15 mars 2013 - Seul le prononcé fait foi
Conférence de presse de M. François Hollande, Président de la République, sur la coordination des politiques économiques au sein de l'Union européenne et sur la situation en Syrie, à Bruxelles le 15 mars 2013.
LE PRESIDENT : « Mesdames, Messieurs, je vous retrouve à la fin du Conseil. Nous nous étions déjà rencontrés sur la première partie. Tard hier soir, il sest tenu un sommet de la zone euro. Je souhaite en effet que régulièrement il puisse y avoir des réunions à 17 pour appréhender ce quest léconomie de cette zone, comment nous pouvons mieux coordonner nos politiques et comment nous pouvons renforcer encore les instruments de stabilité et de croissance.
Dans la réunion dhier soir, il y a eu un focus qui a été fait sur les questions de productivité et de compétitivité. Une zone monétaire suppose davoir : une politique monétaire, celle qui est conduite par la Banque centrale £ une politique budgétaire coordonnée £ mais également une politique qui vise à renforcer la capacité de croissance et qui veille également à mettre en cohérence tous les pays de cette zone, pour quils puissent avoir le niveau le plus élevé de compétitivité et de productivité. Ensuite, à la zone euro, par la coordination de ces politiques, et à chacun des pays, de relever le niveau de la performance industrielle. Nous avons donc regardé ce quétaient les niveaux de productivité et comment nous pouvons les relever.
Il y a eu également une discussion sur la coordination des politiques économiques. Il y a des pays qui sont en déficit de balance de paiement courant et qui doivent donc faire des efforts pour redresser leur commerce extérieur, pour améliorer leur compétitivité. Et puis, il y a des pays qui sont en excédent de paiement courant, qui doivent garder ces avantages, mais qui doivent également soutenir leur demande intérieure pour quil puisse y avoir, dans la zone euro, un soutien direct à la croissance. Pendant que dautres font des efforts pour maîtriser leurs comptes publics ou extérieurs.
Cette discussion a donc été utile. Elle na pas débouché sur des décisions immédiatement opérationnelles, mais elle donne un cap stratégique à la zone euro, qui ne peut pas être simplement une zone de discipline, une zone de vigilance, une zone de stabilité. Tout cela est nécessaire et dailleurs des progrès ont été enregistrés depuis plusieurs mois. Jai personnellement salué laction qui avait été conduite par Mario MONTI en Italie. Pas simplement pour lItalie, mais pour lEurope.
Mais il y a aussi, au-delà de la stabilité, des règles budgétaires, une croissance à préparer et qui est spécifique aussi à la zone euro. Parce que dès lors que lon est dans une zone monétaire, nous avons forcément des convergences aussi en terme de politique de compétitivité, de politique industrielle et de politique de production. Cela cétait le premier sujet. Chypre sera évoquée cet après-midi en Eurogroupe. Nous navons pas entre chefs dEtat et de gouvernement abordé directement cette question.
Ce matin, il y a eu une discussion comme nous avions eu lors de la précédente réunion du Conseil européen, sur la Chine la dernière fois, sur la Russie cette fois-ci. Partenaire stratégique, partenaire important, partenaire avec lequel, Européens, nous devons aller unis dans un certain nombre de négociations que cela soit sur lénergie, sur le commerce ou sur la question des droits de lHomme.
Enfin, il y a eu la question de lattitude de lEurope face à la Syrie qui a été posée. Je lai fait. Je dois constater quil y a eu des progrès, depuis déjà plusieurs semaines, sur la manière dont laquelle lEurope regarde sa relation avec la Coalition qui est aujourdhui, je le rappelle, la représentante légitime du peuple syrien.
Il y a eu deux Conseil des Affaires étrangères qui se sont tenus, au mois de janvier et au mois de février, et qui ont permis non seulement de reconnaître la Coalition, mais en plus de lui livrer un certain nombre de matériels non létaux, ainsi quune assistance technique. Ce qui est maintenant regardé, cest ce qui peut être fait pour lever lembargo. Nous avons une date ultime qui est la fin du mois de mai. Dici là, il y aura une prochaine réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères, en Irlande, pour que soient regardées toutes les conséquences de la levée de lembargo.
Pourquoi je souhaite quil y ait cette évolution de lattitude européenne ? Pourquoi maintenant ? Parce que justement, cela fait deux ans que le drame se produit et que le nombre des victimes salourdit de jour en jour. Ces derniers mois, aucune solution politique na été trouvée, malgré toutes les tentatives du médiateur, M. BRAHIMI, malgré les discussions que nous avons pu avoir sur le plan bilatéral, malgré les réunions du Conseil de sécurité Rien na pu être obtenu du régime de Bachar Al ASSAD.
Il y a eu, enfin, une troisième évolution. Cest justement celle de la reconnaissance, par une grande partie de la communauté internationale, de la Coalition comme représentante légitime du peuple syrien. Sajoutent les armes qui sont livrées par un certain nombre de pays, dont la Russie, pour parler clairement, à Bachar Al ASSAD et à son régime.
A partir de là, nous devons en tirer toutes les conclusions. Jestime que lEurope doit prendre cette décision dans les prochaines semaines. Cest ce qui nous est demandé par la Coalition, mais pas seulement par la Coalition. Par la Coalition parce quelle veut, dès lors quil ny a pas dissue politique pour le moment la pression militaire pourra sûrement la faire ressurgir , dès lors quelle est reconnue internationalement, davoir les moyens de pouvoir défendre les zones qui ont été libérées.
Ensuite, nous devons faire en sorte que ces armes aillent bien à la Coalition, et seulement à la Coalition, et ne puissent pas être détournées par des groupes dont nous naurions pas lassurance quils en feraient le meilleur usage. Enfin, il y a des pays qui nous assurent quils pourront, aussi, en assurer le contrôle et lassistance technique. Je pense notamment aux pays de la Ligue arabe.
Il y a donc aujourdhui une évolution à engager. Elle sera utile pour chercher léventuelle solution politique, elle sera nécessaire pour défendre la population en Syrie. Tel est le débat que nous avons eu. Il va se poursuivre lors de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères. Voilà létat de nos discussions sur cette question importante et qui affecte lensemble de la vie internationale ».
