20 décembre 2012 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations entre la France et l'Algérie, à Tlemcen (Algérie) le 20 décembre 2012.

Mesdames, Messieurs,
Nous arrivons au terme de cette visite, exceptionnelle à bien des égards. Je veux remercier le président BOUTEFLIKA, son gouvernement, pour laccueil et pour la construction dune relation politique de haut niveau, ce partenariat dégal à égal que javais appelé de mes vux.
Je veux également saluer le peuple algérien pour laccueil qui ma été réservé, non pas à titre personnel, mais qui a été réservé à la France dans son ensemble. Ses messages, ses encouragements, ses mots damitiés nétaient pas dirigés vers ma personne, mais étaient autant de messages de confiance à légard de la relation que nous pouvons nouer avec le peuple algérien.
La France a été bien accueillie ici, et il est attendu beaucoup de nous, non pas de revenir sur le passé, jai dit ce qui était la vérité, mais pour bâtir lavenir, construire des projets, aussi bien dans le domaine économique, et il y a eu des accords très importants qui ont été signés , dans le domaine culturel où les algériens prennent conscience aussi de ce que peut être la langue française comme lien, mais aussi avec les échanges universitaires, et à cet égard, la réception qui a été faite à luniversité de Tlemcen pour le président que je suis, mais pour la France, était autant dappels pour des coopérations de haut-niveau.
Je ne vais pas être plus long parce que javais dit que je jugerais la réussite de cette visite à laune de ce que nous étions capables de dire sur le passé, et de faire pour lavenir. Et javais placé mon rendez-vous avec lAlgérie autour de deux mots essentiels : la vérité pour évoquer lhistoire, et la volonté pour bâtir lavenir, et cest autour de ces deux mots que nous avons je le crois réussi cette visite.
QUESTION Peut-on connaître les raisons qui ont motivées votre acquiescement au choix de Tlemcen, comme seconde et ultime étape de votre voyage en Algérie et si Tlemcen navait pas été choisie, quelle aurait été la ville que vous auriez choisie et quelles en seraient les raisons et également pouvez-vous nous dire quelque chose, quelques petits détails sur le livre que vous avez offert au président, hier à Alger ?
LE PRESIDENT - Oui, je voulais aller à Alger parce que cest la capitale, parce que cest là que sont situées les institutions algériennes, parce que cest là que nous avons signé des accords et porté un partenariat. Mais javais souhaité, les autorités algériennes également, que nous puissions aussi nous rendre dans une ville, que je nose pas dire de province, ce terme nexiste pas ici en Algérie, cest une conception française la province. Une autre grande ville dAlgérie pouvait se présenter à nous, la ville dOran parce que nous allons avoir linstallation de lusine Renault. Il pouvait y avoir également Constantine, mais il y avait déjà eu un déplacement qui avait été fait à Constantine. Il faut changer. Je pouvais aller à Sétif, cela eut été sûrement un message en tant que tel, cest la raison pour laquelle jai parlé de Sétif, ce matin. Pourquoi jai choisi Tlemcen ? Parce que je savais que cétait une ville chère au cur du président BOUTEFLIKA, mais aussi parce que cest une ville de rayonnement, de culture, dunité et de rassemblement dans la diversité des religions.
Jai parlé ici à Tlemcen, de lIslam culturel, mais jai parlé aussi de la religion chrétienne, des Juifs, parce quici à Tlemcen, il y a eu ce brassage qui fait que cette ville est exceptionnelle. Et puis enfin, jaurais eu tort de ne pas choisir Tlemcen au regard de laccueil qui ma été réservé ainsi quau président BOUTEFLIKA. Donc, je remercie tous ceux qui ont permis ce déplacement.
Ensuite le livre, cest un livre très ancien, qui justement évoque la chrétienté, toujours dans cette ouverture aux autres, ce souci du respect de toutes les religions. En France, nous appelons cela la laïcité qui nous permet de vivre ensemble et je suis aussi conscient de ce quest lIslam de France, et de ce quil doit avoir comme respect. Avec le gouvernement, le ministre de lIntérieur, nous veillons à ce quil ny ait aucune confusion, aucun amalgame par rapport au fondamentalisme ou à lintolérance et nous luttons contre toutes les discriminations.
