Le Président Emmanuel Macron a partagé un message à l'occasion de l’ouverture, en France, de la deuxième session du comité intergouvernemental de négociations pour un traité sur la pollution plastique.

Le Président de la République a souligné l'importance de la lutte contre la pollution plastique, un objectif majeur, et a décliné les engagements pris par la France et l'Union européenne en la matière.

 

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29 mai 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Message du Président de la République.

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Madame la Directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l'environnement,
Madame la Directrice générale de l’UNESCO,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, 
Mesdames et Messieurs, chers délégués, 

Lors de la 5ème Assemblée des Nations unies pour l’environnement à Nairobi, l’an dernier, près de 170 pays ont décidé d’avancer ensemble vers l’adoption d’un nouveau traité international sur la pollution plastique. 

Après une première session en Uruguay, vous êtes aujourd’hui près de 1000 négociateurs, issus de 175 pays, à nouveau réunis à Paris, au siège de l’UNESCO, pour travailler à cet objectif. Je m’en réjouis, car c’est un objectif majeur. 

La pollution plastique est un fléau à l’échelle planétaire, dont nous commençons seulement à appréhender les conséquences. 
-    Sur le plan du changement climatique : à trajectoire constante, le secteur plastique émettra 56 milliards de tonnes de CO2 par an d’ici 2050, soit 10% environ du budget carbone restant pour tenir les 1,5°C selon le GIEC. 
-    Sur le plan de la biodiversité, le plastique pollue massivement nos océans, nos rivières, nos littoraux. Il est encore plus présent dans nos sols, et il asphyxie le vivant, avec des dégâts majeurs sur la faune comme sur la flore. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis la moitié du siècle dernier, nous avons rejeté plus de 7 milliards de tonnes de plastique dans la nature.
-    Sur le plan de la santé humaine, enfin, nous commençons à peine à dévoiler l’étendue des dégâts liés à l’ingestion ou à l’inhalation quotidienne de milliers de particules de plastiques par chaque individu.

Alors aujourd’hui, il n’existe plus un seul lieu sur la planète qui soit exempt de pollution plastique. 

Et cette pollution s’accélère : si nous ne faisons rien, la génération de déchets plastique triplera encore d’ici 2060. La pollution plastique, c’est donc une « bombe à retardement » en même qu’un fléau déjà présent.

C’est notre devoir d’y mettre fin le plus vite possible. 

Nous avons pour cela besoin d’un cap clair. Ce cap, nous l’avons réaffirmé lors du G7 d’Hiroshima il y a une semaine : nous devons mettre fin à la pollution plastique d’ici 2040 au plus tard. 
Ce chantier est immense, et pour y parvenir cela demande une action résolue dès maintenant. 

Pour réussir, ce sont tous nos modes de consommation et de production qu’il va falloir changer. 

La France à cet égard prend d’ores et déjà ses responsabilités, notamment avec la loi contre le Gaspillage et pour l’économie circulaire dite « AGEC », adoptée en 2020. Nous avons déjà pris à ce titre de nombreux engagements : 
-    La fin du plastique à usage unique en ciblant en priorité les produits les plus rejetés dans l’environnement. Et bonne nouvelle, cela fonctionne. En quelques années, les consommateurs comme les industries ont adopté des solutions. C’est la preuve qu’on peut prendre des mesures ambitieuses et développer un agenda de solution. Il faut le planifier, il faut donner de la visibilité, changer les comportements et aider à s’adapter.
-    Ensuite, l’amélioration de la récupération, du recyclage et du réemploi : la France est ainsi le premier pays au monde à avoir généralisé la vaisselle réutilisable dans la restauration rapide. 
-    Puis, c’est le soutien à l’éco-conception.
-    Ensuite, c’est l’interdiction de certains produits qui rejettent des micro-plastiques. Là aussi, nous avons développé des solutions technologiques, en partenariat avec les industriels, afin de réduire drastiquement ces pollutions. 

L’Europe accélère aussi ses engagements.

De nombreux autres Etats à travers le monde agissent. Je salue en particulier le leadership de pays pionniers en Afrique, comme le Rwanda, qui a interdit les sacs en plastique dès 2008, ou encore le Kenya comme l’Afrique du Sud.