QUESTION : « Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur létat des discussions dont vous venez de parler ? Quels sont les pays qui seraient en train dévoluer vers la France et ceux qui sont extrêmement éloignés ? »
PRESIDENT : « Moi, je ne veux pas chercher à diviser ou à séparer. Je veux faire en sorte que lUnion européenne puisse adopter une position commune. Je défends donc une attitude qui est, à la fois, celle de la responsabilité face à la situation en Syrie et aussi celle de la cohérence et de la cohésion que lEurope doit donner.
La discussion devait donc avoir lieu. Elle avait dailleurs déjà eu lieu lors de plusieurs Conseils des ministres des Affaires étrangères. Nous avons en plus une date, la fin du mois de mai, pour en décider puisque nous aurons à délibérer sur cette question de lembargo. On peut le faire avant, mais, de toute manière, nous aurons à le faire à la fin du mois de mai.
Ce que je cherche donc, cest à convaincre. Pour linstant, il y en a beaucoup qui sont convaincus autour de la table. Mais pas tous. Je respecte cette position parce quil y a toujours cette interrogation sur les conséquences de cette levée de lembargo. Et aussi des assurances qui doivent être données sur lutilisation de ces moyens matériels et militaires. Pour savoir si cela sera contrôlé et si lopposition syrienne est capable, aujourdhui, de les utiliser sans quil y ait de conséquences sur les populations civiles et sans quil y ait de risque dêtre détournés par des groupes dont nous considérons quils peuvent être dangereux pour laprès-Syrie ou plus exactement pour laprès-Bachar Al ASSAD.
QUESTION : « Est-ce que vous êtes confiant, quand vous parlez de cette date du 31 mai sur la possibilité de réunir les 27 autour de cette idée de la levée de lembargo ? Plus précisément est-ce que vous pensez possible et même souhaitable que certains pays lèvent lembargo unilatéralement avant ou après cette date ? »
LE PRESIDENT : « Nous devons chercher, je lai dit, une position commune. Nous avons une politique étrangère et de sécurité commune. Elle doit trouver sa place. Ce nest pas facile à 27 bientôt à 28. Il y a des nuances, il y a des sensibilités, il y a des traditions. Des pays viennent de ce que lon appelle « la neutralité ». Nous devons faire un effort pour quune position puisse être trouvée. Une date est fixée pour la fin du mois de mai. Cela peut arriver avant, puis ensuite nous verrons bien ce quil y a lieu de faire. Mais jai dit ce que serait lattitude de la France. Je dois chercher la position commune et je pense que la méthode qui a été utilisée celle de réunions des ministres des Affaires étrangères, pour regarder à chaque fois létat de la situation est la bonne manière de lappréhender. Cette méthode est la bonne.
QUESTION : « En France, au sujet de la Syrie, plusieurs voix politiques se sont élevées, certaines parlant de folie, dautres daction isolée de la France, dautres dapprenti sorcier Quest-ce que vous répondez à ces interpellations ? Quest ce vous pouvez dire également aux Français, qui pourraient sinquiéter de cette perspective ?
LE PRESIDENT : « Dabord les Français parce que ce sont eux qui doivent être juges de ce que nous faisons et protégés par ce que nous décidons. La levée de lembargo naura aucune conséquence sur les relations que nous avons avec le régime de Bachar Al ASSAD, nous nen navons plus ! Nous considérons quil doit partir, il ny aura donc pas de changement de notre diplomatie.
Nous considérons que ce quil fait, aujourdhui, pour son peuple est criminel. Je ne peux pas dire davantage Levée de lembargo ou pas levée de lembargo, la France a été le premier pays du monde à reconnaitre lopposition à lépoque, cétait lopposition, aujourdhui cest la Coalition nationale comme représentante légitime du peuple syrien. Jai pris mes responsabilités et cette position, dailleurs, est devenue celle de lEurope et dune large partie de la communauté internationale.
Nous luttons contre le terrorisme, partout dans le monde. Nous serons donc attentifs aux aides matérielles que nous faisons à la Syrie. Nous lavons déjà fait pour ce que lon appelle le matériel non létal, laide humanitaire ce que nous avons fait déjà dès lété ou laide financière puisque nous avons réuni à Paris une Conférence des amis.
Puisque nous avons déjà aidé lopposition, nous aurons à cur de le faire jusquau bout, parce que nous avons confiance en elle. A partir de là, la France a pris cette position. Elle a déjà convaincu lEurope à la soutenir à travers la reconnaissance, à fournir du matériel et de laide humanitaire. Nous continuons dans ce même processus et nous luttons contre le terrorisme partout. Parce que nous voulons éviter quen Syrie, il puisse y avoir, par la radicalité de certains groupes, un risque terroriste comme nous lavons connu en Libye. La France doit savoir quelle est protégée contre le terrorisme par une lutte contre le terrorisme à léchelle du monde.
Enfin, sur les positions des uns et des autres, si je devais les commenter ! A peine étais-je élu quon me demandait de faire, pour la Syrie une aide qui navait pas était prévue jusque-là. Certains me demandaient même daller à Moscou cet été, en toute hâte, et demander à Mme MERKEL de maccompagner pour convaincre M. POUTINE. Certains me demandaient de livrer des armes, déjà à cette époque, les mêmes qui aujourdhui sinterrogent ou salarment
Ecoutez, franchement, il y a ce qui relève de la politique nationale, elle a ses règles et ses principes et je ne veux pas ici commenter ces propos. Et puis il y a ce qui relève de la responsabilité. La mienne, cest de faire en sorte que nous puissions être cohérents dans les actions que nous conduisons par rapport à la Syrie depuis plusieurs mois. Quand je dis plusieurs mois, cest aussi par rapport à la période avant mon élection.
