Le Président Emmanuel Macron a reçu plus de 300 chercheurs, représentants d’établissements supérieurs, instituts de recherche, institutionnels et chefs d’entreprises, pour présenter sa vision pour l’avenir de la recherche française, ce jeudi au Palais de l’Élysée.  

Le chef de l’État souhaite que la France mène la bataille des savoirs et de la recherche, condition sine qua non pour développer les innovations de demain, qu’elles soient scientifiques, sociétales ou culturelles, pour demeurer attractifs, compétitifs et assurer notre pleine souveraineté.

Le Président de la République a pour cela formulé plusieurs propositions pour transformer l’organisation de la recherche française et l’adapter aux défis à avenir : mieux financer, améliorer l’attractivité de la recherche et notre compétitivité.

Il s’est également entretenu avec les membres du Conseil Présidentiel de la science, nouvellement établi.

Revoir le discours : 

7 décembre 2023 - Seul le prononcé fait foi

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DISCOURS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE LORS DE LA RÉCEPTION POUR L’AVENIR DE LA RECHERCHE FRANÇAISE.

Madame et Messieurs les ministres, 
Madame la présidente de la Commission Culture de l'Assemblée Nationale, 
Mesdames et Messieurs les Parlementaires, 
Mesdames et Messieurs les Académiciens, 
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités, 
Chers amis, 

Je suis très heureux de vous accueillir ici après les travaux que vous venez de conduire pour parler de science, de recherche, d'innovation. D'abord parce que nous nous retrouvons au terme d'une année faste pour la science française, je pense évidemment à nos prix Nobel. 
Je pense aux équipes qui, à leurs côtés, ont été ainsi reconnues et à plusieurs de nos organismes après les récompenses des années passées. Ceci montre, si besoin était de le rappeler, que la France est un grand pays de recherche et doit le demeurer. 

Néanmoins, on pourrait se dire : pourquoi s'empresser de parler de recherche en cette fin d'année alors que le monde bascule, qu’il semble y avoir tant de priorités d'urgence ? Parce que je pense que parler de recherche, de science est une priorité du pays encore plus aujourd'hui qu'hier et que garder le cap, plutôt le préciser, prendre des décisions aujourd'hui pour le présent, mais aussi un futur proche ou un futur lointain est absolument indispensable tant la période que nous vivons montre le rôle essentiel que la science, la recherche, jouent pour notre pays et plus largement pour notre Europe et pour le monde, au moins à trois égards.

Le premier, c'est qu'en soi la science, la recherche de la vérité, la volonté de bâtir un progrès collectif de la connaissance et du mieux vivre en société est une valeur intrinsèque et doit retrouver sa place de valeur intrinsèque dans la société qui est la nôtre. Nous l'avons vu au moment de la pandémie, parce que ça a été sans doute le moment de simplification, si je puis dire, le plus extrême, où chacun de nos compatriotes guettait les informations et l'avancée de la connaissance pour comprendre un virus qui changeait leur quotidien, puis la découverte d'un vaccin qui allait permettre de retrouver la liberté. Mais cette période fut comme la métaphore de ce qu'est, parfois dans un temps plus long, le rapport à la science et à la recherche. Et nous avons aussi vu combien, dans nos sociétés, ce rapport pouvait être bousculé par des relativismes nouveaux. Donc se battre pour la science, la recherche aujourd'hui, c'est se battre aussi pour des éléments fondamentaux de notre société et de la capacité à bâtir de la vie possible et, au fond, un humanisme éclairé, c’est-à-dire des avancées scientifiques, technologiques, mais aussi des avancées philosophiques, une manière de la concevoir dans la société. 
C'est pourquoi j'y reviendrai à plusieurs reprises mais je ne sépare pas ici les sciences et je considère qu’en particulier les sciences humaines et sociales ont à éclairer l'avancée de la technologie ou des sciences dites dures pour pouvoir cheminer justement ensemble dans la société.
Ce premier combat pour la science et la recherche est absolument fondamental, je le disais, il convient de l'éclairer pour attirer de plus en plus de jeunes à le rejoindre. Il l’est dans un monde où le relativisme a gagné de plus en plus de place et où le grand risque est en quelque sorte une forme de démantèlement de l'autorité académique et scientifique. Parce qu'alors, la société ne placerait plus son investissement collectif ou sa croyance humaniste dans les bons endroits, et alors la société n’avancerait plus droit. 
Je crois, pour citer l'un de mes maîtres, que la légitimité et l'autorité — que plusieurs d'entre vous avez dans cette salle, et je le dis avec beaucoup d'humilité en ce qui me concerne — vient du fait que vous avez lu plus de livres. Et ça représente quelque chose d'un ordre du savoir, d'une légitimité reconnue par les pairs, qui permet ensuite de mener une recherche, mais de dire aussi dans la société des choses qui ont un poids et une valeur. 

Ensuite, parce que la science, la recherche permettent de bâtir la croissance d'une société par l'innovation et c'est un élément très important. C'est un élément très important parce que nos sociétés vivent une équation hyper contrainte. Nous sommes des démocraties et des sociétés matures qui avons une force, c'est un modèle social édifié à travers le temps, généreux, et des sociétés qui vieillissent et qui ont face à elles des investissements massifs à conduire pour accompagner le vieillissement de la population, la digitalisation de nos sociétés, faire face au réchauffement climatique, aux troubles géopolitiques. Il n'y a qu'un moyen de répondre intelligemment à cette problématique, c'est de créer plus de richesse pour pouvoir la louer sur ses priorités. Il n'y a pas de société de la décroissance possible avec le modèle social qui est le nôtre. Et donc nous sommes dans des sociétés qui devons tout à la fois nous décarboner, être plus sobres en consommation d'énergie, faire face à leur vieillissement, faire face à une géopolitique qui suppose de continuer à nous réarmer et être dans la compétition des grands défis très consommateurs de capital, de l'espace à l’intelligence artificielle et ailleurs. 
Le seul moyen de le faire, c'est de continuer de réformer. Je crois que, y compris les réformes impopulaires prises cette année, travailler plus longtemps quand on vit plus longtemps, c'est ce qui permet de créer plus de richesse et de financer la science. Donc je suis cohérent dans mon approche et on ne peut pas ensuite déplorer des conséquences dont on aurait chéri les causes. Je pense surtout que c'est en innovant et en créant plus de richesse qu'on peut financer tout cela. A cet égard, la science et la recherche jouent un rôle absolument fondamental pour nos sociétés, encore plus vitales que dans des sociétés de rattrapage, dans des sociétés dont les modèles économiques, en quelque sorte, leur donnent plus de souplesse. 
On a besoin de continuer à chercher pour créer, pour inventer, pour ensuite déployer des innovations de plus en plus fortes. 

Enfin, c'est un enjeu fondamental de souveraineté. Nous sommes de plus en plus confrontés, là aussi, à une géopolitique non coopérative de la connaissance qui est, je dirais, une recomposition accélérée du monde dans lequel nous vivons. Je souhaite, je me bats pour qu'on continue à avoir une science ouverte, vivant sur la coopération et l'ouverture entre les chercheurs, quels que soient les troubles géopolitiques. Mais regardez ce qui se passe dans le monde où nous vivons. On a vu au moment de la pandémie, pour la première fois depuis bien longtemps, de la non-coopération académique venant du Grand Est, du non partage d'informations sur certaines données. On voit en ce moment même, y compris entre des chercheurs qui coopéraient et qui avaient très bien coopéré en Guerre Froide, des fins de coopération du fait de la décision de la Russie avec nos propres chercheurs dans beaucoup de domaines. Et surtout et plus encore quand on parle de quantique, d'intelligence artificielle, on a une compétition géopolitique qui va structurer la souveraineté qui est la nôtre. Si nous n'avons pas certaines briques de savoirs, d'innovations et de technologies, il est fort à parier que nous serons en dehors des grandes avancées, exclus de celles-ci, relégués peut-être, et qu'au fond, sur ces domaines comme aussi sur celui de l'exploration spatiale, se jouent là des éléments véritables de notre souveraineté d'aujourd'hui et de demain. 

