17 mai 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la politique du gouvernement en faveur du logement, à Caen le 17 mai 2013.

Monsieur le député-maire,
Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du Conseil régional,
Mesdames, Messieurs,
Je tenais à venir à Caen, aujourdhui, non pas pour retrouver cette grande ville, qui dailleurs mavait accueilli dès les premiers jours qui avaient suivi ma prise de responsabilité, sous un soleil éclatant, comme aujourdhui, mais parce que cest ici à Caen que lEtat, avec une ville, va signer lopération de cession que jattends depuis un an.
La fonction présidentielle, contrairement à ce que certains pourraient imaginer, ne permet pas de décider de tout. Javais pris un engagement comme candidat, de permettre que les villes où les bailleurs sociaux qui voudraient, sur un terrain propriété de lEtat, ou dun opérateur public, investir, puissent trouver une réponse appropriée à leur demande.
Lidée est simple. Nous manquons de logements, nous navons pas suffisamment de projets de construction, et une des causes, cest le manque de terrains disponibles.
Terrains privés, qui sont trop chers, terrains publics qui sont souvent présentés par ladministration à des niveaux de prix élevés et surtout qui ne sont pas vendus.
Cette proposition a fait partie de mes engagements aussitôt élu et installé à la présidence de la République, cétait le premier Conseil des ministres. Jai demandé au Gouvernement de préparer un projet de loi permettant de faciliter les cessions de terrains publics aux bailleurs sociaux et aux collectivités qui prenaient lengagement de réaliser un certain nombre de constructions, de logements sociaux, mais pas seulement de logements sociaux.
Un projet a été présenté et cest Cécile DUFLOT, la ministre de lEgalité des territoires et du Logement qui en a eu la responsabilité. Elle a donc vécu ce quest le débat parlementaire, qui peut parfois durer des mois - nous en avons une preuve récente -, mais qui a duré des semaines, parce que sur ces questions de logement, il est légitime que le Parlement puisse faire valoir ses propositions, ses amendements et lamélioration dun dispositif.
Il sen est fallu de peu que cette loi puisse connaitre un sort funeste par le Conseil constitutionnel. Mais le Conseil constitutionnel a permis néanmoins que sur certains points, nous rediscutions, cela a été plutôt vite.
Une loi est votée, permettant donc la cession, nous sommes à la fin de lannée 2012. Faut-il encore quil y ait les décrets dapplication et que ladministration puisse se mettre en situation de pouvoir, une fois les textes pris, organiser des cessions. Il sen est fallu de quelques mois pour que nous puissions avoir cette opération. Nous y sommes enfin, vous imaginez mon bonheur.
Jusque dans les derniers jours, avant darriver ici, il a fallu, et jen remercie le ministre du Budget, que nous levions les derniers obstacles, car il y en a toujours. Je ne veux pas accuser ladministration, cest tellement facile, dexonérer sa propre responsabilité en disant : Cest la faute de fonctionnaires trop zélés. Non, ils ne font quappliquer les textes et je rends hommage à cette administration qui est de haute qualité, ladministration des Finances comme ladministration de ce que lon appelait lEquipement, aujourdhui du Territoire.
Jusquau dernier moment, il y avait encore une discussion, cest de savoir à quel niveau allait être la décote du prix. Au départ, javais une idée simple : cétait gratuit. Au moins il ny avait pas besoin de chercher le prix.
Mais il y a aussi, et cest normal, des critères quil convient de poser. Cela peut être gratuit quand ce ne sont que des logements sociaux qui pour être bâtis, exigent que lEtat mette effectivement, gracieusement le terrain à la disposition du bailleur ou de la collectivité. Cela ne peut pas être complètement gratuit quand il y a des logements qui ne sont pas que sociaux et qui doivent être mis sur le marché dans des conditions conformes à ce quexige la concurrence, par rapport à dautres promotions immobilières.
Et puis le ministre du Budget est tout à fait dans sa tâche quand il dit : Mais vous avez reçu la ville de Caen, par ailleurs dautres subventions, donc je suis amené à en tenir compte.
Il y a eu ce que lon appelle une tractation et une décote de 25% a pu être proposée.