Il y a une cohérence que nous devons rappeler parce quil y a une continuité qui doit aussi, au-delà des alternances, être menée et respectée. Il y a donc ce que nous avons engagé, depuis déjà des mois, et qui doit trouver son prolongement. Je ne dis pas son aboutissement parce que ce nest quune étape et que nous cherchons, de toute manière une solution politique. La pression militaire fait partie de cette démarche. Voilà je nai pas dautres commentaires à faire sur les commentaires ! »
QUESTION : « Avec les 27, vous aviez à discuter de la Russie. Quel est le message que vous envoyez aujourdhui à Moscou ? Sur la question de la Syrie, est-ce que vous pouvez lui assurer quelle gardera, sil y une alternance en Syrie, sa base militaire ? Quels sont les éléments de langage que vous allez adopter avec les Russes parce quune des clés de la solution politique est à Moscou pour les amener, non pas à cesser leur livraison darmes, mais que leur livraison darmes soit plus utile pour une solution politique quelle ne lest aujourdhui ? Deuxièmement, comment allez-vous assurer le contrôle des armes ? Certaines armes sont parties de Libye apparemment se sont retrouvées en Syrie dans des mains qui nétaient pas automatiquement les bonnes. Comment va-t-on sassurer de ce contrôle de ces armes ? »
LE PRESIDENT : « Aux Russes et au président POUTINE, jai déjà dit et je le répète devant vous : nous respectons la position de la Russie dans cette région et les intérêts quelle peut encore détenir ou préserver. Cest légitime, la Russie fait partie de ces puissances qui contribuent, qui peuvent contribuer à léquilibre, à la stabilité. Jai plusieurs fois garanti, autant quil était possible, au président POUTINE que laprès ASSAD ne serait pas, pour les Russes, la fin de la relation que ce grand pays a avec la Syrie. Nous avons donc tout fait pour associer la Russie à la solution politique.
Dailleurs, quand je suis allé à Moscou, nous avons envisagé avec le président POUTINE linitiative que des éléments du régime puissent discuter avec lopposition syrienne pour chercher la solution politique, si ces éléments étaient acceptés par lopposition et si ces éléments acceptaient de discuter avec lopposition. Mais je constate que rien na bougé.
Quelques jours après que jai pu lancer cette initiative et que les Américains et les Russes en aient également discutée, Bachar Al ASSAD a annoncé des élections en 2014, en Syrie et quil était candidat à sa succession. Ce qui nétait quand même pas louverture qui était attendue ! Donc, cette position qui pourrait être, demain, la levée de lembargo nest pas destinée à couper les relations avec la Russie. Au contraire.
Nous avons intérêt à trouver la solution sinon il y a une pression militaire qui va se faire. Vous avez raison de dire que des armes qui avaient été livrées, pendant linsurrection et la rébellion en Libye, se sont retrouvées sur dautres champs et dautres lieux. Au Mali mais aussi en Syrie.
La question de la livraison des armes, pour avoir la meilleure réponse, exige que la Coalition donne toutes les garanties. Cest parce quelle les fournit que nous pouvons aujourdhui envisager la levée de lembargo. Nous avons toute certitude maintenant de ce que serait lutilisation de ces armes. Enfin, il y aura un accompagnement, une aide technique, une assistance qui seront fournis. Ce qui, là aussi, évitera un certain nombre de déperdition ».
QUESTION : « Dabord, est ce que vous avez parlé de laccord de libre-échange avec les Etats-Unis au cours de ce sommet. Je voulais également savoir quelle était la position de la France concernant cet accord de libre-échange sachant que les droits de douanes sont déjà à un niveau historiquement bas. Est-ce quon ne risque pas de négocier des secteurs qua priori on na pas intérêt à négocier comme les normes sanitaires, la culture etc. ?
Seconde question concernant la nouvelle répartition des sièges au sein du Parlement européen qui a été votée, cette semaine, par les députés européens et qui viole la règle du traité de Lisbonne sur la dégressivité proportionnelle. Elle revient, en gros, à priver la France et la Grande-Bretagne des députés quils auraient dû avoir en fonction de lévolution démographique. Quelle est la position de la France ? Est-ce que la France va bloquer au mois de juin cette répartition ? »
LE PRESIDENT : « Nous navons pas discuté de laccord de libre-échange entre lEurope et les Etats-Unis. Mais nous aurons à en débattre puisquun mandat doit être donné à la Commission européenne. Ma position est la suivante : je suis pour quil y ait une négociation qui souvre pour lutter contre les barrières douanières ou les freins aux échanges de façon à favoriser la croissance.
Mais il doit y avoir des garanties par rapport à certains domaines. Vous avez évoqué les normes sanitaires. Cela en est un auquel nous sommes attentifs, notamment dans cette période. Mais il y a un autre domaine sur lequel je voudrais insister, cest la question de lexception culturelle et notamment des services audiovisuels. Ce secteur comme il avait été exclu pour dautres accords, ne peut pas se trouver dans le mandat . Je veux que ces domaines soient exclus du champ de la négociation.
Sur la deuxième question, la répartition des sièges. Il y a des règles effectivement prévues par les traités, cest la formule de « la dégressivité proportionnelle » un jargon très européen, pour bien comprendre quil ny a rien à comprendre. Cest tout simplement la règle que le nombre de siège doit être fonction de la population ».
QUESTION : « Si je peux revenir sur les questions économiques, hier soir, M. MONTI vous a envoyé une lettre qui était un cri dalarme. Il disait quil faut des mesures pour éviter la marée montante du populisme. La solution politique quon essaie en ce moment de trouver en Italie une alliance avec un mouvement qui demande un referendum sur lEuro cest la réponse et la bonne solution ?
LE PRESIDENT : « Mario MONTI a en effet adressé une lettre à tous les chefs dEtat et de gouvernement de lEurope. Il leur a donné une leçon quil retenait du scrutin qui venait davoir lieu en Italie. Sur le plan de la conduite économique, il a dit que ce quil avait fait avait permis, non seulement à lItalie mais aussi à lEurope, de sortir de linstabilité financière que nous connaissions il y a encore quelques mois.
Moi, je noublie pas le rôle qua joué Mario MONTI, au Conseil européen du mois de juin dernier, pour nous permettre de trouver des instruments qui sont maintenant en place. Le rôle également quil a joué dans son pays, pendant plusieurs mois, pour prendre des mesures qui ont fait que la spéculation sest ralentie pour ne pas dire retirée de la zone de la monnaie unique.