Pour ces 3 raisons au moins, je considère que parler de connaissance, de science de recherche est absolument indispensable parce qu'on parle des priorités, plutôt des fondations du soubassement, des priorités de ce qui fait une nation, son indépendance et la capacité à dessiner son avenir. C'est cela qui justifie que nous avons, durant ces dernières années, profondément réinvesti sur notre Éducation nationale, notre enseignement supérieur et notre recherche, et qu’il y a une cohérence au fond derrière tout cela : consolider les savoirs, nous battre contre les déterminismes et les inégalités, les tests PISA ont encore montré, pour le collège, qu'ils étaient très présents. Et donc du redoublement des petites classes CP, du choc des savoirs au collège qui a été présenté par le Ministre il y a deux jours, la transformation de notre orientation scolaire, la réforme du lycée professionnel du premier cycle universitaire, etc, c'est un continuum qui tient sa cohérence par la volonté de remettre le savoir, la transmission des savoirs au cœur de la vie de la nation. Et par l'investissement et les transformations que nous voulons continuer de conduire sur l'enseignement supérieur et la recherche, une volonté justement d'améliorer là aussi collectivement notre système pour les finalités que je viens d'évoquer. 

Alors, à cet égard, si je devais faire un bilan rapide et lucide, le plus lucide possible, la place où je suis, on a toujours tendance à essayer de défendre tout ce qu'on a fait. Et je suis toujours un ardent défenseur de l'action de l'exécutif, j’essaye là aussi d'être cohérent. Mais si on regarde lucidement les choses, je le disais en félicitant nos prix Nobel, nos médailles Fields, etc, on est une grande nation de recherche, les présidents et présidentes d'organismes de recherche qui sont là le savent. Ils portent l'excellence avec nos universités, nos CHU de la recherche française, nos Académiciens ici présents le savent aussi ô combien. Néanmoins, nous avons vécu des moments difficiles ces dernières années aussi. Je ne peux pas vous dire que le fait que la France ait guetté la découverte d'un vaccin et qu'elle l'ait cherché chez les voisins fut le signe d'une formidable santé et justifie quelques triomphalismes de notre part. Alors certes, certes, on pouvait se dire, dans les deux sociétés qui l’avaient découvertes il y avait un Français, c'est vrai, Moderna. Et certes, je dirais plus encore parce qu'il y a une forme d'étrange défaite. Le principe même de l’ARN messager, ce sont des Français, d'ailleurs primés pour cela qu'ils l’avaient découverts. La question, c'est comment, à un moment donné, on a perdu le fil et on n'a pas réussi à garder chez nous, en tous cas pour être au cœur de cette compétition et de cette excellence. Ce n'est là qu’un symptôme et je ne veux pas ici résumer tout à un vaccin. Les choses sont bien plus complexes, multifactorielles que cela. 

Néanmoins, si j'essaie de faire le bilan de nos difficultés, de ce qu'on a commencé à corriger et ce qu'il nous faut faire, parce que c'est un peu ça l'objectif. Nous avons pendant plus de deux décennies eu un désinvestissement trop important sur notre recherche, qui s'est traduit d’ailleurs par des reculs dans plusieurs disciplines sur les publications, des classements qui se sont dégradés et donc, si je devais regarder les difficultés structurelles qu'on a trouvé en 2017, c'est d'abord un sous-investissement chronique dans notre recherche. Je ne veux pas ici aborder les chiffres, mais les rémunérations de nos chercheurs étaient inférieures de 37 % à la moyenne de l'OCDE. Les crédits de l'Agence nationale de la recherche avaient diminué de 38 % entre 2010 et 2015 et nous avions atteint un taux de financement de l'ordre de 10 %. Avec ces chiffres-là, il est difficile de ne pas engendrer beaucoup de frustration. 
Ensuite, on avait — le passé doit être partiellement corrigé — une organisation de notre recherche trop complexe, trop cloisonnée, souffrant de procédures administratives trop lourdes et chronophages. Sur ce sujet, je dirais que le passé peut être encore conjugué au présent, pour partie. 
Notre troisième maladie, si je puis dire structurelle, un lien nettement dégradé entre recherche et innovation, ce qui est historiquement une faiblesse française malgré les efforts faits par les lois ALLÈGRE, tous les travaux sur la valorisation, ce que plusieurs universités et organismes avaient essayé de bâtir. 
Quatrièmement, une tendance au jardin à la française et l'absence de différenciation des parcours des universités et des organismes qui fait que, en quelque sorte, en période de moyens limités, il y a eu un peu des moyens limités pour tout le monde, parfois sans discernement et en touchant davantage la compétitivité des équipes qui étaient le plus soumises à la compétition internationale. Et au fond, maladie du système, là aussi, je ne conjuguerais pas totalement la maladie au passé, qui fait qu’on demande tout le temps, tout le temps, des rapports à des observatoires, à des systèmes d'évaluation, mais on n’en tire à peu près aucune conséquence.  Et puis le dernier point, une insuffisance très forte du financement privé qui est liée, qui est le fruit de la désindustrialisation française, plus rapide que chez beaucoup de nos voisins, et de sa sectorisation qui fait que les forces économiques françaises sont plutôt dans des domaines qui vont moins chercher de la R&D, et le fait aussi qu'en structure la France a moins de PME et d’ETI dans les secteurs qui demandent beaucoup de recherche, et des grands groupes qui avaient eu tendance plutôt à internaliser cette recherche et à moins travailler avec les acteurs de la recherche française. 
Si je devais, à la cavalcade, définir un peu les grandes difficultés de notre recherche, faiblesses qui s'étaient accumulées depuis 20 ans, c'est à peu près ça. La France est ainsi passée du sixième au neuvième rang entre 2005 et 2017 en termes de volume mais aussi de qualité des publications, le top 1%. Et même si les indicateurs sont toujours imparfaits, nous étions aussi un pays qui avait le plus reculé dans les dernières années sur ces sujets, avec insuffisamment aussi de participation et de candidatures aux grands projets de recherche européens et insuffisamment de grandes structures présentes dans les classements internationaux type Shanghaï ou autre. 

Alors, depuis 6 ans, on a essayé de corriger les choses et je veux vraiment saluer le travail de Frédérique VIDAL, et puis de Sylvie RETAILLEAU et avec elles, l'ensemble d'entre vous et on a partiellement corrigé les choses. 
D'abord, on a, je crois collectivement renforcé nos sites universitaires avec la loi ORE, accéléré la logique d'investissement sur les sites universitaires qui avaient été lancés depuis 10 ans en s'appuyant là sur les réformes qui avaient été faites en 2008, en renforçant, en accélérant le renforcement des sites tels que Saclay, PSL, Aix-Marseille Université et en s'appuyant sur la maturation de la dernière décennie. Il y a eu vraiment une phase d'accélération qui a permis une logique de site encore plus forte. Et ça, c'est une dynamique qui a payé ces dernières années, on l'a vu avec une amélioration dans les grands classements internationaux. 
Ensuite, on a engagé de vrais moyens publics au service de la recherche pour inverser la tendance de fond. Quand je dis ça, on a rattrapé, pas du tout surinvesti parce que j'entends parfois les débats qu’il peut y avoir, pas dans cette salle, mais plutôt à l'extérieur. La loi de programmation de la recherche a été promulguée en décembre 2020. Alors, elle est insuffisamment prise en compte dans les classements parce qu'il y a toujours un effet de retard de deux ans. Elle commence à se décliner en 21. Mais elle apporte sur sa trajectoire 25 milliards d'euros de plus dans notre recherche sur 10 ans. Et c'est un rattrapage qui nous ramène aujourd'hui à un niveau comparable sur la partie publique aux Etats-Unis, Royaume-Uni. On est encore dans la partie publique, largement derrière nos voisins allemands qui continuent d'investir plus que nous en recherche publique, en enseignement supérieur. Et ça, c'est ce qu'il nous faut, avec cette trajectoire et cette clause de revoyure, rattraper le cœur de la différence qu'on a en termes de financement, ce que je disais. 

