23 juin 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration conjointe de M. François Hollande, Président de la République, et de l'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, sur les relations franco-qatariennes, à Paris le 23 juin 2014.

LE PRESIDENT « Altesse, vous effectuez aujourd'hui votre première visite officielle en Europe, et c'est la France que vous avez choisi.
Vous avez été choisi pour être l'Emir de votre pays, il y a un an jour pour jour.
Je m'en souviens, si je puis dire, j'y étais. Nous étions en effet accueillis par votre père, pour une visite, et il m'avait prévenu de cet heureux évènement, de cette transmission du pouvoir. Parce qu'entre la France et le Qatar, c'est une relation qui n'a jamais cessé d'être confiante. Elle est vieille, si je puis-dire, depuis 1971, c'est-à-dire, l'indépendance de votre pays. Mais c'est jeune, à l'horizon de notre propre avenir ensemble.
Votre père vous a confié les affaires de l'Etat, dans le cadre d'une succession sereine et maitrisée. Votre père était un visionnaire et il avait compris que le Qatar n'était pas simplement riche de ses ressources naturelles, mais riche de nombreux talent, et qu'il convenait de les mettre au service d'une grande ambition. Et les richesses et le talent.
Au Qatar, des chantiers considérables sont en cours. Des musées prestigieux voient le jour, le patrimoine est mis en valeur, les technologies les plus élaborées sont déployées et les entreprises des plus performantes y développent leurs activités.
Mais ce n'est pas pour lui seul que le Qatar veut réussir. Il a une vision du monde et il a aussi une volonté de contribuer à la paix et à la sécurité de la région, et d'être un acteur important sur le plan international.
Le Qatar est un ami loyal de la France et cette relation va au-delà des alternances politiques et des personnalités à la tête de nos deux pays. Et je souhaite que nos relations puissent se poursuivre dans la confiance, mais dans la transparence, et donc dans la franchise.
Nous devons continuer d'avancer dans trois directions. La première, c'est la sécurité au Moyen-Orient. Plus que jamais, elle est nécessaire, alors que la crise syrienne n'en finit pas, hélas, de générer des victimes sans cesse plus nombreuses, et qu'elle déborde en Irak.
La France sait compter sur le Qatar comme sur ses partenaires du Golfe, pour lutter contre les mouvements terroristes et trouver des solutions politiques aux problèmes de la région. Et la France sait la singularité du Qatar et son utilité pour, justement, parvenir à chercher des issues politiques.
Ensuite, nous devons avancer dans notre coopération de défense. Le Qatar a toujours fait les choix, pour son armée, de la technologie française. Vous connaissez les projets que nous avons en commun, et je sais que vous avez la plus grande attention et la plus grande bienveillance par rapport aux matériels que nous vous proposons dans tous les domaines et notamment, aéronautique.
Enfin, notre relation économique, elle est ancienne. TOTAL est implanté depuis 80 ans. Nos entreprises ont noué des partenariats, depuis plusieurs années, avec les vôtres, aussi bien dans l'industrie que dans les services et encore aujourd'hui, nous en avons eu la preuve à travers un accord entre ALSTOM et SYSTRA, qui permettra le développement des transports urbains avec des entreprises qataries.
Ensemble, nous avons également eu l'intelligence de mettre en uvre des instruments financiers originaux. Et c'est ainsi qu'un fonds commun d'investissement, associe la Caisse des dépôts à l'Autorité des investissements du Qatar. Ce fonds est maintenant opérationnel, et je souhaite qu'il réalise très vite les premières transactions au bénéfice des PME françaises.
Je sais aussi que vous êtes attentif aux investissements français au Qatar, parce que c'est le même esprit qui doit nous inspirer.
Le Qatar fait également confiance à la France dans bien d'autres domaines. Vous avez sollicité nos architectes pour la réalisation de vos équipements les plus prestigieux : le musée des arts islamiques de Doha, que j'ai eu la chance de visiter, votre musée national, qui est en cours de construction et qui sera magnifique. Vous avez également pour les universités françaises, pour les grandes écoles, une attention particulière. Notamment avec HEC, vous avez fait le choix de la coopération pour que des cadres puissent être formés dans nos deux pays, et avec le même diplôme.
Vous avez également fait le choix de la francophonie et vous en êtes ici, l'illustration. Vous parlez notre langue et vous avez veillé à ce que vos enfants soient également scolarisés en France.