Il nous a aussi fait valoir une leçon. Cest que si les pays vont trop vite dans lajustement, sils nentrevoient pas la croissance, lespérance, le renouveau dans les décisions qui sont difficiles à prendre sur le plan des disciplines budgétaires, des améliorations de compétitivité ou des reformes structurelles , alors le risque, cest le rejet non pas des gouvernements, mais le rejet de lEurope en tant que telle. Cette leçon doit donc être absolument retenue y compris dans les décisions quaura à prendre lEurope dans les prochains mois.
Sur la situation politique italienne, il ne mappartient pas den juger. Le président de la République italienne aura à faire le choix de designer un président du Conseil qui cherchera une majorité qui semble difficile. Il y a aussi lintérêt du peuple italien et je ne doute pas que les forces politiques y travailleront ».
QUESTION : « Concernant la Syrie : si, au 31 mai, il ny avait pas de levée collective de lembargo sur la livraison darmes pour lopposition syrienne, que ferait la France ? Vous avez dit hier que vous prendriez vos responsabilités. Seriez-vous prêt à des livraisons unilatérales avec les Britanniques en faveur de lopposition syrienne ? Par ailleurs cela fait longtemps que les Français et les Britanniques poussent pour la levée de lembargo. Il ny a pas eu réellement de consensus, notamment fin février, quand on a prolongé les sanctions. Quest-ce qui vous permet de penser que létat desprit général de lUnion européenne évolue ? En avez-vous notamment parlé avec Mme MERKEL qui na pas lair très chaude là-dessus ? »
LE PRESIDENT : « Je vous lai dit, je ferai tout pour quà la fin du mois de mai, au plus tard, une solution commune soit adoptée par lunion. Je me place donc dans cette perspective, pas dans la division, pas dans la séparation, pas dans lunilatéralisme. Nous devons convaincre. Je dois faire valoir mes arguments et montrer quil y a une nouvelle étape à franchir.
Quest ce qui fait quil peut y avoir une évolution ? LEurope a déjà évolué ! Vous rappeliez, à juste raison, que ces dernières semaines non seulement la Coalition nationale, cest-à-dire lopposition a été maintenant reconnue seule instance légitime de représentation de la Syrie, mais en plus ce qui paraissait inenvisageable, des aides matérielles lui ont été autorisées.
Moi-même, jai longtemps pensé que cette simple fourniture de matériel suffisait et que cela permettait de faire la pression nécessaire sur le régime syrien, tout en donnant à lopposition les moyens dagir. Mais on est devant une asymétrie et cest ce qui fait que nous devons aller plus loin.
Dun côté, un régime condamné pour ses exactions et ses massacres, qui na pas la reconnaissance de lEurope et qui obtient des armes, du matériel de plusieurs pays, notamment de la Russie mais pas seulement de la Russie. Ce pays les utilise, il a des armes chimiques et menace de les employer. En face, il ny aurait que des armements qui viennent don ne sait où ? La meilleure façon de procéder cest de contrôler les armes qui sont apportées à lopposition.
Tout à lheure nous avons évoqué la Libye. Je préfère donc que lon fasse les choses avec contrôle, vigilance, précaution. Je ne désespère pas de convaincre les membres de lUnion européenne ».
Comment allez-vous faire pour convaincre Mme Merkel car lAllemagne est réticente à la levée de lEmbargo ?
« Mme MERKEL elle-même je nai pas à parler en son nom a dit quelle regarderait toutes les conséquences des décisions que nous pourrions prendre et quelle serait attentive à ce que les ministres des Affaires étrangères pourraient avoir comme délibération, dès la prochaine réunion à Dublin. Je fais dailleurs observer que la déclaration du ministre des Affaires étrangères allemand était beaucoup plus ouverte que ce quil disait jusque-là ».
Si lUnion européenne ne parvient pas à un accord que ferez-vous ?« Sil ny a pas daccord, nous nous retrouverons et je vous dirais quelle sera la décision de la France. Mais jai déjà dit que nous aurons à prendre nos responsabilités ».
La France souhaite-t-elle utiliser un droit de véto ?« Non, ce nest pas une question de veto. Cela fait partie de la politique européenne de sécurité commune. Nous devons aller dans le sens de la convergence. Ensuite, nous aurons à la fin du mois de mai une décision à prendre. Mais peut-être avant, parce que la situation évolue, parce quil y a des dizaines et des centaines de morts chaque semaine ou chaque mois ! Nous avons donc là à faire face à une gravité qui effectivement peut convaincre beaucoup de ce que nous avons à faire maintenant ».
QUESTION : « Je comprends bien que la livraison darmes permet dinverser le rapport de forces et donc de faciliter une issue politique. Mais cela comporte des risques pour la France. Avez-vous dautres objectifs en tête ? Plus le conflit perdure, plus il y a un risque de terrorisme et plus il y a un risque de déstabilisation régionale avec le Liban, la Jordanie, Israël. Est-ce à tout cela que vous pensez quand vous vous impliquez davantage dans ce conflit ? »
LE PRESIDENT : « Le plus grand risque serait de ne rien faire. Le plus grand risque serait de laisser faire. Le plus grand risque serait de faire que Bachar Al ASSAD continue à massacrer son peuple et que des groupes désespérés se réfugient dans le terrorisme. Le plus grand risque, cest le chaos.
Voilà pourquoi nous devons agir. Au-delà des questions humanitaires, des questions qui nous interpellent au nom du devoir daider un peuple qui est aujourdhui en danger, nous avons aussi à agir dans notre propre intérêt, pour la sécurité de la région £ vous avez raison. Parce que nous avons maintenant des conséquences directes de ce qui se produit en Syrie : au Liban encore ces dernières heures, mais également dans la région et avec tout ce que cela peut avoir comme conséquence à léchelle du monde £ cest-à-dire une guerre civile qui perdurerait, radicaliserait les deux camps et ferait que des armes seraient utilisées et avec des prolongements extérieurs - en Turquie, au Liban et ailleurs sans doute -.
Voilà, le plus grand risque, cest linaction. En prenant une décision, cest ainsi que lon réduit les risques. Sur les armes, mieux vaut les contrôler que les laisser circuler - ce qui est le cas aujourdhui - et avec des financeurs dont nous ne pouvons être certains quils soient eux-mêmes sûrs de la destination de leur livraison ».
