2 septembre 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur le nouveau collège Louise Michel de Clichy-sous-Bois et sur les efforts en faveur de l'Education nationale, à Clichy-sous-Bois le 2 septembre 2014.

Monsieur le Président de l'Assemblée Nationale, cher Claude BARTOLONE,
Madame la ministre de l'Education, de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, c'est votre première rentrée et elle est marquée par un symbole, l'inauguration d'un collège, ici, en Seine-Saint-Denis.
Je salue le Président du Conseil général, mais également les parlementaires qui se sont dévoués pour qu'il y ait cette réalisation. Je salue également le Maire qui a été élève, ici, il y a bien longtemps, dans l'ancien bâtiment, et a voulu laisser une trace, celle de ce nouvel établissement.
Je salue toutes les autorités académiques et Monsieur le Principal, qui a sans doute beaucoup d'émotions en cet instant. Non pas parce qu'il reçoit le Président de la République, la Ministre de l'Education et les autorités du département, mais parce qu'il est le premier chef d'établissement d'un collège rénové, ici, en Seine-Saint-Denis, dans cette ville.
Je pense que vous éprouvez tous et je veux croire que c'est ce que vous ressentez en cet instant, beaucoup d'émotions et beaucoup de fierté.
J'ai voulu venir en Seine-Saint-Denis aujourd'hui, pour la rentrée. D'abord parce que j'ai une pensée pour les familles qui ont été durement éprouvées à Rosny, par cet effondrement d'un immeuble. Huit morts, onze blessés, des enfants qui auraient dû faire la rentrée, qui y pensaient sans doute, qui préparaient leurs affaires et qui ont été saisis par cette tragédie.
Je voulais venir aussi en Seine-Saint-Denis, parce que c'est un département particulièrement dynamique, avec une vitalité démographique, un département qui veut réussir, mais qui veut avoir aussi les conditions de la réussite. Un département qui n'attend pas tout de l'Etat, mais un département qui prend son avenir entre ses mains. Ce n'est pas le seul collège neuf que nous inaugurons aujourd'hui. Monsieur le Président, il y en a douze, douze. Ils ne sont pas nés comme cela, parce que c'était la rentrée. Il a fallu prendre des décisions courageuses, depuis des années, élaborer un plan pour qu'il puisse y avoir le choix des lieux qui étaient les plus attendus pour recevoir un nouveau collège ou pour le rénover.
Louise MICHEL, c'est un beau nom, qui parle, je le sais, au cur et à l'esprit de Madame la Ministre de l'Education. Mais j'ai cru comprendre, enfin c'est ce qui m'a été rapporté, qu'on l'appelait « Louise MISERE », ce qui n'est quand même pas une très belle appellation pour donner confiance aux élèves et pour faire que les parents puissent à chaque rentrée être certains que leurs enfants connaissent le chemin de la réussite.
Alors, il a fallu faire des choix et vous avez fait le choix de Clichy. 700 millions d'euros ont été ainsi dépensés. J'ai tort de dire dépensés, ont été finalement mis au service de l'éducation. C'était la responsabilité du Conseil général. L'Etat avait le devoir d'accompagner ce mouvement, en mettant des personnels à disposition, de faire en sorte que tous les moyens pédagogiques puissent être tournés, eux-aussi, vers la réussite.
Je voulais venir en Seine-Saint-Denis pour saluer cette politique. Je voulais venir aussi à Clichy. Je connais bien Clichy, pas de réputation, non, j'y suis venu régulièrement quand Claude DILAIN était Maire. Olivier KEIN a aussi eu la gentillesse de m'accueillir, y compris pour les stages d'été que la ville organise pour ceux qui ne partent pas en vacances.
Je connais bien Clichy, à la fois ses drames, chacun s'en souvient, la mort de Zyed et Bouna, en 2005. Mais aussi ses atouts, ses chances, c'est-à-dire sa jeunesse. Vous les enfants, vous êtes l'avenir de Clichy, vous êtes l'avenir de la Seine-Saint-Denis, vous êtes l'avenir de la France. Donc, je voulais venir, ici, parmi vous.