Il reste sur la partie privée où là on est beaucoup moins important que les Britanniques ou les Américains, par exemple. Et ça c'est vrai de la recherche comme de l'enseignement supérieur. Et on dépense par exemple beaucoup plus par étudiant d'un point de vue part publique que chez beaucoup des anglo-saxons. Mais au total, on a moins d'investissements parce qu'il y a beaucoup moins d'investissements privés. Et sur la recherche, c'est pareil. Donc là, on a cet élément à rattraper. Mais enfin, on a d'ores et déjà des effets de ce réinvestissement historique de manière microéconomique, qui sont, là encore, je le dis, un rattrapage, je ne considère pas que nous sommes au bout du chemin, mais nous n’avons plus, dans notre pays, de chercheurs embauchés à moins de deux Smic, ce qui était beaucoup le cas avant 2017. On a eu 20 % de revalorisation environ avec ce qui a été fait ces 5 dernières années en début de carrière. On a plus de 1 000 nouveaux postes de doctorants qui ont été créés, des hausses de 15 % des moyens de fonctionnement fléchés vers nos laboratoires, des chaires de jeunes chercheurs qui sont aujourd'hui beaucoup plus nombreuses et mieux environnées avec 400 nouveaux postes et 49 % de chercheurs recrutés à l'étranger. Ce qui est là aussi une inversion de la tendance qu'on avait connue durant les 15-20 dernières années. L'Institut Pasteur, l'Institut Imagine, par exemple, ont pu aussi et su attirer des talents internationaux avec un investissement historique dans les talents et les infrastructures. Ce qu'on a aussi su faire et commencer à faire dans certains domaines, je pense aux calculateurs hautes performances exascale et à quelques autres. Ça, c'était l'autre élément important sur lequel je voulais revenir, ce qui avait été fait. 

Troisième élément qui a été corrigé, on a relancé une politique sectorielle d'innovation qui s'appuie sur les forces de notre recherche. Et donc ces dernières années, sur l'intelligence artificielle, sur le quantique, sur la biologie et la santé, on a relancé, je ne suis pas exhaustif, mais des stratégies sectorielles qui, je crois, ont mis des moyens et ont permis d'améliorer le lien recherche fondamentale, recherche appliquée, développement et innovation. Le plan sur l'intelligence artificielle, on a été l'un des premiers en Europe, puis après on a essayé sur tout ce qu'on pouvait de l’européaniser. Mais avec les 3 IA, les investissements dans les chaires de recherche notamment, certains d'entre vous en sont d'ailleurs la preuve. On a bâti aussi une vraie dynamique autour de Inria Startup Studio. Notre stratégie sur le quantique, lancée dès 2021, qui a permis l'émergence dans les deux ans d'un vrai écosystème de start-up, je pense le plus solide aujourd'hui d'Europe continentale à coup sûr, et l'un des deux meilleurs d'Europe. Mais on est très loin de la compétition avec les Américains et les Chinois pour le moment. 

Et puis, on a lancé une stratégie santé et innovation. On investit 7 milliards et demi d'euros et qui a permis de consolider les IHU, de développer des bio clusters annoncés et de travailler avec nos CHU, l'Inserm, etc. On a consolidé le travail avec la banque publique d'investissement, les organismes de recherche et les universités et démultiplié cet effort avec France 2030 qui a permis, dans le cadre de cet investissement total de 55 milliards d'euros, d'avoir 13 milliards d'euros supplémentaires sur la recherche et l'enseignement supérieur à travers une quarantaine de programmes et équipements prioritaires de recherche, les fameux PEPR dans une grande variété de domaines qui vont de l'endométriose à l'hydrogène. Et j'aurai l'occasion d'y revenir. 

Tout ça fait qu'on a beaucoup amélioré quand même dans plusieurs sujets, la capacité à innover à travers ces politiques sectorielles qui vient s'appuyer sur le substrat d'interdisciplinarité, de recherche fondamentale et de la solidarité de notre recherche historique. Les organismes de recherche ont commencé aussi leur mue avec les universités, les CHU, les écoles pour là aussi, bâtir davantage de partenariats avec les start-up et avec le monde économique. Ça, c'est ce qu'on a essayé de corriger ces dernières années. Je parle de moyens, d'effets de structures, de dynamique à la fois nationale et de site. Maintenant, je pense qu'il y a encore beaucoup de choses qui ne sont pas satisfaisantes. 

D'abord, et ça revient de partout de manière très claire, on vient à nouveau d'en parler, notre organisation collective n'est pas un élément d'efficacité et je pense que cela nous pèse. Nous avons une spécificité française qui tient à la coexistence de plusieurs institutions de différentes natures : des organismes nationaux de recherche, des universités, des grandes écoles, des établissements d'enseignement supérieur qui conduisent chacun leurs travaux avec une coordination et un partage des tâches qui fait encore parfois défaut. Et à l'échelle de la nation, ce morcellement désordonné nous prive de nous concentrer sur de grands défis partagés, nous empêche parfois d'être suffisamment réactifs en cas d'urgence et diminue notre capacité à parfois être attractif aussi dans le monde. 
Ensuite, on a un système qui est trop peu lisible et qui parfois gaspille des énergies par trop de bureaucratie rampante. Et ça, c'est très clair, on a remis des crédits publics, on améliore les choses, pas encore assez à mes yeux. Mais surtout on mange énormément du temps de recherche par de la bureaucratie et de la complexité administrative, mais qui est le fruit de notre organisation. Je veux dire tous ici, dans cette salle, nous sommes les co-dépositaires de cette bureaucratie. On ne peut pas chérir la complexité et les éléments de structure que chacun défend quand il parle pour lui-même et déplorer la bureaucratie qu'il engendre. Et aujourd'hui, c'est vrai qu'un chercheur dans une UMR doit dialoguer avec plusieurs interlocuteurs administratifs, remplir un dossier dans un format sur un logiciel quand il s'agit de l'université, un autre quand il s'agit de son organisme de tutelle recommandé, recommencer sur une troisième ou une quatrième s’il fait un projet de recherche avec un tiers. Donc on a une superposition des tutelles, des gestionnaires qui rend la vie complètement impossible et qui génère cette bureaucratie. C'est de la perte de temps, c'est de la perte de lisibilité, c'est de l'inefficacité aussi, du coup, des évaluations. Et c'est ce qui fait que même si on augmente les moyens, même si on va plus vite, etc., on a des équipes qui passent un temps considérable à faire au fond du dossier administratif pour avoir de l’argent pour le programme de recherche, qui leur permet de vivre. Et ça, c'est vraiment du gaspillage de temps de chercheurs et d'argent public. Parce qu’on ne parle que d'argent public. C'est de l'argent public qui prépare les appels à projet ou instruit les choses. C'est de l'argent public qui finance au niveau local la réponse à ces projets, puis ensuite qui va regarder et déplier les choses ou les instruire. C'est fou. Et c'est quand même fou que collectivement, avec autant d'intelligence embarquée, on arrive à générer ça. Je le dis pour nous tous, donc on devrait là faire un hackathon comme on dit maintenant, et se dire autour de la table, avec l'intelligence artificielle et beaucoup de choses, on devrait pouvoir cracker ce truc. C'est fou ! Alors on a fait des rapports très compliqués, la ministre a demandé un rapport à M. GILLET, avec des travaux qui ont été menés par l'Académie des sciences… Mais la vérité, c'est que tout ça devrait spontanément se faire. Moi, je le dis, je l'assume, mais je pense qu'on devrait derrière le faire beaucoup plus simplement, beaucoup plus fortement. Et ça, c'est le fruit d'une trop grande complexité en termes organisationnels et c'est le fait qu'on a mis l'appartenance à des structures et les statuts devant l'efficacité de fonctionnement. 