QUESTION : « Avez-vous des informations sur léventuel usage darmes chimiques par le régime dAl ASSAD ? »
LE PRESIDENT : « Non, nous navons pas dinformations. Nous avons pour linstant conscience que le régime prendrait un risque extrêmement élevé sil les utilisait et il le sait. Merci ».
Dans la réunion dhier soir, il y a eu un focus qui a été fait sur les questions de productivité et de compétitivité. Une zone monétaire suppose davoir : une politique monétaire, celle qui est conduite par la Banque centrale £ une politique budgétaire coordonnée £ mais également une politique qui vise à renforcer la capacité de croissance et qui veille également à mettre en cohérence tous les pays de cette zone, pour quils puissent avoir le niveau le plus élevé de compétitivité et de productivité. Ensuite, à la zone euro, par la coordination de ces politiques, et à chacun des pays, de relever le niveau de la performance industrielle. Nous avons donc regardé ce quétaient les niveaux de productivité et comment nous pouvons les relever.
Il y a eu également une discussion sur la coordination des politiques économiques. Il y a des pays qui sont en déficit de balance de paiement courant et qui doivent donc faire des efforts pour redresser leur commerce extérieur, pour améliorer leur compétitivité. Et puis, il y a des pays qui sont en excédent de paiement courant, qui doivent garder ces avantages, mais qui doivent également soutenir leur demande intérieure pour quil puisse y avoir, dans la zone euro, un soutien direct à la croissance. Pendant que dautres font des efforts pour maîtriser leurs comptes publics ou extérieurs.
Cette discussion a donc été utile. Elle na pas débouché sur des décisions immédiatement opérationnelles, mais elle donne un cap stratégique à la zone euro, qui ne peut pas être simplement une zone de discipline, une zone de vigilance, une zone de stabilité. Tout cela est nécessaire et dailleurs des progrès ont été enregistrés depuis plusieurs mois. Jai personnellement salué laction qui avait été conduite par Mario MONTI en Italie. Pas simplement pour lItalie, mais pour lEurope.
Mais il y a aussi, au-delà de la stabilité, des règles budgétaires, une croissance à préparer et qui est spécifique aussi à la zone euro. Parce que dès lors que lon est dans une zone monétaire, nous avons forcément des convergences aussi en terme de politique de compétitivité, de politique industrielle et de politique de production. Cela cétait le premier sujet. Chypre sera évoquée cet après-midi en Eurogroupe. Nous navons pas entre chefs dEtat et de gouvernement abordé directement cette question.
Ce matin, il y a eu une discussion comme nous avions eu lors de la précédente réunion du Conseil européen, sur la Chine la dernière fois, sur la Russie cette fois-ci. Partenaire stratégique, partenaire important, partenaire avec lequel, Européens, nous devons aller unis dans un certain nombre de négociations que cela soit sur lénergie, sur le commerce ou sur la question des droits de lHomme.
Enfin, il y a eu la question de lattitude de lEurope face à la Syrie qui a été posée. Je lai fait. Je dois constater quil y a eu des progrès, depuis déjà plusieurs semaines, sur la manière dont laquelle lEurope regarde sa relation avec la Coalition qui est aujourdhui, je le rappelle, la représentante légitime du peuple syrien.
Il y a eu deux Conseil des Affaires étrangères qui se sont tenus, au mois de janvier et au mois de février, et qui ont permis non seulement de reconnaître la Coalition, mais en plus de lui livrer un certain nombre de matériels non létaux, ainsi quune assistance technique. Ce qui est maintenant regardé, cest ce qui peut être fait pour lever lembargo. Nous avons une date ultime qui est la fin du mois de mai. Dici là, il y aura une prochaine réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères, en Irlande, pour que soient regardées toutes les conséquences de la levée de lembargo.
Pourquoi je souhaite quil y ait cette évolution de lattitude européenne ? Pourquoi maintenant ? Parce que justement, cela fait deux ans que le drame se produit et que le nombre des victimes salourdit de jour en jour. Ces derniers mois, aucune solution politique na été trouvée, malgré toutes les tentatives du médiateur, M. BRAHIMI, malgré les discussions que nous avons pu avoir sur le plan bilatéral, malgré les réunions du Conseil de sécurité Rien na pu être obtenu du régime de Bachar Al ASSAD.
Il y a eu, enfin, une troisième évolution. Cest justement celle de la reconnaissance, par une grande partie de la communauté internationale, de la Coalition comme représentante légitime du peuple syrien. Sajoutent les armes qui sont livrées par un certain nombre de pays, dont la Russie, pour parler clairement, à Bachar Al ASSAD et à son régime.
A partir de là, nous devons en tirer toutes les conclusions. Jestime que lEurope doit prendre cette décision dans les prochaines semaines. Cest ce qui nous est demandé par la Coalition, mais pas seulement par la Coalition. Par la Coalition parce quelle veut, dès lors quil ny a pas dissue politique pour le moment la pression militaire pourra sûrement la faire ressurgir , dès lors quelle est reconnue internationalement, davoir les moyens de pouvoir défendre les zones qui ont été libérées.
Ensuite, nous devons faire en sorte que ces armes aillent bien à la Coalition, et seulement à la Coalition, et ne puissent pas être détournées par des groupes dont nous naurions pas lassurance quils en feraient le meilleur usage. Enfin, il y a des pays qui nous assurent quils pourront, aussi, en assurer le contrôle et lassistance technique. Je pense notamment aux pays de la Ligue arabe.
Il y a donc aujourdhui une évolution à engager. Elle sera utile pour chercher léventuelle solution politique, elle sera nécessaire pour défendre la population en Syrie. Tel est le débat que nous avons eu. Il va se poursuivre lors de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères. Voilà létat de nos discussions sur cette question importante et qui affecte lensemble de la vie internationale ».
QUESTION : « Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur létat des discussions dont vous venez de parler ? Quels sont les pays qui seraient en train dévoluer vers la France et ceux qui sont extrêmement éloignés ? »
PRESIDENT : « Moi, je ne veux pas chercher à diviser ou à séparer. Je veux faire en sorte que lUnion européenne puisse adopter une position commune. Je défends donc une attitude qui est, à la fois, celle de la responsabilité face à la situation en Syrie et aussi celle de la cohérence et de la cohésion que lEurope doit donner.
