Le résistant français Roger FICHTENBERG, l’un des héros des pages les plus brûlantes de l'histoire du XXe siècle, s’est éteint. La France perd un grand combattant de la liberté, un grand combattant de la mémoire aussi, profondément attaché à faire vivre le souvenir de la Seconde Guerre mondiale.

Les scouts des Éclaireurs israélites de France (EIF) avaient eu une inspiration heureuse en totémisant « jaguar délicat » leur nouvelle recrue de vingt ans, fraichement débarquée en Allier depuis Paris. Né en 1921 dans une famille juive parisienne qui prit le chemin de l'exode en 1940, Roger FICHTENBERG avait le courage, l'ardeur, la discrétion et la rapidité furtive du félin.

Son totem allait devenir son nom de guerre, car la zone dite libre ne le resta pas longtemps. Quand s'y déclarèrent les rafles de juifs en 1942, et que les EIF furent interdits, le jeune homme contribua à transformer le mouvement en un réseau clandestin d'évasion d'adolescents juifs, la Sixième. Des milliers de jeunes s'échappèrent alors par les Alpes et les Pyrénées, grâce aux cachettes, aux convoyages, à la production de faux-papiers organisés depuis Moissac par FICHTENBERG et ses compagnons. Engagé en 1944 dans l'Armée Secrète puis dans les FFI comme sous-lieutenant, il participa à la Libération d'Agen.

Roger FICHTENBERG garda toute sa vie une conception très haute de l'engagement, en particulier sur la scène politique. Tout en travaillant dans l'industrie textile, il entra au Parti Radical Socialiste puis au Mouvement des Radicaux de Gauche, et mena une carrière d'élu local dans le XIe arrondissement où il était né et auquel il était très attaché. Après deux mandats de conseiller municipal, M. FICHTENBERG fut conseiller régional d'Île-de-France entre 1986 et 1992 puis entre 1997 et 1998. Son engagement politique était pour lui le prolongement de son action résistante : « La tâche n’est pas achevée » disait-il, appelant sans relâche à lutter contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. 

Animé par une foi profonde dans les valeurs républicaines, M. FICHTENBERG fut toujours un passeur, imprégné de l'importance du témoignage et de la transmission, membre de la Commission du Souvenir du CRIF et d'associations d'anciens combattants. Son histoire, qu'il coucha par écrit en 2015 dans son Journal d’un résistant juif dans le Sud-Ouest, a touché des milliers de jeunes Français auxquels il est venu la raconter dans les écoles. Lucide et droit, sans rancœur ni naïveté, Roger FICHTENBERG versait sur la plaie vive de la Seconde Guerre mondiale son regard de paix.

Celui que Serge KLARSFELD définissait comme un « héros tranquille et modeste » ne quitta jamais les armes du combat pour le bien commun.

Le Président de la République rend hommage à cet homme d'engagement et de mémoire, et adresse à ses proches ses plus sincères condoléances.

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