12 mars 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la réforme de la décentralisation, la modernisation démocratique, l'accés aux services publics et à la santé, l'école et sur la politique agricole, à Sombernon (Côte d'or) le 12 mars 2013.

Monsieur le maire,
Je veux dabord vous remercier pour votre accueil, laccueil dun Républicain, laccueil dun agriculteur, laccueil dun élu rural attaché à son territoire et qui veut le faire vivre.
Je suis ici en Bourgogne, la région présidée par François PATRIAT qui montre sa capacité, à la fois, à développer des agglomérations celle de Dijon mais aussi à faire vivre lensemble de son territoire.
Je vous retrouve ici, élus du pays dAuxois-Morvan, une terre que François MITTERRAND considérait comme étant le cur de la Bourgogne. Je nose pas dire la capitale ! Je viens dapprendre que je succède ici, à Sombernon, au Président GISCARD dESTAING. Cette terre est donc celle dune France qui a compté dans notre histoire et qui comptera encore dans son avenir.
Parce que la ruralité je suis lun de ceux qui a eu, comme élu, à la défendre est à la fois, notre histoire et notre avenir. Cest notre histoire parce que cest dans la ruralité que la France sest fondée avec son agriculture, sa production, ses paysages, ses traditions. Mais la ruralité, cest aussi un facteur de confiance en lavenir parce que cest dans les territoires ruraux que nous pourrons trouver les leviers de notre propre développement. A condition de valoriser tous nos atouts, et il y en a de nombreux dans ces territoires.
La France a cette particularité en Europe jallais dire presque cette exception davoir une natalité particulièrement dynamique nous avons le taux de fécondité le plus élevé dEurope et en même temps davoir une densité de population, sur le territoire, la plus harmonieuse dEurope. Nous avons, à la fois, la capacité de continuer à croître, au niveau de notre population : à lhorizon 2030, il y aura 70 millions de Français £ et nous avons aussi la possibilité de faire vivre cette population de manière équilibrée sur le territoire, à la condition que nous ayons une vraie politique daménagement et que la ruralité puisse être pleinement utilisée.
Je crois à la ruralité parce quelle permet de préserver la diversité de nos régions, de nos productions, de nos cultures et notre agriculture. La ruralité, même pour des Français urbains, cest aussi une référence. Les Français de nos villes, soit veulent connaître leurs racines et les retrouvent dans nos territoires ruraux £ soit nayant pas de racines, veulent les planter quelque part, y compris dans les territoires ruraux.
Malgré tous ces enjeux, je nignore rien des interrogations qui sont les vôtres. Ces interrogations, ces préoccupations sont nombreuses. Il y a dabord lavenir même de nos collectivités : la commune, le département. Mais il y a aussi la présence des services publics : lécole, la santé. La fracture numérique qui risque de se produire si nous néquipons pas convenablement nos territoires. Et enfin les questions posées sur lavenir même de lagriculture et notamment lélevage.
A toutes ces questions, je veux répondre dans mon propos initial comme à travers des interpellations qui seront les vôtres.
La première question à laquelle je veux répondre, cest : « pourquoi une nouvelle loi de décentralisation ? » Sagit-il de transférer de nouvelles compétences ? Sûrement. Sagit-il de transférer des responsabilités aux collectivités ? Pas nécessairement, si elles ne doivent pas être compensées financièrement. Sagit-il de compliquer encore la carte territoriale ? Sûrement pas, dès lors quil y a suffisamment déchelons.
Alors, quel est lobjectif ? Cest de clarifier, de simplifier et dorganiser.
Dabord il sagit de dire qui va faire quoi dans les territoires de demain.
La région doit élargir ses compétences à tout le développement économique, à linnovation, à lemploi, à la formation professionnelle et aux transports. Le département doit garder sa fonction de solidarité : solidarité territoriale entre communes et entre intercommunalités, solidarité sociale à travers un certain nombre de prestations, solidarité générationnelle parce que cest sur les départements que repose, aujourdhui, une bonne part du financement de la dépendance.