Ce collège de Clichy marque un symbole, fait resurgir l'avenir là où le passé avait parfois sombré. C'est un symbole, parce que ce collège est beau. Oui, on peut faire du beau aussi pour l'éducation.
J'appartiens à une génération où on faisait les collèges exactement de la même manière. Que l'on soit élève en Corrèze, en Normandie ou en Seine-Saint-Denis, c'était le même bâtiment. Là, vous avez fait un effort, appelé une qualité architecturale, vous avez voulu qu'il y ait d'abord une dimension humaine, 500 élèves pour le collège. Et puis qu'il soit fait appel aux meilleurs professionnels. Je pense aux architectes, je pense aussi à ceux qui bâtissent ce collège, qui sont derrière nous, les ouvriers, les travailleurs qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes pour que ce soit le plus beau possible. Ce n'est pas complètement terminé, il y a la piscine qui est encore en construction, nous y reviendrons.
Il faut faire beau pour faire bien ensemble, le beau n'est pas réservé aux plus favorisés, le beau doit être accessible à tous, donné à tous. Mais il ne fallait pas simplement faire un beau bâtiment, il fallait que ce collège, cet établissement, puisse être le plus ouvert possible, le plus fonctionnel possible, pour que les personnels de l'éducation et les élèves y soient le mieux possible pour travailler. Parce qu'un collège, c'est fait pour travailler, c'est fait pour apprendre, c'est fait pour connaitre et ensuite pour comprendre. Et il fallait qu'il y ait tous les espaces possibles pour toutes les disciplines.
Là aussi, trop souvent, la culture ou le sport dans les établissements n'étaient pas forcément mis en évidence. On trouvait des salles comme on pouvait. Là, vous avez voulu qu'il puisse y avoir les conditions d'un épanouissement dans ce collège pour tous les élèves. Il y a aussi le souci d'ouvrir l'établissement, qu'il puisse y avoir des expositions, des conférences, qu'il puisse y avoir des rencontres, que les parents puissent venir, y être bien pour ensuite faire en sorte que les professeurs soient considérés. Parce que les professeurs doivent être respectés, doivent être regardés comme des atouts pour les enfants. Le premier devoir d'un parent, c'est bien sûr de faire en sorte que ses enfants réussissent après l'école, mais c'est de donner sa confiance, aux professeurs et aux personnels de l'Education Nationale.
Et puis il y a eu le choix, c'est ce qui donne aussi du sens à ma venue, de mettre du numérique, de faire le pari de l'avenir. Et là aussi, je veux saluer le Conseil général qui a investi pour équiper les collèges, une dizaine, en matériels informatiques, en numérique, en haut-débit. Là aussi, il ne fallait pas se tromper, il y a eu des choix, il y a des années et des années, où l'on mettait simplement des ordinateurs. On ne se préoccupait pas de savoir s'ils allaient être branchés, on ne savait pas s'il y allait avoir du contenu, on mettait des ordinateurs. Puis finalement, on s'apercevait, on ouvrait des placards et puis on voyait les matériels et on ne voyait pas d'élèves devant les ordinateurs. Donc, il fallait faire le choix de sauter une étape. C'est le plan numérique. Pour avoir des tablettes, pour avoir des contenus, pour avoir des enseignements qui soient valorisés par le numérique et par l'informatique. Non pas pour que les enseignants ne fassent pas cours, ils font cours, mais avec cet outil-là. Ce n'est pas pour jouer, parfois il peut y avoir cette tentation, même si l'on peut aussi avoir du bonheur en apprenant et c'est le rôle du numérique.
Je l'annonce ici, il va y avoir un grand plan numérique pour l'école dans la République. Bien sûr que nous aurons besoin des collectivités locales pour accompagner ce processus. C'est déjà fait. Mais l'Etat y mettra aussi tous ses moyens pour former les enseignants, pour assurer partout l'arrivée du très haut-débit et pour que les éditeurs de livres puissent mettre les contenus sous forme numérique. De manière à ce que chacun puisse y accéder.