Cela représente néanmoins, plus de 1 million deuros. Sil ny avait pas eu cette décote, permettant un gain pour la collectivité et donc pour les futurs opérateurs d1 million deuros, il est possible et même certain que cette opération naurait jamais vu le jour.
Je veux saluer tous ceux qui y ont contribué. Pas pour me faire plaisir, mais pour réussir à donner ce bel exemple. Car en réalité, si nous arrivons à mobiliser les 1000 terrains que nous avons identifiés, cela peut représenter jusquà des dizaines de milliers de logements.
Or, comme nous voulons réaliser, cela a été rappelé par M. DURON, 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, nous devons agir dabord sur le foncier.
Le foncier de lEtat, souvent le ministère de la Défense est le plus sollicité, car compte-tenu du format de nos armées qui a diminué ces dernières années, il y a des casernes et cest le cas ici à Caen, qui se trouvent disponibles.
Mais le ministère de la Défense a des arguments, en disant : Nous devons financer les armées de demain, nous avons des investissements très importants à engager pour nos sous-marins, pour notre dissuasion nucléaire, pour notre projection à lextérieur. Je rends hommage à nos soldats et à nos forces armées. Il a fallu contraindre le ministère, il sest rangé à vos arguments.
Mais il ny a pas que lEtat, il y a aussi des terrains de ce que lon appelle les « opérateurs ». La SNCF, RFF, la RATP - mais à mon avis ici, vous nêtes pas concernés. Beaucoup dopérateurs ont des espaces disponibles. Je ne veux pas du tout mettre en cause telle ou telle de ces entreprises, mais jai été Maire avant dêtre président de la République - cest une bonne expérience, qui fait que lon na pas besoin de cumuler, on peut faire des mandats successifs à des fonctions différentes Discuter avec RFF pour la cession dun terrain, ce nest pas facile, parce que là aussi il y a des exigences dentreprise, et une entreprise publique doit aussi présenter des résultats.
Donc, nous avons convaincu ces opérateurs et je les en remercie, de mettre à disposition, à meilleur prix, avec les décotes, quelquefois gratuitement, les terrains que nous pouvions identifier.
Là, cela a été un exercice très intéressant, parce quil y avait ce que ladministration fiscale connaissait des terrains. Elle ne connait pas tout, ladministration fiscale, on sen est aperçu.
Nous avons, grâce à cette action, pu retrouver des terrains qui étaient effectivement propriété de lEtat, de tel ou tel ministère ou dopérateurs, et qui nétaient pas identifiés ou connus de ladministration. Nous pourrons encore engranger un certain nombre de terrains.
Il y a plusieurs questions qui arrivent à lesprit : Il y a aussi les terrains des hôpitaux. Là aussi, problème de financement des hôpitaux, ils veulent et cest bien légitime, retrouver le prix de leur cession, dans leur compte, mais là encore, nous aurons des discussions avec les établissements hospitaliers, je parle ici à Caen dun établissement hospitalier qui fait lobjet dune interrogation par rapport à son avenir et je veux rassurer ici le Maire, nous ferons en sorte que nous puissions trouver la meilleure solution pour létablissement hospitalier de Caen.
Nous devons aussi mobiliser tous ces terrains. Est-ce que lon va régler les problèmes du logement simplement par cette grande opération que nous réalisons aujourdhui, cest-à dire ce transfert du foncier public vers la construction et vers les opérateurs qui peuvent dailleurs, être privés ? Non bien sûr, mais cest une première condition pour atteindre notre objectif.
Nous avons fait beaucoup pour le logement, pourquoi ? Dabord, parce que cela correspond à une attente des français, il y a trop de nos concitoyens qui sont mal logés, je ne parle pas de ceux qui ne sont pas logés du tout, je parle de ceux qui sont mal logés. Dans de mauvaises conditions, avec des appartements ou des maisons qui ne correspondent pas à des niveaux de confort ou à des tailles suffisantes par rapport aux ménages concernés.
