne notre mémoire commune.
Les programmes aussi devront être rendus intelligibles. Cela veut dire compris de tous : des enseignants forcément, mais aussi des parents, et je demande à la ministre d'y veiller. Mais dans ces programmes, pour ces programmes, nous allons mettre en uvre le Plan numérique. Nous sommes réunis, aujourd'hui, autour de cette ambition parce que le numérique est devenu aussi notre langue, notre mode de communication. Le numérique doit être une chance pour tous les élèves, une opportunité supplémentaire pour l'Ecole, dans sa tâche de transmission des savoirs. C'est un devoir pour la cohésion nationale car, à chaque révolution technologique, il y a toujours là aussi une crainte : la crainte pour certains de nos concitoyens d'être les perdants du changement, d'être oubliés, laissés-pour-compte. Nous devons donc nous assurer que les nouvelles technologies seront bien mises à la disposition de tous, de tous les territoires -des territoires urbains comme les territoires ruraux- que personne ne sera mis de côté pour cette grande aventure qui va nous concerner et surtout concerner nos enfants.
C'était le sens de la consultation qui a été conduite par la ministre de l'Education nationale avec un grand succès : 50.000 participations, des milliers de contributions, des contacts, des réunions. C'est la bonne méthode : associer le plus grand monde, partager les expériences, diffuser ce qui se fait déjà, anticiper sur ce qui pourrait être décidé.
Les témoignages recueillis ont montré comment le numérique pouvait développer de nouvelles pédagogies, de nouvelles pratiques, de nouveaux usages, plus individualisés, plus différenciés £ comment le numérique pouvait contribuer à lutter contre le décrochage, contre les inégalités £ comment il pouvait apporter des réponses adaptées pour les élèves en situation de handicap £ comment il pouvait ouvrir l'Ecole à ses partenaires, aux parents, aux intervenants extérieures, y compris même aux élus, parce que le monde numérique est un monde fondé sur le partage.
Les conclusions de la consultation sont claires. La première conclusion, c'est qu'il ne peut pas y avoir de diffusion du numérique s'il n'y a pas de formation des enseignants et des personnels. C'est un enjeu décisif si l'on veut que des équipements soient pleinement exploités. J'ai, l'expérience, dans les années 1980, de tant de plans Informatique qui ont été, un moment, diffusés. Comme j'ai été élu pendant un certain nombre d'années, dans des collectivités de différents niveaux, j'ai souvent visité des établissements à cette époque, et les placards étaient généralement remplis de matériels plus ou moins sophistiqués qui avaient été mis en place et qui n'avaient que rarement été utilisés. Argent gaspillé, espoir déçu, pédagogie abandonnée. Nous devons donc faire en sorte que, quelle que soit la modernité des outils, quelles que soient leurs performances, même leurs évolutions futures, les enseignants puissent être à même de pleinement les maîtriser, pleinement les utiliser. Ceci est la première conclusion.
Deuxième conclusion : les professeurs veulent avoir un accès simplifié à une offre complète de contenus numériques. C'est-à-dire qu'ils veulent pouvoir accéder à tout ce qui existe, qui peut être fourni par le ministère de l'Education, mais également par leurs collègues, ou par des éditeurs, par des entreprises, pour pouvoir utiliser ces ressources au mieux en fonction de leurs élèves, en fonction de leur discipline, en fonction même de leur pédagogie, et qui peut leur donner davantage de liberté pour assurer davantage d'égalité entre les élèves.
Puis, il y a une conclusion d'évidence : il faut apprendre, pas simplement l'utilisation de l'outil numérique ou des pédagogies qui peuvent être facilitées par le numérique £ il faut pouvoir diffuser une culture digitale et permettre que le numérique puisse être maîtrisé dans toutes les disciplines.
Enfin, il y a une dernière conclusion mais on aurait pu, celle-là, l'écrire avant même la consultation c'est que pour que le numérique puisse être véritablement une chance supplémentaire, il faut que chaque collégien puisse avoir lui-même les outils numériques à sa disposition partout sur le territoire.
Ce sont ces conclusions qui ont justifié le Plan numérique que je présente aujourd'hui. D'abord, il y aura un programme exceptionnel de formation des enseignants et des personnels, sur les trois prochaines années, 2016, 2017, 2018, pour qu'à travers tout le territoire, il puisse y avoir une culture commune du numérique au sein de l'Education nationale. Vous avez demandé de la cohérence, c'est la formation qui pourra y contribuer.