Et je sais quen Algérie, ce sujet-là est sensible, parce que chaque fois quil y a une atteinte aux droits, une menace par rapport à légalité, les Algériens se sentent concernés, mais nous aussi nous sommes concernés. Nous voulons quen Algérie il y ait le respect de toutes les situations et jai été très heureux, je peux vous le dire dêtre accueilli au cimetière dAlger. Avec lentretien qui est fait des sépultures, des tombes par lEtat algérien, cela me permet de dire aux familles de Français nés en Algérie dont les parents sont morts en Algérie et qui ne savent pas toujours comment revenir pour honorer leurs morts de le faire, de le faire parce quils y seront bien accueillis, parce que nous ferons tout pour quil en soit ainsi et les autorités algériennes également.
QUESTION M. le Président, un mot sur ce français enlevé au Nigeria, de quelles informations disposez-vous, la France que compte-t-elle ou peut-elle faire ?
LE PRESIDENT Je confirme dabord que lun de nos compatriotes a été enlevé dans le nord du Nigeria. Il y a eu deux morts nigérians, dans le cadre de cet assaut. Notre ressortissant a été emmené, nous cherchons tous les éléments qui nous permettent de le retrouver. Je suis en contact avec le gouvernement en France pour avoir toutes les informations. Ici, les ministres ont été tenus informés minute par minute, aussi bien le ministre des Affaires étrangères que le ministre de la Défense, et nous utiliserons tous les moyens pour retrouver notre ressortissant.
QUESTION Vous avez appelé à orienter le regard vers lavenir. Il se trouve que la France continue daborder ces relations avec le continent africain sur la base de lhéritage colonial. Donc, ma question est de savoir, est-ce que réellement la page du passé colonial a des chances dêtre tournée ?
Vous avez dit dans votre discours à luniversité de Tlemcen, en parlant justement de la réconciliation en Algérie que se réunir et se rassembler ne suffisaient pas, je vous invite à être plus explicite ?
LE PRESIDENT Je vais lêtre puisque vous my invitez en toute liberté. Jai fait un discours à Dakar, il y a plusieurs semaines sur ce que je voulais trouver comme relation avec lAfrique, cest-à-dire là encore tournée vers lavenir. La volonté de ne pas entretenir les confusions. La France a une relation qui doit être fondée sur des principes avec lAfrique et avec tout autre continent. Mais encore davantage avec des pays qui ont pu être dans ce quon appelait lempire colonial et avec lesquels nous devions être à égalité et dans le respect. Mais il ne faut pas non plus entretenir le passé comme une forme de récrimination. Nous avons dit ce quil convenait de dire sur le système colonial, je lai également abordé ce matin. Donc, nous pouvons travailler ensemble sur cette base-là de vérité, de respect et dengagement pour lavenir.
Pour ce qui concerne la réconciliation, elle était nécessaire, indispensable et jai salué le mouvement qui avait été engagé en son temps par le président BOUTEFLIKA qui a mis dix ans avant daboutir à une situation où la sécurité est revenue, la compréhension. Mais en même temps, je sais que lAlgérie ne veut pas en rester là. Si elle sest réunie, si elle sest rassemblée, si elle a été capable, là encore dexorciser les peurs et déradiquer les intolérances et les violences, elle veut, lAlgérie, sengager pour lavenir et donc, nous la France, nous devons être présents au rendez-vous, que lAlgérie dailleurs a lancé à lensemble du monde, pas simplement à la France. Je ne demande aucune exclusivité, je dis simplement quentre la France et lAlgérie, il y a de telles relations, de tels liens que nous pouvons faire bien plus quaujourdhui et cest ce que nous allons montrer par la déclaration damitié, par le document qui permet dengager une coopération sur cinq ans. Donc maintenant, ce sont les actes qui doivent venir parce que les paroles ont été prononcées, à loccasion de cette visite, des accords ont été signés, mais maintenant, nous devons les traduire.
