28 juin 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Hollande, Président de la République, notamment sur l'Union bancaire, la Commission européenne, l'élargissement de l'Union européenne et sur le déficit public, à Bruxelles le 28 juin 2013.

LE PRESIDENT : Mesdames, et Messieurs, hier le Conseil sest prononcé sur le budget, le plan sur lemploi des jeunes et laccès aux crédits des PME des étapes importantes pour donner des perspectives et de lespoir aux Européens.
Aujourdhui, nous avons examiné quelles étaient les étapes qui nous restaient à franchir pour lUnion économique et monétaire et notamment lUnion bancaire. Là, je dois dire que le calendrier et les objectifs que nous avions fixés, il y a déjà plusieurs mois, sont respectés. Cétait dailleurs la volonté de la France.
LUnion bancaire, cela peut paraître compliqué cela lest dailleurs mais de quoi sagit-il ? Il sagit de prévenir les crises qui ont provoqué la récession que nous connaissons aujourdhui. Il sagit déviter des défaillances bancaires qui pourraient coûter cher aux épargnants et aux contribuables. Il sagit davoir des instruments et des procédures qui permettent à lUnion européenne mais surtout dans la zone euro, davoir une surveillance ce que lon appelle la supervision et la capacité dintervention. Enfin, le dernier objectif, cest déviter que des Etats puissent être emportés, comme cela la été dans un passé récent, par des défaillances bancaires.
Alors, quest-ce qui peut, aujourdhui, être fait comme bilan ? Quelles sont les différentes étapes qui nous attendent encore ?
Premier point, la recapitalisation des banques par le mécanisme européen de stabilité (MES) a été rendu possible, dès cette semaine, par laccord des ministres de lEconomie et des Finances. Cela, cest pour lurgence. Mais la supervision unique cest-à-dire que sur le même ensemble, il y ait une autorité qui puisse surveiller et contrôler les banques autour de la Banque centrale européenne cela, cest maintenant engagé. Un accord avec le Parlement a été trouvé au mois de mars et le Parlement européen aura à se prononcer, sans doute à lautomne. Le mécanisme doit être maintenant mis en place.
Quel est ce mécanisme ? Cest ce que lon appelle les modalités de la supervision. Deux préalables doivent être posés. Le premier, cest lévaluation dun bilan des banques. Et cest la mise en place, dans chaque Etat, de filets de sécurité. Le Conseil européen vient de se prononcer là-dessus et tout sera donc prêt au milieu de lannée 2014 pour que rentre en vigueur ce mécanisme de supervision.
La dernière étape, cest la résolution. Une fois que lon a surveillé, une fois que lon a mis en place un mécanisme, le même partout sur la zone européenne considérée, faut-il encore quil y ait possibilité de régler les crises bancaires. Là-encore, une étape importante a été franchie puisquun projet de directive, établissant le cadre de cette résolution, sera voté dici la fin de lannée. Un mécanisme unique de résolution couronnera le tout. Cela sera normalement prêt nous nous sommes prononcés là-dessus au milieu de lannée 2014.
Je considère que ce projet dUnion bancaire, lancé il y a un an, est maintenant en voie dêtre réalisé avec un calendrier qui nous permet de dire quau milieu de lannée 2014, cest-à-dire avant les élections européennes, il y aura lensemble des mécanismes supervision, résolution, recapitalisation des banques permettant de protéger lEurope de toute crise bancaire, mi 2014.
Cest un point très important. Pas simplement parce quil solde le passé et permet de mieux comprendre ce qui aurait été utile à ce moment-là. Mais parce quil permet de préparer lavenir, plus exactement de prévenir les éventuelles crises qui pourraient apparaître dans la zone euro.
LUnion bancaire, cest aussi un élément constitutif de lUnion économique et monétaire. Là encore, le Conseil européen a eu à débattre de cette question sur la base du rapport de M. Van ROMPUY. Le travail dapprofondissement se poursuit.
Quel est le débat ? Jai insisté là-dessus et je nai pas été le seul. Mme MERKEL est intervenue également dans un sens comparable. Le débat est le suivant : les pays de la zone euro doivent aller plus loin et plus vite. Les pays hors de la zone euro doivent laisser les premiers aller à leur rythme. Ceux qui ont vocation à venir dans la zone euro doivent être associés aux décisions. Réciproquement, les pays de la zone euro ne peuvent pas imposer aux autres des règles quils nont pas à suivre, dès lors quils nont pas en partage une monnaie, en loccurrence leuro.
