Fait partie du dossier : Sommet du G7 à Biarritz

Retrouvez ci-dessous la conférence de presse du Président de la République française Emmanuel Macron avec Akinwumi Adesina, Président de la Banque africaine de développement et Angelique Kidjo, consacrée au programme AFAWA :

25 août 2019 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse du Président de la République française Emmanuel Macron avec Akinwumi Adesina, Président de la Banque africaine de développement et Angelique Kidjo, consacrée au programme AFAWA

Emmanuel MACRON

Je suis très heureux d’avoir ici le président de la BAD et Angélique KIDJO. Alors merci pour votre présence, je viens de le dire avec la Chancelière et le président KABORÉ notre objectif pour ce G7 c’est vraiment de construire un partenariat stratégique avec l’Afrique et donc c’est pour ça qu’on a associé 5 chefs d’Etat africains, 2 présidents d’organisation africaine aux travaux du G7 et donc la BAD et l’Union Africaine avec une discussion qui a porté sur tous les sujets — de sécurité, de développement — parce que nous sommes profondément convaincus, je parle au nom vraiment de tous les membres du G7, que la réussite de l’Afrique, son développement est un des défis contemporains les plus importants qui touche toute la planète et qui touche évidemment l’ensemble des pays développés. On a un responsabilité particulière : aider, faciliter, ouvrir et, il faut être très lucide, on a aussi un intérêt. Il faut que l'Afrique réussisse parce qu’on ne traite souvent que les conséquences des difficultés quand on parle de sujets migratoires ou autres mais on ne va pas s'attaquer à la racine. Il y a une très bonne discussion tout à l'heure autour justement de cette idée de partenariat, d’essayer de voir comment aujourd'hui et en quoi l'Afrique n'avait plus besoin d'une approche en termes de développement classique mais beaucoup plus de partenariats équilibrés pour l'aider à faire ce qu'elle est capable de faire. Et alors dans cette méthode, je dois dire moi je suis convaincu d'une autre chose c'est que ce sont les Africaines et les Africains qui savent beaucoup mieux que les Européens ou les Américains ou les Japonais ce qui est bon pour eux, et il se trouve qu'il y a quelques mois j'avais détourné de sa route habituelle Angélique KIDJO et elle avait accepté de m'accompagner au Nigeria. Et en revenant du Nigéria elle m'a raconté une anecdote qui consistait à dire “Je suis allée sur plusieurs marchés au Bénin voir des femmes entrepreneuse et elles m'ont dit ‘Nous, personne s'occupe de nous’”, en substance. Il y a du microcrédit qu'on a créé depuis des années mais c'est très, très cher et les montants sont très, très faibles et donc on peut monter un tout petit commerce avec des taux d'intérêt 15-20 parfois plus et donc c'est affreux pour rembourser. Mais on ne peut pas développer véritablement une entreprise, on ne peut pas créer notre entreprise et se développer comme il faut parce que de l'autre côté on n'a pas accès au crédit. Je suis ensuite allé quelques semaines, quelques mois plus tard au Tchad et j'ai eu une discussion avec plusieurs associations de femmes entrepreneuse etc, plusieurs d'ailleurs étaient peut-être avec moi, et j'ai eu exactement les mêmes interpellations : des femmes qui m'ont dit “On a cette difficulté” et avec, quand on regarde les choses, ça a été analysé par beaucoup qui sont ici présents (le conseil présidentiel pour l'Afrique) au fond un vrai défi pour l'Afrique c'est qu’il y a deux moteurs démographiquement, les femmes et les hommes, il n'y a qu'un moteur qu'on aide, les hommes, pour pouvoir se développer, pour pouvoir créer des entreprises, pour pouvoir… L'autre moteur est à l'arrêt parce que dans beaucoup de pays africains les femmes n'ont pas le droit d'accéder au foncier ce qui est un défi fondamental, et donc ça veut dire qu'elles n'ont pas le droit d'accéder au crédit, elles ne peuvent pas développer une activité, et dans beaucoup de pays africains les femmes ne peuvent pas accéder en effet au crédit, à l'emprunt (hors le microcrédit) et donc développer de l'entrepreneuriat. C'est pourquoi ce midi lorsqu'on a traité des inégalités femmes-hommes au Conseil consultatif on a soulevé le sujet du foncier entre tous les leaders qui étaient là, les organisations internationales pour lancer une initiative pour aider les femmes à acquérir du foncier, à avoir des droits fonciers parce qu'il y a une vraie injustice qui est un frein pour beaucoup de continents dont l'Afrique, et que nous avons décidé ensemble de lancer cette initiative AFAWA. Et moi je vais m'arrêter là mais, outre le fait que l'idée vient Angélique KIDJO et de son interpellation, ensuite nous on a essayé de travailler, on a travaillé en mobilisant des banques françaises, des structures françaises, et puis en fait la bonne solution elle était dans une structure africaine, la BAD. Et donc je le dis parce que en tant que président du G7 je suis très fier qu'on ait pu lancer une initiative sur une idée africaine avec une structure africaine.