La discussion devait donc avoir lieu. Elle avait dailleurs déjà eu lieu lors de plusieurs Conseils des ministres des Affaires étrangères. Nous avons en plus une date, la fin du mois de mai, pour en décider puisque nous aurons à délibérer sur cette question de lembargo. On peut le faire avant, mais, de toute manière, nous aurons à le faire à la fin du mois de mai.
Ce que je cherche donc, cest à convaincre. Pour linstant, il y en a beaucoup qui sont convaincus autour de la table. Mais pas tous. Je respecte cette position parce quil y a toujours cette interrogation sur les conséquences de cette levée de lembargo. Et aussi des assurances qui doivent être données sur lutilisation de ces moyens matériels et militaires. Pour savoir si cela sera contrôlé et si lopposition syrienne est capable, aujourdhui, de les utiliser sans quil y ait de conséquences sur les populations civiles et sans quil y ait de risque dêtre détournés par des groupes dont nous considérons quils peuvent être dangereux pour laprès-Syrie ou plus exactement pour laprès-Bachar Al ASSAD.
QUESTION : « Est-ce que vous êtes confiant, quand vous parlez de cette date du 31 mai sur la possibilité de réunir les 27 autour de cette idée de la levée de lembargo ? Plus précisément est-ce que vous pensez possible et même souhaitable que certains pays lèvent lembargo unilatéralement avant ou après cette date ? »
LE PRESIDENT : « Nous devons chercher, je lai dit, une position commune. Nous avons une politique étrangère et de sécurité commune. Elle doit trouver sa place. Ce nest pas facile à 27 bientôt à 28. Il y a des nuances, il y a des sensibilités, il y a des traditions. Des pays viennent de ce que lon appelle « la neutralité ». Nous devons faire un effort pour quune position puisse être trouvée. Une date est fixée pour la fin du mois de mai. Cela peut arriver avant, puis ensuite nous verrons bien ce quil y a lieu de faire. Mais jai dit ce que serait lattitude de la France. Je dois chercher la position commune et je pense que la méthode qui a été utilisée celle de réunions des ministres des Affaires étrangères, pour regarder à chaque fois létat de la situation est la bonne manière de lappréhender. Cette méthode est la bonne.
QUESTION : « En France, au sujet de la Syrie, plusieurs voix politiques se sont élevées, certaines parlant de folie, dautres daction isolée de la France, dautres dapprenti sorcier Quest-ce que vous répondez à ces interpellations ? Quest ce vous pouvez dire également aux Français, qui pourraient sinquiéter de cette perspective ?
LE PRESIDENT : « Dabord les Français parce que ce sont eux qui doivent être juges de ce que nous faisons et protégés par ce que nous décidons. La levée de lembargo naura aucune conséquence sur les relations que nous avons avec le régime de Bachar Al ASSAD, nous nen navons plus ! Nous considérons quil doit partir, il ny aura donc pas de changement de notre diplomatie.
Nous considérons que ce quil fait, aujourdhui, pour son peuple est criminel. Je ne peux pas dire davantage Levée de lembargo ou pas levée de lembargo, la France a été le premier pays du monde à reconnaitre lopposition à lépoque, cétait lopposition, aujourdhui cest la Coalition nationale comme représentante légitime du peuple syrien. Jai pris mes responsabilités et cette position, dailleurs, est devenue celle de lEurope et dune large partie de la communauté internationale.
Nous luttons contre le terrorisme, partout dans le monde. Nous serons donc attentifs aux aides matérielles que nous faisons à la Syrie. Nous lavons déjà fait pour ce que lon appelle le matériel non létal, laide humanitaire ce que nous avons fait déjà dès lété ou laide financière puisque nous avons réuni à Paris une Conférence des amis.
Puisque nous avons déjà aidé lopposition, nous aurons à cur de le faire jusquau bout, parce que nous avons confiance en elle. A partir de là, la France a pris cette position. Elle a déjà convaincu lEurope à la soutenir à travers la reconnaissance, à fournir du matériel et de laide humanitaire. Nous continuons dans ce même processus et nous luttons contre le terrorisme partout. Parce que nous voulons éviter quen Syrie, il puisse y avoir, par la radicalité de certains groupes, un risque terroriste comme nous lavons connu en Libye. La France doit savoir quelle est protégée contre le terrorisme par une lutte contre le terrorisme à léchelle du monde.
Enfin, sur les positions des uns et des autres, si je devais les commenter ! A peine étais-je élu quon me demandait de faire, pour la Syrie une aide qui navait pas était prévue jusque-là. Certains me demandaient même daller à Moscou cet été, en toute hâte, et demander à Mme MERKEL de maccompagner pour convaincre M. POUTINE. Certains me demandaient de livrer des armes, déjà à cette époque, les mêmes qui aujourdhui sinterrogent ou salarment
Ecoutez, franchement, il y a ce qui relève de la politique nationale, elle a ses règles et ses principes et je ne veux pas ici commenter ces propos. Et puis il y a ce qui relève de la responsabilité. La mienne, cest de faire en sorte que nous puissions être cohérents dans les actions que nous conduisons par rapport à la Syrie depuis plusieurs mois. Quand je dis plusieurs mois, cest aussi par rapport à la période avant mon élection.