Le deuxième débat sur lUnion économique et monétaire, cest : quest-ce qui relève de lEurope et quest-ce qui appartient aux Etats-membres sur ces questions ? Quest-ce qui doit être dans les recommandations, dans la coordination des politiques économiques au niveau européen ? Quest-ce qui doit rester, peut rester, au niveau national ? Là-aussi, cette clarté est nécessaire. Il peut y avoir des objectifs qui peuvent être définis et les moyens doivent rester ceux dont les Etats veulent eux-mêmes se doter.
Ce débat va donc se prolonger dans les mois qui viennent. Je souhaite quil ait cette clarté-là. Les pays de la zone euro doivent aller plus loin : cest le cas du gouvernement économique dont jai parlé et qui va trouver maintenant sa concrétisation. Il doit y avoir une plus grande cohérence entre ce que nous faisons au plan européen et ce qui doit être, en même temps, du niveau de la responsabilité de chaque Etat membre.
Dans la dimension économique, nous souhaitons une coordination, nous voulons même une harmonisation. Mais il doit y avoir aussi une dimension sociale et cest lun des apports de ce Conseil, puisque dans lUnion économique et monétaire figure la dimension sociale. Avec une coordination des politiques sociales comme il pourrait en exister davantage encore sur le plan économique.
Pour mener à bien cette coordination, des indicateurs vont être définis, permettant, là aussi, davoir un suivi des politiques sociales. Le dialogue social est reconnu au niveau européen comme au niveau national. La Commission fera enfin une communication sur la dimension sociale de lUnion économique et monétaire. Je rappelle que la France est très attachée à une harmonisation, notamment au avec un salaire minimum.
Je termine sur les autres décisions du Conseil européen. Lune concernant la Lettonie pour son adhésion à la zone euro, lautre pour louverture du processus dadhésion de la Serbie. Enfin, nous nous sommes réjouis daccueillir la Croatie, ce sera au le 1er juillet, comme membre à part entière de lUnion européenne.
Voilà les décisions du Conseil européen.
Je salue au nom de la France ce qui vient de se produire pour lUnion bancaire. Cest un projet auquel jétais attaché, un projet qui traduit dailleurs une continuité dans les intentions de la France, davoir plus de cohérence, plus dinstruments, plus de régulations.
De façon à prévenir des crises mais aussi à protéger les épargnants et les contribuables et en faire un pilier de lunion économique et monétaire. La finance dont on a beaucoup parler parlé doit être maitrisée et lUnion bancaire, cest aussi linstrument au plan européen de la maitrise de la finance.
En France, nous avons anticipé, nous avons fait voter une loi bancaire qui sinscrit dans la perspective de lUnion bancaire, notamment avec la séparation des activités de dépôt et les activités dites de spéculation et, avec aussi cette supervision que nous avons déjà engagée pour ce qui nous concerne.
QUESTION : Oui, bonjour Monsieur le Président, hier soir vous avez salué le travail de la commission ces dernières heures, ce qui est apparu comme une volonté dapaisement après les tensions de ces derniers jours, de ces dernières semaines mais ce matin Harlem Désir disait du président de la Commission quil incarnait le contraire du rêve européen et votre ministre du commerce extérieur Nicole BRICQ, affirmait quil navait rien fait pendant son mandat, rien fait de son mandat. Est-ce que cest un souci davoir deux personnalités importantes, une de votre majorité, et une personnalité de votre gouvernement qui nest manifestement pas sur la même ligne que vous ?
LE PRESIDENT : Je travaille avec les institutions communautaires, celles qui ont été choisies par les Etats, les gouvernements et le Parlement européen. Et je les respecte parce que ce sont des institutions légitimes. Il y aura des élections lannée prochaine pour le Parlement européen. Dautres personnalités, jimagine, seront présentes dans le débat, candidates pour des fonctions mais ce nest pas le moment, ce nest pas lheure.
Aujourdhui, quest-ce que jai à faire comme chef dEtat représentant la France ? De faire avancer les dossiers qui nous tiennent à cur, lUnion bancaire, de dialoguer avec la Commission telle quelle est avec son Président pour avoir le meilleur résultat concernant le suivi de nos engagements et le délai qui nous a été accordé. Je souhaite aussi, et cela a été le cas, que la Commission ait un accord avec le Parlement européen pour le cadre financier, puisque nous avons obtenu un certain nombre davancées dans ce cadre financier et que lEurope doit avancer.