Intervenante non identifiée (Angélique KIDJO ?)

Si rapidement.

Emmanuel MACRON

On l'a fait rapidement parce qu'on aime que les choses avancent vite. Et donc aujourd'hui nous avons réuni dans le cadre du G7 nous des contributions qui vont permettre de lever un montant de 251 millions de dollars de prêts au bénéfice de femmes africaines. La France à elle seule s'est engagée à 135 millions sur l'initiative AFAWA. Je le dis parce que c'est un engagement très fort de notre part mais parce que j'y crois très profondément, parce que ça se fera sur le terrain avec l'engagement de femmes comme Angélique KIDJO qui iront suivre et avec une structure derrière qui est la BAD. Donc merci Angélique d'avoir été si libre, si inspirante, merci à la BAD d'avoir été si efficace, je vous cède maintenant la parole. Je crois que c'est Angélique d'abord puis le président ADESINA.

Angelique KIDJO

Merci beaucoup Monsieur le président MACRON. J'ai rencontré beaucoup de chefs d'Etat et des gens qui ont du pouvoir, qui disent des choses et qui ne font jamais rien. Donc je suis contente d'avoir rencontré un président, Monsieur MACRON, qui a dit “On va faire quelque chose” et ça se fait. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour porter la voix des femmes du continent africain. En 2020 23 % des femmes ont accès au crédit ce qui veut dire que trois-quarts des femmes n'en n'ont aucun. Il est urgent parce que les femmes sont celles qui créent des emplois, celles qui travaillent vraiment, sont les premières en ligne pour les inégalités, ce sont elles qui élèvent les garçons et les filles et c'est elles qui investissent dans l'éducation des garçons et des filles. Moi ces femmes-là m'ont parlé et pendant notre rencontre au bout d'une demi-heure elles étaient épuisées déjà et s'endormaient. Et ça m'a touché profondément parce que ma grand-mère elle a commencé aussi sa carrière au marché : veuve, toute seule pour élever ses deux enfants, pas accès au crédit du tout, elle s'est bagarrée pour élever ses deux enfants et les mettre à l'école. Du côté de ma grand mère maternelle c'est la même chose. Donc je viens, vraiment je suis un résultat de la décision d'un père qui a dit “Ma femme elle travaillera, mes filles iront à l'école et on changera l'Afrique”. Au jour d'aujourd'hui la solidarité est en danger. Il est vital pour tout un chacun d'entre nous de conjuguer nos efforts pour réformer ce qui ne fonctionne pas et de réussir coûte que coûte à atteindre les exclus de cette mondialisation. Il en va de la sécurité du monde entier, pas seulement du continent africain, parce que les problèmes d'immigration que nous avons aujourd'hui, pourquoi est-ce que nos jeunes partent ? Ils partent parce qu'ils n'ont pas de perspective de futur, ils partent parce qu'ils, on les met à l'école, l'éducation n'est pas bonne, et même si l'éducation était bonne il n'y a pas de travail. L'Afrique est le continent qui aura le plus de jeunes en dessous de 19 ans en 2025 ou 2050 et qu'est-ce qu'on va faire de cette jeunesse-là ? Moi en tant que femme africaine entourée d'hommes de pouvoir je dis qu'on peut faire les choses, ne pas avoir peur de faire des choses. Les femmes du marché ont droit au crédit car si elles ont les crédits tous les problèmes dont nous parlons seront réglés parce qu'il faut se rendre compte d’un chiffre : le manque à gagner des femmes c'est 2 000 milliards de dollars, je dis bien 2 000 milliards de dollars. Est-ce que l'Afrique peut se permettre de perdre autant d'argent ? Je ne le pense pas. Les femmes que j'ai rencontrées au marché — Madame (inaudible), Rachi DATOU (phon), Madame KOUASSI Claudine et Madame ADJOVI Lucile (phon) — elles m'ont expliqué que si on les aidait il n'y aurait plus jamais un moment où elles iraient se coucher en se disant “Comment je vais nourrir mes enfants demain et comment je vais payer la scolarité de mes enfants ?” On en est là au 21ème siècle où des femmes qui se lèvent tôt le matin, les premières à se lever les derniers à se coucher, qui comprennent ce que c'est que le business, qui comprennent ce que c'est que de faire de l'argent parce qu'elles sont femmes n'ont pas accès au crédit. Comment est-ce qu’un homme peut se tenir debout devant même dire “Je suis fier d'être un homme et par dessus le marché un homme africain” me dit “Je suis fier d'être un homme africain”, les femmes qui font la moitié de la population de ce continent-là n'ont pas accès au crédit, se bagarrent pour survivre et on se dit en costume cravate “Nous sommes des présidents.” Ah bon, d'accord... Moi je ne sais pas ce que ça veut dire mais ce n'est pas moi ça. Alors moi ce que j'aimerais beaucoup qu'on fasse ensemble ce que le président MACRON m'a dit qui m'a vraiment touché, il m'a dit “Je veux du concret”, je suis une femme de concret. Parler ça ne coûte rien, agir ça coûte de l'argent, et si on agit pas les choses n'avancera pas. Moi je vous dis la raison pour laquelle je suis là c'est justement ces femmes-là. Je suis ici aussi pour — Monsieur le Président me regarde, dit — vous savez très bien que je serai la garante intraitable des engagements de ce sommet. Ça ne s'arrête pas ici et quand j’irai au marché de Cotonou et que les mêmes femmes et les autres viendront poser des questions je veux être en mesure de dire que la Banque africaine de développement grâce à son initiative AFAWA peut leur parler, peut les aider et que leur vie sera transformée comme j'ai promis et comme le président m’a permis de leur dire de le faire. Alors je vais faire, je veux vous remercier tous les deux et cette initiative est déterminante pour l'avenir de mon continent. Les femmes d'Afrique attendent que nous délivrions pour elles. Je suis là pour être sûre que ça se passe car vous connaissez ma franchise, moi je n'ai pas la langue de bois et si ça ne va pas je prends mon téléphone et j'appelle. Ca ne va pas assez vite pour moi, je vous appellerai, je vous donnerai des maux de tête jusqu'à ce que ça se fasse donc je peux vous le garantir. Mais en attendant je vous remercie beaucoup au nom de toutes ces femmes africaines qu'on va arriver à atteindre, faisons le vite et faisons le bien.