Mais au-delà des approches nationales sur lesquelles je voulais revenir pour montrer les exemples très concrets, si nous voulons accélérer et tenir le cap, nous avons besoin d’un cadre international qui nous permette d’agir sur le plastique à l’échelle de son cycle de vie complet. 

Ce cadre commun est crucial, tout simplement parce que la pollution plastique ne s’arrête pas aux frontières. 

Ainsi, nous savons qu’il nous faudra investir dans les solutions de traitement et de recyclage partout dans le monde, si nous voulons éviter que la croissance démographique et économique des pays en développement se traduise demain par une pollution plastique massive de l’océan et de l’air. 

Nous savons aussi qu’il nous faudra coopérer pour trouver des voies de transition qui soient justes et qui se traduisent par la création de nouvelles opportunités.

Cela signifie d’abord qu’il nous faut définitivement mettre fin à un modèle globalisé et insoutenable qui consiste à produire le plastique en Chine ou dans les pays de l’OCDE, pour ensuite l’exporter sous forme de déchets vers les pays en développement, qui sont pourtant moins bien équipés en systèmes de traitements de déchets. Aujourd’hui, nous extrayons du pétrole pour produire du plastique que nous brûlons ou que nous enterrons quelques mois après. C’est un non-sens économique et écologique.

Cela signifie aussi que nous devons innover, d’une part pour développer de nouvelles chaînes de valeur qui permettent de compenser la disparition de ce plastique qui nous était devenu indispensable dans tant de domaines. D’autre part, pour que la fin de la pollution plastique soit créatrice de valeur : avec le tri, le recyclage, le réemploi qui permettent de développer des activités économiques porteuses d’emploi et de richesse. 

Sur tous ces sujets, nous sommes interdépendants. C’est pourquoi nous avons besoin d’un traité international, qui soit juridiquement contraignant. Ce traité, c’est ensemble qu’il nous faut le construire.

Il doit nous permette d’avancer sur plusieurs objectifs fondamentaux : 
-    L’objectif premier doit être de réduire la production de nouveaux plastiques, et d’interdire dès que possible les produits plus polluants – comme les plastiques à usage unique – et les plus dangereux pour la santé. 
-    Nous devons aussi nous fixer des cibles précises sur le recyclage, car aujourd’hui, il faut reconnaitre que nous ne sommes pas performants. 15% du plastique seulement est recyclé à l’échelle mondiale. 100% des plastiques mis sur le marché doivent demain être entièrement recyclables : c’est le meilleur moyen d’éviter qu’ensuite ces plastiques se transforment en déchets.
-    Il nous faut aussi nous donner les moyens d’innover plus fort, et plus vite, pour substituer au plastique des alternatives réellement écologiques, inventer de nouveaux modes de production et de consommation, y compris en passant par le réemploi. Cela passe aussi par une régulation et des incitations plus fortes vis-à-vis du secteur privé pour passer de l’économie linéaire à l’économie circulaire. 
-    Enfin, nous devons mieux partager les solutions, les technologies, et assurer une solidarité vis-à-vis des pays les plus pauvres. 

Ce projet que je viens de décrire à grands traits, est un projet historique. 

Il s’inscrit dans la lignée du cadre de Kunming-Montréal sur la biodiversité, et de l’accord sur la biodiversité en haute-mer (BBNJ). Il s’agit au fond de poser les briques d’un nouveau droit international de l’environnement, qui doit nous permettre de construire demain une mondialisation plus juste, qui protège la nature, et qui encourage l’innovation au service de la planète, plutôt qu’elle ne la détruit. 

Pour cela, il n’y a pas de temps à perdre. L’objectif doit être d’aboutir à un texte agréé d’ici la fin de l’année 2024, un an avant la conférence des Nations unies sur l’Océan à Nice. 

Alors pour cela, il nous faut faire preuve d’audace et d’ambition. Oser bousculer et transformer en profondeur nos modes de production. C’est cela qui est au cœur de vos négociations. 

Je ne serai pas plus long. La France est heureuse d’accueillir le deuxième cycle de négociations pour ce traité majeur. Vous pouvez compter sur notre détermination, comme je compte sur votre engagement. 

A nous de faire de cette nouvelle étape un jalon décisif. 

Alors je souhaite bon courage aux négociateurs. Je veux leur dire que nous serons là pour pousser et poursuivre leurs travaux, et aller au bout de ce combat essentiel, pour changer les modes de production, les comportements afin de sauver notre planète. 

Merci.  

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