Ce que je demande donc, cest tout simplement de pouvoir travailler avec les institutions communautaires. Et dans un esprit de dialogue. Ensuite, il y aura des débats, des élections mais ce nest pas le moment et ce nest pas le temps.
QUESTION : Monsieur le Président, en effet on a limpression que cest un Sommet un petit peu de pré-campagne électorale du côté allemand. Est-ce que vous navez pas limpression que sur lUnion bancaire, sur dautres sujets, Angela MERKEL est plus préoccupée de ce qui va se passer en septembre dans son propre pays. Est-ce que vous lavez ressenti comme cela ?
LE PRESIDENT : Chacun peut comprendre que les élections, cela compte. Cela compte même énormément. A partir de là, il y a une compréhension mais cela na pas empêché Mme MERKEL daccepter les conclusions du Conseil européen sur lUnion bancaire. Et elle na pas émis de réserve particulière sauf davoir le respect le plus absolu des décisions qui avaient été prises en commun, par les chefs dEtats et de gouvernements, comme par les ministres.
Mais nous aurons lUnion bancaire à la date prévue et avec les mécanismes de résolution et de supervisons que nous avions nous-mêmes choisis. Voilà pourquoi jestime, même sil y a des échéances à très court terme qui concernent lAllemagne, cela na pas empêché le Conseil européen daller le plus loin possible et le plus vite possible sur lUnion bancaire.
QUESTION : Bonjour Monsieur le Président, je voulais revenir sur les rapports avec la Commission. Un de vos ministres, Arnaud MONTEBOURG, expliquait que le président de la Commission était un carburant du Front national en France, je voulais savoir si vous partagiez cette analyse et si vous aviez eu loccasion den discuter avec lintéressé pendant ce Conseil.
LE PRESIDENT : Jai dit en arrivant ici que ce nest pas le débat sur les personnes qui est intéressant, cest le débat sur les politiques. Les personnes, elles sont là au nom dune légitimité, c'est-à-dire, des élections. Elections nationales, élections européennes, c'est-à-dire, tous ceux qui sont à la table du Conseil européen ne sont pas venus de nulle part, sans autorisation. Ils sont venus parce que des chefs dEtat et de gouvernements les ont choisis, mais en accord avec le Parlement européen, ou ils sont venus, chefs dEtats et de gouvernements, parce quils ont été élus par leurs concitoyens. On peut alors considérer, je pourrais le faire, que ce nest pas forcément lorientation que, pour ma part, je défends. Il y a donc nécessairement dialogue, discussion, négociation et compromis. Compromis avec les chefs dEtats et de gouvernements, dialogue et discussion avec la Commission européenne.
QUESTION : « Monsieur le Président, ce matin lINSEE a annoncé que la dette de la France avait atteint quasiment 92% du PIB au premier trimestre. Hier, les recommandations de la Commission ont été adoptées, acceptées sur lallongement du calendrier de réduction des déficits de deux ans, avec lutilisation des deux ans potentiels. A quelle échéance, compte tenu de tout cela, pensez-vous pouvoir infléchir la courbe de la dette de la France ?
LE PRESIDENT : La courbe de la dette, il faut sans doute linfléchir, cela supposera dailleurs de réduire les déficits. Mais la dette, cest un stock, c'est-à-dire que, lorsque je suis arrivé aux responsabilités du pays, la dette était proche de 90% du PIB, c'est-à-dire de la richesse nationale.
Comme en 2012, il y a eu un déficit, comme en 2013 il y a encore un déficit, la dette continue daugmenter. Nous avons donc besoin de maîtriser les déficits pour maîtriser la dette. Et cest lorsque nous aurons atteint léquilibre au moins structurel de nos finances publiques et de nos comptes publics que nous pourrons infléchir, inverser ce que vous appelez la courbe de la dette. Mais on voit bien que, si vous faites cette comparaison avec la courbe du chômage, la dette, personne ne la rencontre dans la rue. En revanche, les demandeurs demploi, on les rencontre dans la rue. Ce sont des réalités humaines.
