30 septembre 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les efforts en faveur de l'entreprise, à Paris le 30 septembre 2014.

Madame, Monsieur les ministres,
Monsieur le Président,
Monsieur le Lauréat,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Mesdames, Messieurs,
C'est la troisième fois que je remets le prix de l'Audace Créatrice et à chaque fois, c'est le même bonheur. D'abord, d'entendre M. DE LACHARRIERE faire la promotion de la France, de ses résultats, de sa politique, de ses taux d'intérêts. Et venant de lui, cela ne peut être qu'un jugement sincère, signé, authentifié. Mais, je ne veux pas aller plus loin dans le propos qu'il a tenu, parce que, à ce moment-là, je le compromettrais. Et tel n'est pas le but de l'exercice.
Néanmoins, c'est vrai que depuis maintenant plus de 2 ans, nos taux d'intérêts sont parmi les plus bas du monde, mais que cela ne peut pas autoriser une politique d'emprunt qui laisserait filer la dette publique au prétexte que la ressource serait bon marché. Ce qu'il nous faut, c'est de la croissance. Pas simplement des taux d'intérêts, pas simplement et c'est déjà beaucoup, un niveau de l'euro par rapport au dollar qui peut correspondre davantage à l'économie réelle. Ce dont nous avons besoin, c'est qu'il y ait davantage d'entreprises, davantage d'entrepreneurs, davantage d'investissements pour qu'il y ait davantage de croissance.
Ce rendez-vous de l'Audace Créatrice, il est fait pour cela. C'est-à-dire, saluer autrement que par des mots, même s'il ne faut jamais ignorer les mots d'amour qui vous sont adressés, mais ce qu'il faut, c'est montrer qu'il y a une reconnaissance, une distinction.
C'est très important dans la société française, qui se pose toujours beaucoup de questions sur son avenir, sur son destin.
C'est d'ailleurs un trait propre aux grands pays que de s'interroger sur le futur. Notamment, les grandes Nations qui ont une grande histoire, de savoir si elles auront encore un grand avenir.
Et une des façons d'y contribuer, à ce destin commun, c'est de valoriser et de considérer tous ceux et toutes celles qui appartiennent à la communauté nationale. Et en premier lieu, celles et ceux qui permettent la création de richesse. Sans oublier ceux et celles qui fabriquent les objets que nous consommons. Celles et ceux qui les distribuent, celles et ceux qui les valorisent. Nous avons besoin de tous les métiers, de toutes les forces de la France et des entrepreneurs.
Le Prix de l'Audace Créatrice, c'est aussi la reconnaissance du risque, c'est-à-dire les familles de personnes qui s'engagent au-delà même de leur patrimoine personnel pour fonder une entreprise, la reprendre, la diversifier et permettre qu'elle puisse, demain, être parmi les plus compétitives du monde et c'est possible.
Le Prix de l'Audace Créatrice, c'est de montrer qu'il y a des possibles, que rien n'est véritablement impossible, y compris votre performance sportive qui ne doit pas effacer votre performance industrielle. Car, je crois que ce qui compte, c'est d'avoir été capable de reprendre une entreprise familiale que votre père avait créée, spécialisée dans les robots, pour ensuite avoir le génie de penser que nous pouvions être les premiers pour les drones.
Sur le plan militaire, nous n'avons pas toujours été les premiers, je le dis pour que nous puissions maintenant être à la hauteur du défi.
Mais, pour les drones, tels que vous les avez conçus - c'est-à-dire des drones qui servent à la fois à la protection civile, mais aussi à la surveillance des installations -, donc, ces drones-là, que vous avez exposés dans les jardins de l'Elysée, - et vous avez sans doute recueilli des informations extrêmement précieuses -, ces drones-là, vous les avez non seulement fabriqués pour les besoins de notre économie nationale, mais vous les avez exportés là où il y avait des considérations de sûreté qui étaient parmi les plus exigeantes. Et je pense notamment à la Chine, puisque vous avez installé ces systèmes de sécurité et vous êtes quasiment un des premiers fournisseurs de ces matériels en Chine. Cela veut dire, que toutes les installations nucléaires chinoises et nous travaillons à ce que les entreprises françaises puissent être présentes pour les développer avec nos amis Chinois, c'est vous qui avez la charge de les surveiller.
