INTRODUCTION
La cryosphère des régions montagneuses et polaires joue un rôle crucial dans l’équilibre énergétique de la planète, le cycle de l’eau, les rétroactions climatiques, la biodiversité et les sociétés humaines. Malheureusement, avec l’intensification du réchauffement climatique provoqué par les activités humaines, on constate la diminution des nappes glaciaires et des glaciers, l’élévation du niveau de la mer, le dégel du pergélisol, la réduction de la couverture neigeuse, la fonte de la glace de mer et le réchauffement des océans polaires. Deux milliards de personnes et deux tiers de l’agriculture irriguée dépendent des eaux de ruissellement des montagnes, qui proviennent bien souvent de glaciers. D’ici à 2050, un milliard d’habitants des zones côtières de basse altitude subiront les conséquences de l’élévation du niveau de la mer, due en grande partie à la fonte des calottes glaciaires au Groenland et en Antarctique.
Les derniers rapports du GIEC et les études scientifiques réalisées par la suite révèlent l’incidence lente ou rapide, et en partie irréversible, du réchauffement climatique sur la cryosphère, ainsi que les lacunes en matière d’évaluation des risques, d’atténuation et d’adaptation à l’échelle mondiale comme régionale, notamment en ce qui concerne la gestion de l’eau. La perte de composants de la cryosphère entraîne des dangers locaux et une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes à l’échelle régionale et mondiale. Ces conséquences ont des répercussions considérables sur le coût social des émissions de carbone et l’assurabilité. Ainsi, il est impératif d’identifier et, si possible, d’empêcher les processus d’auto-renforcement dont les effets en chaîne sont incontrôlables et irréversibles.
Les scientifiques spécialistes de la cryosphère appellent donc à une gestion mondiale des risques au moyen de coalitions internationales ambitieuses et durables visant à atténuer les dangers dus à la fonte des glaces. En 2023, la fonte historique de la glace de mer antarctique (-17 % en juin 2023) a entravé le cycle de reproduction des manchots empereurs. Les perturbations liées aux incendies ont augmenté dans l’Arctique par rapport au milieu du XXe siècle. En 2021-2022, la fonte des glaciers, calculée à partir de 37 glaciers de référence, a dépassé d’environ 20 % la moyenne de la dernière décennie, avec des valeurs extrêmes dans les Alpes, les zones de haute altitude d’Asie, l’ouest des pays d’Amérique du Nord, en Amérique du Sud et dans certaines régions de l’Arctique. De nouvelles études révèlent que le réchauffement climatique actuel de 1,2 °C pourrait provoquer la disparition d’une partie de la nappe de glace en Antarctique occidental au cours des prochains siècles, même sans réchauffement supplémentaire. Ce constat appelle à une action immédiate et à la formation de coalitions pour freiner la fonte des glaces et préserver les espaces habitables de notre planète.
Les points suivants, relatifs aux glaciers, à la glace de mer, aux océans polaires et au pergélisol, synthétisent les positions de la communauté scientifique mondiale exprimées lors du sommet One Planet – Polar Summit des 8 et 9 novembre 2023. Celle-ci appelle à une action politique et socioéconomique d’urgence tout en préconisant la mise en place de nouvelles approches internationales et interdisciplinaires ambitieuses pour réduire les incertitudes et faire face aux mécanismes de rétroaction encore inconnus qui impliquent à la fois la cryosphère et la santé de notre planète.
- Inlandsis, glaciers, cycle de l’eau et niveau de la mer
Avec la fonte des masses glaciaires continentales, l’élévation du niveau de la mer se poursuit inexorablement. Ce processus s’effectue au rythme de phénomènes, encore mal connus, liés à la fonte des glaces du Groenland, à la jonction de l’océan austral et des immenses plateformes glaciaires qui flottent sur l’océan. Les glaciers de montagne constituent des sources d’eau considérables pour les régions situées en aval. S’ils venaient à disparaître, des milliards de personnes pourraient manquer de ressources en eau pour l’agriculture pendant la saison sèche, avec le risque d’une aggravation des tensions et des conflits.
- Océan, glace de mer, formes de vie et atmosphère
Principal réservoir de carbone et de chaleur au monde, les océans polaires jouent un rôle essentiel pour les cycles biogéochimiques de la Terre, les écosystèmes et les ressources de millions de personnes. La disparition de la glace de mer affecte considérablement l’équilibre énergétique entre la Terre et l’espace, réduisant la régulation thermique et amplifiant le réchauffement en cours. Ce phénomène bouleverse également les écosystèmes polaires (au-delà des facteurs de perturbation, comme la pêche, le bruit et les produits chimiques persistants), menaçant notamment l’existence de nombreuses communautés autochtones du Nord et provoquant la disparition irréversible d’une partie de la biodiversité. La faune et la flore terrestres des régions montagneuses et polaires atteignent leurs limites et, ne trouvant nulle part où migrer alors que les températures augmentent, risquent l’extinction.
- Pergélisol et géorisques
Le pergélisol boréal et arctique contient environ deux fois plus de carbone que dans notre atmosphère actuelle. Tandis que les risques d’incendie ont augmenté, il est difficile d’estimer précisément le rythme, la quantité, la proportion et la répartition des flux de gaz à effet de serre (CO2 ou CH4) causés par son dégel. La fonte du pergélisol dans les régions polaires et à haute altitude présente des risques géologiques et biologiques croissants, qui touchent les infrastructures, le patrimoine mondial, les êtres humains et la faune.