Les intercommunalités sont des périmètres de projet et doivent être renforcées. Après une procédure qui a été un peu chahutée, les préfets ont établi les cartes des intercommunalités et elles doivent maintenant être appliquées. Les intercommunalités doivent recevoir la capacité de fixer les Plans locaux durbanisme, de bien maîtriser lespace. Même si les maires doivent garder la délivrance des permis de construire.
Nous avons donc, dans cette nouvelle loi de décentralisation, une donne qui va être simplifiée et qui va permettre, à chaque niveau de collectivité, de bien savoir ce quil a à faire £ et à chacun de nos concitoyens de bien comprendre qui est responsable de quoi.
Nous aurons aussi à reconnaître le fait métropolitain, cest-à-dire le fait quil y a dans notre pays des agglomérations qui doivent jouer tout leur rôle. Je vous lai dit, jai été maire dune commune de taille modeste, même si elle a une grande ambition £ jai été président dun Conseil général, la Corrèze, considéré comme rural. Mais je nai jamais voulu opposer les agglomérations aux territoires ruraux. Je ne me suis jamais laissé aller à cette simplification pour opposer les uns et les autres.
Parce que sil ny a pas dagglomérations, il ny a pas despaces qui puissent être convenablement irrigués sur le plan économique et sur le plan des grandes infrastructures. Mais si les agglomérations aspirent lespace rural, alors il en est terminé de notre espoir dun territoire équilibré.
Nous avons donc à reconnaître le fait métropolitain et, dans le même temps, à permettre à la ruralité de pouvoir disposer des mêmes accès aux services que dans les grandes villes. Cest tout lenjeu de laménagement de notre territoire. Cest ce que devra faire également la loi de décentralisation en permettant des espaces de dialogue entre les collectivités, entre les exécutifs de régions, de départements, dintercommunalités, entre les représentations des élus, pour bien savoir comment nous structurons le territoire.
Le dialogue, cest aussi, au niveau national, la création dun Haut conseil des territoires. Il sera composé des principaux élus de notre pays désignés par leurs pairs, des représentants de lEtat pour permettre de bien coopérer et de bien nous organiser pour que la France, elle-même, puisse être rassemblée.
Il ny aura pas de changement en France si lEtat ne coopère pas avec les collectivités locales. Il ny aura aucune réussite locale, sil ny a pas aussi cette conception nationale du développement.
La réforme doit être aussi guidée par des aspects financiers qui sont essentiels. Trois principes doivent fonder la relation entre lEtat et les collectivités locales en cette matière :
- Premier principe, cest la confiance. Jai demandé au gouvernement de présenter un pacte entre lEtat et les collectivités pour que les dotations soient fixées sans avoir à être révisées ou réduites sur les trois ans qui viennent. De la même manière, jai voulu que les financements aux collectivités locales puissent être pérennisés et garantis, à travers deux mécanismes :
- Le premier, cest le relèvement du plafond du livret A : la Caisse des dépôts peut prêter aux collectivités locales, à plus de 20 ans, à des taux qui devront être en dessous de ceux qui sont pratiqués aujourdhui, de manière à ce que toute collectivité qui ait un projet long, puisse trouver un financement.
- Et puis, il y aura un deuxième instrument, la Banque des collectivités locales qui succède à Dexia qui a sombré, avant nous, et qui a coûté fort cher aux contribuables. Cette Banque des collectivités locales doit être au service de tous les élus.
- Enfin, je suis prêt à accueillir favorablement une proposition qui mest faite par les maires de France pour quils puissent sorganiser eux-mêmes pour lever un certain nombre de capitaux sur les marchés. Pourquoi pas ? Dès lors que nous avons des taux dintérêt très faibles sur les marchés, tout ce qui pourra être mobilisé comme épargne pour être affecté à linvestissement local, sera le bienvenu à condition dêtre au meilleur marché.
