Fait partie du dossier : Déplacement au Proche-Orient.

Le Président Emmanuel Macron s'est rendu au Proche-Orient le mardi 24 et le mercredi 25 octobre 2023.

Durant son déplacement, le Président de la République s'est rendu au Caire pour rencontrer le Président de l'Égypte Abdel Fattah al-Sissi.

Revoir la déclaration conjointe : 

25 octobre 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration conjointe avec Abdel Fattah al-Sissi, Président de la République arabe d’Égypte.

Merci beaucoup, Monsieur le Président. Merci pour votre accueil et vos mots. 

Je suis à nouveau heureux d'être au Caire, à vos côtés, pour suivre le dialogue stratégique que nous entretenons ensemble depuis ces dernières années dans un moment grave. En effet, vous venez de le rappeler, nous sommes en train de vivre une période éminemment sombre. Et dans de tels moments, il importe que nous puissions tout faire pour éviter l'escalade, la montée des tensions. 

Rien ne justifie l'attaque terroriste du Hamas contre Israël. La France l'a condamné immédiatement, reconnaissant aussi à Israël le droit de se défendre, en respectant les règles de la guerre et du droit international humanitaire. Mais aujourd'hui, cette situation porte en elle plusieurs risques d'escalade dont nous avons parlé et la nécessité d'avoir une action urgente. 

La première, et je tiens ici à vous remercier tout particulièrement, Président, et salue aussi à vos côtés les efforts faits par le Qatar, c'est de libérer nos otages. Plus de 200 otages sont aujourd'hui détenus par le Hamas. Malheureusement, nous avons 9 otages français ou binationaux, mais tous les otages doivent être libérés dans les meilleurs délais, et je vous remercie très sincèrement pour les efforts que vous effectuez depuis le 7 octobre dernier en ce sens. C'est extrêmement important, et nous faisons tout pour faciliter ceci. 

Ensuite, je veux vous remercier dans ce contexte de votre leadership et de ce que vous avez su d'ores et déjà organiser samedi dernier lors du sommet du Caire pour mesurer l'urgence de trouver des solutions rapides aux drames comme aux problèmes qui existent depuis si longtemps. 

J'ai aussi, je veux vous le dire, entendu votre message, comme j'ai entendu l'alarme du roi de Jordanie, sur les doubles standards. Nous en avons parlé il y a quelques heures à Amman. Je vais ici être très clair : la France ne pratique pas le double standard. Le droit international s'applique à tout le monde, et la France a toujours porté des valeurs universelles d'humanisme. Toutes les vies se valent, et il n'y a pas de hiérarchie. Toutes les victimes méritent notre compassion, notre engagement pour une paix juste et durable au Proche-Orient, et cela ne varie pas. Je sais, là aussi, votre engagement en la matière. 

Reprenant la structure du propos du Président AL-SISSI à l'instant, ce que nous souhaitons bâtir, c'est au fond une initiative de paix et de sécurité qui puisse éviter l'escalade et traiter les causes profondes de la situation que nous vivons. 

Le premier élément de réponse, c'est la lutte contre le terrorisme. Et je le dis parce qu'il y a eu une action terroriste gravissime qui a été menée le 7 octobre contre des nourrissons, des femmes, des enfants, des adultes, que rien ne justifie. Elle a aussi touché des Françaises et des Français. 31 de nos ressortissants ont été tués. Mais nous ne devons jamais céder face au terrorisme et je sais que vous y êtes ô combien attachés, vous qui avez tant fait dans votre pays contre plusieurs groupes terroristes. Donc pour moi le premier pilier de la réponse c'est justement la coopération renforcée en matière de renseignements, de ciblage. Et c'est au fond de se dire tous ensemble : la bonne réponse est de coopérer, de tirer les enseignements de la coalition internationale contre Daesh dans laquelle nous sommes engagés depuis plusieurs années et de pouvoir prendre les mesures qui s'imposent contre les groupes terroristes qui nous touchent dans la région. Cela impose une coopération internationale, régionale. Ça suppose de cibler les terroristes pour protéger aussi et épargner les populations civiles, de coopérer en matière de renseignements et d'avoir des mesures multiples pour pouvoir les éradiquer. C'est un travail qui prend du temps, qui nécessite de la préparation et qui suppose un effort dans la durée. L'Egypte et la France savent ce qu'est la blessure du terrorisme et je pense que cet axe est extrêmement important. 