Il faut donc traiter la réalité qui est celle dabord de la croissance et de lemploi. La dette, en revanche, cest un fardeau, pas simplement pour ceux qui gouvernent aujourdhui, mais pour les générations futures, donc cest une responsabilité. Pourquoi réduire les déficits ? Pas parce que la Commission ou lEurope nous le demande, cela cest en fonction dengagements que nous avons pris. Si nous réduisons les déficits - et ce nest pas facile - dans une période de croissance nulle, voire négative, cest bien parce que je veux dire aux Français quon nacceptera pas de transférer sur les plus jeunes le fardeau de nos propres dépenses.
Ce nest pas parce que mes prédécesseurs se sont largement libérés de cette contrainte, en faisant augmenter la dette publique de 600 milliards deuros, que je dois avoir la même attitude. Et la crise ne peut pas justifier cette fuite en avant. Cela suppose donc une maîtrise de la dépense en faisant en sorte que nous nen rajoutions pas dans le rythme de réduction des déficits, au point de compliquer encore le retour de la croissance. Cest la raison pour laquelle jai dit que, dans lannée 2013, il ny aurait pas de corrections en termes de prélèvements supplémentaires.
Je rappelle que, pendant lannée 2012, il y a eu des prélèvements supplémentaires pour permettre, justement, de réduire le déficit. Lobligation que jai posée et qui engage le gouvernement, cest de maîtriser la dépense tout au long de lannée 2013 et, a fortiori, de préparer un budget 2014 dont la dépense pour lEtat devra être inférieure à ce quelle est pour 2013.
QUESTION : Une question sur un dossier industriel. Etiez-vous informé à lavance de la volonté de la famille PEUGEOT de se désengager de PSA ? LEtat français est-il daccord pour que le groupe PSA passe entre dautres mains et à quelles conditions ?
LE PRESIDENT : Vous comprendrez bien que, sur ces questions-là, cest dabord aux actionnaires et aux dirigeants de lentreprise Peugeot de donner des informations. Je nen ai, à ce stade, aucune dont jaurais à faire part au moment où je mexprime. Je laisse donc les actionnaires, les dirigeants annoncer, sils doivent annoncer, une décision, ce quils pensent être le meilleur pour lentreprise. Cest à ce moment-là que lEtat pourra faire un commentaire.
QUESTION : Je voudrais revenir aux affaires européennes et à lélargissement. Encore une fois, vous avez donc décidé manifestement, sans grand débat, délargir lUnion européenne à termes à la Serbie. Vous décidez daccueillir dans la zone euro un nouveau pays alors que les mécanismes de gouvernance tant dans lUnion européenne que dans la zone euro ne sont toujours pas renforcés. Cest même pire, le 22 mai dernier, dans la plus parfaite discrétion, vous avez même ratifié le fameux protocole irlandais qui gèle la représentation de la Commission à un commissaire par Etat-membre. On est donc très très loin je dirais de la démocratisation ou dune fédéralisation de lUnion européenne mais vous continuez à accueillir de nouveaux invités sans véritable débat. Je voulais donc savoir sil y a quelquun parmi vous qui réfléchit, un chef dEtat de gouvernement qui réfléchit à lavenir de lUnion en se disant : peut-être quand même à 35, cela va peut-être finir par coincer, comment on va fonctionner à autant etc au lieu de renvoyer les débats toujours au lendemain.
LE PRESIDENT : Je vous remercie davoir cette pensée à légard dun chef dEtat qui pourrait avoir lui-même cette lucidité et je vous remercie très personnellement de penser que je pourrais être ce chef dEtat.
Dabord, il ny a pas eu aujourdhui dannonce dune adhésion supplémentaire. La Serbie, cela nest dailleurs pas nouveau, cest un processus qui est ouvert pour une adhésion qui nest pas dactualité immédiate. Le seul pays qui a été accueilli aujourdhui, cest la Croatie, enfin qui le sera le 1er juillet. Mais cest une décision qui avait été prise avant que je narrive aux responsabilités. Et je pense que cétait une bonne décision.
Quant à la Lettonie, elle nadhère pas à lUnion européenne, elle y est déjà, mais à la zone euro. Quelle est ma proposition et jai fait déjà apparaître cette volonté ? Cest que je considère que lUnion européenne va encore connaître des élargissements. Mais que la zone euro, elle, à mesure que lUnion peut sélargir même si le nombre dEtats potentiellement adhérents nest pas considérable, la zone euro, en revanche, elle, doit sapprofondir, sintégrer davantage, se structurer démocratiquement.