QUESTION Pendant ces deux jours, il a été très peu question des problèmes internationaux. Je voudrais vous poser deux questions. La première porte sur la Syrie, vous avez dit que le devoir de la communauté internationale, si je ne trahis pas votre parole, cest de hâter le régime du président ASSAD. Après Marrakech, que peut faire la communauté internationale et est-ce que vous considérez quil faut sattendre quelque chose dutile, de positif des négociations qui ont lieu actuellement entre les Russes et les Américains, avec Monsieur BRAHIMI ?
La deuxième question porte sur la colonisation israélienne dans lEtat palestinien. Vous avez voté pour la reconnaissance de la Palestine en tant quEtat observateur, non-membre des Nations Unies. Or, depuis plusieurs semaines, la colonisation saccélère à un rythme infernal, bientôt, il ny aura plus la possibilité davoir cet Etat que vous appelez de vos vux avec la continuité territoriale. Est-ce quon peut continuer comme cela à ne rien faire vis-à-vis de ce gros problème ?
LE PRESIDENT Dabord, nous avons beaucoup parlé avec le président BOUTEFLIKA, de la situation internationale. Vous savez sa sagesse, sa connaissance, son expérience, elles nous sont précieuses. Et donc, nous avons abordé trois grands sujets. Le premier, cest le Sahel, le Mali et avec, je lai rappelé hier, la même conception. La discussion politique, la négociation, là encore pour une réconciliation, mais uniquement avec les groupes qui ont rompu tout lien avec le terrorisme et qui acceptent le principe de lintégrité du Mali et en même temps continuer la pression internationale. Aujourdhui même, la résolution que nous attendions a été adoptée par le Conseil de sécurité et rend désormais possible si les Africains mettent en uvre ses principes, une intervention dont la France ne sera pas partie prenante, mais que la France appuiera par des moyens de formation et de logistique. LAlgérie comprend cette position et elle sait pourquoi nous agissons, non pas pour nous-mêmes mais pour des principes. Non pas par nous-même, puisque ce sont les Africains qui en décideront.
Deuxième sujet que nous avons abordé, la question israélo-palestinienne et je savais que le vote aux Nations Unies nallait pas provoquer immédiatement la consécration de lEtat palestinien. Nous, nous avons mis notre acte en conformité avec notre parole, nous étions favorable à cette reconnaissance de la Palestine comme état non-membre observateur, mais nous savions bien que cela nallait pas produire ce qui était peut-être espéré par certains. Il ny a pas dautre issue que la négociation et par rapport aux annonces de colonisation, nous avons condamné ces déclarations, nous savons quil y a des élections en Israël au mois de janvier et nous souhaitons quau lendemain de ces élections un processus de négociation puisse souvrir enfin pour aboutir à la solution des deux Etats.
Le troisième sujet, cest la Syrie, le groupe des amis de la Syrie sest réuni à Marrakech et a continué à affirmer son soutien à une transition, c'est-à-dire au départ de Bachar EL-ASSAD.
Il y a eu aussi un travail avec la coalition nationale syrienne et pour répondre précisément à votre question, oui, nous soutenons tous les efforts de Monsieur BRAHIMI, qui est lenvoyé des Nations Unies pour, avec les Russes, avec les Américains aussi, mais surtout avec les Russes trouver une issue, puisque nous savons bien que le Conseil de Sécurité est bloqué compte tenu des positions de la Russie. Et, nous attendons que Monsieur BRAHIMI contribue à la solution politique. Là encore, les deux démarches ne sont pas contradictoires, lune dappui à lopposition syrienne la nôtre, à travers le groupe des amis, lautre, la recherche dune solution politique à travers la démarche de lenvoyé spécial des Nations Unies.