Et puis, on n'a pas été au bout d'une maladie structurelle que j'évoquais tout à l'heure, c'est-à-dire qu'on a mis plus d'argent, on a été plus vite sur beaucoup de sujets, mais on finance encore beaucoup trop des projets et pas assez des équipes et on finance encore beaucoup trop sur des temps courts. Parce qu'en fait on ne tire toujours pas assez conséquence des évaluations. Et ça, c'est une réalité. Et la maladie de l'évaluation que j'évoquais ou ces faibles conséquences tirées, ça reste vrai aujourd'hui, il faut être clair. Et puis nous n'avons pas réussi complètement encore à aller au bout de la maladie sur le financement privé. Du coup, maintenant, que faire pour regarder l'avenir et ensemble le bâtir ? 

Alors d'abord, j'ai souhaité assumer complètement ce que je vous dis tout à l'heure et mettre pleinement la science au cœur de nos décisions. C'est pourquoi j'ai pris la décision d'installer un Conseil présidentiel de la science, installé aujourd'hui. Je vais ici vous rassurer, ça n'a pas vocation à avoir le rôle que le conseil scientifique a joué pendant l'épidémie, cher François, même si évidemment, il y aura des missions de prospective et des éléments de recherche. Ça n'a pas vocation à se substituer à nos académies, cher Alain, qui continuent de nous alimenter, qui ont leur histoire, leur rayonnement, leur prestige et que je veux encore associer davantage à des décisions. Mais c'est permettre au moins une fois par trimestre d'échanger en toute liberté avec moi pour pouvoir nous dire ce qui va, ce qui ne va pas, nous aider à voir les émergences qu'il nous faut commencer à penser. De manière très libre aussi, alerter sur des dysfonctionnements, essayer de bâtir des projets nouveaux et essayer d'aller sur des éléments beaucoup plus de ruptures, indépendamment évidemment des politiques publiques qui sont à décider ou de ce qui est la vie normale du Gouvernement et de ce que porte la Ministre, de ce que les organismes décident ou autre. Donc, ce n'est pas un élément de substitution de concurrence avec les organismes de recherche ou les académies, bien au contraire. Mais au fond, vers où concentrer nos efforts ? Sommes-nous au niveau sur des sujets émergents ? Prenons-nous le bon chemin etc etc. avec liberté de parole et méthode ? L'objectif est qu’au plus haut niveau, ce Conseil m’aide dans l'orientation, l'alerte et le suivi des décisions prises. 

Ensuite, je veux qu'on puisse prendre en matière de pilotage, d'organisation, de mise en œuvre de notre politique de recherche, plusieurs éléments de clarification qui sont indispensables. Et en effet, au-delà de la science au cœur de nos décisions, le deuxième principe, c'est la clarté dans le pilotage de nos organisations. J'ai décrit ce qui ne fonctionnait pas et je pense que pour ce faire, il nous faut, et pour moi, le bon pas de temps, ce sont les 18 prochains mois ; c'est-à-dire que là, il nous faut finir les propositions. 
On a le rapport GILLET qui est une première étape. J'y reviendrai. On a plusieurs autres jalons dans les mois qui viennent. Il faut commencer pour la rentrée prochaine à faire tout ce qu'on peut sur les choses. Mais pour moi, d'ici à 18 mois, il faut qu'on ait, sur tout ce que je vais dire, essayer d'avoir mené la transformation. 18 mois me semblent réalistes et ambitieux, mais je pense que c'est indispensable, je le disais tout à l'heure, parce qu’aller plus vite, c'est évidemment irréaliste, ce serait à mes yeux impossible. Aller plus lentement, c'est prendre le risque de décourager toutes celles et ceux qui veulent y croire dans ces transformations et le règlement des problèmes que j'évoquais et c'est le risque de l'enlisement. Mais je pense qu'on a amené des transformations que parfois, par le passé, on n'a pas réussi à mener ensemble. 

Dans la clarification du rôle et donc de nos organisations, la première, c'est au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche de créer une vraie fonction de pilotage et de stratégie Une fois que j'ai dit ça, ce n'est pas qu'un mot dans ma bouche, c'est une fonction que l'administration centrale, historiquement, sait très mal faire parce qu'elle n'a pas été conçue pour cela. Et il est vrai… c'est vrai pour le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et c'est vrai pour beaucoup des ministères qui de plus en plus font la tutelle d'opérateurs parce que quand vous avez habitué les gens, les organismes, les administrations au fond à décider, à faire du contrôle, a priori, il est très difficile de les amener à faire de la stratégie, du pilotage et de l'évaluation. 

Ce ne sont pas les mêmes talents donc, il faut reformer les choses profondément, les accompagner. Si on regarde avec honnêteté ce qui a été fait après la réforme de l'autonomie des universités de 2008, le fait que très peu de conséquences aient été tirées sur l'administration centrale, fait que nous avons très peu fait de l'autonomie. J'y reviendrai, mais j'avais la chance d'être avec France Universités il y a quelques jours, on parlait de nos fameux COMP. On a produit beaucoup de sigles collectivement, donc contrats d'objectifs de moyens et de performance. C'est vrai que quand on regarde en vrai ce qu'avec ces contrats on pilote comme vraies dépenses au total, on a envie de se dire que les gens qui sont prêts à les préparer, à les documenter et les évaluer sont des héros, c’est les meilleurs COMP.  

Présidents, regardez-moi, c'est 0,8 ou 1 % du budget de l'université. Objectivement, on ne fera croire à personne que ça s'appelle de l'autonomie. Ce n’est pas vrai. Donc, ça veut dire qu'on n'a pas pris les bonnes décisions et qu'on ne doit pas rester au milieu du gué. Donc ça, c'est un vrai travail, une tutelle efficace, elle sait définir les priorités. Le ministère est celui qui doit agréger les éléments d'interdisciplinarité, être capable d'être un interlocuteur qui oriente, stimule, questionne ces grands opérateurs comme ces universités, lance les évaluations et sait en tirer les conséquences. Derrière ce premier pilier de la clarification, il y a évidemment la fonction de l'évaluation. Je souhaite que vraiment, et ça, c'est un des travaux que j'ai demandé à la ministre et je sais combien elle y croit, on simplifie le système d'évaluation, qu’on en réduise drastiquement le nombre et la fréquence, mais qu'on bâtisse un consensus pour en tirer vraiment les conséquences. Aujourd'hui, une mauvaise évaluation n'a aucune conséquence, quasiment sur une équipe de recherche. Ça veut dire que collectivement, si on veut qu'il y en ait moins, il faut qu'on accepte de se dire que sur une équipe de recherche qui a une mauvaise évaluation, on accepte de la fermer mais qu'à l'inverse, une équipe qui a une bonne évaluation, on sait lui faire confiance et lui donner un financement d'équipe de 3 ans, 5 ans qui va lui permettre de ne pas aller chercher des projets, de se concentrer sur sa recherche fondamentale ou sur la recherche de grands projets européens ou de contrats partenariaux, etc. Deuxième pilier d'évaluation. 