La communauté scientifique appelle donc à une action coordonnée soutenue afin d’éviter les conséquences néfastes et irréversibles de la disparition de la cryosphère. Il convient de :
- Réduire considérablement et de toute urgence les émissions mondiales de gaz à effet de serre, abandonner progressivement les nouveaux investissements dans les combustibles fossiles et atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat.
- Améliorer les connaissances relatives aux risques progressifs et aux phénomènes climatiques extrêmes liés à la disparition de la cryosphère. Agir sur les mécanismes de rétroaction de la cryosphère pour éviter d’atteindre des points de non-retour au niveau physique, biologique et social et préserver la santé humaine et planétaire. Pour y parvenir, il convient de déployer des efforts de collaboration considérables permettant de superviser, d’évaluer, de chiffrer et d’anticiper les processus à l’œuvre, ainsi que d’informer les responsables politiques. Cette démarche nécessite un soutien fiable et à long terme.
- Prendre en compte les répercussions socioéconomiques de la fonte des glaces et les limiter en améliorant la gestion des risques. Il convient ainsi de considérer le point de vue des communautés autochtones et des autres populations habitant les régions de haute altitude et de haute latitude. Il est nécessaire de mettre en place des mécanismes de solidarité pour faire face aux risques résiduels, qui se traduisent par des pertes et préjudices.
- Accélérer les processus politiques visant à protéger la cryosphère afin de réduire la pression exercée sur les écosystèmes de haute latitude et de haute montagne et de renforcer leur résilience.
- Soutenir les initiatives et missions intégratives mises en place par la communauté scientifique à l’échelle internationale et destinées à enrichir les connaissances relatives à la cryosphère.
- Améliorer l’empreinte environnementale et la durabilité des activités d’observation de la cryosphère, des infrastructures et du partage des données, pour toutes les populations travaillant dans les régions polaires et de haute montagne.
Inlandsis, glaciers, cycle de l’eau et niveau de la mer
CONTEXTE
Les régions polaires et les zones montagneuses abritent les principaux champs de glace de la Terre, qui sont désormais affectés par l’intensification du réchauffement climatique. Les régions polaires, en particulier l’Arctique, enregistrent une hausse de température jusqu’à quatre fois supérieure à la moyenne mondiale et sont aujourd’hui les principales responsables de l’élévation du niveau de la mer. Les inlandsis de l’Antarctique renferment un potentiel d’élévation du niveau de la mer de près de 58 m (6 m pour l’inlandsis de l’Antarctique occidental et 52 m pour celui l’Antarctique oriental), contre 7 m pour l’inlandsis du Groenland.
Ces nappes glaciaires recèlent également de nombreuses données sur les réactions de la glace face aux changements climatiques survenus dans le passé. Les bulles d’air capturées dans les carottes de glace témoignent des fluctuations du CO2 et d’autres gaz à effet de serre au cours des 800 000 dernières années. Il a ainsi été révélé que sur cette période, les niveaux de CO2 n’ont jamais dépassé les 280 parties par million. Au XIXe siècle, les niveaux de dioxyde de carbone ont augmenté de 50 % par rapport aux niveaux préindustriels, pour atteindre environ 420 parties par million aujourd’hui. Cette incroyable archive nous livre de précieuses informations sur les cycles glaciaires du passé, et notamment sur le recul des inlandsis au cours d’anciennes périodes de réchauffement climatique.
Les observations par satellite révèlent que les inlandsis du Groenland et de l’Antarctique réagissent incontestablement au réchauffement atmosphérique et océanique. Les plateformes de glace bordant l’Antarctique sont exposées aux eaux chaudes des océans qui, poussées par des vents puissants, viennent fondre les plateformes par le dessous. La disparition de ces plateformes, qui servaient de protection aux glaciers environnants, a déjà commencé à fragiliser la glace de la péninsule Antarctique et de l’Antarctique occidental. À lui seul, ce phénomène pourrait entraîner une élévation du niveau de la mer de plus d’un mètre d’ici à 2100, si le réchauffement climatique se poursuit. De même, les glaciers du Groenland qui rejoignent l’océan Arctique subissent les effets du réchauffement des eaux de l’océan Atlantique et de la fonte de leur surface, ce qui contribue à l’élévation du niveau de la mer. Le taux de fonte des glaces en Antarctique et au Groenland a été multiplié par quatre depuis les années 1990.
La fonte des inlandsis du Groenland et de l’Antarctique entraîne des changements irréversibles susceptibles de perdurer sur de multiples générations, même si le réchauffement climatique s’arrêtait ou s’inversait. L’immense nappe glaciaire d’Antarctique de l’Est, que l’on croyait stable pour de nombreuses années à venir, présente des signes d’amincissement et de recul. Des études récentes portant sur les points de basculement explorent les divers risques fondamentaux liés à l’accélération de cette perte de masse glaciaire.
La fonte des vastes nappes glaciaires des régions polaires provoque une élévation du niveau de la mer qui affectera des milliards d’habitants des régions côtières de la planète. Chaque centimètre d’élévation du niveau de la mer entraîne tous les ans des inondations qui touchent 2 à 3 millions de personnes. En anticipant avec davantage de précision le rythme et l’ampleur de l’élévation du niveau de la mer, il sera possible de mieux évaluer les risques et d’agir pour protéger les populations et leurs moyens de subsistance, ainsi que les grandes villes et les chaînes d’approvisionnement industrielles, souvent situées dans les régions côtières. Pour ce faire, une meilleure compréhension des facteurs d’instabilité de la nappe glaciaire de l’Antarctique est nécessaire. Certaines prévisions annoncent jusqu’à 2 m d’élévation du niveau de la mer d’ici à 2100.