Pour la formation initiale, ce seront les Ecoles Supérieures du Professorat et de l'Education qui veilleront à ce que le numérique puisse être pleinement partie prenante de ce qu'un jeune professeur doit connaître de son métier. Il y aura, également, un effort exceptionnel pour la formation continue, pour des dizaines de milliers de professeurs du second degré, mais aussi pour les chefs d'établissement.
Ce Plan doit également permettre de créer des ressources pédagogiques, des contenus. A quoi servent une machine, une technologie, un objet connecté s'il n'y a pas un contenu, une création, un usage ? Des appels d'offres seront, donc, lancés, dès septembre 2015 pour que tout soit prêt pour la rentrée 2016. Cinq disciplines du collège seront couvertes en priorité : le Français, les Mathématiques, les Langues étrangères, l'Histoire-Géographie, et enfin les Sciences. Nous allons demander aux éditeurs et je sais qu'ils y sont prêts, et je salue ceux qui sont présents dans cette salle de pouvoir fournir toutes ces ressources pour la rentrée 2016. Ce qui aboutira à un vieux projet qui a été tant rêvé par tellement de ministres de l'Education nationale, c'est que le cartable puisse être allégé. On avait tellement entendu de revendications, justifiées, de la part des parents qui voyaient leurs enfants pliés sous la charge insupportable du cartable. C'est par l'outil numérique, qui n'est pas une magie, qui est simplement la possibilité d'avoir des livres numériques sur la tablette ou sur l'ordinateur, que nous aurons atteint cet objectif.
Des services innovants seront également créés pour apporter une gamme d'outils aux élèves, aux enseignants, pour les mettre dans un réseau social professionnel -je parle des enseignants- mais également aux parents qui pourront mieux suivre la scolarité de leurs enfants et échanger avec les personnels de l'établissement. Là-aussi, aux Mureaux, nous avons réuni les parents, nous leur avons demandé s'ils n'avaient pas peur de l'outil, s'ils ne craignaient pas d'être dépossédés, s'ils ne s'inquiétaient pas de ne pas être informés en temps réel de la situation de leur enfant, et c'est tout le contraire qu'ils nous ont dit : que grâce au numérique pour celles et ceux qui, bien sûr, en étaient équipés, c'était un moyen -je n'ose pas dire de contrôle ni de renseignement- permettant de suivre l'activité de l'élève, de rentrer en contact, en relation avec les enseignants, de pouvoir avoir, en temps immédiat, les notes qui pouvaient être attribuées. C'est donc pour les parents, un moyen d'être associés pleinement à la scolarité de leur enfant.
Nous allons créer une grande plate-forme qui assurera la diffusion et le partage de toutes les ressources entre tous les professeurs et tous les élèves £ qui contiendra tous les contenus, produits par les éditeurs scolaires mais également les entreprises innovantes, les enseignants eux-mêmes - car il y a beaucoup d'enseignants qui inventent, innovent, créent des ressources nouvelles -, que ce soit d'ailleurs des contenus payants, gratuits, libres ou sous la propriété de quelques groupes industriels, tout ce qui est disponible sera mis sur cette plate-forme. Elle sera facile d'utilisation et orientera les enseignants dans leur choix. Parce que le mot-clé, ici comme ailleurs, c'est la simplicité, tout doit être simple. Cette technologie doit donner de la rapidité et de la simplicité.
Nous investirons, l'Etat, davantage sur les contenus pédagogiques. Nous voulons aussi les mettre au service, non pas simplement de la France, mais de la francophonie. C'est-à-dire permettre que tout ce que nous allons créer, ici, dans notre pays, puisse être mis au service de tous les pays qui parlent le Français, de toutes les populations qui veulent se former en Français. Ce qui peut représenter d'ailleurs, à l'horizon 2050, près de 800 millions d'habitants.