- Le second principe, cest la responsabilité. En ces temps de rigueur budgétaire, chacun doit faire son effort, chacun doit prendre sa part. Cest pourquoi lEtat a indiqué aux collectivités locales que les dotations baisseraient de 1, 5 milliards non pas en 2013 puisquelles ont été préservées mais en 2014 et en 2015, sur une masse de concours de lEtat qui sélève aujourdhui à près de 52 milliards deuros. Cest vrai que cest un sacrifice et je sais ce que cela peut représenter. Mais, en même temps, nous devons tous faire des économies, nous devons tous chercher à utiliser des deniers publics dans lesprit de la meilleure qualité et de la meilleure efficience.
- Le dernier principe pour régir les relations de lEtat et des collectivités sur le plan financier, cest la solidarité. Parce que leffort dont je viens de parler doit être justement réparti. Cest ce que lon appelle la péréquation, terme compliqué pour dire tout simplement la redistribution. LEtat doit accorder davantage de dotations aux territoires ruraux et aux quartiers fragiles. Ce sont les dotations de solidarité urbaine et les dotations de solidarité rurale. Elles seront non seulement préservées mais augmentées. Et puis, il y a la redistribution entre collectivité, entre départements riches et départements plus pauvres compte-tenu de la structure fiscale, entre régions, entre intercommunalités. Parce que nous ne pouvons pas accepter que dans les départements où il y a une masse financière importante grâce à une population et surtout à des entreprises, il ne puisse pas y avoir une réaffectation de ces surplus vers les territoires les plus affectés, soit par le vieillissement de la population, soit par létendue du territoire.
Voilà les principes qui nous permettront de disposer, dans les trois années qui viennent, dune relation claire entre lEtat et les collectivités.
Mais lune des façons de faire des économies, sans que cela ne coûte rien aux contribuables et sans que cela naltère la qualité des services publics, cest lallègement des procédures et des normes. Chaque fois que lon impose une contrainte supplémentaire à des collectivités, cest une charge de plus et donc un impôt de plus que lon est obligé de lever auprès de nos concitoyens.
Il y a aujourdhui 400 000 normes qui sont applicables. 400 000 ! Cela na pas de sens ! Beaucoup, dailleurs, sont obsolètes. Mais elles sont néanmoins appliquées avec des complexités administratives qui sont insupportables, des charges élevées, des risques juridiques même quand elles ne sont pas appliquées et débouchent sur des contentieux. Je veux marquer un coup darrêt à cette inflation normative. Il y aura une réduction systématique du nombre de normes, de règles et de contraintes. Je veux agir vite. Des discours sur ces sujets, en tant quélu, jen ai entendu beaucoup. Je ne voudrais pas que le mien en soit un de plus.
Il y aura une loi, suite à des rapports parlementaires excellents, qui viendra simplifier, réduire, clarifier, alléger les procédures et les contraintes. Cette loi pourra être appliquée avec une célérité que notre Constitution prévoit dans les cas exceptionnels.
Voilà ce quest la première interrogation : « quel avenir pour nos collectivités locales dans le cadre dune nouvelle étape de la décentralisation ? »
La deuxième interrogation, cest : « quelle représentation démocratique de nos territoires ? » Même si la démocratie sest approfondie avec les libertés locales, nous devons considérer que, là-aussi, les structures nouvelles appellent une intervention des citoyens, différente du passé.
Je pense, notamment, à lintercommunalité. Jai été un élu intercommunal. Souvent, dans lintercommunalité, nous dépensions bien davantage que dans nos propres communes. Pour autant, nous étions élus, certes, mais pas choisis pour exercer cette responsabilité par nos concitoyens. Désormais, les élus communautaires seront désignés par les électeurs, par un système de fléchage au moment des élections municipales. Chacun saura qui va siéger dans la structure intercommunale.