Les émissions de CO2 accumulées dans le passé ont déjà provoqué une élévation du niveau de la mer de 30 à 60 cm, qui continuera de croître avec l’instabilité grandissante des nappes glaciaires due au réchauffement climatique. Dans ce contexte, les phénomènes météorologiques extrêmes se multiplient et engendrent une augmentation des dégâts et des coûts dans les zones habitées ou non du littoral : érosion côtière, glissements de terrain, inondation par remontée de nappe phréatique, intrusion saline et contamination des aquifères.
Les régions montagneuses, telles que les Alpes, les Andes, l’Himalaya et les Rocheuses, perdent leur précieuse nappe glaciaire, qui fournit de l’eau de fonte à un sixième de la population de la planète pendant les saisons sèches et contribue à un quart du PIB mondial. Les deux tiers de l’agriculture irriguée dépendent des eaux de ruissellement provenant de ces glaciers. Au cours des 30 prochaines années, ces régions devraient voir leur couverture neigeuse diminuer de 10 à 40 %, soit plusieurs centaines de kilomètres cubes d’eau. D’ici à la fin du siècle, les glaciers de montagne auront perdu 20 à 60 % de leur masse.
Cette situation représente un risque conséquent pour la sécurité hydrique, alimentaire, énergétique et des moyens de subsistance de centaines de millions de personnes dans le monde. La quantité d’eau fournie par la cryosphère de montagne et l’évolution de son rôle restent très incertaines. Malgré la gravité de la situation (cf. le Sommet sur les zones de haute montagne de l’OMM, 2019), aucune initiative mondiale n’a encore été lancée pour évaluer les ressources en eau des montagnes.
Les zones couvertes de glace dans les régions polaires et en haute montagne diminuent, dévoilant des sols fraîchement exposés que les espèces végétales colonisent à un rythme croissant, y compris dans les régions terrestres de l’Antarctique. Les phénomènes météorologiques extrêmes et les épisodes de sécheresse et de réchauffement entraînent un renouvellement des espèces végétales telles que les mousses et les lichens. Ces zones fraîchement exposées sont colonisées par un nombre croissant d’espèces non indigènes, comme les oiseaux marins et les phoques dans les régions polaires. Une observation plus poussée est toutefois nécessaire afin de mieux comprendre les évolutions des systèmes terrestres engendrées par la fonte des glaces. Des microbiomes glaciaires, encore peu connus, sont-ils en train de disparaître ?
Les glaciers de montagne et la couche de neige saisonnière qui les entoure forment des paysages d’une beauté inégalée, des hauts lieux touristiques et des zones de sports d’hiver, qui génèrent des rentrées financières et préservent la qualité de vie des populations locales. Toutefois, ces atouts subissent déjà les effets de la fonte et du recul des glaciers.
PRIORITÉS
- Projections de l’élévation du niveau de la mer. La fonte des glaces polaires présente un risque majeur : l’élévation du niveau de la mer à l’échelle mondiale et ses répercussions pour les populations et les infrastructures littorales. Il est donc urgent et primordial de réagir face à ce danger et d’améliorer la précision des projections de cette élévation, en ce qui concerne son rythme et son ampleur. Pour y parvenir, les efforts internationaux de modélisation doivent être soutenus par des infrastructures informatiques et des ressources humaines et en développement de la modélisation. La gestion des conséquences de l’élévation du niveau de la mer et des risques pour les populations côtières nécessite une actualisation régulière. Il convient de prendre des mesures pour faire face à la migration des populations déplacées en provenance de régions de basse altitude inondées.
- Phénomènes d’interaction océan-glace. Afin d’améliorer les projections futures relatives à la fonte des glaces au Groenland et en Antarctique, il convient de mieux comprendre les phénomènes d’interaction océan-glace, la circulation thermohaline et les taux de fonte sous les plateformes de glace, la dynamique de la glace dans la zone d’échouage, les instabilités des inlandsis marins. Pour ce faire, il est nécessaire d’améliorer les observations des fluctuations sur le terrain à l’aide de technologies innovantes, d’intensifier les observations par satellite et de perfectionner la physique des modèles de simulation océan-glace réalisés par des outils informatiques couplés à l’intelligence artificielle. Ainsi, les responsables politiques disposeront de données plus précises concernant l’évolution du niveau de la mer.
- Archives climatiques. Les nappes glaciaires, les glaciers et les sédiments constituent de précieuses archives climatiques du passé. Il convient d’effectuer au plus vite de nouvelles observations à partir de ces archives paléoclimatiques (à l’aide de carottes de glace et de sédiments) pour comprendre si le recul des inlandsis s’inscrit dans un processus progressif ou s’il s’est caractérisé par des événements abrupts et irréguliers. Cette analyse est nécessaire pour améliorer les modèles de projections futures, notamment la physique de la dynamique des inlandsis, les interactions entre l’atmosphère et les nappes glaciaires, celles entre l’océan et les inlandsis et les instabilités des nappes glaciaires.
- Ressources en eau. Afin de mieux évaluer les réserves d’eau provenant de la glace et la neige dans les régions montagneuses, il convient de réaliser un meilleur suivi, de mener davantage de recherches sur le terrain et d’observations par satellite, ainsi que d’améliorer les modélisations. Il convient d’entreprendre ces démarches en collaboration avec les populations, les praticiens et les responsables politiques locaux pour que les évolutions à venir des ressources en eau figurent au cœur des stratégies de gestion des risques et d’adaptation.