Il ne vous a pas échappé que cette proposition a été reçue avec un meilleur accueil quauparavant car y compris dans lapprofondissement daujourdhui, il est clair que la zone euro doit avancer plus vite et doit aller plus loin dans les règles qui la concerne. Ce qui aura une double conséquence. La première, cest quil y aura des recettes, cest-à-dire un budget ou une capacité budgétaire pour la zone euro. Avec Mme Angela MERKEL, nous avons convenu, elle en a dailleurs fait part à son Parlement hier, dun fonds qui serait dédié à la zone euro avec des recettes qui seraient affectées à ce fonds. Après, à charge de la zone euro de savoir ce quelle fait de ce fonds-là. Est-ce que cest pour la compétitivité ? Est-ce que cest pour lemploi ? Est-ce que cest pour les jeunes ? Est-ce que cest pour dautres ambitions, nous en discuterons. Mais il y aura nécessairement, et je lai également annoncé dans une conférence de presse au mois de mai, il y aura une révision des traités une fois que lon aura clarifié et que lon aura donc choisi un mode de construction européenne qui ne pourra pas être simplement lUnion à 28.
La zone euro, avec des moyens supplémentaires, des modes de décisions différents, cest lavenir de la construction européenne. Cela ne veut pas dire que cela écarte les autres. Ce serait dailleurs, à mon sens, particulièrement malvenu de considérer que les pays qui ne sont pas membres de la zone euro nont aucune vocation à y adhérer ou seraient des Européens de second niveau. Mais nous devons dabord marquer de la solidarité, de lintégration. Ce que jappelle de lintégration solidaire dans la zone euro. Je vous remercie donc de mavoir permis de faire présenter cette proposition une nouvelle fois.
QUESTION : Deux questions. La première rejoint celle de mon collègue sur le « BARROSO bashing » qui continue dans votre majorité et dans votre gouvernement. Vous êtes ici au Sommet européen, vous êtes satisfait du Sommet. Cest lEurope concrète que vous pouvez défendre auprès de Français parfois eurosceptique. Est-ce quil ny a pas une contradiction entre vous qui devez négocier avec cette Commission qui est satisfaite du travail et, en France, une petite musique dans votre majorité, une musique de campagne déjà délections européennes qui dit le contraire ? Et deuxième question, cest une information qui vient de nous parvenir : Angela MERKEL vient de faire une déclaration. Elle dit quil faudra passer par une modification des traités avant de pouvoir créer une autorité unique pour la résolution bancaire. Est-ce que, pour vous, il faut passer par les traités ou pas ? Est-ce que vous dites que tout sera prêt pour juin 2014. Est-ce quon a le temps en modifiant les traités ?
LE PRESIDENT : Nous avons clairement dit sur cette question, et je lai fait à plusieurs reprises, que sans modification des traités, nous pouvons aller le plus loin possible dans lUnion bancaire. Sil apparaissait juridiquement quil soit nécessaire de corriger le traité, nous le ferions. Mais cela ne pourrait venir que dun point de vue juridique et en aucune façon dun point de vue politique. Si il apparaissait que pour que ce mécanisme unique de résolution qui est vraiment lintervention, il y ait ce besoin-là, nous passerions bien sûr à cette étape. Avant dy arriver, je pense que nous devons aller le plus loin possible dans le cadre des traités existants. Rien ne doit nous arrêter à ce stade pour aller le plus vite possible au milieu de lannée 2014 pour être dans la consécration de lUnion bancaire.
Sur le premier sujet, je ny reviens pas puisque je suis déjà intervenu, il y a ce qui est du domaine de la politique et de la préparation des élections. Dabord, je considère que nous ne sommes pas encore en élections européennes. Les élections municipales vont arriver les premières. Quil y ait un débat, quil ny ait pas un débat de personnes, je lai dit parce que ce serait dailleurs considérer que ce serait « une » Commission, mais la Commission est pluraliste. Elle a peut-être un déséquilibre mais ce déséquilibre, comme je lai dit, vient des votes qui sont ont émis par les peuples à travers leurs Etats-membres qui ont désigné les membres de la Commission. La question nest donc pas sur les personnes et je dois travailler avec la Commission telle quelle est, avec les chefs dEtats et de gouvernements tels quils sont, procédant des peuples, avec M. BARROSO qui a été désigné par une procédure. Et puis, il y a les orientations politiques. Elles peuvent être discutées. Ce sera dailleurs lobjet des élections européennes. Mais dici là, jai à travailler avec les chefs dEtats et de gouvernements, avec la Commission européenne, avec le président de la Commission européenne. Et jentends le faire au nom de la France et dans lintérêt de la France et de lEurope.
