Le chef bourguignon Marc Meneau, qui avait obtenu trois étoiles au guide Michelin à la tête de son restaurant L’Espérance dans l’Yonne, nous a quittés aujourd’hui.
S’il grandit dans les tintements des assiettes et la chaleureuse ambiance des comptoirs, entre bocaux et bouteilles, ce ne fut pas dans un antre de la haute cuisine, mais dans le bistrot-épicerie que tenait sa mère au village de Saint-Père, en Bourgogne, où son père était bourrelier.
Profondément attaché à son berceau bourguignon, il ne le quitta que quelques années, pour aller étudier à Strasbourg, où il n’apprit nullement la cuisine mais la gestion hôtelière. C’est seulement de retour sur ses terres que, par amour pour une fille de restaurateurs, il s’arma d’une casserole et d’une spatule et se plongea avec passion dans les grimoires de grands maîtres : Alex Imbert de Maxim's, André Guillot de l’Auberge du Vieux-Marly ou Jacques Besnard du Palais de l'Élysée.
Riche de cette seule passion d’autodidacte, il reprit avec sa femme Françoise l’épicerie de sa mère dans les années 60 et le transforma bientôt en haut-lieu de la gastronomie française.
De déjeuners en dîners, d’assiettes en menus, il se perfectionne et invente des recettes qui font aujourd’hui partie du patrimoine de la gastronomie française : les cromesquis de foie gras, les huitres en gelée à l’eau de mer, le homard aux girolles ou le quasi de veau au caramel amer.
En 1972 s’ouvre pour lui la course aux étoiles Michelin : la première qu’il reçoit l’autorise à rêver plus grand. Le beau nom qu’il donne au nouveau restaurant qu’il ouvre alors, L'Espérance, trouve une confirmation trois ans plus tard : une deuxième étoile vient faire scintiller son établissement. Également encensée par la critique et le bouche-à-oreille, sa toque se pare de tous les lauriers.
1983 est l’année de la consécration : celle de la troisième étoile et d’un 19/20 au Gault et Millau qui le titre « Meilleur Cuisinier Français de l'Année ». Il est d’autres hommages rendus à un grand chef : les invités illustres qui se pressent à sa table pour venir goûter sa cuisine. Le Président François Mitterrand, Serge Gainsbourg ou Mstislav Rostropovitch ont d’abord franchi le seuil de sa jolie maison de pierre en curieux puis très vite en habitués, car il ne leur fallut qu’un repas pour passer de la découverte à l’enthousiasme.
Mais pas question pour lui de se reposer sur ses bonnes étoiles : il continue d’innover. En précurseur, il plante dans le parc de l’Espérance un potager bio, et s’occupe de 16 hectares de vigne pour faire revivre l’appellation Bourgogne-vézelay AOC.
Cependant, les années 2000 fragilisent les comptes de son restaurant, qui trouve repreneur en 2015 lorsqu’il est acquis par le groupe Hôtel & Food Disrpt Partners, fondé par Alain Ducasse. Avec une passion intacte, Marc Meneau se lança alors dans une nouvelle aventure, ouvrant un restaurant dans un hôtel sept étoiles de Shanghai, prouvant qu’il n’avait jamais renoncé à l’espérance et qu’il visait toujours plus haut.
La gastronomie, la Bourgogne et la France perdent aujourd’hui un de leurs meilleurs ambassadeurs et les chefs français sont nombreux à lui tirer leur toque. À sa famille et ses proches, à tous ceux que sa cuisine avait réjouis et inspirés, le Président de la République adresse ses sincères condoléances.