- Risque de catastrophe naturelle. Il est essentiel de contrôler et de mesurer le risque de catastrophe naturelle due à la fonte des glaciers de montagne (rupture de lacs glaciaires, glissement de terrain ou éboulement, par exemple).
- Écosystèmes. Les conséquences de la fonte des glaces sur les écosystèmes, que ce soit en haute montagne, dans les régions côtières ou dans les océans, restent encore à déterminer. Il convient de surveiller les zones récemment exposées afin d’identifier les nouveaux écosystèmes qui s’y développent, ce qui nécessite des mesures spéciales pour limiter la propagation des espèces invasives.
- Collaboration. Les observations dans les régions polaires et de haute montagne, éloignées et hostiles, sont coûteuses, laborieuses, chronophages et complexes. La recherche est plus efficace et moins risquée lorsqu’elle est menée par de grandes équipes polyvalentes, qui partagent dépenses et infrastructures.
- Action. Une action internationale est indispensable pour relever ces défis majeurs. Il convient de constituer de grandes équipes aux compétences complémentaires qui travailleront conjointement à la collecte de nouvelles données tout en partageant leurs infrastructures. Ainsi, l’initiative Antarctica InSync a pour objectif de rassembler la communauté polaire afin d’élaborer et de mettre en œuvre un programme de mesures synchrones portant sur de nombreux aspects de l’environnement antarctique. Ce programme permettra de mieux comprendre comment le continent et son océan sont affectés par les changements climatiques et de fournir de meilleures prévisions qui profiteront à l’ensemble de la planète. Par ailleurs, des programmes à grande échelle relatifs aux interactions terre-océan en Arctique sont en cours d’élaboration. Le renforcement des capacités internationales nécessite un soutien accru pour assurer la formation des prochaines générations de scientifiques internationaux spécialisés dans la cryosphère.
Océan, glace de mer, formes de vie et atmosphère
CONTEXTE
Présente dans les hautes latitudes océaniques, la glace de mer représente un indicateur fondamental de l’avancée des changements climatiques. Constituée d’eau de mer gelée, elle s’étend pendant la période hivernale de chaque hémisphère et fond durant l’été. Sa blancheur lui permet de refléter l’énergie solaire (albédo) et, ainsi, de diminuer la température de la planète. La glace de mer joue un rôle important dans les échanges de chaleur et de gaz entre l’air et l’océan. Lorsqu’elle s’amenuise, ce dernier, plus sombre, absorbe davantage de chaleur, ce qui accélère le processus de fonte. Des microbes aux baleines en passant une immense variété d’oiseaux, la glace de mer abrite également de nombreuses espèces, dont beaucoup sont endémiques. Sa fonte, notamment celle de la glace vieille de plusieurs années ou située le long des côtes, représente une véritable menace pour la vie polaire. La glace de mer transporte diverses matières, ralentit la fonte des glaciers et protège les littoraux contre les vagues et les risques d’érosion. Vecteur de la mobilité humaine, elle a favorisé l’expansion des hominidés avant même l’émergence de l’Homo sapiens et reste aujourd’hui un élément central des cultures et des moyens de subsistance des êtres humains.
Les océans polaires constituent la force motrice du tapis roulant océanique. Véritable puits mondial de chaleur et de CO₂, l’océan Austral joue un rôle particulièrement important. Lorsque les eaux froides polaires plongent dans les profondeurs, elles y entraînent de l’oxygène et des matières organiques dissoutes, mais également des polluants. Les flux de chaleur radiatifs et d’eau douce provenant des précipitations accrues, du ruissellement ainsi que de la fonte de la glace de mer et des inlandsis s’intensifient, ce qui renforce la stratification de la surface. Le réchauffement des océans entraîne de lourdes conséquences pour la fonte des glaciers du Groenland aboutissant à la mer, mais aussi pour les plateaux de glace et inlandsis de l’Antarctique. Ainsi, il augmente l’élévation du niveau de la mer et, potentiellement, le renversement de l’océan dans les basses latitudes. Parmi de nombreux processus complexes et encore mal compris, on compte notamment les tourbillons océaniques, les interactions entre l’air tropical et l’air polaire, le réchauffement de l’intérieur, les changements de stratification ainsi que la capacité future de la pompe à carbone physique et biologique à absorber le CO₂.
Au cours de l’histoire terrestre, la glace de mer a parfois été présente à des latitudes bien plus basses qu’aujourd’hui. Revêtant une importance cruciale pour l’évolution des micro-organismes sur Terre, elle abrite peut-être des formes de vie dans d’autres mondes océaniques ailleurs dans l’Univers. Le rôle de la glace de mer en tant que biome terrestre majeur et élément essentiel du fonctionnement des écosystèmes polaires reste à comprendre. Face aux transformations rapides de la glace de mer polaire, notamment de ses parties les plus anciennes, l’établissement d’un niveau de référence concernant l’état de ses écosystèmes relève d’une véritable course contre la montre. En effet, la vieille glace de mer arctique offre sans doute les conditions très proches de celles des périodes glaciaires et des autres mondes océaniques.
En ce qui concerne la productivité des océans polaires, le manque de séries chronologiques présentant une résolution saisonnière et régionale adéquate a limité notre compréhension des conséquences entraînées par le réchauffement. La fonte de la glace de mer renforçant la pénétration de la lumière, les observations par satellite révèlent principalement une augmentation de la biomasse du phytoplancton dans les océans Arctique et Austral au cours des 20 dernières années. En raison des changements simultanés de stratification, y compris l’intensification des échanges entre l’océan et l’air, qui renforce le mélange des eaux océaniques, et de leurs conséquences sur les réserves en éléments nutritifs, les prévisions pour l’avenir sont toutefois très incertaines.