Il y a une cohérence que nous devons rappeler parce quil y a une continuité qui doit aussi, au-delà des alternances, être menée et respectée. Il y a donc ce que nous avons engagé, depuis déjà des mois, et qui doit trouver son prolongement. Je ne dis pas son aboutissement parce que ce nest quune étape et que nous cherchons, de toute manière une solution politique. La pression militaire fait partie de cette démarche. Voilà je nai pas dautres commentaires à faire sur les commentaires ! »
QUESTION : « Avec les 27, vous aviez à discuter de la Russie. Quel est le message que vous envoyez aujourdhui à Moscou ? Sur la question de la Syrie, est-ce que vous pouvez lui assurer quelle gardera, sil y une alternance en Syrie, sa base militaire ? Quels sont les éléments de langage que vous allez adopter avec les Russes parce quune des clés de la solution politique est à Moscou pour les amener, non pas à cesser leur livraison darmes, mais que leur livraison darmes soit plus utile pour une solution politique quelle ne lest aujourdhui ? Deuxièmement, comment allez-vous assurer le contrôle des armes ? Certaines armes sont parties de Libye apparemment se sont retrouvées en Syrie dans des mains qui nétaient pas automatiquement les bonnes. Comment va-t-on sassurer de ce contrôle de ces armes ? »
LE PRESIDENT : « Aux Russes et au président POUTINE, jai déjà dit et je le répète devant vous : nous respectons la position de la Russie dans cette région et les intérêts quelle peut encore détenir ou préserver. Cest légitime, la Russie fait partie de ces puissances qui contribuent, qui peuvent contribuer à léquilibre, à la stabilité. Jai plusieurs fois garanti, autant quil était possible, au président POUTINE que laprès ASSAD ne serait pas, pour les Russes, la fin de la relation que ce grand pays a avec la Syrie. Nous avons donc tout fait pour associer la Russie à la solution politique.
Dailleurs, quand je suis allé à Moscou, nous avons envisagé avec le président POUTINE linitiative que des éléments du régime puissent discuter avec lopposition syrienne pour chercher la solution politique, si ces éléments étaient acceptés par lopposition et si ces éléments acceptaient de discuter avec lopposition. Mais je constate que rien na bougé.
Quelques jours après que jai pu lancer cette initiative et que les Américains et les Russes en aient également discutée, Bachar Al ASSAD a annoncé des élections en 2014, en Syrie et quil était candidat à sa succession. Ce qui nétait quand même pas louverture qui était attendue ! Donc, cette position qui pourrait être, demain, la levée de lembargo nest pas destinée à couper les relations avec la Russie. Au contraire.
Nous avons intérêt à trouver la solution sinon il y a une pression militaire qui va se faire. Vous avez raison de dire que des armes qui avaient été livrées, pendant linsurrection et la rébellion en Libye, se sont retrouvées sur dautres champs et dautres lieux. Au Mali mais aussi en Syrie.
La question de la livraison des armes, pour avoir la meilleure réponse, exige que la Coalition donne toutes les garanties. Cest parce quelle les fournit que nous pouvons aujourdhui envisager la levée de lembargo. Nous avons toute certitude maintenant de ce que serait lutilisation de ces armes. Enfin, il y aura un accompagnement, une aide technique, une assistance qui seront fournis. Ce qui, là aussi, évitera un certain nombre de déperdition ».
QUESTION : « Dabord, est ce que vous avez parlé de laccord de libre-échange avec les Etats-Unis au cours de ce sommet. Je voulais également savoir quelle était la position de la France concernant cet accord de libre-échange sachant que les droits de douanes sont déjà à un niveau historiquement bas. Est-ce quon ne risque pas de négocier des secteurs qua priori on na pas intérêt à négocier comme les normes sanitaires, la culture etc. ?
Seconde question concernant la nouvelle répartition des sièges au sein du Parlement européen qui a été votée, cette semaine, par les députés européens et qui viole la règle du traité de Lisbonne sur la dégressivité proportionnelle. Elle revient, en gros, à priver la France et la Grande-Bretagne des députés quils auraient dû avoir en fonction de lévolution démographique. Quelle est la position de la France ? Est-ce que la France va bloquer au mois de juin cette répartition ? »
LE PRESIDENT : « Nous navons pas discuté de laccord de libre-échange entre lEurope et les Etats-Unis. Mais nous aurons à en débattre puisquun mandat doit être donné à la Commission européenne. Ma position est la suivante : je suis pour quil y ait une négociation qui souvre pour lutter contre les barrières douanières ou les freins aux échanges de façon à favoriser la croissance.
Mais il doit y avoir des garanties par rapport à certains domaines. Vous avez évoqué les normes sanitaires. Cela en est un auquel nous sommes attentifs, notamment dans cette période. Mais il y a un autre domaine sur lequel je voudrais insister, cest la question de lexception culturelle et notamment des services audiovisuels. Ce secteur comme il avait été exclu pour dautres accords, ne peut pas se trouver dans le mandat . Je veux que ces domaines soient exclus du champ de la négociation.
Sur la deuxième question, la répartition des sièges. Il y a des règles effectivement prévues par les traités, cest la formule de « la dégressivité proportionnelle » un jargon très européen, pour bien comprendre quil ny a rien à comprendre. Cest tout simplement la règle que le nombre de siège doit être fonction de la population ».
QUESTION : « Si je peux revenir sur les questions économiques, hier soir, M. MONTI vous a envoyé une lettre qui était un cri dalarme. Il disait quil faut des mesures pour éviter la marée montante du populisme. La solution politique quon essaie en ce moment de trouver en Italie une alliance avec un mouvement qui demande un referendum sur lEuro cest la réponse et la bonne solution ?
LE PRESIDENT : « Mario MONTI a en effet adressé une lettre à tous les chefs dEtat et de gouvernement de lEurope. Il leur a donné une leçon quil retenait du scrutin qui venait davoir lieu en Italie. Sur le plan de la conduite économique, il a dit que ce quil avait fait avait permis, non seulement à lItalie mais aussi à lEurope, de sortir de linstabilité financière que nous connaissions il y a encore quelques mois.
Moi, je noublie pas le rôle qua joué Mario MONTI, au Conseil européen du mois de juin dernier, pour nous permettre de trouver des instruments qui sont maintenant en place. Le rôle également quil a joué dans son pays, pendant plusieurs mois, pour prendre des mesures qui ont fait que la spéculation sest ralentie pour ne pas dire retirée de la zone de la monnaie unique.
Il nous a aussi fait valoir une leçon. Cest que si les pays vont trop vite dans lajustement, sils nentrevoient pas la croissance, lespérance, le renouveau dans les décisions qui sont difficiles à prendre sur le plan des disciplines budgétaires, des améliorations de compétitivité ou des reformes structurelles , alors le risque, cest le rejet non pas des gouvernements, mais le rejet de lEurope en tant que telle. Cette leçon doit donc être absolument retenue y compris dans les décisions quaura à prendre lEurope dans les prochains mois.