Il y a ensuite la représentation au niveau du département. Je vous lai dit, jai été président dun Conseil général avec une structure cantonale qui, dans le département dont jétais le responsable, avait des écarts qui pouvait aller de 1 à 20 ou de 1 à 30. Ici, je crois que cela va même à 33. Nous avions aussi, et vous avez aussi, une représentation qui nest pas particulièrement paritaire dans les Conseils généraux. Je pense quau niveau national, nous devons être à 15% de femmes dans les Conseil généraux. Est-ce que nous pouvons accepter, dans lintérêt-même du département, cette forme de représentation ? Non.
A partir de là, nous pouvions mettre un système électoral à la proportionnelle, majoritaire, comme il existe pour la région, assurant ipso facto, la parité £ ou tenir compte plutôt de la réalité territoriale et de la représentation dun certain nombre de collectivités à travers un scrutin qui puisse être, dune certaine façon, la représentation des cantons, mais plus élargie que dans le passé et avec un binôme homme/femme ou femme/homme qui permette le respect de la parité.
Ceux qui critiquent cette réforme ont oublié, souvent, quils avaient proposé le Conseiller territorial qui aurait conduit au même redécoupage. Il y aura une diminution du nombre de cantons et une représentation paritaire dans chaque canton à travers ce scrutin binominal.
Je suis conscient néanmoins, quil y a des territoires qui doivent être représentés et qui ont pourtant une large surface et peu de population. Nous ferons en sorte que pour ces territoires spécifiques que nous connaissons bien, ici en Côte-dOr, mais partout dans les territoires ruraux il y ait une souplesse, une dérogation qui permette davoir des écarts de population entre les cantons urbains et les cantons ruraux, mais de manière raisonnable.
Voilà lidée de cette réforme. Je pense quelle est de nature à préserver le département et à garantir la parité et la juste représentation des territoires.
Je veux aussi évoquer la modernisation démocratique à travers la limitation du cumul des mandats. Sujet débattu depuis des années, sujet passionné et donc passionnant ! Vous savez que cette réforme interviendra dans le quinquennat. Elle ne peut être établie que sil y a dans le même temps un statut pour les élus. Cest une revendication qui a longtemps été portée par les associations. Je veux que nous ayons la même démarche, car loin de moi lidée de mettre en accusation les élus. Cest trop facile, trop commode, surtout dans des périodes de difficulté.
Je sais ce que peuvent faire des élus dans un territoire, je sais ce quils représentent, je sais ce quest leur tâche quotidienne, je sais ce quest lensemble des sollicitations qui leur sont adressées, alors même que leurs ressources sont rares. A partir de là, nous avons besoin délus respectés et qui puissent faire pleinement le travail qui est le leur qui nest pas un travail mais un mandat quils reçoivent du peuple mais qui néanmoins leur prend du temps, et qui quelquefois compromet leur carrière. Doù lexigence dun statut de lélu.
Dernier élément sur la représentation démocratique : nous devons aussi tenir compte de lexigence citoyenne qui est parfois impatiente, qui est parfois même dérangeante, mais qui est le signe que nos concitoyens veulent tout connaitre de notre activité. Cest lexigence de transparence.
Je suis favorable à lexercice du droit de pétition, à la faculté de faire inscrire à lordre du jour de nos collectivités des projets de délibération et de consultation. Non pas pour ralentir, mais en définitif pour anticiper, pour préparer les bonnes décisions.
Lautre grande préoccupation est celle qui a été exprimée par le maire, au nom de tous les élus qui sont ici : cest laccès aux services publics. La République est indivisible. Il ny a pas deux catégories de citoyens : ceux qui peuvent par facilité, par leur situation géographique, accéder à tous les équipements et à toutes les prestations £ et puis les autres qui par éloignement, par impossibilité, par lourdeur ne pourraient pas le faire.
Je sais les conséquences, dans les territoires ruraux, des services publics affaiblis, voire même effacés. Ce sentiment doubli, dabandon, de relégation surtout, de la part de ceux qui, au départ, ont connu une vie en ville et sont venus sétablir, comme on dit, à la campagne, pensant disposer là de tous les services quils avaient jusque-là reçus et qui les cherchent, faute quon ait garanti la présence de ces administrations et de ces services publics. Il y a là un enjeu démocratique et citoyen. Je veux y répondre.