QUESTION : Est-ce quil ny a pas un problème dannonces dans ces conseils et derrière tout ce que nous nous pouvons raconter à nos lecteurs, nos auditeurs ? On ne va pas revenir sur le pacte de croissance dil y a un an. Mais prenons les 6 milliards deuros, vous avez dit hier quils peuvent être multipliés par deux ou trois sur la durée jusquen 2020. M. Van ROMPUY dit cela peut aller jusqu??à 8 milliards, ce qui fait une différence. Ensuite, sur lUnion bancaire, on peut expliquer. Oui, les contribuables ne paieront pas et puis après on voit que cela peut être dans quelques années. Donc, dici quelques années, il peut se passer beaucoup de choses. Et derrière une toute petite question : vous avez évoqué deux « project bonds » hier soir. Pouvez-vous nous dire lesquels ?
LE PRESIDENT : Que les décisions européennes soient complexes, jen conviens. Que les décisions européennes soient longues à prendre, je fais en sorte que ce ne soit plus forcément le cas compte tenu de lurgence. Mais il nous revient à tous, je ne parle pas à la presse mais à ceux qui prennent les décisions, de les expliquer clairement. Parce quil sest passé des choses importantes dans ce Conseil. Jaurais préféré que lon aille plus loin, on préfère toujours aller plus loin, mais sur le programme contre le chômage des jeunes, il y avait déjà 6 milliards deuros dinscrit dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020. Ce qui a été décidé et le Parlement européen y a été pour beaucoup mais nous en avons convenu avec les chefs dEtats et de gouvernements, cest de consommer les 6 milliards deuros dans les deux premières années et de rajouter des crédits après ces deux dernières années parce quil y aura encore du chômage des jeunes. On peut le penser. Cela peut donc faire 8 comme cela peut faire dailleurs un peu plus. Mais au moins 8 dit M. Van ROMPUY, il a raison. Je pense que cela pourra même faire davantage si les crédits ne sont pas consommés dans les autres chapitres ou priorités du Conseil européen.
Deuxièmement, sur lUnion bancaire, elle garantit quoi aujourdhui ? Dabord, si un pays connaissait une difficulté aujourdhui pour ses banques, il y a une procédure qui existe qui est le mécanisme européen de stabilité, le MES, qui peut apporter des fonds aux Etats pour la recapitalisation des banques. Aujourdhui, les contribuables peuvent être pris en charge à travers ce mécanisme européen de stabilité enfin cest fait sont quand même protégés. Les épargnants sont protégés mais on doit les sécuriser. Cela va prendre encore un an même si je vous lai dit il y a déjà une procédure durgence qui est possible sil arrivait éventuellement une crise. A lhorizon dun an, on pourra donc affirmer clairement que les épargnants et les contribuables sont protégés. Je pense que cest une étape très importante de lunion économique et monétaire et donc de lEurope. Il mappartient parfois de critiquer, il y aussi un débat. Je préfèrerais que lon fasse plus pour la croissance, plus pour lemploi mais, en même temps, il y a des compromis à trouver. Là, cest un compromis qui, au moins pour les deux ans qui viennent, nous garantit davoir une Union bancaire qui sera prête lannée prochaine et davoir un programme pour lemploi des jeunes qui nest pas dans la compétence de lUnion européenne. LEurope aurait pu dire lemploi des jeunes et je pense que certains dailleurs devaient le penser autour de la table du Conseil européen lemploi des jeunes, chacun doit faire ce quil a à faire dans ses compétences nationales. Pas besoin daller mettre des crédits européens. Il y a des crédits européens, cest bien. Le pacte de croissance, 120 milliards deuros, jai insisté pour que cela aille plus vite. Nous sommes maintenant dans une exécution qui me paraît au bon rythme. Je veille pour que, dici la fin de lannée, tout soit à peu près consommé et notamment que la Banque européenne dinvestissement cela a été lobjet du Conseil européen puisse prêter davantage notamment aux PME. Nous avons même fait signer par la Banque publique dinvestissement française et la Caisse des dépôts française deux accords avec la Banque européenne dinvestissement pour prêter plus facilement et plus directement.
Après, il y a deux « project bonds » qui seront sur deux travaux dinfrastructure mais comme cela se présente le 9 juillet pour lensemble des infrastructures vous ne mavez dailleurs pas interrogé sur le rapport Duron mais comme cela sera présenté le 9 juillet, ces financements-là iront directement à ces deux projets-là.
