Après le Cameroun et le Bénin, c'est en Guinée-Bissau que s'est rendu le Président Emmanuel Macron afin de conclure sa tournée africaine. Il s'agissait de la première visite d'un Président français sur le territoire. 

Le Président Emmanuel Macron s'y est entretenu avec son homologue Umaro Sissoco Embaló. 

Ils ont échangé sur la situation régionale qui coïncide avec l’accession du Président de Guinée-Bissau à la tête de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Ils ont aussi abordé les enjeux de sécurité alimentaire face aux conséquences de la guerre en Ukraine et la nécessité de poursuivre les efforts collectifs en faveur de la sécurité alimentaire mondiale. 

Revoir la conférence de presse conjointe : 

28 juillet 2022 - Seul le prononcé fait foi

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Discours du Président de la République

Monsieur le Président, 
Mesdames et Messieurs les ministres, 
Mesdames et Messieurs les parlementaires, 
Mesdames, Messieurs les ambassadeurs, 
Mesdames, Messieurs, 

Je suis extrêmement honoré, d'abord de vos mots, et puis d'être, en effet, le premier Président de la République française à être reçu ici à Bissau. Je voulais vous dire la fierté qui est la nôtre, avec ma délégation, et vous remercier très sincèrement de la chaleur de l'accueil que nous avons reçu hier soir et ce matin, en étant à vos côtés. Nous avons décidé du principe de cette visite lorsque je vous ai reçu, en octobre dernier, cher Président, à Paris. Je veux ici féliciter le Président pour son élection à la présidence de la CEDEAO, rendre hommage au travail de votre prédécesseur Nana AKUFO-ADDO, qui a défendu les principes et les valeurs de l'organisation. 

Vous avez maintenant pris la présidence de cette organisation régionale dans un contexte inédit que vous venez de rappeler, celui d'un défi sécuritaire pour toute l’Afrique de l’Ouest, avec une extension du terrorisme, avec un défi pour la stabilité politique et la multiplication de coups d’Etat dans plusieurs pays, et donc un agenda clé. Nous avons, ce matin, évidemment parlé de la relation bilatérale, mais également de la situation au Mali, au Burkina Faso, en Guinée Conakry. Nous avons longuement évoqué le risque de déstabilisation que la situation au Sahel fait peser sur l’ensemble de la région de l’Afrique de l’Ouest. 

J’ai réitéré au Président la détermination de la France, d'abord à rester engagée au Sahel et dans toute la région, mais aussi à changer sa doctrine et les modalités pour, d'une part, venir en soutien aux armées - formation, équipement, accompagnement - et pas en substitution en quelque sorte à celles-ci, mais d'autre part, pour insister sur le fait que la stratégie qui seule peut être efficace face à la multiplication des groupes terroristes, c'est un agenda de sécurité au service des Etats, mais complété par un agenda politique de retour de l'Etat et de ses services, pour pouvoir se libérer des groupes terroristes, et un agenda de développement de projets, de création d'opportunités éducatives, économiques pour les populations. Et donc, c'est bien la synergie entre nos stratégies politiques, sécuritaires et de développement qui seule peut être efficace face au fléau du terrorisme. C'est exactement la même chose que j'ai pu évoquer hier avec le président TALON. 

Dans ce contexte, le Président m'a fait part de sa volonté d'organiser dans les semaines, les prochains mois, en fonction de discussions avec ses partenaires, un sommet de la CEDEAO auquel il souhaitait convier la France pour justement bâtir cet agenda commun face aux groupes terroristes. Je veux ici lui dire ma disponibilité et notre volonté de coopérer dans cette direction. 