Troisième élément, nos organismes nationaux de recherche. Je souhaite que nous réussissions à transformer nos grands organismes nationaux de recherche en de vraies agences de programmes. À ce titre, chaque agence doit être de plus en plus stratège dans son domaine et participer à la définition de thématiques de recherche prioritaires, organiser la veille scientifique pour l'ensemble des chercheurs de son domaine de compétence, interagir avec les homologues européens internationaux et veiller au développement des infrastructures de recherche. Chaque ONR transformé en agence aura ainsi un vrai mandat et disposera des ressources pour piloter les programmes qui lui seront confiés. Sur les grands défis du temps, nous allons ainsi vers un principe de spécialité par agence de programmes, même si, on le sait, des agences sont plus généralistes que d'autres : climat, biodiversité et société durable au CNRS, en lien naturellement avec l'Ifremer pour les océans, avec l'IRD pour le développement durable, pour n'en citer que quelques-unes et illustrer la nécessaire coordination de nos forces, agriculture, alimentation durable, forêts, ressources naturelles associées pour l’INRAE, énergies décarbonées, numérique, logiciel à l'INRIA, santé à l'INSERM en lien étroit avec nos CHU, composants aux systèmes et infrastructures numériques au CEA, spatiales naturellement au CNES, etc. Agence de programmes veut aussi dire capacité à oser davantage et à laisser toute la liberté académique aux meilleurs et savoir encore mieux accompagner toutes les équipes d'excellence émergentes. Ce que nous ne savons pas encore assez faire aujourd'hui, les évaluations récentes le montrent, les agences auront aussi un mandat fort et des moyens pour les encourager, je sais que c'est votre volonté, à la prise de risque, à aller vers des recherches plus disruptives, des innovations de rupture, préparer les grands programmes de recherche de demain et donc permettre justement au fond d'accompagner dans la durée des équipes d'excellence que vous aurez préparées, sélectionnées et à qui vous donnez plus de visibilité et de profondeur de champ.  C'est une vraie révolution dans l'approche. C'est une vraie révolution dans l'organisation. Mais j'y crois. Et je pense que c'est ce qui nous permettra d'être véritablement compétitif et d'aller au bout de cette logique. 

Alors on me dira légitimement dans ce contexte-là, que deviennent les universités ? Justement, les universités doivent évoluer pour prendre une place centrale en tant que cheffes de file pour organiser et gérer la recherche scientifique de leur territoire. Si la prospective, la définition des programmes nationaux sont majeurs, la recherche existe dans un continuum essentiel et qui se fait dans une logique de site. Enseignement, formation, recherche, dialogue avec la société, le monde socio-économique, responsabilité sociale et environnementale, là aussi rôle avec nos homologues à l'international, lien avec la clinique quand on parle de nos centres hospitalo-universitaires, et ces liens, cette logique à la fois de site de pluridisciplinarité sont absolument essentiels. Et c'est au niveau des universités que cela se joue, avec les universités, au niveau des sites, des pôles universitaires que nous souhaitons continuer de renforcer. 

Construire son identité, sa politique scientifique sur un site, développer ses collaborations avec les entreprises est là aussi un formidable enjeu avec ce dialogue permanent, cette tension permanente entre une politique nationale et une priorité locale. Et donc ça, c'est ce que nous voulons installer véritablement. Et à terme sur chaque site universitaire, on doit pouvoir avoir un gestionnaire unique suite aux échanges locaux qui devra être défini pour chaque unité, en le rendant pleinement responsable de l'accompagnement administratif de chacun des chercheurs. Et sans rentrer dans les détails, nous allons amorcer un vrai effort de simplification dans le poids des procédures administratives pour nos chercheurs. Là, dès maintenant, avec un pilotage local des équipes et une évaluation réorganisée. C'est donc par cette logique de site qu'on créera plus d'autonomie réelle et surtout plus de simplification de gestion. Ce qui n'enlève rien à la qualité de la science qui continuera à être faite dans ce dialogue avec les organismes de recherche, la gestion des pairs, avec le dialogue national qui continuera de se faire réguler par les pairs, mais qui permettra d'avoir une vraie efficacité sur une logique de site et de simplifier infiniment la vie des équipes. Plus fondamentalement, ça implique que nos universités renforcent leur autonomie, développent leur capacité à opérer cette gestion et que nous construisions ensemble les moyens de cette pleine responsabilité. Pour ça, il faut avancer sans tabou et c'est ce qu'il faut faire dans les prochains mois pour le préparer. On en a parlé avec France Universités, c'est-à-dire regarder les enjeux de gouvernance, de modèle économique et en effet, bâtir des vrais contrats d'objectifs de moyens et de performance avec des financements beaucoup plus incitatifs. Et moi, je souhaite que les universités qui y sont prêtes et qui le veulent fassent des propositions les plus audacieuses et permettent de gérer la ressource humaine, qui sont sur leur site avec une vraie logique de délégation de cette fonction. Et on peut tout à fait avoir et ça va au-dessus, je sais, parce la ministre m'a interdit de prononcer le mot statut. Je le disais tout à l'heure au Conseil présidentiel, vous avez des ministres pour qui j'ai beaucoup d'affection. Je leur passe toujours avant ce que je vais dire pour voir s’ils sont d'accord ou pas, parce qu'après c'est eux qui vont le faire. Et alors, vraiment, elle m'a dit « si vous dites que vous avez changé de statut », d'abord, j'ai dit « dans la mission de Monsieur Gillet qu'on n’allait pas le faire, voilà, ça va être tout de suite la bronca. Tout le monde va se mettre en travers, on n'arrivera à rien faire. » Donc je n'ai pas dit qu'on allait réformer les statuts. Mais à la fin des fins, qu'est-ce qu'on veut ? On veut que vous puissiez former, recruter, garder les meilleurs chercheurs au monde et les attirer. On veut que ça puisse se faire dans une très grande liberté académique et donc que ce soit entre pairs que ce soit décidé. Mais après, on veut quand même simplifier la vie de tout le monde et que ce soit au niveau des équipes, que les choses se décident avec beaucoup plus de liberté. Et moi, je suis incapable de dire au fond s’il faudrait 100 % de temps de recherche pour la même personne tout au long de sa vie, et c'est sans doute une stupidité absolue de notre système. Tout ça parce qu'il est rentré à 25 ans dans un système et peut-être que cette même personne, elle aura à un moment donné envie de faire un peu plus d'enseignement. Les choses selon les disciplines, selon sa vie, ses choix font qu'on a peut-être à un moment envie de faire plus d'enseignement, plus de recherche, plus de clinique. Les statuts ne sont pas des protections aujourd'hui, ce sont devenus des éléments de complexité. Donc moi, je vous invite très sincèrement, vous êtes beaucoup plus intelligents que moi, tous dans cette salle, à les changer vous-mêmes. À mon avis, c'est le meilleur truc à faire ; c'est-à-dire qu'il faut préserver du temps de recherche pour les gens qui sont très bons, qui en ont envie ou autres. Se dire d'ailleurs qu'à mon avis, pour les très bons chercheurs, moi, je parle sous le contrôle de gens qui font ça, j'ai beaucoup d'admiration. Il y en a qui considèrent que l'enseignement nourrit leur recherche. Et moi, je crois vraiment qu'on a une approche et on a en quelque sorte sur ce sujet des guerres de tranchées qui sont d'un autre âge. On va continuer de donner plus de moyens et j'en serai le garant devant vous. 