Nous avons des personnes qui attendent depuis trop longtemps des logements sociaux et qui nen trouvent pas. Il y en a dautres qui voudraient accéder à la propriété et qui ny parviennent pas. Il y en a enfin, beaucoup qui sont hors du parc social, pas suffisamment solvables pour accéder à la propriété et qui ne trouvent pas de logement correspondant à leurs besoins dans le parc privé. Nous avons à construire davantage de logements.
Il y a une deuxième raison, qui est celle de soutenir lactivité économique. Parce que le secteur du bâtiment est essentiel pour la croissance que nous cherchons, que nous nattendons pas. On ne fait pas une politique en pensant que ce sont les autres qui vont régler les problèmes à notre place.
Même si cest vrai quil y a une récession en Europe et nous en sommes victimes, nous nallons pas attendre que les pays puissent retrouver un peu plus de souplesse et de liberté par rapport à leur propre trajectoire budgétaire pour que nous puissions retrouver de la croissance. Il faut aller la chercher, la créer, la faire sortir de terre et cest le cas de le dire pour le logement, parce que nous avons besoin de plus demplois et le logement fait partie de ces emplois non délocalisables, de ces emplois qui permettent à des grandes entreprises dêtre performantes, mais aussi à beaucoup de PME et à beaucoup dartisans de pouvoir également avoir du chiffre daffaire et de lactivité.
Cela correspond aussi à des qualifications qui sont précieuses et quand on les perd, on ne les retrouve plus. Si lon veut former des jeunes aux métiers du bâtiment, il faut quil y ait de lactivité.
Pour nous, le logement est à la fois une priorité sociale et une priorité économique. Jajoute que cest aussi une priorité écologique. Nous en avons eu une illustration cet après-midi à Caen.
Quand vous êtes capables de rénover des logements, 730, dans ce quartier de la Folie-Couvrechef, nous offrons aux particuliers concernés, une amélioration de leur pouvoir dachat. Dans le quartier où jétais, ce sont des catégories modestes, avec des personnes qui ont des petites retraites. Quand elles sont âgées et ont des petits salaires, quand ils sont plus jeunes et quelquefois vivent de prestations. Nous avons absolument besoin de leur redonner du pouvoir dachat.
La rénovation thermique permet aussi de donner de lactivité économique à beaucoup de petites entreprises. Et puis cela offre des conditions de confort à la population bien meilleure, parce que lon commence avec de la rénovation thermique et on finit avec de la sécurité, avec de lagrément et avec une amélioration de la qualité de la vie. Voilà pourquoi nous devons avoir une politique du logement.
Nous avons fait voter une première loi, dite loi DUFLOT. Je ne sais pas pourquoi dailleurs, les lois sur le logement portent toujours le nom des ministres. Ce qui fait que cela remonte à loin, ce qui offre à Cécile DUFLOT une perspective davoir son nom inscrit encore pour de longues années dans la vie de nos concitoyens et même de nos promoteurs.
Donc, il y a un dispositif fiscal qui porte votre nom et qui est encourageant pour les investisseurs privés.
Il y a un certain nombre de dispositions qui ont été prises pour favoriser une fluidité du marché, une meilleure protection des locataires et aussi une incitation forte pour que les opérateurs puissent faire davantage de logements. Mais cela ne suffit pas.
Jai constaté et la ministre également, quil y a trop de lenteur. Jen ai fait la démonstration pour cette histoire de cession. Entre une promesse, une décision et la première traduction, la première opération, un an ! Cest dire si nous avons besoin daccélérer.
Parce que voter la loi, prendre des décrets dapplication, avoir ensuite les administrations qui puissent intervenir, cela prend trop de temps.
Nous avons décidé de prendre par ordonnance, un certain nombre de dispositions qui vont faciliter lexistence des acteurs économiques en matière de logement - notamment, pour la délivrance dun certain nombre dactes administratifs, de procédures, et également pour transformer des bureaux en logements - pour faire en sorte que nous puissions surélever un certain nombre dimmeubles sans que cela pose de difficultés, dissuader les recours abusifs.
On sest rendu compte quil y avait un certain nombre de groupes ou de personnes suffisamment rouées, pour ne pas dire plus, qui faisaient des recours pour bloquer des opérations de construction et ensuite obtenir éventuellement des compensations en cas de retrait de ce recours, de cette procédure ! Il y a 30 000 logements qui sont aujourdhui bloqués.