Par ailleurs, et je lai déjà annoncé mais je vous le confirme, il y a, parmi les prêts de la Banque européenne dinvestissement, deux priorités qui ont été fléchées. Lune pour le plan campus universitaire, plus dun milliard deuros, et lautre pour les hôpitaux, plus dun milliard deuros. Donc dans le pacte de croissance, dans le plan dinvestissement de lEurope, cela correspond aussi à des aspects concrets. On pense que cela est toujours très théorique. Ce sera pour les hôpitaux et ce sera pour les universités. Cest cela aussi ce que lEurope peut apporter.
QUESTION : Monsieur le Président, je reviens une nouvelle fois encore à la Commission européenne. Au-delà des problèmes de personnes, le débat de fond sur une Commission qui est à un an de son mandat est lancé. Hier, un ancien ministre socialiste belge, M. Paul MAGNETTE, qui est un bon connaisseur de la chose européenne, mettait en cause publiquement la légitimité politique de la Commission, sur le mode « les Commissaires sont responsables au second degré devant les citoyens », et il ajoutait « il faudrait que cette Commission européenne laisse un petit peu plus de marge de manuvre aux dirigeants nationaux ». Alors jaimerais savoir si vous pouvez partager ce constat ?
LE PRESIDENT : Sil faut en plus que je défende les positions des socialistes belges, européensje vous lai dit, il y a un débat, il est politique, cest le droit des responsables politiques de sexprimer. Mais il y a des traités. Les traités sont faits pour être respectés. Le traité européen donne à la Commission des pouvoirs, des pouvoirs jusquau bout. Et la Commission, comme je lai déjà dit, elle ne procède pas de nulle part, elle a sa légitimité. Elle vient des Etats et du Parlement européen. Il y aura une prochaine Commission, mais ce nest pas tout de suite, cest dans plus dun an. Nous avons donc à travailler avec cette Commission, sans lui dénier, à aucun moment, sa légitimité. On peut parfois avoir un dialogue, une discussion, faire défense de ses arguments, je lai fait. Mais à un moment nous devons travailler ensemble, cest ce que nous avons comme responsabilité. Je ne vais pas attendre dans un an quil y ait une autre Commission avec dautres représentants, quest-ce que jen sais ? Quest-ce que je sais ce que vont être les élections au Parlement européen ? Il ny a donc pas de temps à perdre. Et donc tout ce qui peut être fait, gagné, pour lintérêt de lEurope et pour lintérêt de la France, jai à faire en sorte que ce soit obtenu. Voilà pourquoi je travaille dans ce Conseil européen, avant le Conseil européen et après le Conseil européen avec la Commission, telle quelle est, le président de la Commission et avec les collègues qui sont chefs dEtats et de gouvernements et qui procèdent des peuples.
QUESTION : Bonjour, je voulais savoir si vous êtes satisfait avec ce qui a été décidé sur la Banque européenne dinvestissement, parce que si je comprends bien, les Allemands ont mis des limites sur son pouvoir de levier.
LE PRESIDENT : Vous pensez toujours que les Allemands mettent des limites à tout vous : ils mettent des limites à lUnion bancaire. Ils mettent des limites à la Banque européenne dinvestissement. Ils mettent des limites au programme pour lemploi, mais je nai pas cette vision-là de lAllemagne. La Banque européenne dinvestissement doit à la fois, garder son triple A et, en même temps, prêter. Et prêter aux PME, prêter aux PME des pays qui peuvent être les plus en difficulté. Cest donc un équilibre. Ceux qui disent la Banque européenne pourrait perdre son triple A, ce ne serait pas grave, on peut répondre. Mais si elle perdait son triple A, le coût de sa ressource serait plus élevé, elle prêterait donc plus cher aux PME que lon veut justement favoriser. Je comprends donc cet argument. Et la position de compromis qui a été trouvée, cest la Banque européenne dinvestissement, qui doit prêter le plus possible tout en respectant un certain nombre de critères lui permettant de garder son triple A. Et sur les limites, non, on a veillé justement à ce que ce soit par rapport aux capacités de la Banque européenne dinvestissement, en faisant en sorte quelle puisse même avoir un effet de levier supplémentaire avec un instrument, qui va être présenté prochainement au Conseil européen, et qui doit être le plus simple possible, le plus rapide, et le plus ample dans leffet que cela peut avoir pour les PME.