QUESTION Vous venez au début de votre conférence de presse de faire un premier bilan, si je peux lappeler ainsi de votre visite que vous avez jugée très exceptionnelle. Je souhaiterais savoir quelle seront les résultats immédiats dans le cadre de cette refondation des relations, ou plutôt le recentrage de ces relations bilatérales, quelles seront les dividendes de cette visite dans limmédiat ?
LE PRESIDENT Les dividendes, cest comme les fruits, il faut attendre quil y ait eu suffisamment dinvestissements pour les retrouver ou les recouvrer. Je crois quil y a déjà un résultat immédiat qui est ce climat qui a été particulièrement favorable au cours de cette visite. Climat entre les deux présidents, les deux gouvernements, également laccueil qui ma été réservé, mais aussi les mots qui ont été choisis par les uns comme par les autres pour dépasser ce qui avait pu nous séparer, pour construire. Cela, cest le résultat immédiat, c'est-à-dire une confiance, le souci daller de lavant et puis cet appel à la jeunesse. Est-ce que concrètement nous pourrons avoir des résultats rapides, je le crois. Pour lemploi, nous avons cette installation de Renault. Pour la coopération culturelle, cela ira vite, pour lagriculture, les choses ont été également bien posées, pour la défense, ce nétait pas si évident de nouer un accord de défense. Il y a des progrès assez substantiels, mais vous avez raison, cest sur le long terme que lon jugera. Moi, je suis conscient de ce qui sest produit dans le passé, des annonces, des espoirs, puis ensuite des déceptions.
Donc, nous allons être très vigilants, doù également la méthode que nous avons utilisée, c'est-à-dire que chaque année il y aura une vérification du respect des accords et du document que nous avons signé
QUESTION Monsieur le Président, vous avez dit à Alger être pour la vérité sur la guerre et la mémoire des blessés. Pouvons-nous demblée penser ou envisager un travail commun entre les historiens des deux parties ? La deuxième question en rapport avec lassassinat des moines de Tibhirine, et donc lenquête que la justice française compte mener ici même en Algérie, va-t-elle aussi donner des réponses ou peut-être plus de réponses sur laffaire ?
LE PRESIDENT Jai souhaité que nous puissions ouvrir nos archives, permettre le travail des historiens, avoir une commission dans laquelle historiens français et historiens algériens puissent travailler ensemble. Cette volonté-là est commune aussi aux Algériens, et cest la bonne méthode.
Ensuite, pour ce qui concerne la justice, il y a une enquête de la justice française. Il y a une enquête de la justice algérienne. Il y a des coopérations. Et nous devons faire travailler en toute indépendance, mais également en toute liberté la justice sur la question qui reste encore posée des moines de Tibhirine.
QUESTION Monsieur le Président, jai deux questions à poser. La première, Tlemcen est située à un jet de pierres de la frontière marocaine. Est-ce quil a été question lors de vos discussions avec Monsieur le Président Bouteflika du dossier sahraoui. Est-ce quon peut espérer que la position française, que cette question soit revue ?
Deuxième question, des officiels français ont laissé entendre que Paris est disposé à vendre des armes à lAlgérie. Est-ce que vous avez reçu une demande bien claire et précise de la part des autorités algériennes ?
LE PRESIDENT Nous avons parlé de la frontière fermée entre lAlgérie et le Maroc et de ses causes, cest-à-dire le contentieux qui demeure par rapport à lavenir du Sahara occidental. La position française, cest la suivante : lONU, rien que lONU et toutes les résolutions des Nations Unies et nous nen changerons pas.
Ensuite, jirai, vous le savez, au Maroc, au début de lannée 2013 et, je ne suis pas médiateur, je nai pas à jouer un rôle dintermédiaire, personne ne me le demande. Mais je dirai aussi bien aux Marocains ce que jai dit aux Algériens, cest que nous devons aller vers lapplication des résolutions de lONU et faire en sorte que ce qui a provoqué la fermeture de la frontière puisse être levé. Je crois que cest lintérêt du Maghreb.