Alors aujourd'hui, c'est la rentrée, la rentrée des 6ème. La 6ème, c'est une classe, Monsieur le Principal, je parle devant les autorités académiques, c'est une classe très importante. Parce que vous l'avez très bien décrit, on passe de la grande école à ce lieu qui s'appelle le collège. D'un professeur, à plusieurs enseignants. Et puis, il y a la confrontation avec d'autres, beaucoup plus grands, beaucoup plus forts. Alors, c'est la vie en commun qui se fait ici au collège, ce qui suppose qu'on y mette également l'accompagnement nécessaire. Une transition qu'il faut réussir. Je sais qu'ici vous y veillez parce qu'il ne faut qu'aucun élève ne décroche. La rentrée c'est celle des élèves. C'est un mélange, la rentrée. On est à la fois content et inquiet. Il faut que l'inquiétude disparaisse, que la confiance soit là. Mais il n'y a pas de rentrée s'il n'y a pas d'enseignants eux-mêmes motivés, ils le sont, prêts à servir, ils le montrent et là je veux, à l'occasion de cette rentrée, saluer tous les personnels de l'éducation nationale. Les professeurs, à l'évidence, mais aussi tous les agents qui, à leur place, permettent la réussite, veulent la réussite.
Servir dans l'éducation nationale c'est sans doute pour un fonctionnaire un moment très important de sa vie professionnelle parce que c'est faire le choix de l'avenir, faire le choix de l'investissement pour le pays, pour la jeunesse. Parfois il y a des difficultés terribles dans le métier d'enseignement. Faire partager la connaissance, s'occuper des élèves les plus en difficulté, lutter contre les violences et il est arrivé - vous vous souvenez de ce drame qu'une enseignante, une professeure de maternelle, Madame TERRAL-CALMÈS, puisse être lâchement assassinée. Je veux avoir une pensée pour elle en cet instant parce qu'elle aussi, elle aurait voulu vivre cette rentrée. Elle était enseignante à Albi, et je sais qu'à Albi, en ce moment même où je parle, il y a ce moment d'émotion pour elle.
Alors, Madame la ministre c'est aussi votre rentrée. La première et c'est une grande satisfaction que de savoir que c'est vous et que c'est une femme qui pour la première fois est ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. On se demande d'ailleurs pourquoi on n'y avait pas pensé plus tôt. Parce que si je regarde le nombre de personne de sexe féminin qui enseigne, qui travaille dans l'éducation nationale, mais enfin, ça aurait dû être l'évidence. Quand je vois aussi le nombre de parents et quelques fois beaucoup de femmes qui s'investissent pour l'école, oui, je pense que c'eût été une bonne idée. Donc, c'est une bonne idée que d'avoir nommé une femme, Madame Najat VALLAUD-BELKACEM et qui vient, je le disais, pour le collège Louise-Michel. Il n'y avait pas meilleur symbole pour elle et pour nous.
Je veux terminer parce que je ne suis pas venu faire un discours, je suis venu ici vous donner tout mon soutien, exprimer toute ma fierté pour ce qui va se faire ici. Parce que ici ça va être la preuve que tous les enfants de France où qu'ils soient, où qu'ils soient nés, quelles que soient leurs histoires personnelles, celles de leurs parents, et bien que tous ces enfants vont avoir les mêmes chances qu'ailleurs pour réussir et pour ça, il va falloir mettre plus de moyens ici qu'ailleurs parce que quand on est dans une ville, quand on est dans un département, quand on est dans un territoire où il y a plus d'inégalité, et bien on doit rattraper le retard, on doit faire en sorte que ceux qui n'ont pas forcément tous les atouts au début puissent les avoir à la fin et ça s'appelle l'éducation prioritaire. Ce n'est pas pour remettre en cause le principe d'égalité. Partout en France les élèves ont droit à un enseignement gratuit, obligatoire et laïque. C'est pour faire qu'ici, ailleurs nous fassions davantage pour la réussite. Ça s'appelle l'éducation prioritaire parce que priorité doit être donnée à l'éducation, parce que priorité doit être donnée à la réussite. C'est que l'on appelle les réseaux d'éducation prioritaire. Il y en a 102 aujourd'hui. C'est quoi un réseau ? Il y a un collège, il y a des écoles autour et si on ne réussit pas à l'école, on ne peut pas réussir au collège donc il faut que les établissements travaillent ensemble. Il faut qu'il y ait plus d'enseignants dans ces réseaux. Il faut qu'ils aient plus d'encouragement à y rester, à y rester longtemps parce que c'est une équipe pédagogique qui doit se former. Nous devons aussi faire que ces établissements soient mieux équipés en numérique, en informatique, en matériels pédagogiques et il convient aussi de rattraper ceux qui sont les plus en difficulté, les accompagner, les soutenir, pour qu'ils puissent ensuite suivre l'enseignement jusqu'au bout. C'est quoi le bout ? Ça peut être le lycée, le lycée d'enseignement général, le lycée professionnel, ça peut être l'apprentissage, ça peut être ensuite des parcours d'excellence. Ici, il doit y avoir la volonté de faire que chacun puisse donner le meilleur de lui-même, que chacune puisse rêver à l'excellence en se disant je suis français, même si je ne suis pas français et que je vis en France et j'ai pu réussir ma vie grâce à l'école, grâce à la République. C'est le plus beau message que l'on puisse prononcer pour une rentrée scolaire et il était important que Clichy soit dans cette vague de l'éducation prioritaire, dans cette belle vague qui conduit comme les élèves vers le large, le large pour qu'ils puissent réussir leur vie.