Vous avez aussi fait en sorte de développer ce qu'était une grande PME, en entreprise de taille intermédiaire. Or, c'est précisément de cette mutation que l'économie française souffre, parce qu'elle est insuffisante. Parce que nous avons un très bon réseau de PME, nous avons d'excellentes entreprises du CAC 40 pour beaucoup représentées dans le jury, et en même temps, nous n'avons pas suffisamment d'entreprises de taille intermédiaire. Précisément, la vôtre s'inscrit dans ce modèle, puisque vous avez plus de 1000 salariés et vous avez aussi un chiffre d'affaires qui ne cesse de progresser.
Vous avez aussi été capable d'être une entreprise innovante, pas simplement sur les drones, venants après les robots, mais également maintenant sur les imprimantes 3D, puisque vous avez repris une filiale, une entreprise et vous allez vous porter sur ce marché, marché là aussi très disputé, mais qui est essentiel et qui correspond aux 34 plans industriels que le ministre MACRON est maintenant en charge de faire appliquer avec les entreprises et on voit bien que l'imprimante 3D, que l'usine du futur, que les robots, que les drones, font partie de ce que peut être l'excellence française.
M. DE LACHARRIERE a évoqué aussi votre forme de patriotisme. C'est-à-dire d'avoir pensé que vous pouviez vendre, exporter, faire fabriquer quand c'était nécessaire à l'étranger, mais garder votre siège et l'essentiel de vos emplois, ici en France, notamment dans le Sud-Est. C'est un choix qui vous honore, mais c'est un choix qui permet de comprendre que la compétitivité française, elle est sur l'innovation, elle est aussi sur le coût du travail et que nous avons justement favorisé et l'innovation et la compétitivité sur les coûts eux-mêmes.
Vous êtes également une entreprise exemplaire, puisque vous avez pu avoir la confiance de vos partenaires et notamment de la BPI, que vous avez citée et qui participe à votre capital, ce qui permet de garder l'indépendance. L'indépendance, cela, c'est le mot clé. La France doit être ouverte, doit être dans le monde, doit être partout présente et en même temps, elle doit garder autant qu'il est possible des entreprises qui peuvent être indépendantes dans leurs choix et dans leurs décisions.
Cela vaut d'ailleurs pour aussi ce que nous avons à faire au plan international. Nous avons des alliances, nous avons des partenariats, nous sommes dans l'Europe, nous sommes dans l'OTAN et en même temps, nous gardons notre indépendance. C'est ce qui fait que la France peut croire en son avenir, car nous avons la capacité d'être indépendant.
Pour cela, il y a deux conditions. La première, c'est que nous devons consacrer sur le plan de notre défense, vous y contribuez aussi à travers les robots et les drones, nous devons garder une suffisance, ce qui veut dire des crédits militaires à un moment même où nous pourrions nous interroger sur des économies. La seconde condition de l'indépendance, c'est précisément la compétitivité. La compétitivité n'est pas simplement une chose, un concept pour les entreprises, la compétitivité, c'est la souveraineté de la France. Un pays qui n'est pas compétitif dans l'Europe, dans la zone euro, un pays qui n'est pas compétitif dans le monde ne peut plus exprimer sa voix comme il l'entend. C'est la raison pour laquelle j'ai voulu que nous ayons ces deux forces qui puissent être renforcées, confortées pour les années qui viennent £ à la fois notre outil militaire, notre capacité stratégique et en même temps, notre compétitivité industrielle.