Il y a aussi, chacun l'aura bien compris, à travers ce Plan numérique, une opportunité industrielle majeure pour nos entreprises qui, grâce à ce Plan, pourront accélérer encore leurs investissements dans la filière du numérique éducatif qui est un potentiel de croissance très important. J'ai l'ambition que la France puisse être leader dans ce qu'on appelle l'e-éducation, c'est-à-dire tout ce qui peut être production de contenus et même d'équipements, dès lors que nous avons cette volonté et cette ambition. Il s'agira de mobiliser les éditeurs, les programmateurs, les développeurs, les fabricants, les ingénieurs, mais aussi tous les acteurs publics pour qu'ils puissent eux aussi contribuer à cette innovation. Les moyens seront encore renforcés par le Fonds d'investissement de la Banque publique du même nom de 15 millions d'euros pour soutenir les entreprises innovantes en matière d'éducation.
Le numérique n'est pas simplement un outil, ce ne sont pas simplement des pédagogies, des contenus, c'est aussi une culture. Une culture, cela veut dire que chaque collégien doit être doté des moyens de comprendre ce qui se lit, ce qui se voit, sur les tablettes numériques ou sur les ordinateurs, d'en comprendre les enjeux en termes de citoyenneté, d'avoir aussi une bonne analyse de ce qu'est la programmation, comment se créer un certain nombre de contenus et de ressources. C'est cette compréhension, à la fois, de ce qu'est l'outil lui-même et de la manière avec laquelle on peut l'utiliser à son propre bénéfice que nous allons mettre dans le socle commun de connaissances, la programmation informatique.
A partir de la rentrée 2016, dès l'école primaire, tous les enfants seront éveillés au codage et à la culture digitale. Au collège, ces connaissances seront pleinement intégrées aux enseignements de la 6ème jusqu'en 3ème. Au lycée, dès la classe de Seconde, seront développés des cours d'informatique. La spécialité Informatique et Sciences du numérique, qui est aujourd'hui réservée à certains élèves de Terminale S sera généralisée à toutes les filières et étendue à la classe de 1ère sous la forme d'une option.
Pour mettre en uvre ces enseignements, il y a une condition, c'est celle de l'évidence : que les élèves, tous les élèves, tous les établissements puissent être équipés. Certaines collectivités j'en connais communes, départements, régions, ont déjà procédé à des investissements, parfois lourds et sans être aidés. Parce que ces collectivités avaient compris avant d'autres qu'en mettant à disposition des outils, des équipements du numérique, ils anticipaient, ces élus, sur ce qu'allait, un jour, décider l'Etat. Ce jour est venu. Je les félicite, d'abord, pour l'audace qui a été la leur, mais aujourd'hui, l'Etat doit aider les collectivités locales à faire ces choix.
C'est au collège que l'essentiel se joue. C'est pourquoi j'ai décidé que chaque euro qu'un Conseil départemental investira dans l'équipement des élèves, au collège, l'Etat mettra également un euro. Les départements et les équipes éducatives seront laissées entièrement libres de construire leur projet et de choisir les équipements, tablettes ou ordinateurs, et quels qu'en soient les fabricants. Il leur reviendra de les choisir au plus près des besoins des enseignants et conformément aussi au travail qui a pu être mené dans un certain nombre d'établissements. En 2016, une très grande majorité des élèves de 5ème pourront ainsi être équipés en France. En 2017, les élèves de 4ème, qui auront été dotés l'année précédente, pourront conserver leur matériel et une nouvelle génération de 5ème sera à son tour doté et ainsi de suite. C'est ainsi que nous pourrons atteindre l'objectif en 2018, j'espère, pas plus tard, de 100 % d'élèves en collège qui disposeront d'un outil numérique et qui pourront avoir dans leur établissement un équipement approprié.
Si certaines collectivités veulent démarrer seulement en 2017 allez savoir pourquoi ou en 2018, pour se donner le temps de la construction des projets avec des établissements scolaires, elles le pourront. Parce que l'offre de l'Etat restera valable pendant trois ans. C'est un effort important, qu'une fois encore, je fais pour l'Ecole de la République, pour toutes les écoles, pour que nous puissions avoir toutes les conditions pour la réussite. C'est un milliard d'euros sur trois ans. Le tiers viendra du Programme d'investissement d'avenir qui sera d'ailleurs renouvelé l'année prochaine pour, précisément, pouvoir financer des investissements dans l'Education, l'Enseignement supérieur et la Recherche. Le reste, 650 millions, seront à la charge de l'Etat pour la formation des personnels, pour le développement des ressources pédagogiques et pour le financement des ordinateurs ou des tablettes acquis par les départements.