Donc, les ordonnances vont permettre là encore de mettre fin à ce type de pratiques et daccélérer un certain nombre dautorisations pour faire plus de logements.
Ces ordonnances supposent une loi dhabilitation, en ce moment en discussion à lassemblée nationale, et je remercie les parlementaires davoir compris que ce nétait pas ôter un pouvoir au parlement. Cest au contraire, donner davantage de moyens pour être plus efficaces pour lensemble de la collectivité. Tous les groupes politiques ont eu cette lucidité ce nest pas toujours- quand on peut se retrouver ensemble sur le même objectif, cest quand même mieux.
Lopposition, la majorité, cela existe dans notre pays, ce en sont pas toujours les mêmes, ce qui donne toujours des espoirs quand on est dans lopposition, et de la vigilance quand on est dans la majorité cela fait partie de la démocratie. Mais, il y a des sujets qui dépassent les clivages partisans. La rapidité, laccélération, lallègement des procédures, voilà ce qui peut nous unir. Quand on est élu dune collectivité, on est aussi désireux daller vite.
Il y aura une troisième étape dans la politique du logement, prochain projet de loi qui va être présenté, et là aussi avec des mécanismes qui permettront de favoriser la construction et daméliorer les rapports entre locataires et propriétaires.
Parce quun propriétaire, quest-ce quil craint ?
Cest pourquoi il ny a pas toujours autant dinvestissements en matière de logement. Cest quen louant un bien, il ne soit plus payé par un loyer et quil puisse y avoir effectivement une immobilisation dun bien et une privation dune ressource qui est quelquefois essentielle pour les propriétaires.
Car là aussi, il ne fait pas avoir didée préconçue. Il y a beaucoup de propriétaires qui sont des ménages modestes, qui nont que cet élément de patrimoine pour assurer leurs retraites. Nous devons là encore, leur garantir le paiement effectif du loyer, ce qui sera le cas dans la prochaine loi DUFLOT, deux lois DUFLOT et la série nest pas terminée
Donc, je voulais ici vous dire que la politique du logement est une politique essentielle. Une priorité du gouvernement, une priorité de lEtat, et que cela permet datteindre trois objectifs :
Un objectif qui est de mieux loger, de mieux satisfaire des ménages qui ont des besoins aujourdhui très différents selon les âges de la vie.
De faire quil y ai plus de circulation, quon ne reste pas toujours dans le parc social, quon passe du parc social au parc privé, puis du parc privé à laccession à la propriété. Cest aussi une aspiration de beaucoup de nos concitoyens.
Quon puisse en fonction des âges trouver des logements qui correspondent à ses propres besoins. Les personnes âgées - avoir des logements qui soient accessibles - comme pour les personnes dépendantes ou handicapées. Que pour les familles, on ait des logements plus larges. Vous savez quaujourdhui, cest très difficile davoir des logements avec la taille suffisante, parce que le prix du foncier est tellement élevé que même pour les opérations dans le parc social, les bailleurs réduisent la taille des logements voir même la taille des pièces.
Donc, la première priorité, cest de bien loger les Français.
La seconde priorité, cest de prendre de lavance sur le plan écologique et énergétique. La précarité énergétique est là aussi finalement une inégalité de plus qui fait que ce sont les plus modestes qui payent les charges locatives les plus élevées.
Et la troisième priorité, cest une priorité de croissance.
Voilà pourquoi je voulais venir à Caen, parce quici vous avez été exemplaires. Vous avez été capables de réussir des opérations de rénovation énergétique, de création de logements et je le constate, de réussir la première opération de cession dun terrain public.
On se souviendra, lhistoire se souviendra, il y aura une plaque qui sera gravée ici Il y a eu suffisamment dévènements historiques dans cette salle, on se souviendra que le premier terrain de lEtat qui a été cédé non pas gratuitement, mais enfin - on dira que cela a été presque gratuitement. Cela sest fait ici à Caen, en notre présence et jen suis très heureux.
Merci.