Par rapport à larmement, il y a un accord. Vous pourrez le lire, il nest pas secret. Donc, il ne sagit pas de matériel darmement, ce sont des matériels qui sont prévus dans laccord. Ce ne sont pas les armes comme on pourrait le penser.
QUESTION Vous avez dit tout à lheure quil est beaucoup attendu de la France. Est-ce quon peut savoir ce que vous a été demandé officiellement par les autorités algériennes. Quest-ce que la France attend aussi de lAlgérie.
Une deuxième question par rapport au dossier malien. Vous avez dit quil y a convergence entre les deux pays, alors que la France est favorable à une intervention militaire et lAlgérie défend toujours la solution politique. Pouvez-vous nous expliquer cette contradiction ?
LE PRESIDENT Nous devons faire ensemble. Nous ne demandons rien comme concession aux Algériens, pas plus que les Algériens nous demandent des concessions à nous-mêmes. Nous avons à bâtir un certain nombre de relations nouvelles dans le cadre daccords, cest ce que nous avons fait dans de nombreux domaines. Nous ne nous sommes pas retrouvés en situation déchange ou de troc. Nous avons voulu justement nous situer sur une autre démarche, cest-à-dire tout simplement avancer, pas revenir sur le passé, pas échanger de la culture contre de léconomie, ou de la diplomatique contre de la formation. Nous avons voulu faire tout à la fois. Nous retrouver dans une relation politique, comme dans une relation économique tout en parlant aussi des aspects déducation et de culture.
Sur le Mali, que les choses soient claires, la France se situe dans le cadre des Nations Unies. Le Conseil de sécurité, à lunanimité, vient de prendre une résolution sur le Mali. Ce nest pas que la France, cest les Nations Unies. Cest tous les pays membres du Conseil de sécurité. Est-ce que cest contradictoire avec la position de lAlgérie ? Pas davantage, puisque lAlgérie souhaite des négociations politiques, nous aussi. En même temps, il y a une pression à exercer, sinon le terrorisme ne sera pas éradiqué.
QUESTION On sait très bien que les relations entre lAlgérie et la France nont pas toujours été faciles, il y a eu beaucoup de haut, beaucoup de bas, pensez-vous, Monsieur le Président quaujourdhui cest le réalisme qui a pris le dessus sur la passion ?
Deuxième question, il y a à peine 30% des Français qui ont une bonne opinion sur la lAlgérie, donc loin derrière le Maroc et la Tunisie. Quel message vous pouvez adresser aux Français à partir de Tlemcen Monsieur le Président ?
LE PRESIDENT Un peu de passion est utile, beaucoup de réalisme également. Il faut une part démotion. Il faut une part de conviction. Il faut une part de sentiments sans lesquels il ny a rien de possible y compris pour le réalisme. Il y avait deux manières de faire : soit en rester aux incantations, aux paroles et ce voyage aurait peut-être apaisé ou satisfait certains plutôt que dautres. Je nai pas voulu prendre cette méthode-là.
Lautre façon, cétait de ne faire que du réalisme économique, mais léconomie se nourrit aussi de confiance politique et de relation humaine. Nous avons plutôt fait une déclaration dabord damitié pour porter la part démotion, de passion et dhumanité dans laquelle nous souhaitons inspirer la relation franco-algérienne et puis de lautre nous avons voulu avancer.
Cest un voyage qui était tourné résolument vers lavenir, qui ouvrait ce que jai appelé un nouvel âge, 50 ans après. Après 50 ans on doit passer vraiment au moment de réalisation de sa vie. Jusquà 50 ans on peut se poser des questions, on peut réfléchir, on peut parfois même changer. Mais après 50 ans il faut savoir ce que lon veut.
Voilà, lAlgérie et la France savent maintenant ce quelles veulent.