On ne gère donc pas la pénurie avec la réforme que je vous propose parce qu'on réinvestit, on a cette loi de programmation, je vais y revenir et je veux qu'on continue à mettre davantage. Mais si on veut simplifier nos structures, vous aider à terrasser la bureaucratie, faisons des vraies agences de financement qui arrêtent de gérer directement les personnels. Faisons des vraies universités autonomes avec des logiques de site et ayons des équipes qui sont gérées au niveau d'un site. Mais après, avec de la possibilité de bouger de l'un à l'autre et donc de la fluidité et de la mobilité nationale, selon les équipes, et de la mobilité interdisciplinaire, beaucoup plus qu'aujourd'hui. Ça m'a été dit tout à l'heure. Parce que la logique du statut, ne vous trompez pas, elle crée de la rigidité interdisciplinaire aujourd'hui alors créons cette liberté. Moi, je crois en tout cas que ce qu'on est en train de se dire, c'est bon pour les universités parce qu'au fond, ce que je leur propose, c'est d'ici à 18 mois d'ouvrir l'acte 2 de l'autonomie et d'aller vers la vraie autonomie avec des vrais contrats pluriannuels où on a une gouvernance qui est réformée, vous avez les moyens de vous engager en tant qu’université et collectif universitaire sur des objectifs et à l'issue du contrat où ils sont évalués. Vous avez de la visibilité et ce faisant, on va mettre en place une vraie révolution pour nos chercheurs, parce que ce sera un élément de simplification. Je vais y revenir. Pluriannualité, autonomie, évaluation. Concrètement, si on a un tel modèle, si une nouvelle pandémie survenait, les pouvoirs publics se tourneraient vers l'Inserm —qui aurait préalablement défini et accompagné tous les laboratoires de recherche sur les vaccins du territoire, serait, dès lors qu'elle est l'équipe, quel que soit son rattachement au sein de son université, qui serait la mieux placée et en lien avec l'Institut Pasteur, les CHU, les universités— piloterait, si je puis dire, la stratégie nationale avec des vraies équipes qui auraient une gestion bien plus simplifiée. 
De la même manière, sur la planification écologique, on a posé les premiers jalons d'un plan complet où les défis pour la France de 2040 sont massifs. C'est exactement la même ambition fixée. Le CNRS bâtirait la stratégie nationale, aurait tous les labos de référence avec les partenaires, organismes de recherche, laboratoires, structures, écoles et serait — et va savoir, puisque là, ce n'est pas l'éventualité d'une pandémie, c'est la certitude qu'on doit justement avancer sur ce plan — nous identifier les meilleurs éléments de solutions, de recherche en décarbonation, en énergie, etc. 

L'autre élément qui va avec cette simplification, c'est une différenciation assumée. Je ne veux pas ici réinventer un jardin à la française. Tous les organismes et les sites n'iront pas à la même vitesse, même si certains ont déjà commencé à prendre ce virage. Ce qu'on doit bâtir et ça, c'est un intangible, on doit partout avoir un enseignement supérieur de qualité, on doit partout avoir une recherche de qualité mais on sait que dans des disciplines, on doit accepter la différenciation et ce n'est pas une logique, là, de Paris contre la province ou forcément des gros sites contre la province. L'exemple de La Rochelle, par exemple, est sans doute la meilleure illustration que sur telle ou telle discipline, on peut tout à fait avoir un site universitaire qui décide d'aller sur un secteur où il a un écosystème qui lui permet de faire la meilleure recherche mondiale, d'avoir une meilleure équipe. Il faut donc l'aider à aller beaucoup plus vite. Mais ce n'est pas vrai qu'on aura la meilleure recherche mondiale compétitive dans tous les domaines, dans toutes les universités et qu'on doit du coup donner tous les moyens identiques à tout le monde ou en quelque sorte faire avancer tout le monde de la même manière. Ce ne serait pas lucide. Et donc commençons dès à présent par confier aux grands organismes de gestion de nos grands programmes thématiques et nos programmes de recherche de France 2030, accélérons la prise de risque, ce qui va permettre à ce qu’il y ait un élément de différenciation pour les meilleurs qui n'ont pas encore assez d'argent public avec la loi de programmation de recherche, laissons d'ici 2025 le temps de prendre toutes les mesures pour mettre en œuvre ces transformations aussi en agence de programmes, mais dès maintenant, donc dans les 18 mois, ce que je veux du CNRS, du CEA, de l’INRAE, de l’INSERM, de l'INRIA, de tous les organismes, du CNES, c'est véritablement d'utiliser cet argent de France 2030 pour les priorités qu'on a déjà définies. Au-delà des crédits qui sont les leurs, d'accélérer sur ces priorités et d'amorcer à marche forcée ce travail de différenciation qui est le leur et de travailler avec les autres organismes, les universités, les écoles et les CHU dans cette direction. De façon similaire, expérimentons avec nos universités pour arriver à construire une autonomie renforcée. Mais moi, je souhaite que si certains sites souhaitent aller plus vite, ils puissent aller plus vite et qu'on donne de la liberté, qu'on ne soit pas forcément homogène. Et peut-être que d'ici à 18 mois, tous les sites universitaires ne seront pas prêts à aller vers des contrats d'objectifs, de moyens et de performances aussi ambitieux que ceux que je décrivais. Et il faudra qu'on assume peut-être un système qui accepte de faire vivre une transition à plusieurs vitesses, et ça n'est pas grave. Et là-dessus, je veux aussi le dire, il faut qu'on accepte d'avoir un système qui est différencié, qui gagne en flexibilité parce que c'est le seul moyen en tout cas de pouvoir créer de la confiance collective qui permettra d'avancer. 

Ensuite, tout ça doit s'accompagner évidemment d'une simplification et de plus de confiance pour nos chercheurs. Si on a cette clarté dans l'organisation, si on a justement des unités de gestion clarifiées et une plus grande autonomie de nos universités, en découlera une plus grande simplicité pour nos chercheurs. Et je le dis parce que tout ce que je viens de dire, si on dit ce n'est pas possible, on ne va pas le faire, etc., on continuera du coup d'avoir de la complexité au niveau des unités de recherche, qu'on le veuille ou non. Donc on peut me dire “Vous faites des trucs, mais c'est trop lent, c'est trop compliqué, etc.” mais il faut qu'on bouge tout le système parce qu'on continuera à avoir des unités mixtes, c'est une formidable force. Il faut juste qu'on ne soit pas entravés par ces complexités. Et donc, sur ce sujet, je veux un véritable choc de confiance. Il nous faut délester nos chercheurs des réponses à des cahiers des charges, leur éviter les temps d'attente sur des projets parfois trop longs. On l'évoquait encore, même quand on a des projets prioritaires, on met parfois 18 mois à avoir les crédits, ce qui est fou. Tout cela doit se faire de plusieurs manières. 