Jentends agir dans quatre directions.
Dabord, faire que les services publics puissent être mieux organisés, quil puisse y avoir, sous lautorité du préfet et du président du Conseil général, un schéma départemental des services au public. Il faut que lon puisse regrouper autour des mêmes espaces maisons des services publics ou toute autre formule des administrations et même des services privés, de façon à ce que, sur le même lieu, tous les moyens, toutes les prestations, toutes les informations, tous les renseignements puissent être fournis dans chaque bassin de vie.
Jai demandé au Gouvernement de Jean-Marc AYRAULT de mobiliser les neuf grands opérateurs du service public la Poste, Pôle emploi, lAssurance maladie, les CAF, les régimes de retraites, la MSA, EDF, GDF, la SNCF pour quils mutualisent leurs moyens, forment leurs personnels pour délivrer, parfois, des prestations dune autre entreprise et pour que nous puissions avoir sur le territoire, à chaque fois, toutes les possibilités dintervention.
Nous ne réussirons pas partout mais, sil y a cette fédération, sil y a cette réunion, cette mobilité, alors nous pourrons répondre au mieux aux besoins de nos concitoyens. LEtat lui-même montrera lexemple. Il créera un Fonds national pour participer aux dépenses qui seront liées à cette nouvelle organisation.
Reste la question de la présence de lEtat. Il y a deux soucis souvent exprimés. Dabord, quel sera lavenir de la gendarmerie ou de la police sur un certain nombre de territoire ? Cette réforme nest pas facile à faire mais, là encore, essayons de répondre, non pas en tant que défenseur dune administration gendarmerie ou police , mais en sachant ce qui permet dassurer le mieux, sur un territoire, la sécurité de nos concitoyens. Qui doit relever dune zone de police, dune zone de gendarmerie ? Ce qui compte cest davoir des forces de sécurité qui interviennent. Cest le schéma que prépare le ministre de lIntérieur.
La seconde question, cest lavenir des sous-préfectures. Là encore, essayons de répondre aux besoins. Moi, je crois à lutilité des sous-préfectures pour soutenir les élus dans leurs projets, pour participer à des politiques demploi, pour accompagner les entreprises Mais est-ce quil faut toujours, pour autant, un lieu unique pour assurer ces services ? Il ne sagit pas denlever des moyens, il sagit de les utiliser différemment. Je pense quil ny a rien de mieux quune administration qui parfois vient directement au contact des élus.
Puis, il y a des sous-préfectures qui doivent encore avoir cet édifice parce que cest un service qui est rendu au public, au-delà même de ce qui peut être fait pour les élus. Par exemple, je ne prends pas ma référence par hasard, la sous-préfecture de Montbard correspond à cette logique-là. Mais il y a nécessairement sur le territoire toujours à se poser la même question : quest ce qui est le plus utile, le plus efficace, quest ce qui permet de répondre au mieux aux besoins des usagers ?
Voilà pour laccès au service public. Mais il y a aussi laccès à la santé qui, là aussi, est devenu lune des interrogations majeures pour nos concitoyens et pour vous, qui les représentez, avec ce que lon appelle les « déserts médicaux », avec une population qui vieillit et une démographie médicale qui nest pas favorable. Beaucoup de médecins vont partir à la retraite et peu de jeunes médecins veulent sinstaller sur un certain nombre de territoires. Parce que, là aussi, les modes de vie ont changé : un certain nombre de jeunes praticiens ne veulent plus avoir les mêmes contraintes aussi bien de permanence que dorganisation de leurs journées ou de leurs vacances.