Le deuxième axe sur lequel nous souhaitons avancer, c'est la protection des populations civiles. Vous l'avez rappelé Monsieur le Président, tout particulièrement, les Palestiniennes et les Palestiniens. Il s'agit aujourd'hui de l'aide humanitaire qui doit arriver à Gaza sans entrave. Je salue ce que l'Egypte fait pour la population de Gaza aujourd'hui, j'ai eu l'occasion de l'évoquer hier, comme ce matin avec le roi de Jordanie qui est aussi très engagé à travers un hôpital, dont il assure justement la continuité et je l'ai évoqué hier avec le Premier ministre NETANYAHOU comme avec le Président Mahmoud ABBAS. La France, en particulier, a beaucoup poussé pour que l'accès à l'eau soit totalement sécurisé et que l'accès à l'électricité en particulier pour les hôpitaux soit réouvert. Nous continuerons ce travail qui est extrêmement urgent et j'ai pu échanger ce matin avec le représentant de l'agence des Nations unies, l'UNRWA, en ce sens. La situation est critique. Donc sur cette situation humanitaire, nous souhaitons avancer avec vous, à vos côtés. La France, comme vous le savez, agit d'ores et déjà pour soutenir cet effort en étant un contributeur important à l'UNRWA. Nous avons augmenté aussi notre aide de 10 millions d'euros ces dernières semaines à destination des populations palestiniennes. Et en étroite coordination avec vous, nous souhaitons utiliser les corridors et les voies que vous avez ouvertes. Un avion français se posera dès demain sur votre sol pour livrer du matériel médical, d'autres suivront et donc nous serons pleinement impliqués, en particulier sur l'accès aux médicaments et aux soins. 

Je veux aussi dire ici, le Président faisait référence, que suite aux discussions que j'ai pu avoir hier avec l'ensemble des interlocuteurs déjà évoqués, je voulais vous annoncer ici que j'ai pris la décision qu'un navire de notre marine nationale puisse appareiller prochainement pour soutenir les hôpitaux de Gaza. Il partira de Toulon dans les 48 prochaines heures. Il s'agit aussi des ressources financières que nous avons à mobiliser pour pourvoir aux besoins à Gaza comme en Cisjordanie. Et il s'agit aussi de la protection des femmes et des hommes. Je vous remercie également pour la très bonne coopération pour protéger nos ressortissants. Nous avons 54 Français actuellement présents à Gaza que nous souhaitons pouvoir protéger. Nous avons au total près de 170 Français personnels de notre institut et ayant droit que nous souhaitons pouvoir protéger et le faire en lien étroit avec vous et vos services. 

Enfin, le troisième pilier, à côté de la lutte contre le terrorisme, de la protection des populations, c'est évidemment la question politique. C'est certainement la plus difficile, mais elle est à la racine de beaucoup de ressentiment et de la situation régionale que nous connaissons aujourd'hui. Nous le disions tout à l'heure avec le Président, il y a quelques mois nous évoquions la question justement du droit légitime des Palestiniens à demander à un État et du débouché politique de celle-ci. Nous n'étions plus nombreux à l'évoquer. Comme je le disais avec une certaine tristesse, la France n'a jamais quitté ce chemin, vous le savez, et l'Égypte a toujours eu ce rôle éminent de porter cette question politique. 

Il nous faut agir de manière décisive aujourd'hui pour parvenir enfin à la solution de deux États, Israël et la Palestine, vivant côte à côte en paix et en sécurité. Ce n'est pas parce que cette idée est vieille qu'elle est devenue caduque. Il nous faudra sans doute imaginer des formes, inventer, innover. Je pense surtout que ce chemin politique est nécessaire parce qu'il donne une route à la colère, qui n'est pas la violence, qui est la reconnaissance d'un droit légitime et qui permet de lui donner un cadre, celui de discussion politique. Mais nous devons le faire, car sur ce point, nous avons beaucoup trop attendu. C'est urgent et important, et je pense que c'est un chemin à mener en même temps qu'on combat le terrorisme. 

Donc, ce que la France propose — et je vous remercie des propos que nous venons de tenir, qui sont, je crois, à l'unisson de cette approche — c'est de pouvoir mener avec tous les partenaires de bonne volonté, de la région et de l'international, une initiative concomitante sur trois voies : la lutte contre le terrorisme, la protection des populations et l'aide humanitaire, et la question politique et le règlement de la question palestinienne. Tout ça est éminemment compatible avec la sécurité d'Israël qui, vous le savez, nous concerne ô combien. Et elle doit, à chaque étape, être un des éléments de possibilité de cet ensemble. Ça n'est qu'à cette condition que nous aurons la paix dans la région, la capacité à ce que tous les Etats de la région acceptent l'existence d'Israël et de sa sécurité, que soit reconnu au peuple palestinien le droit à un Etat qui vive lui aussi en sécurité, et que nous évitions toute escalade de tensions. Je crois que le moment, à cet égard, est venu pour agir ensemble, et c'est autour de ce triptyque que nous souhaitons, en effet, avancer. 

En tout cas, je veux vous remercier à nouveau, Président, et nous sommes convenus, avec le Président SISSI, de renforcer encore notre partenariat. Nous l'avons éprouvé ces dernières années sur toutes les grandes questions stratégiques, en particulier face à la crise libyenne. Nous allons œuvrer main dans la main. Je sais votre rôle éminent et je souhaite que nous puissions, si je puis m'exprimer ainsi, renforcer encore cet axe. Parce que je crois qu'il est juste, respectueux et efficace. 

Je vous remercie, Président. 

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