D'abord, pour les appels à projets qu'on appelle blancs, ou en bon breton curiosity driven. Donc, avec la loi recherche, on a redonné du sens aux appels à projets de l'Agence nationale de la recherche et on a rendu, je crois, plus crédible ces financements. On a commencé à réduire les délais, on a donné beaucoup plus de capacité. On doit réduire drastiquement les délais de réponse, je le sais, qui doivent être similaires à ceux en cours pour les aides aux entreprises. Et on doit viser de les diviser par deux, de passer d’un an à six mois, ce qui impliquera une mobilisation de tous à l'ANR, je le sais, mais aussi pour les évaluations que j'évoquais. Les appels à projets nationaux voient et verront leurs montants augmentés et concentrés sur les projets de recherche de grande ampleur aux standards internationaux qui atteignent 5 ans, ce qui permettra là aussi d'éviter les financements successifs incertains et variables. Et pour les projets blancs, c'est la même logique que celle que j'évoquais, c'est-à-dire aller vers un financement d'équipes avec plus de durée, avec des financements plus massifs, qui permet de libérer ces équipes d'excellence de la multiplicité des appels à projets et du temps perdu sur ce sujet. La simplicité doit être une exigence absolument constante et pour cela, nous allons mettre en place des outils de mesure à destination des chercheurs pour avoir une mesure en temps réel de la simplicité et mettre de la transparence sur ce sujet. Et là, au fond, moi, j'appelle à la bonne volonté collective. Je pense qu'on n'a pas intérêt à déployer un outil administratif pour faire ça, mais à demander aux meilleurs chercheurs de nous aider à avoir des instruments de mesure et d'avoir en quelque sorte des startups d'État qui vont nous aider à faire ça. Vous avez tous là, beaucoup plus que moi, l'intelligence pour permettre d'avoir de la mesure, si je puis dire, en temps réel, de la complexité subie par les chercheurs. Il faut la déployer partout pour nous permettre de traquer l'inefficacité et au fond l'ensemble des structures, ONR comme universités, doivent faire de l'accompagnement humain des chercheurs une priorité. Là où tout notre système s'est en quelque sorte replié sur lui-même parce qu'il a subi 15 années de disette budgétaire et là où la culture administrative collective est plus de la défiance. Et donc on a beaucoup plus mis une logique de contrôle que d'accompagnement. 
On doit aussi réfléchir à faciliter les passerelles entre les agences de programmes et les universités pour gagner en fluidité. Et là aussi, je le dis clairement, ça va avec ce que j'évoquais sur les statuts, autant de statuts différents dans une même politique publique, à coup sûr, n'est pas efficace ni agréable à vivre pour les acteurs, et donc on doit cheminer là aussi vers des rapprochements des sentiers. Et au fond, vous l'avez compris, moi je pense que ce que je suis en train de vous proposer, qui est le fruit de discussions du compagnonnage depuis tant d'années avec vous, est une vraie révolution collective. Mais je ne crois pas au grand soir qu'on fait d'en haut avec des textes de loi. Je crois qu'il y a un constat suffisamment partagé que le système marche mal pour se dire de manière collaborative, on peut trouver des systèmes beaucoup plus intelligents. Les passerelles entre les statuts les uns les autres en font partie. Et c'est un élément de simplicité. La clarté dans la chaîne de responsabilité, la simplicité pour les acteurs, vous le voyez bien, ce sont des éléments absolument clés pour rebâtir notre système, pour libérer du temps de recherche, pour redonner là aussi, je dirais, une plus grande visibilité aux équipes et pour accroître notre attractivité, je dirais attractivité à l'égard des chercheurs que nous formons et parfois qu'on perd, attractivité à l'égard des jeunes doctorants qui sont parfois sous vos responsabilités, qu'il faut convaincre de rejoindre la recherche et l'attractivité à l'égard des meilleurs chercheurs à l'étranger qu'on veut faire revenir. Voilà le cœur, si je puis dire, de la transformation collective que je vous propose dans les 18 mois qui viennent. Placer la France au niveau qui est le nôtre et à l'ambition qui est la nôtre, suppose aussi de valoriser tous nos domaines d'excellence. 

Et je le disais dans mon propos introductif, je pense aussi à cet égard aux sciences humaines et sociales. En la matière, la France est aussi une nation d'excellence qui a créé des véritables disciplines, qui a su les porter et de la sociologie à l'anthropologie a su bâtir son excellence académique et de recherche. Ce que je veux, c'est qu'on puisse là aussi renforcer nos sciences humaines et sociales, les inscrire dans le même paysage, la même organisation que je viens de décrire. Il faut pour cela aussi mieux les structurer pour qu'elles retrouvent leur rayonnement et leur visibilité. À cet égard, plusieurs de nos programmes prioritaires de recherche ont d'ores et déjà été dédiés aux sciences humaines et sociales parce qu'ils seront un levier absolument indispensable de notre organisation et de la transformation qui est la nôtre. Par exemple, le PEPR dédié à l'intelligence artificielle, au numérique, associe étroitement nos SHS et je souhaite que nous lancions dans les prochaines semaines des programmes de recherche dédiés au SHS et orientés sur des thématiques prioritaires sur lesquelles savons qu'on a besoin d'éclairage. Les évolutions de nos démocraties, la question du travail, les âges de la vie, le patrimoine, les religions et les civilisations, mais aussi les conséquences du changement climatique, les évolutions de nos habitats et modes de vie. Je n'en cite que quelques-unes. Celles-ci ont fait l'objet d'un très fort consensus. Ces travaux permettront à nos perceptions et nos jugements d'être plus éclairés, enracineront à nouveau aussi nos débats publics sur des faits. Plus largement, c'est tout le domaine de la recherche qui doit mieux s'appuyer sur les ressources de créativité et de curiosité de la société. Et je sais que l'aspiration est, à cet égard, à plus d'interdisciplinarité et de transdisciplinarité fortes. Et là aussi, nous l'avons vécue au cœur de la pandémie, l'éclairage par l'anthropologie, la sociologie de la médecine ou d'autres disciplines a été absolument clé pour accélérer la diffusion de certaines innovations ou de certaines bonnes pratiques qui étaient essentielles pour avoir des résultats scientifiques quand on parlait de l'approche collective. Là-dessus, nous continuerons donc d'apporter nos efforts et je le dis aussi dans un moment grave pour nous collectivement, nous continuerons d'accentuer nos efforts pour porter des projets de science ouverte et en open source, là où dans beaucoup de pays, ils sont de plus en plus menacés. Vous le voyez, tout ce que j'essaie de dessiner, qui est le fruit d'échanges collectifs, c'est un changement complet de philosophie, d'organisation à la fois au niveau national, mais dans l'intimité de nos structures, de notre recherche. Je crois que le pays y est prêt parce qu'il y a eu beaucoup de réformes réussies ou ratées, parce que nous sommes dans une phase où on a commencé à rattraper le retard qui s'était accumulé et nous réinvestissons et vous savez ma détermination pour tenir cette ligne. Et je crois qu'aujourd'hui, on doit prendre des décisions avec un caractère vraiment irréversible. Tout ça, évidemment, doit s'accompagner de moyens. En 10 ans, deux quinquennats, nous aurons engagé des investissements historiques et des réformes profondes d'organisation. 

Je le disais, le rattrapage budgétaire est déjà amorcé par la LPR et France 2030. Je vous annonce que ce sont d'ores et déjà près d'un milliard d'euros issus de France 2030 que nous sommes en train de débloquer là pour lancer les premiers travaux dans les prochaines semaines et pour piloter de nouveaux programmes, prendre plus de risques et faire rester les meilleurs dans tous les domaines. Je pense à l'exemple d'ailleurs des mathématiques où nous allons investir massivement en recherche dans le domaine parce que, là aussi, nous savons les éléments de fragilité qui ont été soulignés par plusieurs d'entre vous dans une tribune récente. Je pense aussi qu'il faut continuer à renforcer les dispositifs de soutien à l'attractivité de nos jeunes chercheurs pour faire revenir les plus prometteurs en France et faire rester ceux qui seraient tentés par la recherche. Et à cet égard, si nous avons des réinvestissements à faire, je veux tout de suite prioriser ce point. Les chaires de professeur junior fonctionnent, les dispositifs, notamment en santé, ont été mis en place avec des montants exceptionnels de soutien sur chaque poste qui seront annoncés prochainement. Là-dessus, à coup sûr, il nous faudra les amplifier, les pérenniser et les étendre à tous les secteurs parce que cette dynamique fonctionne. Je souhaite aussi qu'on accroisse notre capacité à mobiliser davantage les financements privés pour accélérer justement l'investissement dans notre recherche. Je le disais, c'est le point sur lequel nous sommes le plus en retard par rapport à nos grands comparables. Et donc là, le but, c'est que, par les réformes que je viens de décrire, nos équipes aient aussi plus de temps pour aller chercher des contrats partenariaux ou faire émerger des startups et de la création d'entreprises dans nos laboratoires. On a déjà beaucoup accéléré ces dernières années, il faut poursuivre ce mouvement qui est un des leviers de financement de notre recherche par le secteur privé. Je suis aussi très confiant et j'en appelle à tous les acteurs de l'ensemble du monde de l'innovation et de la technologie française, mais les startups, la French Tech et à travers elles aussi tout ce que nous avons su développer ces dernières années dans la deep tech, les entreprises qui ont commencé à émerger et ont pris des tailles plus importantes, qu'il s'agisse du secteur de la santé, de l'énergie, du spatial, des secteurs les plus technologiques, de manière native, ont un réflexe de collaboration avec la recherche publique beaucoup plus fort. Tout ce développement que nous sommes en train de réussir, qui fait de la France la nation la plus attractive en termes de financement sur ces secteurs et la première nation en termes de création et de développement de startups, doit avoir un effet sur notre recherche publique et son financement. Et donc, là aussi, nous serons très vigilants pour que tous ces acteurs émergents nouent des liens, maintiennent leurs liens, développent des liens encore plus importants avec la recherche publique au travers des contrats de recherche et, là aussi, des logiques de brevets ou de création de startups. 