Essentielles à la productivité des océans polaires, les diatomées sont remplacées par des algues plus petites à cause du réchauffement des océans. Ce phénomène modifie le réseau alimentaire et affaiblit probablement la pompe à carbone. Pour le krill, les poissons, les mammifères marins et les oiseaux de mer, la fonte de la glace de mer représente un danger considérable, notamment en matière de prédation et de reproduction. Elle a par exemple entraîné un échec de reproduction massif particulièrement alarmant dans les colonies de manchots empereurs et Adélie. Ses conséquences se répercutent également sur la vie microbienne et, ainsi, sur tout le réseau alimentaire. Si l’expansion vers l’océan Arctique de plusieurs espèces venues des océans Pacifique et Atlantique a été observée à tous les niveaux trophiques, ses causes (modification des courants, de la répartition des masses d’eau, des propriétés de l’eau de mer ou encore des dynamiques de la glace de mer, par exemple) restent inconnues, ce qui limite notre capacité à prévoir l’évolution des écosystèmes marins.
Avec le réchauffement climatique actuel de 0,2 °C par décennie, on observe depuis 1978 que la glace de mer arctique fond à un rythme de 3 % par décennie en hiver, 13 % en été. La majorité de la glace de mer de plusieurs années a été remplacée par une glace annuelle, plus fine et dynamique. Il existe une corrélation étroite entre l’évolution de la glace de mer arctique en été, les émissions cumulées de CO₂ et la température à la surface du globe. Ainsi, l’émission d’une tonne de CO₂ correspond à la fonte d’environ 3 m2 de glace de mer arctique. En raison d’une forte variabilité interne et de dynamiques régionales contrastées, aucune tendance notable n’a été identifiée en Antarctique entre 1979 et 2020, été comme hiver. Cependant, l’étendue de la glace de mer s’est révélée particulièrement faible ces deux dernières années (en juin 2023, – 17 % par rapport à la moyenne).
L’influence humaine représente la première cause du recul de la glace de mer Arctique. Face à l’intensification continue des émissions de gaz à effet de serre et de leurs concentrations atmosphériques, les températures de la planète augmentent. 91 % de la chaleur excédentaire est absorbée par les océans, dont la moitié par l’océan Austral. 3 % de cette chaleur contribue à la fonte de la cryosphère, 5 % au réchauffement des terres émergées et 1 % au réchauffement de la basse atmosphère. Ainsi, la hausse des températures de l’océan représente une menace grandissante pour la glace de mer. Celle-ci est également soumise à d’autres boucles de rétroaction, qui mènent à l’amplification polaire et sont notamment liées aux échanges entre l’océan et l’air, à l’albédo, à la vapeur d’eau, aux nuages ainsi qu’aux précipitations de neige. Toutefois, il est impossible d’estimer précisément la capacité de boucles de rétroaction stabilisantes provoquées par des processus physiques et biologiques à atténuer cette amplification, ce qui renforce les nombreuses incertitudes. Ainsi, la production de gaz à effet de serre, tels que le sulfure de diméthyle, ou de particules microbiennes aérosolisées de nucléation de la glace, qui favoriserait la formation de nuages dans les zones dépourvues de glace depuis peu, a par exemple été proposée. Dans l’Arctique notamment, les contaminants à longue distance, en particulier le carbone noir transporté depuis les régions en phase d’industrialisation intensive vers de plus basses latitudes, permettent en effet de réduire l’albédo de la glace de mer et, ainsi, de limiter la fonte.
Au cours des quarante dernières années, l’Arctique s’est réchauffé quatre fois plus vite que le reste du monde. Selon les différents scénarios et trajectoires analysés dans le sixième rapport d’évaluation du GIEC (2021), la hausse des émissions cumulées de CO₂ pourrait priver l’océan Arctique de glace (étendue inférieure à 15 %) en été dès la période 2030-2035, et au moins une fois avant 2050. Les variations récentes sont liées à la configuration des courants atmosphériques et résultent des effets persistants entraînés par le réchauffement des océans ainsi que, potentiellement, du nouvel état de la glace de mer. L’océan Austral absorbe plus de 50 % de la chaleur captée par l’ensemble des océans.
Les lacunes des connaissances scientifiques concernent principalement les interactions entre la terre et les océans, entre la glace, l’atmosphère et les océans, entre les océans et les glaciers ainsi qu’entre la glace de mer et les différentes formes de vie. Dans le contexte de réchauffement climatique ainsi que d’intensification du cycle hydrologique et de sa variabilité, il est essentiel de mieux comprendre les futures précipitations, y compris de neige, ainsi que l’évolution des dynamiques de la circulation atmosphérique et des vents. Les changements dans la répartition des masses d’eau, notamment entre les océans Atlantique et Arctique, dans les interactions entre les eaux de surface, douces et froides, et les eaux des grands fonds, chaudes et salées (mélange des eaux océaniques, entre autres) et, enfin, dans le cycle d’extension et de fonte de la glace de mer (advection, formation de crêtes et de chenaux, bassins de fonte) complexifient encore davantage les conséquences du réchauffement climatique sur la glace polaire. Le manque de séries chronologiques à long terme avec une résolution régionale adéquate qui permettrait d’évaluer les évolutions circumpolaires empêche l’établissement de projections fiables. Il est particulièrement important de prévoir le rôle des dynamiques décennales et de la téléconnexion pour des phénomènes tels qu’El Niño et l’oscillation nord-atlantique, mais aussi d’anticiper la stabilité de la circulation méridionale de renversement de l’océan Atlantique, du courant circumpolaire antarctique et de leurs liens avec la glace de mer. L’avenir de celle-ci entraîne des conséquences directes et indirectes sur le réseau alimentaire et l’ensemble des interactions biologiques, de la vie microbienne au krill en passant par les poissons, les baleines, les oiseaux et la faune benthique, y compris dans les grands fonds marins. La connaissance scientifique présente encore de grandes lacunes quant à la diversité de la vie polaire et de ses dynamiques, à ses interactions avec la chimie des océans (formation d’aérosols, matières dissoutes et flux de particules, notamment) et à ses conséquences sur le développement économique ainsi que sur la santé et le bien-être humains.