Nous avons aussi partagé nos inquiétudes sur l'amplification des violences contre les populations civiles au Sahel, plus largement, maintenant dans toute la sous-région, et en particulier des exactions commises par les éléments mercenaires déployés au Mali et dont les agissements sont désormais documentés par les rapports des Nations unies, Wagner pour ne pas les citer. J'ai fait part aussi au Président Umaro Sissoco EMBALO de l'alarme de la France et de ses partenaires face à ce qui s'apparente, sous couvert d'opérations de lutte contre le terrorisme, à des violences systématiques ciblant les populations peules. Nous avons partagé l'urgence d'enrayer cet engrenage qui pourrait déstabiliser l'ensemble de la région et avons souligné la responsabilité première des Etats de la région pour sanctionner les coupables et exercer leur vigilance. Ceci pour illustrer la complexité de cet agenda mais la nécessité d'agir ensemble. 

Pour finir, je voudrais juste dire un mot de notre coopération bilatérale. En effet, s'agissant de la Guinée-Bissau, je voudrais réitérer la condamnation ferme de la tentative de coup d'Etat de février dernier et saluer les efforts qui ont été faits sur la voie de la stabilité. Dire ici tout mon soutien au Président, à son gouvernement dans la lutte contre le narcotrafic, toutes formes de trafic qui déstabilisent le pays. Nous avons par le passé entretenu une coopération dense avec la Guinée-Bissau, brutalement interrompue avec la guerre civile de 1998. Nous souhaitons aujourd'hui participer à la réouverture du pays en direction des partenaires internationaux, permise par cette stabilité retrouvée. 

À ce titre, la France poursuivra son soutien à l'économie de votre pays dans un contexte lourdement impacté par la pandémie de COVID-19 et aggravée par la guerre en Ukraine. Après une aide budgétaire globale de 1,5 million d'euros octroyée en 2021, la France accordera une nouvelle aide budgétaire pour contribuer à la stabilité du pays à très court terme d'au moins 3 millions d'euros. Suite à notre discussion, j'ai décidé de pouvoir compléter celle-ci. Nous allons également financer un projet dans le domaine de l'agriculture d'un montant de 1,5 million d'euros pour la formation d'une quinzaine de jeunes agronomes, dont dix femmes à l'école d'agronomie de Yamoussoukro en Côte d'Ivoire. C'est une démarche originale qui donne tout son sens aux efforts d'insertion régionale de votre pays et je souhaite que nous puissions le poursuivre, le continuer par la construction d'une coopération renforcée dans le domaine agricole et alimentaire avec votre pays pour aider à accroître la production en formant un investissement dans plusieurs filières, en particulier celle du riz. 

Je salue aussi la place importante de la langue française en Guinée-Bissau, comme en témoigne le nombre croissant de francophones. Nous serons en mesure d'accompagner cette dynamique avec l'ouverture prochaine d'une Ecole française grâce à la mobilisation d'investisseurs privés issus de la sous-région. Notre objectif est d'ouvrir dès la rentrée 2023. Au-delà de cela, nous avons aussi décidé de renforcer la coopération bilatérale sur le plan de la défense, dans le domaine de l'équipement, de la lutte contre la piraterie maritime et la pêche illicite et de la formation des cadres militaires. Voilà les quelques points que je souhaitais faire en complément de cet agenda régional et de la lutte contre le terrorisme sur notre coopération bilatérale. 

Enfin, je voudrais saluer la présence de la basketteuse de l'équipe de France, Émilie GOMIS, qui s'est engagée dans le domaine du sport en Guinée-Bissau. Avec l'appui de l'AFD, nous allons lancer un ambitieux programme de réhabilitation des structures omnisports, de formation et d'éducation sportive, à Bissau, au profit de plus de 15 000 lycéens. C'est là aussi un des axes de notre coopération et c'est une fierté pour nous de faire vivre le lien à travers la diaspora, parfois les binationaux, en tout cas, toutes celles et ceux qui fertilisent la relation bilatérale. 

Voilà, cher Président, les quelques mots que je souhaitais dire. C'est une étape historique de notre relation que notre présence aujourd'hui parmi vous, parce que c'est une première. Mais ce n'est qu'une étape. Parce qu'il nous reste beaucoup de travail devant nous, parce que vous avez beaucoup d'ambition et parce que nous avons beaucoup d'affection et d'amitié pour vous et pour votre peuple. Nous serons là dans la durée. 

Merci beaucoup.

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