QUESTION : Monsieur le Président, dans lobjectif de baisse du déficit public, qui est un engagement pris ici, M. Didier MIGAUD estime quil y a une marge de manuvre avec les fonctionnaires, quil faut faire des économies sur les fonctionnaires. Soit en leur demandant de travailler deux heures de plus, soit en réduisant leur nombre, quest-ce que vous en pensez ?
LE PRESIDENT : Mais, quest-ce que je demande aux fonctionnaires ? Cest de ne pas avoir daugmentation du point dindice. Cela a été déjà le cas en 2012 et, en 2013. Il y aura des négociations qui vont souvrir pour 2014. Mais cest un sacrifice important, qui dailleurs permet davoir une économie, si on peut dire, de près de 800 millions deuros. Chacun doit donc bien comprendre que les fonctionnaires ne sont pas exonérés de leffort, bien au contraire.
Quand on regarde lévolution des rémunérations, le point dindice est bloqué depuis quatre ans. Cest sans doute la catégorie qui, au travail, a eu le moins de retour en termes de pouvoir dachat.
Ensuite, sur dautres propositions : réduire le nombre de fonctionnaires pour lEtat, jai veillé à ce que tous les emplois créés dans léducation nationale je dis bien dans léducation nationale soient compensés par des non-remplacements dans les autres administrations, pour quon stabilise le nombre des fonctionnaires. Cest aussi un effort qui est demandé à toutes les administrations, autres que léducation nationale.
Il va y avoir une discussion sur les retraites, une autre sur les conditions de travail. Cela fait partie du dialogue. Mais ce serait trop simple de penser que lon peut régler les problèmes de finances publiques de notre pays près de 80 milliards deuros de déficit avec la variable dajustement que serait les fonctionnaires. Je rappelle que le non-remplacement dun fonctionnaire sur deux, cela ne rapporte si je puis dire que 500 millions deuros. Il sagirait, si on voulait trouver des moyens de réduire substantiellement le déficit, de se séparer dune fonction publique. Je ne laccepterais pas et les Français pas davantage. Les Français sont pour légalité, pour la justice mais ils sont aussi conscients que les fonctionnaires, ce sont les services publics. Quand on interroge les Français, ils pensent globalement quil y en a trop. Mais quand on prend domaine par domaine, on considère quil ny en a jamais assez : sécurité, police, gendarmerie, armée, hôpitaux, professeurs. Il ny a que peut-être pour les impôts où lon considère justement malgré tout, la lutte contre la fraude fiscale, cest ce qui a le rendement le plus élevé et en ce moment, il y a une mobilisation de ladministration des impôts ou des douanes pour lutter contre la fraude fiscale. Et cela rapporte près de 20 milliards deuros ! Nous avons, là-aussi, à considérer la fonction publique, le service public, tout en demandant aux uns et aux autres, et aux fonctionnaires de faire des efforts. Et ils en font !
Cest comme pour les dépenses publiques, je veux revenir sur le rapport DURON - cest toujours intéressant de répondre à des questions qui ne sont pas posées. Au même moment où dun côté de léchiquier politique, on dit « il faut faire des économies, absolument », et dire « on veut notre ligne TGV » et notre ligne TGV, qui avait été promise dans des conditions invraisemblables, où il y en avait pour 240 ou 250 milliards deuros, où chaque fois quune autorité se déplaçait, elle promettait une ligne TGV, forcément les gens disaient « bon, vous lavez ». Pas nous, nos prédécesseurs : « vous avez annoncé la ligne TGV, elle est à nous ! » Mais qui va la financer ? Qui va la payer ? A partir dun certain moment, au-delà même de savoir sil faut faire du TGV ou de lamélioration des lignes existantes, cest de largent public ! On doit être responsables et cohérents. Cest un vieux principe dans la République de, ceux qui demandaient plus de dépenses et moins aux contribuables. Cest vieux comme la 3ème République. Déjà, CLEMENCEAU contestait ce point de vue. Cest tellement facile : on demande dans lhémicycle plus de dépenses et devant les contribuables, moins dimpôts. Non, à un moment, cela ne marche plus. Cest ce qui explique que la dette fasse 91%. La dette publique de 91%, cest la somme de toutes les promesses qui nont pas été tenues autrement que par le crédit, lemprunt. Mais pas la recette correspondante.