Emmanuel MACRON

Merci beaucoup Angélique KIDJO. Président ADESINA.

Akinwumi ADESINA

Merci Monsieur le président MACRON, notre hôte, chère sœur Angélique, Mesdames et Messieurs, aujourd'hui Monsieur le Président c'est un grand jeu pour les femmes en Afrique. Je voudrais remercier le président MACRON, mes chers frères et amis pour votre leadership remarquable dans la promotion des investissements en faveur des femmes. Vous avez engagé une transformation politique majeure en France grâce au mouvement En marche. Votre leadership robuste, votre dynamisme personnel, votre soutien incroyable et l'appui extraordinaire de tous les présidents du G7 ont permis de donner un formidable élan à l'action positive pour les financements en faveur des femmes en Afrique, AFAWA. (traduction) Monsieur le Président, permettez-moi de vous dire que par vous le G7 envoie un message puissant au monde,  ce message c'est que les femmes ne sont pas seulement l'avenir de l'Afrique les femmes sont le présent. Investir dans les femmes est un investissement très sûr, l’AFAWA est la plateforme de financement qui permettra de mettre les femmes en marche en Afrique. L’AFAWA est une initiative développée en Afrique par la Banque africaine de développement pour les les femmes africaines. Vous avez entendu ma sœur en parler et soutenu par le monde et par le Président MACRON. Sans femme il n’y aura pas de monde parce que les femmes dès qu'elles arrivent au monde malheureusement sont marginalisées, par des manières plus ou moins subtiles elles sont discriminées et lorsqu'il s'agit déjà de l'accès au foncier elles n'ont pas les mêmes droits que tout le monde. Même chose dans l'entreprise, dans l'investissement, dans les affaires, on leur dit constamment que c'est trop risqué de les financer. J'aimerais vous rappelez vous tous qui êtes là aujourd’hui que c'est une femme qui vous a donné la vie et qui vous a donné l'opportunité d'être qui vous êtes ; c'est une femme, votre mère, qui vous a permis d'avoir la vie et de vous permettre de faire avancer le monde aujourd'hui. Alors Mesdames et Messieurs les leaders nous sommes fiers de vous aujourd'hui mais nous sommes surtout fiers des femmes qui vous ont donné naissance, qui ont donné ce cadeau au monde parce que ce sont les femmes qui font les leaders et donc les leaders doivent soutenir les femmes. En soutenant les femmes le monde va créer encore plus de leaders. Quel bel avenir nous attend lorsque ces leaders sont également des femmes ! Les femmes africaines sont des entrepreneurs, elles représentent 30 % de toutes les entreprises africaines et elles représentent 70 % de tous les échanges informels en Afrique. Vous n'avez qu'à aller voir à un marché et vous allez probablement voir un visage féminin qui vous accueillera, une femme qui travaille dur pour vendre ses produits et le fruit de son labeur. Le succès de la zone de libre-échange continentale africaine dépendra de l'ouverture qui sera donnée aux opportunités des femmes. Le marché des biens et des services a besoin des femmes, sans les femmes une majorité des entreprises dans le monde aujourd'hui s'effondrerait. Le temps est venu pour les femmes de dominer les marchés, nous devons créer un mouvement En Marche, un vrai levier d'investissement économique pour les femmes en Europe. Aucun oiseau ne peut prendre son envol avec une seule aile, lorsque l'Afrique aura entièrement donné les outils économiques à ses femmes l'Afrique aura enfin ses deux ailes et pourra avoir le meilleur taux de croissance qu'elle ait jamais vu. Aujourd'hui 42 milliards de dollars manquent aux femmes pour investir en Afrique, c'est une carence de financement que nous devions résoudre rapidement parce que sans investir financièrement dans les femmes africaines nous ne pourrons pas répondre aux ODD. Voilà pourquoi la Banque africaine de développement a lancé l'action AFAWA en partenariat avec le Fonds de garantie africain. L'initiative AFAWA établit des financements de 300 millions de dollars pour le