Nous devons donc agir. Comment ? La première décision que jai prise, cest de faire en sorte que dans la loi de financement de la Sécurité sociale, il soit créé 200 emplois de praticiens territoriaux de médecine générale qui auraient la garantie dun revenu mensuel de 4 600 euros, là où ils sinstalleront, c'est-à-dire dans les territoires que nous considèrerons comme prioritaires. De manière à ce que cela ne soit pas simplement une incitation nécessaire, mais une garantie de revenu pour que ces jeunes médecins puissent être sûrs de réussir leur vie professionnelle.
Deuxièmement, il faut quil y ait un lien plus direct entre les médecins de ville et les hôpitaux publics, à la fois pour lorganisation, mais également pour quun certain nombre puissent continuer leurs carrières y compris à lhôpital.
Enfin, il y a ce que lon appelle les « maisons de santé ». Ici, dans le département, il y a deux projets en cours délaboration. Ils visent à réunir des professionnels de santé dans le même lieu avec une qualité de service, avec une mutualisation des moyens, avec une efficacité encore plus grande pour les patients et les assurés sociaux. Dès lors, nous devons avec la région, le département et lEtat avoir une politique publique de soutien à ces structures-là. Nous avons commencé à le faire, nous continuerons et même nous amplifierons les moyens donnés à ces maisons de santé.
Je veux également insister sur lécole, lécole de la République à laquelle les territoires ruraux sont très attachés. Cest ce qui structure une commune. Rien nest plus douloureux pour un maire que de la voir fermée. Chacun sait ici que quand une école ferme elle ne ré-ouvre plus. Il y a aussi lintérêt des élèves qui justifie quon ne laisse pas des classes avec des effectifs trop réduits. Même si on sait quil y a encore, jen ai connu dans mon propre département, des écoles uniques où on trouve du CP jusquau CM2 et où le professeur fait un travail remarquable. Mais faut-il encore que ce soit dans lintérêt des élèves.
Pour préserver lécole de la République, depuis 10 mois, nous avons inversé le mouvement. Nous créons des postes quand ils étaient supprimés. Nous en aurons lillustration dès la prochaine rentrée, ce qui fera que les cartes scolaires bénéficieront de plus douvertures que de fermetures.
Mais il y a aussi la question des rythmes scolaires. Je connais le sujet. On se demande dailleurs comment cela existait avant, à 4 jours et demi, pour avoir autant de mal à les retrouver. Mais pourquoi passer à 4 jours et demi ? Tout simplement parce que la démonstration a été faite. Nous sommes le pays dEurope je nose pas dire du monde, je ne veux pas aller vérifier partout ! où nous avons lannée scolaire la plus courte : 144 jours en moyenne pour nos élèves quand dautres ont 188. Cest le seul domaine où on a réduit le temps de travail à ce point- là ! Et pas à lavantage des élèves puisque cela fait des journées de travail qui sont parmi les plus longues dEurope. Parce quà la journée scolaire, il faut ajouter le temps du ramassage scolaire, ce qui fait que des élèves peuvent partir à 7h du matin et revenir à 18h et parfois plus tard le soir. Jai connu ces situations.
Il y a donc nécessité de repasser à 4 jours et demi et avoir la souplesse nécessaire pour y parvenir. Jy veillerai. Mais laccompagnement indispensable a un coût supplémentaire ! Pour toutes les communes qui mettront en uvre la réforme à la rentrée 2013/2014, il y aura ce fonds qui leur permettra davoir une subvention entre 50 euros et 90 euros par enfant. Je vous dis franchement ma position : si jétais maire, je nhésiterais pas mais ceux qui voudront prendre leur temps, pourront bien entendu attendre la rentrée 2014 pour avoir la réforme des rythmes scolaires qui leur paraîtra la meilleure.
Un dernier sujet que je voulais évoquer devant vous, cest le très haut débit. Là aussi pour les territoires ruraux cela peut être un progrès ou une calamité. La calamité, cest en définitive de vivre une inégalité de plus, cest-à-dire une coupure par rapport au reste du territoire comme pour le téléphone mobile à un moment. Aujourdhui, aucun particulier et à fortiori aucune entreprise ne sinstallera sur un territoire, sil nest pas sûr davoir au moins le haut débit et pour une entreprise le très haut débit.