A la suite du rapport GALLOIS -qui d'ailleurs, le rapport n'est pas là, mais M. GALLOIS lui l'est-, nous avons fait les choix en matière d'allégement du coût du travail, en matière de simplification. Il y a encore beaucoup à faire. J'entendais donc M. DE LACHARRIERE qui nous disait : « Nous devons remettre de la croissance ». Il y a des chiffres d'endettement en valeur absolue, mais il y a aussi des chiffres d'endettement en valeur relative. Il se trouve que pendant les 5 années qui ont précédées mon entrée en responsabilités, la dette publique a augmentée de 600 milliards. 600 milliards, nous sommes à 2 000 milliards. Donc, notre rôle, cela doit être de maitriser les déficits pour éviter que nous puissions encore augmenter le niveau absolu de la dette. Même si elle se finance à des taux d'intérêts très bas.
Mais, pour cela, il faut faire des économies, c'est ce que nous allons faire notamment en 2015 et cela a des conséquences £ cela a forcément des conséquences. Si vous n'entendez pas crier, c'est que nous ne faisons pas d'économies. Donc, vous voyez, vous entendez. Il n'y a pas de plan d'économies qui soit indolore, sinon cela aurait déjà été fait. Il ne faut jamais penser que les responsables politiques manquent d'intelligence, parfois de clairvoyance. Mais les économies forcément sont douloureuses. Il n'y a aucun secteur qui peut accepter de voir un certain nombre de ses habitudes, parfois de ses financements, être remis en cause. Et ce que nous devons faire, c'est faire des économies de manière juste, de manière efficace, de manière innovante, parce que l'on peut changer les modes d'organisation. C'est la réforme territoriale.
Et puis, en même temps que nous faisons des économies, il nous faut améliorer aussi le fonctionnement de notre société. Et c'est tous ce que l'on appelle les réformes structurelles, que l'on doit appeler maintenant, si j'en crois M. DE LACHARRIERE, les réformes en profondeur. Il m'a dit qu'il fallait dire en profondeur pour montrer que ça va aller le plus loin possible, pour aller ensuite le plus haut possible.
Donc, ces réformes-là, pour mettre plus de concurrence, pour mettre aussi plus de sécurité juridique, plus de simplification. Et cela va être la loi « croissance ».
Il convient aussi et j'y ajouterai ce mot pour la loi « croissance », que nous puissions intéresser davantage les salariés aux résultats de l'entreprise. Ce n'est pas facile, lorsque l'on veut attirer les meilleurs. Or, aujourd'hui, il y a une mondialisation des talents. Il faut attirer les meilleurs. Et ce n'est pas simple de convaincre un certain nombre de jeunes, ingénieurs, créateurs, innovateurs, de venir travailler dans une entreprise dont ils ne peuvent pas savoir si elle va réussir ou pas. Donc, j'ai décidé que nous allions changer le dispositif pour l'actionnariat salarié et pour ce que l'on appelle les BPCE, les bons de souscriptions, de manière à ce que une partie de la rémunération puisse être apportée sous cette forme pendant un temps, de manière à ce que les salariés et notamment ceux qui ont des compétences et des savoir-faire, puissent avoir cette forme de rémunération et de confiance et d'attachement à l'entreprise.
Voilà ce que je voulais aussi vous annoncer à l'occasion de ce prix de l'Audace Créatrice. Parce que l'Audace, elle doit être chez le créateur, elle doit être dans toute la société.
Ce qui fait le talent français et vous voyagez beaucoup et souvent ce sont les étrangers qui nous le disent. Ce qui fait le talent français, c'est précisément l'audace et le panache. Cela fait partie de nos références. Le panache d'aller avec parfois son drapeau, parfois son orgueil, parfois sa fierté, mais aussi sa créativité.
Donc, l'audace elle doit être partout, partout. Chaque fois que l'on a à défendre ce que l'on pense être l'essentiel, nos valeurs, nos principes, nos idées, nos produits, nos innovations, nos créations, notre culture, notre langue. Il faut mettre de l'audace. Et ce sont les pays audacieux qui gagnent. Pas forcément les pays les plus forts, les pays les plus audacieux.
Merci d'y contribuer. Merci M. GORGÉ pour ce que vous avez fait, pour ce que vous avez fait aussi avec votre père, votre famille, parce que là encore les sociétés familiales, c'est un atout pour notre pays. Il faut des sociétés familiales, il faut qu'il en reste pour notre indépendance et pour la promotion de la France.
Merci à tous.