Je souhaite aussi que les liens se renforcent avec nos plus grands groupes. Un travail a été fait ces dernières années par l’Académie nationale de la technologie, l’ANRT, et plusieurs autres, pour qu'il y ait plus de docteurs dans nos grandes entreprises au plus haut niveau. Je pense que c'est un changement absolument essentiel sur le plan sociologique et nous continuerons à l'accompagner. Là aussi, nous serons vigilants pour que les plus grands groupes s'appuient davantage sur la recherche publique. 

Puis nous allons multiplier les efforts de financements conjoints sur les infrastructures de recherche. Qu'on parle de supercalculateurs, des infrastructures, du quantique ou de l'intelligence artificielle, de certains domaines de l'innovation en exploration spatiale ou des capacités de calcul ou de découvertes dans la physique de la matière et des particules, les montants sont tels que nous avons de plus en plus besoin de réussir à mobiliser des projets publics privés et c'est indispensable en garantissant l'open source et la capacité d'avoir une science ouverte, mais d'avoir des approches où on va mobiliser des grands acteurs privés français et européens dans ce sens pour avoir des infrastructures de recherche à un niveau critique, là où sinon nous sommes concurrencés d'ailleurs parfois exclusivement par des acteurs privés. Je pense aux capacités de calcul aujourd'hui, quand on les regarde, qui nous placeraient hors de la capacité à être compétitif. 

Enfin, il nous faut aussi beaucoup plus mobiliser les financements européens. Plusieurs d'entre vous ont témoigné sur les grands programmes européens de recherche. Là aussi, je souhaite que nous puissions en faire un chantier prioritaire pour nos organismes et nos universités. Aller chercher davantage de crédits et de grands projets de recherche à l'Europe et nous allons continuer à nous battre pour aussi nos grands projets d'intérêt européen commun, les fameux PIIEC, qui nous ont permis, sur plusieurs disciplines de mobiliser des financements massifs pour l'innovation, mais aussi sur de la recherche et surtout de mutualiser les efforts entre Européens. Je crois que sur beaucoup des domaines que nous évoquons, on peut avoir un effet démultiplicateur en la matière. Et puis enfin, nous aurons l'année prochaine une clause de revoyure qui devra nous permettre de redéfinir des priorités et de pouvoir ainsi recalibrer de nouvelles ambitions côté financements publics de la recherche à horizon 2030, sur la base de cette évaluation et accompagnant les évolutions de structures que j'évoquais. Voilà les points principaux que je voulais ici bâtir, mais au fond, tous les grands défis qui sont les nôtres, qu'il s'agisse de la protection de notre nature et du défi climatique pour aller vers la neutralité carbone, de l'intelligence artificielle et de ses conséquences sur notre société, de la capacité à être au cœur de l'exploration spatiale, des aventures de ruptures qui s'y joueront, de l'exploration des grands fonds et là aussi, des innovations de rupture qui s'y décideront à coup sûr, des évolutions en santé, de la médecine individualisée ou prédictive, et j'en passe, nous avons des révolutions qui nous imposent de réussir et nous devons conduire ensemble ces transformations. 

Ce que j'ai essayé de dessiner à grands traits aujourd'hui devant vous qui, encore une fois, est le fruit de beaucoup de travail ces derniers mois, je dirais ces dernières années, s'appuie sur une crédibilité des dernières années et des premières transformations que nous avons bâties, mais suppose dans les 18 prochains mois un travail important et beaucoup de courage de votre part à tous et toutes, parce qu'aucune des transformations que je viens d'évoquer n'est naturelle. Et beaucoup des choses que j'ai pu dire ici ont pu être dites ou tentées, puis interrompues. Je pense que nous avons déjà conduit beaucoup de transformations et d’évolutions qui nous permettent, en particulier sur les 18 prochains mois, de mener ce travail. Vous l'avez compris, plusieurs rendez-vous dans les prochains mois seront donnés à Madame la ministre qui, avec vous et sur la base des premiers travaux, va avancer sur cela. Nous aurons pour l'été et l'automne prochains déjà, des évolutions massives dans les éléments de simplification et des premiers points d'étape sur ce que je viens de dire. Mais pour moi, l'automne 2025 est vraiment le point d'aboutissement de ces transformations et de la vision que je viens d'évoquer. Ce qui suppose des rendez-vous réguliers que nous aurons les uns avec les autres. Peut-être faudra-t-il ajuster tel ou tel point, peut-être faudra-t-il transformer, nous adapter, gagner en flexibilité, être peut-être plus ambitieux là, être plus pragmatique ici. Je considère que c'est comme ça que les choses doivent avancer. Et au fond, ce que je vous propose, c'est une transformation collaborative où l'esprit de recherche est mis au service de notre organisation administrative collective. Ça me semble le meilleur moyen de faire avancer et de vraiment transformer notre système de recherche et d'enseignement supérieur. Vous m'aurez en tout cas à vos côtés. Et pour terminer, je voudrais simplement vous dire deux dernières choses avant de partager un verre avec vous. 

La première chose, c'est que derrière tout cela, il y a une très grande confiance de la nation à votre endroit, à l'endroit de tous vos pairs et de toutes celles et ceux qui se tournent vers la recherche, le savoir et l'enseignement supérieur. Et je le dis sous ce plafond où les arts et la science soutiennent la République, parce que je pense que le défi de notre République, et la France y tient un rôle tout particulier dans le concert des nations, est en effet de mettre le savoir, la science au cœur des choix, des décisions, et de la vie collective. Derrière tout ce que nous sommes en train de faire et de décider, de partager, il y a cette volonté de dire que la recherche de la vérité, la liberté académique qui doit l'accompagner et la volonté de placer le savoir au cœur, plutôt au sommet de la République, est vital pour elle. Parce que la République s'est construite sur ces valeurs et ces principes, celui de la dignité humaine au-dessus de laquelle rien ne se bâtit et celui de démocraties libérales qui peuvent fonctionner aussi longtemps que les citoyens sont éclairés, c'est-à-dire que ce sont des esprits bien formés pour pouvoir décider et être maîtres de leur choix et que ce sont des citoyens bien éclairés par une décision rationnelle, objective, nourrie par la science, qui leur permet de réagir aux décisions des dirigeants, de les valider ou de les invalider, mais en connaissance de cause. Il n'y a pas de République, de démocratie qui survive longtemps s'il n'y a pas une science forte, ouverte, reposant sur la liberté académique et donc c'est un principe de confiance intéressé si je puis dire, qui est le mien, intéressé dans la vie, la vitalité et la solidité de notre démocratie. 

La deuxième chose, c'est que derrière tout cela, je sais pouvoir compter sur vous pour créer des vocations. Parce que notre responsabilité est aussi d'être sûr que demain, des jeunes garçons et des jeunes filles, peut-être encore plus des jeunes filles parce que je n'oublie pas la nécessité d'attirer les talents, en particulier dans certaines disciplines de ce côté, rejoignent à leur tour la recherche, l'enseignement supérieur, la clinique et puissent continuer de faire de la France une grande nation de savoirs, de connaissances, de recherches. Une grande nation au service de la science et à laquelle la science apporte tant. Voilà pourquoi je suis avec vous aujourd'hui. Je crois à tout ce que je viens de vous dire. Je me battrai à vos côtés pour que cela advienne et en tout cas, vous saurez que je serai à vos côtés dans les mois, les années qui viennent, pour que cela puisse advenir. Merci à vous. Vive la République et vive la France !

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