Jai donc décidé que sur les 10 ans qui viennent tout le territoire français, je dis bien tout le territoire français, 100%, devra être équipé de très haut débit £ dici 5 ans, au moins la moitié du territoire français. Nous allons mobiliser des sommes très importantes avec les opérateurs privés et les collectivités locales. Une part de la subvention de lEtat ira aux territoires ruraux parce que cest là que les subventions sont nécessaires. Si cest pour équiper en très haut débit les villes, les agglomérations, pas besoin de subvention ! Les opérateurs privés sy retrouvent et nont pas besoin davoir le moindre soutien public. Pour les zones semi-urbaines, lincitation sera nécessaire. Mais pour les zones rurales, cela doit se faire avec les collectivités locales, avec les opérateurs et avec lEtat. Je vous le garantis.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire en introduction pour le débat que nous allons avoir. Mais étant ici en Côte-dOr, grande région agricole, je veux évoquer lagriculture et lélevage. Lagriculture est confrontée, dune manière générale, à un défi nouveau et positif pour notre pays. Il y a une demande mondiale qui est en augmentation pour tous les produits : production animale, comme production végétale, cest une chance !
Deuxième atout : le cours des produits agricoles est en augmentation surtout pour les productions végétales. Mais pour les productions animales, il y a une contrainte supplémentaire, cest que le coût des matières premières sest considérablement élevé, sans que pour linstant les prix à la production ait permis la répercussion.
Le risque, on le voit bien, cest donc létranglement pour les éleveurs, avec des marges qui deviennent inexistantes et lincitation forte de transformer lutilisation des sols. Pourquoi continuer à faire de lélevage si, sur un certain nombre de terres, il est possible de faire des céréales ou des productions végétales avec une garantie de prix et une rentabilité très haute, que les mouvements spéculatifs peuvent également amplifier ?
Nous avons donc le devoir de réguler les prix et dassurer aux éleveurs une répercussion de leurs propres difficultés sur la distribution. Mais nous avons aussi à faire en sorte que les produits de qualité, que lélevage comme ici, puissent être également valorisés à travers des labels, à travers des reconnaissances, à travers des prix et à travers aussi une information du consommateur. Il a fallu, une nouvelle fois, que lon découvre quun certain nombre de produits surgelés, déclarés « pur buf » soient « pur cheval », pour que nous nous reposions la question de la certification, de la traçabilité.
Jai donc décidé, quen France, nous aurions cette obligation : faire connaître les produits. Les grands distributeurs, dailleurs, sy sont pour linstant engagés. Au niveau européen, cest plus difficile mais je pense que ce qui vient de se produire va permettre que la traçabilité se trouve renforcée. Ce qui fera que le consommateur pourra dautant plus avoir cette assurance, cest que lon indiquera quici tout ce qui est consommé est une viande bovine française. Là encore, cette traçabilité aura un double avantage : 1 - confiance des consommateurs et 2 - soutien à la production française.
Je sais aussi, et jai été alerté au cours de ce déplacement en Côte-dOr, le problème que vous rencontrez pour éradiquer définitivement la tuberculose bovine. Vous avez fait beaucoup defforts. Cest un enjeu très important parce que si nous venions à perdre le statut indemne de tuberculose, nous ne pourrions plus exporter nos broutards vers les pays consommateurs. Cette question vaut pour la Bourgogne et pour dautres régions de France. Nous avons donc lobligation, non seulement de respecter les normes mais déradiquer cette maladie. Et cest là que je viens aussi aux questions de chasse, sur des questions sensibles. Il faut absolument que nous ayons un arrêté pris par le ministre de lAgriculture qui nous permette dagir pour lutter contre la tuberculose bovine.