Clichy, Clichy-sous-Bois, que de progrès en quelques années, après tant de tragédies, de drames, de difficultés, d'interrogations. Il manquait tout à Clichy, sauf la population, mais il n'y avait pas de commissariat, il n'y avait pas de Pôle emploi, peut-être qu'il n'y avait pas de chômage ?, pas de commissariat, peut-être qu'il n'y avait pas d'insécurité ? Et puis il y avait un collège qui n'était pas dans la situation de pouvoir permettre la réussite. Voilà ce qui s'est produit. Je sais qu'il est beaucoup attendu, aussi, une desserte par tramway. Depuis le temps que l'on en parle, certains n'ont pas été favorables à ce projet, je le sais, mais ici il y a une volonté £ c'est dans le cadre du Grand Paris, il doit y avoir un échéancier : 2018. Il ne faut pas perdre de temps supplémentaire. C'est pourquoi je demande aux opérateurs de transport, à ceux qui décident, de ne pas accepter le moindre retard par rapport à cette livraison, pour que Clichy puisse être desservie comme une ville doit l'être pour aller où vous voudrez aller. Notamment vers la capitale ou vers les emplois, parce que quand on ne peut pas se déplacer, on ne peut pas non plus chercher et obtenir un emploi.
Voilà pourquoi aussi je voulais venir à Clichy.
Mesdames et Messieurs,
La priorité que j'ai fixé pour le quinquennat, c'est la jeunesse. Nous affrontons aussi des difficultés, il y a l'économie mondiale, il y a l'Europe, il y a la nécessité de soutenir l'investissement. Nous avons nos contraintes budgétaires, mais rien ne me fera dévier de cet objectif : la jeunesse. Faire que nous puissions au moins nous dire que pendant les 5 ans, tout aura été donné, tout aura été fait pour que les jeunes puissent vivre mieux et réussir. Mieux que leurs parents, parce que c'est ça que pensent chaque mère, chaque père. Faire en sorte que mon enfant puisse avoir une meilleure vie, que celle que je peux moi-même connaître. Et il n'y a rien de pire pour des parents que de se dire : est-ce que mes enfants vont pouvoir accomplir leur destin et être heureux ? On ne peut pas réussir le bonheur à la place des individus eux-mêmes. Chacun est responsable de sa vie, mais au moins que tout soit fait pour que la jeunesse de France puisse être accompagnée, encadrée, éduquée, servie par la République.
Le mot le plus beau de notre devise c'est l'égalité et bien ici, à Clichy, lorsque nous inaugurons un collège, lorsque nous y mettons les moyens, lorsque nous luttons contre l'échec scolaire, contre les inégalités, lorsque nous faisons en sorte que toutes les technologies soient mises à disposition des enseignants, des personnels, des élèves, lorsque nous voyons ce cadre devant nous, cette volonté de pouvoir enfin se mettre au meilleur niveau, oui, je peux dire vive l'égalité, vive la République et vive la France.