La langue française est de plus en plus enseignée à l'école secondaire au Qatar. Et je me souviens encore de ma visite au lycée Voltaire.
Nous avons d'ores et déjà signé un accord pour une prochaine saison culturelle croisée, qui nous permettra de mettre nos artistes et nos créateurs, particulièrement en valeur.
Je ne veux pas oublier le sport, surtout dans cette période et encore moins le football. Je sais qu'à Doha, comme à Paris, l'équipe du Paris Saint-Germain est particulièrement suivie.
Je sais aussi que vous êtes attentif à ce qui se passe en ce moment au Brésil, nous aussi. Nous pour notre équipe et vous pour l'organisation de la prochaine compétition en 2022.
Tout cela, l'économie, la culture, le sport, la défense, les questions diplomatiques, tout ce qui lie la France et le Qatar est durable. Et c'est pourquoi, nous avons mutuellement la volonté d'enrichir régulièrement la relation exceptionnelle entre la France et le Qatar, pour la paix, pour la sécurité et pour les intérêts de nos deux pays.
Vive le Qatar ! Vive la France ! Et vive l'amitié entre la France et le Qatar ! »
CHEIKH TAMIM BIN HAMAD AL THANI - « Mesdames et Messieurs, je tiens tout d'abord à remercier Monsieur le Président HOLLANDE, le Gouvernement et le peuple français pour l'accueil qu'il m'ont accordé ce soir dans votre beau pays.
C'est la première fois que je m'exprime devant tant de personnes en français. Alors, si vous ne comprenez pas ce que je dis, je vous remercie de faire semblant.
Je voudrais à cette occasion exprimer combien je me réjouis de l'amitié qui unit aujourd'hui la France et le Qatar.
Les liens entre nos deux pays sont aujourd'hui des plus solides. Aussi bien sur le plan économique, que commercial et culturel.
Chaque jour, le nombre d'étudiants qataris en France continue d'augmenter. Pour le Qatar, l'éducation constitue une des conditions du développement. C'est pour cela que nous avons ouvert plusieurs écoles françaises au Qatar.
Ceci demande que notre coopération aille bien au-delà de l'économie. C'est dans cet esprit que nous investissons en France, dans le but de renforcer la coopération et resserrer les liens entre nos deux pays.
En France, nous ne chercherons pas à satisfaire nos intérêts immédiatement, loin de là. Bien que nous comprenions la particularité du contexte économique français, nous continuons à investir car c'est ce qui renforce notre partenariat commercial.
Non seulement ces échanges économiques nous apportent des avantages mutuels, mais cette coopération comporte aussi une dimension culturelle. Plus encore, elle nous amène à nous intéresser aux questions de civilisation, actuelles et à venir.
Nous savons que pour le Qatar, la culture et l'éducation représentent les clés de l'avenir.
Par conséquent, nous avons choisi de miser sur la jeunesse. Notre monde est un monde complexe, déchiré par les conflits et les contradictions. Cela est encore plus vrai dans notre région.
Cependant, le Qatar a toujours défendu des valeurs, telles que la justice, la fraternité, l'égalité et la sagesse. Le Qatar est resté neutre dans les conflits de la région, malgré les tensions politiques. Nous avons toujours joué un rôle de médiateur, auprès des pays qui l'on souhaité. Et nous voulons créer un terrain d'entente, où les forces opposées peuvent se rencontrer, pour résoudre leurs conflits de manière pacifique.
Nous sommes unis, nous sommes une Nation et pas un mouvement politique. Et nous échangeons avec tous les pays. Nous respectons les principaux courants politiques et intellectuels de notre région et du monde entier.
Nous défendons la liberté d'expression et nous nous opposons à ce qui conduit à l'intolérance. C'est le choix que nous avons fait, et nous assumons qu'il ne plaise pas à certains.
De par notre histoire, notre culture et notre foi, nous affirmons que la raison est le principe fondamental qui guide notre action. Nous refusons de croire que la pensée éclairée sont le monopole d'une seule civilisation. C'est pourquoi, notre relation avec l'Europe, et la France en particulier, est des plus importantes. C'est parce que nous croyons aux échanges culturels, que nous voulons consolider notre lien avec la France. Et cela dans l'intérêt de nos deux peuples.
Nous sommes très heureux de compter comme ami la France, qui comme nous, veut faire de la paix, du dialogue et de la coopération entre les peuples, des questions des plus fondamentales.
Permettez-moi de vous remercier de nouveau pour cet accueil chaleureux, merci beaucoup M. le Président. »