Un dernier mot sur lagriculture. Beaucoup sinquiétait, là encore, parce quil y avait des doutes sur lavenir de la politique agricole commune. Je suis allé négocier au Conseil européen pour lavenir du budget de lUnion européenne. Je nai pas pu obtenir autant que je voulais, au niveau de lensemble des dépenses. Parce quil y a des pays qui considèrent quil convient que lEurope ait moins de crédit alors que le budget européen cest 1% du produit européen, de la production, de la croissance. 1%...
Mais, nous avons stabilisé cette dépense. Au sein de cette dépense, javais un engagement vis-à-vis des agriculteurs. Je voulais que la politique agricole commune, pour la part qui revient à la France, puisse être garantie, stabilisée au même niveau quaujourdhui et même avec une possibilité de tenir compte de linflation. Cest fait.
Nous avons donc exactement les mêmes aides directes que précédemment avec le couplage avec la production, ce qui était une revendication très forte de la profession £ avec avertissement limité, ce qui était aussi une revendication de la profession £ et avec une redistribution des aides, ce qui nest pas toujours le cas de la profession, mais que nous aurons à assurer dans les prochains mois.
Je sais que la profession agricole engage une solidarité entre les filières. Nous avons donc réussi, et tous les agriculteurs doivent le savoir, à préserver le niveau des aides directes à lagriculture et à la production. En plus, nous avons augmenté les fonds qui sont consacrés au développement rural. Cest là tout ce qui va nous permettre daider les spécificités de notre agriculture et de nos territoires. Ce sont les r??gions qui vont avoir la responsabilité de répartir ces aides avec, bien sûr, des règles nationales, notamment pour linstallation et pour les bâtiments délevage et pour les indemnités pour les territoires que lon juge source de handicap.
Nous avons donc garanti ces financements, nous avons une plus grande souplesse pour les utiliser, nous avons permis quil y ait une redistribution de ces aides. Alors nous devons utiliser ces moyens pour développer notre agriculture, parce que cest un atout pour notre pays. Aujourdhui, le commerce extérieur de la France connait un déficit de plus de 60 milliards deuros en 2012. Mais lindustrie agro-alimentaire et lagriculture sont en excédent. Nous devons donc utiliser cette filière qui est une filière demploi, qui est une filière dactivité, qui est une filière de commerce extérieur, pour améliorer notre croissance et pour bien utiliser nos territoires.
Pour tout vous dire, je crois à lavenir de nos territoires ruraux. Je ne considère pas que cest une charge pour la Nation, comme on le dit souvent, ni même un risque pour le pays, pour ceux qui y vivent. Non, ces territoires ruraux, cest un capital. Ces territoires ruraux, cela nous permet de préserver un patrimoine, de fixer une population, dassurer une culture et de donner davantage de moyens pour la réussite de notre économie.
La compétitivité, comme on dit, ce nest pas simplement une compétitivité entre les entreprises, cest aussi une compétitivité entre les territoires. Pour avoir des territoires compétitifs, il faut avoir de très grandes villes à dimension européenne : Paris, Lyon, Marseille, Strasbourg £ il faut avoir des métropoles qui ont les grands équipements universitaires, scientifiques, culturels et sportifs £ il faut avoir des régions qui assurent le développement économique, des départements qui puissent assurer la solidarité et un territoire rural qui puisse être animé.
Les pays qui aménageront mieux leurs territoires seront des pays qui auront réussi à en faire un facteur de croissance. La croissance est sur les territoires. Ce sont les territoires qui génèrent cette croissance. Quand on libère les territoires, on libère de la croissance. Lharmonie territoriale, cest donc un atout pour la France. La croissance de demain dépendra de notre capital territorial qui ne se confond pas avec lavenir de la seule capitale. Il y a la capitale. Et il y a le capital des territoires : cest vous.
Cest ce message que je voulais vous adresser, ici, dans lun de nos territoires ruraux les plus dynamiques. Je rappelle quil y a 20 millions de nos compatriotes qui vivent dans les territoires ruraux. Cest donc à ceux-là que je madresse en leur disant que la République sera avec eux, parce quils contribuent à faire la République de demain. Merci.