CONSÉQUENCES ET RISQUES
- En raison des lourdes conséquences des changements climatiques, les océans polaires auront profondément évolué d’ici à 2050.
- Les effets dus à la fonte de la glace de mer polaire pourraient être ressentis sur toute la planète, notamment sur le plan des phénomènes météorologiques.
- La fonte de la glace de mer ainsi que le réchauffement et l’acidification des océans réduisent les habitats disponibles pour de nombreuses espèces marines (coquillages, poissons et mammifères marins, notamment) tout en favorisant la prolifération de certaines espèces boréales invasives. L’exposition des espèces marines polaires à des facteurs de perturbation nouveaux (plastique, produits chimiques persistants, bruit...) ou anciens (pêche) pourrait encore renforcer ces effets négatifs.
- Pour de nombreux secteurs en phase de développement, tels que le trafic maritime, la pêche, le tourisme ou la mise en valeur des ressources, le déclin de la glace de mer va de pair avec de nouvelles perspectives, mais génère aussi des risques croissants, entraînant notamment une intensification des tensions géopolitiques.
- La fonte de la glace de mer et les phénomènes extrêmes dus au réchauffement climatique affectent les modes de vie et les moyens de subsistance des communautés arctiques. L’amplification polaire menace de nombreux aspects de leur quotidien (culture, identité, sécurité et santé, notamment mentale), en particulier pour les populations autochtones.
PRIORITÉS DES GOUVERNEMENTS
- La communauté scientifique appelle à de nouvelles ambitions internationales en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre afin de respecter au maximum le seuil de + 1,5 °C et de limiter les émissions cumulées de CO₂ afin d’atteindre la neutralité climatique aussi rapidement que possible. Essentiels pour limiter le déclin de la glace de mer et les conditions météorologiques extrêmes dans le monde entier, ces objectifs doivent en outre permettre d’éviter une escalade des pertes et préjudices ainsi que des coûts liés au-delà des limites d’adaptation.
- Comme exprimé dans la Déclaration d’Helsinki sur les changements climatiques lors de la Réunion consultative du Traité sur l’Antarctique (2023), une collaboration internationale centrée sur la protection des océans polaires est essentielle à la réalisation des objectifs définis dans l’Accord de Paris et le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal.
- La protection de certaines zones marines et terrestres constitue une mesure déterminante pour réduire la pression que l’intensification et le développement des activités humaines exercent sur la vie polaire. Elle doit être soutenue par de nouvelles ambitions internationales reposant sur des connaissances scientifiques. Dans le cadre de la planification et du suivi de ces activités, la collaboration et l’aide apportée à l’autodétermination des communautés autochtones jouent un rôle primordial.
- Il est essentiel de combler les lacunes concernant la connaissance de la cryosphère et de ses futures évolutions. Ainsi, il est nécessaire de viser une meilleure compréhension des processus, de se doter d’outils de modélisation et de mener une recherche exploratoire, notamment sur les implications pour l’habitabilité, l’eau, l’alimentation, la sécurité humaine, les écosystèmes uniques, la biodiversité, l’équité ainsi que l’économie, y compris en ce qui concerne l’assurabilité.
- L’avenir de la cryosphère devrait être pris en compte dans les estimations du coût des émissions de carbone et d’adaptation, dans la définition des limites d’adaptation ainsi que dans la planification des fonds pour les pertes et préjudices.
- Il est nécessaire de mettre en place des infrastructures locales qui renforcent la résilience face aux changements climatiques et à la fonte de la glace de mer tout en prenant en compte l’autodétermination des populations autochtones.
PRIORITÉS SCIENTIFIQUES
- Soutien à long terme des programmes internationaux consacrés à la banquise, aux océans, à la biosphère et à l’atmosphère en Arctique et en Antarctique au moyen d’infrastructures (programme international de flotteurs Argo, navires d’expédition, avions et stations de recherche polaires) et de grandes missions internationales (station polaire Tara, Antarctica InSync, Année polaire internationale) intégrées au sein d’initiatives et de réseaux d’observation internationaux.
- Renforcement de la coopération entre les agences spatiales, maritimes et polaires pour assurer le lancement de satellites en orbite polaire, partager les données d’observation des régions polaires, élaborer de nouveaux produits, algorithmes et missions ainsi que mener des expéditions de vérification des données sur le terrain. Améliorer l’accessibilité des données FAIR.
- Coopération régionale, réseaux multiscalaires de protection de la biodiversité ainsi que des écosystèmes marins (suivi et gouvernance) et augmentation des ressources scientifiques afin de renforcer les stratégies de développement durable et résilient.