Sur le message, oui, vous avez raison. Je pense que lAlgérie est encore mal connue des Français. Bien sûr que beaucoup de Français qui ont un lien avec lAlgérie ont une relation de cur, parfois de ressentiment. Tout dépend de la situation. Mais beaucoup de Français pensent que venir en Algérie cest compliqué. Cest simple pourtant. Beaucoup de Français pensent que le tourisme ce nest pas en Algérie. Il suffit de visiter Tlemcen pour être convaincu du contraire. Beaucoup de Français pensent quil y a de linsécurité en Algérie. Je peux comprendre quaprès la période très dure, très éprouvante, il y ait eu des interrogations. Ce nest plus le cas aujourdhui. Beaucoup de Français ne savent pas si les Algériens sont accueillants. Jespère que les images qui seront diffusées de ma visite démontreront tout linverse. Jai rencontré des étudiants à luniversité de Tlemcen. Ils étaient tous algériens sauf un qui était français et qui a fait cette confidence : « chaque fois que je viens à Tlemcen », il y venait régulièrement, « on me dit bienvenu, et on me dit bienvenu à la »rance".
Aujourdhui comme hier, les Algériens ont dit « bienvenu » à la France et aux Français.
QUESTION Vous avez déclaré ce matin, vous avez reconnu dans votre discours devant les parlementaires algériens que le système colonial qui a été injuste a infligé des souffrances pour le peuple algérien. Mais force est de constater que dans le pays dont vous êtes le Président, il y a une loi votée, la loi du 23 février qui glorifie malheureusement le colonialisme. Donc, il y a une sorte de contradiction. Est-ce quil ny a pas lieu, avec la majorité que vous possédez au niveau de la chambre nationale, de revoir cette loi plutôt labrogée peut-être ?
LE PRESIDENT Il y a tant à faire avec cette majorité, tant de lois à voter que lon pourrait se dire que cest inutile de revenir sur celle-là. Mais, nous navons pas besoin dy revenir puisque cest déjà fait. Puisque le Président CHIRAC avait eu lintelligence de saisir le Conseil constitutionnel qui avait annulé ce point-là. Il ny a plus rien dans la loi française qui fait référence au système colonial en Algérie
QUESTION Vous avez beaucoup insisté au cours de toutes vos interventions sur le passé dun côté, lavenir de lautre, autrement dit, un passage culturel pour un franchissement politique. Est-ce que vous pensez que pour la Méditerranée, il faut un tandem ou un moteur franco algérien comme il a fallu un moteur franco-allemand pour lEurope ? Et un de vos amis me disait ce matin amusé : Monsieur HOLLANDE tient avec cette histoire de Méditerranée son futur prix Nobel ?
LE PRESIDENT Jai déjà été docteur honoris causa cet après-midi. Je ne voudrais pas gonfler dimportance. Mais, le 22 janvier, il va y avoir le 50ème anniversaire du traité de lElysée, 50 ans. 50 ans, pour lamitié franco-allemande. 50 ans, après que le Général de GAULLE et Konrad ADENAUER, après une guerre terrible contre la barbarie nazie aient été capable de se retrouver ensemble pour ouvrir non seulement un nouveau temps pour la France et lAllemagne, mais une nouvelle espérance pour le continent, lEurope.
Aujourdhui, 50 ans après, lindépendance de lAlgérie, nous pouvons être capables, la France et lAlgérie douvrir un nouveau temps, une nouvelle époque, une nouvelle histoire, pas simplement pour nos deux pays, mais pour la Méditerranée.
Voilà, cest le message que jai prononcé à Alger ce matin. Je pense que nous pouvons en être capables. Demain, je suis convaincu que Français et Algériens seront fiers sils sont en mesure douvrir ce processus. Et il se trouvera bien un Président de la République française qui viendra en Algérie après moi - elle finira par arriver - et qui pourra regarder ce que nous aurons fait.
Mais je souhaite que cette trace là soit laissée et que cette responsabilité nous engage. Cest dire le niveau auquel nous devons parvenir. Cest un grand enjeu pas simplement pour nos deux pays, . La France et lAlgérie ont des vocations universelles. Elles doivent ouvrir la voie aux autres comme la France et lAllemagne lont fait pour lEurope.
Merci à tous