La mise en uvre du Plan commence dès aujourd'hui. Dès la rentrée 2015, ce sont 500 établissements expérimentaux qui seront connectés, des élèves qui seront équipés et des enseignants qui seront pleinement formés et mobilisés pour utiliser les nouvelles technologies et diffuser les nouvelles pédagogies (200 collèges, 300 écoles élémentaires). Ces établissements seront connus dès ce soir. Je souhaite qu'ils puissent justement accélérer encore le mouvement pour mieux préparer la généralisation à partir de 2016.
Mesdames et Messieurs, avec le Plan numérique, il ne s'agit pas d'une réforme de plus, mais d'une mutation profonde de notre système éducatif. Le numérique n'est pas simplement une nouvelle technologie. C'est une intelligence nouvelle qui doit être portée, transformée grâce aux enseignants et mise à la disposition des élèves. Le numérique est aussi un moyen d'associer les parents à la réussite de leurs enfants. Le numérique est également une manière de dire aux élèves que nous leur donnons toutes les conditions pour qu'ils puissent avoir le meilleur destin, que nous leur faisons confiance, que nous ne les coupons pas de la réalité qu'ils connaissent, du monde qu'ils fréquentent, comme si l'école pouvait être séparée de la vie réelle, comme s'il pouvait y avoir un numérique pour la vie personnelle et un lieu, l'école, où le numérique serait simplement cantonné, retenu, réservé pour certains.
La grandeur d'une nation se mesure à sa capacité à offrir le meilleur pour sa jeunesse. Aujourd'hui, c'est encore sur l'Education que repose ce progrès. C'est par l'Education que nous pouvons assurer l'égalité de tous, que nous pouvons transmettre les connaissances, donner de l'excellence à chacun, permettre des destins qui ne se seraient jamais accomplis sans elle. Le progrès, c'est l'Education £ ce n'est pas seulement l'Education. Ensuite, le progrès peut être économique, social, culturel, écologique, mais s'il n'y a pas l'Education, il ne peut pas y avoir le progrès pour tous.
Le numérique ne remplacera pas les enseignants, au contraire ! Il renforcera leur rôle et leur intervention. Il ne peut y avoir d'Education sans enseignant. Je le dis parce que certains le croient. C'est sans doute ce qu'ils imaginent en supprimant des postes pour l'Education nationale, qu'il pourrait être possible, y compris peut-être par le numérique, de donner des connaissances sans l'intervention des maîtres et des professeurs. C'est une illusion £ pire, c'est une menace qui pèse sur les fondements mêmes de notre Ecole. Rien ne peut se faire sans les enseignants. C'est avec les enseignants que le numérique prendra toute sa place.
Le numérique ne dispensera pas de l'effort ! Je le dis aux enfants. Le numérique rendra plus stimulant l'effort et l'Ecole plus attrayante, même si ce n'est pas son objet que simplement de pouvoir donner aux élèves un moment aussi d'exaltation ou de joie. Il y a une exaltation et une joie à apprendre ! C'est ce que le numérique peut faire ! Il ne dispensera pas du courage qu'il faut pour apprendre et pour connaître, mais il facilitera l'accès de beaucoup vers ce que l'on croit être le savoir fondamental, dès lors qu'il est à la portée de tous.
Le numérique ne creusera pas les inégalités £ au contraire, il les réduira puisqu'il les effacera, à condition que les outils soient mis à la disposition de tous les territoires et de tous les élèves, quelle que soit leur situation. C'est en ce sens que le Plan numérique est un plan pour l'égalité.
La France doit être en avance. C'est ce qu'elle recherche dans tous les domaines : être en avance. En avance, par rapport aux technologies, à l'innovation, en avance aussi par rapport aux pédagogies. Pour que nous soyons en avance, l'Etat doit prendre ses responsabilités £ il le fait aujourd'hui. Pour réussir, pour parvenir à l'objectif de donner à tous les enfants de France cet accès par le numérique à plus de savoirs, plus de connaissances, plus de citoyenneté, nous avons besoin du concours de tous : des enseignants, des personnels d'encadrement, des éditeurs scolaires, des entreprises numériques et des collectivités locales.
C'est un projet pour la jeunesse que nous venons de lancer aujourd'hui. Puisque c'est un projet pour la jeunesse, c'est une chance pour la France. Quand la France saisit sa chance, alors elle est en avance. Merci.