- Renforcement des capacités de recherche grâce aux nouvelles compétences scientifiques de pointe dans le domaine de l’exploration de la biodiversité de la banquise.
- Financement du renforcement des capacités développé par et avec les populations présentes sur place pour répondre aux besoins scientifiques locaux et internationaux tout en optimisant les collaborations et activités régionales dans la perspective d’une science polaire plus durable tout au long de l’année.
- Transformation des infrastructures polaires afin de réduire l’empreinte carbone et environnementale de la recherche et de permettre la transmission de données en temps quasi réel.
- Élaboration de produits et d’outils d’information accessibles et adaptés au contexte de la glace de mer, ainsi que de prévisions et de projections régionales visant à faciliter la prise de décision.
- Modélisations interactives complexes (jumeaux numériques) des mers polaires comprenant des modules de gestion des risques (réponses appropriées en cas d’urgence et adaptation) et encadrant les stratégies d’observation.
Pergélisol et géorisques
CONTEXTE
Environ un cinquième de la surface terrestre de l’hémisphère nord est recouvert de pergélisol. On le trouve principalement en Alaska, au Canada, en Russie et sur le plateau Qinghai-Tibet, ainsi que dans le nord de la Scandinavie, en Antarctique et dans les régions de haute montagne du monde entier. Les paysages de pergélisol les plus densément peuplés et développés se situent dans les Alpes. De nombreuses régions de pergélisol recèlent de précieuses ressources minérales, que les populations locales souhaitent exploiter. La plupart des infrastructures de ces régions ont été conçues et construites pour s’adapter à un sol gelé.
Les effets des changements climatiques touchent les milieux polaires bien plus que les autres régions du monde et se manifestent à travers l’évolution des températures et, désormais, des précipitations. Les variations climatiques atteignent et dépassent parfois les prévisions maximales émises il y a 20 ans. Dans les régions polaires et de haute montagne, le pergélisol se réchauffe et, proche de la surface, commence à fondre.
Érosion côtière, glissements de terrain, marées noires, libération de déchets industriels enfouis et de contaminants naturels, comme le mercure et d’anciens virus, ou encore émissions de méthane et de CO2 provenant de matières organiques emprisonnées dans le pergélisol : au cours de la dernière décennie, les risques géologiques et biologiques liés au dégel se sont considérablement accrus.
Ces émissions de carbone à l’échelle régionale ont des répercussions mondiales. Le dégel s’est intensifié en raison du nombre croissant d’incendies dans les forêts qui occupent près de la moitié des territoires de pergélisol. Pour les populations autochtones du Nord, la menace physique qui pèse sur les sites naturels et la faune sauvage représente un danger direct, car le biome du pergélisol contient une biodiversité limitée, ce qui fragilise les écosystèmes lorsqu’ils sont perturbés. Les habitants des régions de haute montagne craignent quant à eux de perdre leur approvisionnement en eau avec le dégel du pergélisol et l’infiltration de l’eau de surface dans les sols.
Les travaux scientifiques et techniques sur le pergélisol présentent de nombreux défis, notamment en raison du coût élevé de telles activités dans des régions éloignées. Jusqu’à présent, les populations des régions de pergélisol occupaient une place marginale dans la recherche. Il convient de rééquilibrer cette collaboration à tous les stades de la réalisation des programmes pour que les politiques élaborées en Arctique bénéficient pleinement des éclairages de la science. Les populations et les organismes privés et publics des régions de pergélisol sont confrontés à la détérioration des infrastructures bâties et des conditions d’accès à la terre, à de nouveaux risques et à des changements environnementaux soudains. Il leur faut également adopter des mesures d’atténuation et d’adaptation pour favoriser le développement économique de la région.
PRIORITÉS
- Il convient de reconnaître l’inévitabilité des ajustements considérables que connaîtront les environnements de pergélisol et leur capacité à accueillir des infrastructures dans leur configuration actuelle. Il est donc urgent d’adapter leur conception et les techniques de construction au dégel des sols. Pour assurer une surveillance efficace du pergélisol, le partage des données et la mise à jour régulière des rapports sont essentiels afin de réduire le risque de dégâts causés aux populations et aux infrastructures, notamment dans les régions de haute montagne.
- La communauté scientifique se doit d’accorder une attention toute particulière au rythme prévisionnel des émissions de CO2 et de méthane provenant du dégel du pergélisol. Il convient d’améliorer la modélisation dynamique de ces émissions dans le cadre d’une série de scénarios climatiques potentiels, en tenant compte du rôle crucial de l’activité microbiologique. Pour faire face à cette problématique majeure, il est également nécessaire d’adopter des solutions géopolitiques permettant de favoriser la recherche scientifique dans les régions de pergélisol.
- Il convient de souligner les conséquences socioéconomiques des pertes et préjudices induits par le dégel de la cryosphère et les changements écologiques qui en découlent, ainsi que les mesures d’adaptation à ce phénomène, notamment les répercussions financières pour les organismes publics, les actuaires et le secteur privé. De même, les facteurs environnementaux qui affectent la santé des populations et les espèces animales revêtent une importance cruciale, tout particulièrement la répartition des espèces essentielles à la sécurité écologique et alimentaire.
- Il convient d’impliquer davantage les populations, autochtones ou autres, des régions de la cryosphère à tous les niveaux de la recherche et des discussions concernant les mesures d’adaptation et de gestion des effets des changements climatiques. Pour ce faire, il est nécessaire de renforcer les programmes d’éducation et de formation destinés aux habitants de ces régions.