Sur la situation politique italienne, il ne mappartient pas den juger. Le président de la République italienne aura à faire le choix de designer un président du Conseil qui cherchera une majorité qui semble difficile. Il y a aussi lintérêt du peuple italien et je ne doute pas que les forces politiques y travailleront ».
QUESTION : « Concernant la Syrie : si, au 31 mai, il ny avait pas de levée collective de lembargo sur la livraison darmes pour lopposition syrienne, que ferait la France ? Vous avez dit hier que vous prendriez vos responsabilités. Seriez-vous prêt à des livraisons unilatérales avec les Britanniques en faveur de lopposition syrienne ? Par ailleurs cela fait longtemps que les Français et les Britanniques poussent pour la levée de lembargo. Il ny a pas eu réellement de consensus, notamment fin février, quand on a prolongé les sanctions. Quest-ce qui vous permet de penser que létat desprit général de lUnion européenne évolue ? En avez-vous notamment parlé avec Mme MERKEL qui na pas lair très chaude là-dessus ? »
LE PRESIDENT : « Je vous lai dit, je ferai tout pour quà la fin du mois de mai, au plus tard, une solution commune soit adoptée par lunion. Je me place donc dans cette perspective, pas dans la division, pas dans la séparation, pas dans lunilatéralisme. Nous devons convaincre. Je dois faire valoir mes arguments et montrer quil y a une nouvelle étape à franchir.
Quest ce qui fait quil peut y avoir une évolution ? LEurope a déjà évolué ! Vous rappeliez, à juste raison, que ces dernières semaines non seulement la Coalition nationale, cest-à-dire lopposition a été maintenant reconnue seule instance légitime de représentation de la Syrie, mais en plus ce qui paraissait inenvisageable, des aides matérielles lui ont été autorisées.
Moi-même, jai longtemps pensé que cette simple fourniture de matériel suffisait et que cela permettait de faire la pression nécessaire sur le régime syrien, tout en donnant à lopposition les moyens dagir. Mais on est devant une asymétrie et cest ce qui fait que nous devons aller plus loin.
Dun côté, un régime condamné pour ses exactions et ses massacres, qui na pas la reconnaissance de lEurope et qui obtient des armes, du matériel de plusieurs pays, notamment de la Russie mais pas seulement de la Russie. Ce pays les utilise, il a des armes chimiques et menace de les employer. En face, il ny aurait que des armements qui viennent don ne sait où ? La meilleure façon de procéder cest de contrôler les armes qui sont apportées à lopposition.
Tout à lheure nous avons évoqué la Libye. Je préfère donc que lon fasse les choses avec contrôle, vigilance, précaution. Je ne désespère pas de convaincre les membres de lUnion européenne ».
Comment allez-vous faire pour convaincre Mme Merkel car lAllemagne est réticente à la levée de lEmbargo ?
« Mme MERKEL elle-même je nai pas à parler en son nom a dit quelle regarderait toutes les conséquences des décisions que nous pourrions prendre et quelle serait attentive à ce que les ministres des Affaires étrangères pourraient avoir comme délibération, dès la prochaine réunion à Dublin. Je fais dailleurs observer que la déclaration du ministre des Affaires étrangères allemand était beaucoup plus ouverte que ce quil disait jusque-là ».
Si lUnion européenne ne parvient pas à un accord que ferez-vous ?« Sil ny a pas daccord, nous nous retrouverons et je vous dirais quelle sera la décision de la France. Mais jai déjà dit que nous aurons à prendre nos responsabilités ».
La France souhaite-t-elle utiliser un droit de véto ?« Non, ce nest pas une question de veto. Cela fait partie de la politique européenne de sécurité commune. Nous devons aller dans le sens de la convergence. Ensuite, nous aurons à la fin du mois de mai une décision à prendre. Mais peut-être avant, parce que la situation évolue, parce quil y a des dizaines et des centaines de morts chaque semaine ou chaque mois ! Nous avons donc là à faire face à une gravité qui effectivement peut convaincre beaucoup de ce que nous avons à faire maintenant ».
QUESTION : « Je comprends bien que la livraison darmes permet dinverser le rapport de forces et donc de faciliter une issue politique. Mais cela comporte des risques pour la France. Avez-vous dautres objectifs en tête ? Plus le conflit perdure, plus il y a un risque de terrorisme et plus il y a un risque de déstabilisation régionale avec le Liban, la Jordanie, Israël. Est-ce à tout cela que vous pensez quand vous vous impliquez davantage dans ce conflit ? »
LE PRESIDENT : « Le plus grand risque serait de ne rien faire. Le plus grand risque serait de laisser faire. Le plus grand risque serait de faire que Bachar Al ASSAD continue à massacrer son peuple et que des groupes désespérés se réfugient dans le terrorisme. Le plus grand risque, cest le chaos.
Voilà pourquoi nous devons agir. Au-delà des questions humanitaires, des questions qui nous interpellent au nom du devoir daider un peuple qui est aujourdhui en danger, nous avons aussi à agir dans notre propre intérêt, pour la sécurité de la région £ vous avez raison. Parce que nous avons maintenant des conséquences directes de ce qui se produit en Syrie : au Liban encore ces dernières heures, mais également dans la région et avec tout ce que cela peut avoir comme conséquence à léchelle du monde £ cest-à-dire une guerre civile qui perdurerait, radicaliserait les deux camps et ferait que des armes seraient utilisées et avec des prolongements extérieurs - en Turquie, au Liban et ailleurs sans doute -.
Voilà, le plus grand risque, cest linaction. En prenant une décision, cest ainsi que lon réduit les risques. Sur les armes, mieux vaut les contrôler que les laisser circuler - ce qui est le cas aujourdhui - et avec des financeurs dont nous ne pouvons être certains quils soient eux-mêmes sûrs de la destination de leur livraison ».
QUESTION : « Avez-vous des informations sur léventuel usage darmes chimiques par le régime dAl ASSAD ? »
LE PRESIDENT : « Non, nous navons pas dinformations. Nous avons pour linstant conscience que le régime prendrait un risque extrêmement élevé sil les utilisait et il le sait. Merci ».