- Les émissions dues aux incendies de forêt et à d’autres perturbations, telles que l’érosion du littoral, persistent et compromettent désormais les efforts déployés pour atteindre l’objectif zéro émission nette. L’accélération du dégel du pergélisol résultant de ces perturbations accroît considérablement les émissions de carbone. Il convient d’axer la recherche scientifique sur les émissions de méthane et de CO2 provenant des zones incendiées et côtières, notamment lorsqu’elles ne sont accessibles que par télédétection.
- Il convient de reconnaître le coût que représente la recherche de terrain dans ces zones reculées et le rôle essentiel de ce travail pour valider les connaissances théoriques et les observations de télédétection. Une plus grande implication des institutions et des organismes implantés dans les régions de pergélisol pourrait permettre de réduire certains coûts.
- Enfin, il convient d’appuyer durablement les efforts internationaux d’archivage, de gestion et de mise à disposition du public des données relatives à l’évolution de l’état du pergélisol, notamment les nombreuses données obtenues par télédétection.
Le rapport scientifique a été rédigé par les spécialistes suivants, avec le concours des participants au « One Planet Polar Summit ».
Comité consultatif scientifique
Antje Boetius, coprésidente, chercheuse spécialisée dans les pôles et les grands fonds marins et directrice de l’Alfred-Wegener-Institut, Centre Helmholtz pour la recherche polaire et marine. Mme Boetius a dirigé de nombreuses expéditions polaires internationales, principalement consacrées aux effets des changements climatiques sur les écosystèmes. Elle conseille la classe politique et la société civile en sa qualité de membre de l’Académie nationale des sciences allemande.
Jérôme Chappellaz, coprésident, glaciologue, géochimiste et paléoclimatologue. M. Chappellaz est professeur à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), directeur de Recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), ancien directeur de l’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV) et président de la fondation Ice Memory.
Liss Marie Andreassen, enseignante-chercheuse en glaciologie à la Direction norvégienne des ressources hydriques et de l’énergie (NVE) et présidente de l’Association internationale des sciences cryosphériques (IACS).
Nicole Biebow, présidente du Conseil polaire européen et directrice de l’unité de coopération internationale de l’Alfred-Wegener-Institut, Centre Helmholtz pour la recherche polaire et marine (Allemagne). Mme Biebow est également coordinatrice d’EU-PolarNet 2 et de l’ARICE (Arctic Research Icebreaker Consortium), structure financée par l’Union européenne.
Steven Chown, professeur de sciences biologiques à l’université Monash (Australie) et ancien président du Comité scientifique pour les recherches antarctiques (SCAR).
Gwenn Flowers, professeure au département des Sciences de la Terre de l’université Simon Fraser (Canada) et présidente de la Société internationale de glaciologie (IGS).
Yeadong Kim, géophysicien, président du Comité scientifique pour les recherches antarctiques (SCAR), également ancien directeur de l’Institut coréen de recherche sur les pôles (KOPRI) et président du Comité national coréen de la recherche sur les pôles.
Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et directrice de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), placé sous la tutelle du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Mme Masson-Delmotte fut également vice-présidente du groupe de travail n°1 du GIEC (6e rapport).
Thamban Meloth, spécialisé en cryosphère, en paléoclimatologie et en glaciologie himalayenne. M. Meloth est directeur du Centre national de recherche polaire et marine (NCPOR) de l’Inde.
Jennifer Mercer, spécialisée en sciences de la terre, est présidente du Forum des opérateurs de la recherche en Arctique (FARO). Mme Mercer dirige également la section des Sciences arctiques de la Fondation nationale pour la science des États-Unis.
Dahe Qin, spécialisé en cryosphère, en climatologie et en géographie, est membre de l’Académie des sciences chinoise, président du comité exécutif de la Société asiatique de géographie et ancien coprésident du groupe de travail n°1 du GIEC (4e et 5e rapports).
Jefferson Simoes, professeur de glaciologie et de géographie polaire à l’Université fédérale de Rio Grande do Sul (UFGRS) et directeur de l’Institut national brésilien de la science de la cryosphère. M. Somes fut également vice-président du Comité scientifique pour les recherches antarctiques (SCAR).
Modérateurs de la session
Outre Antje Boetius, Jefferson Simoes et Nicole Biebow, qui ont également animé les sessions scientifiques :
Jane Francis, paléoclimatologue et paléobotaniste, directrice de la British Antarctic Survey (Royaume-Uni).
Marcel Babin, océanographe, directeur de recherche au CNRS, directeur du laboratoire de recherche international Takuvik (CNRS / Université Laval) (Canada)
Christopher Burn, spécialiste du pergélisol, professeur à l’université Carleton, président de l’Association internationale du pergélisol (Canada)
Claire Treat, spécialiste du pergélisol, directrice d’un groupe de recherche à l’Alfred-Wegener-Institut, Centre Helmholtz pour la recherche polaire et marine (Allemagne).
Научное заявление по криосфере Парижского призыва в защиту ледников и полюсов Земли.
冰冻圈科学界就冰川与极地问题发表巴黎声明.
À consulter également
Voir tous les articles et dossiers-
19 novembre 2024 Déclaration franco-brésilienne sur la protection des océans.
-
2 octobre 2024 Proposition de renouvellement de Philippe Mauguin, en qualité de président-directeur général de l’INRAE.
-
27 septembre 2024 Déclaration France-Canada sur l'océan.
-
19 septembre 2024 Inauguration de l'Arboretum à Nanterre.