partage des risques de manière à faciliter le financement par l'institution aux femmes africaines. J'aimerais remercier le président MACRON pour avoir permis la mobilisation de 251 millions de dollars de financements et je pense que nous pouvons le remercier en applaudissant bien fort. AFAWA aidera à dégager 300 milliards de dollars directement destinés aux entreprises des femmes africaines, c'est l'effort le plus grand que l'on ait jamais connu dans l'histoire de toute l'Afrique. L’AFAWA fournira également une assistance technique aux entreprises des femmes pour qu'elles puissent produire des plans de travail qui soient finançables, et AFAWA fera également en sorte de soutenir le secteur bancaire pour qu'il soit plus accessible aux femmes. De manière systématique AFAWA va transformer la façon dont les institutions financières travaillent avec les femmes sur le continent. Pour y parvenir la BAD va mettre sur pied un Indice du financement des femmes qui notera les institutions financières du continent sur la base de leur volumes de financements accordés aux femmes et sur les impacts de financement de ces fonds pour les femmes sur le continent. Autrement dit, AFAWA va faire en sorte que les institutions financières africaines doivent enfin rendre des comptes aux femmes. La BAD va également faire en sorte que davantage de ces capitaux soient rendus disponibles aux femmes pour compléter l'initiative AFAWA. Sur les cinq prochaines années, Monsieur le Président, la BAD par le biais de ses opérations régulières de financement va fournir un milliard de dollars de crédits pour les entreprises menées par les femmes. Nous allons également fournir un milliard supplémentaire pour le financement aux échanges pour soutenir la participation des femmes à la zone de libre-échange africaine et 100 millions de dollars supplémentaires de financement pour les participations privées dans les entreprises menées par les femmes. Par le biais du financement direct de la BAD les femmes en Afrique vont avoir 5 milliards de financement supplémentaires sur les 5 prochaines années. Nous voulons une Afrique nouvelle et celle-ci sera pour les femmes. Une mère de famille qui a ses clefs économiques pourra les donner à ses enfants, en particulier à ses filles pour que cela se répercute dans toute l'Afrique. Nous leur permettrons ainsi de réaliser leur plein potentiel, comme Angélique qui est là aujourd'hui, cela leur permettra d'envoyer leurs filles à l'école, cela permettra à ces filles de rester à l'école et de se développer à l'école et de devenir des grandes gagnantes de cette opération. Voilà ce dont l'Afrique a besoin. Monsieur le Président, vous avez fait une action extraordinaire parce que vous pensez à l'Afrique et que vous vous souciez de l'Afrique. Merci infiniment pour avoir ainsi porté l'initiative AFAWA. Merci également à Angélique KIDJO qui est ici aujourd'hui pour parler au nom d’AFAWA et le soutenir. Et au fait j'adore vos fils, vos chaussons pardon. Vous allez faire une chanson pour nous également ? Vous avez ici le soutien du G5 Sahel et de l'Union africaine et de la BAD. Les efforts doivent être conjoints pour que nous puissions avancer là-dessus et c'est le cas ici, j'aimerais donc remercier tout le monde, chaque personne individuellement qui a travaillé en ce sens, y compris et surtout les sherpas du G7 et le bureau du président MACRON qui a travaillé sans relâche pour faire de ceci une réalité. Je vous remercie Monsieur le Président. J'aimerais également demander à mon équipe de se lever, (inaudible) directrice des questions de genre à la banque. Merci à vous pour votre travail, merci. L’AFAWA va faire des femmes des grandes gagnantes en Afrique et lorsque les femmes gagnent c'est l'Afrique qui gagne. Merci.

Emmanuel MACRON

Est-ce qu'il y a des questions par rapport à l'initiative AFAWA ? Oui ?

Eline FOUQUET

Bonjour, Eline FOUQUET pour Bloomberg. Peut-être une question financière : est-ce qu'il y a des institutions financières, des banques, d'autres, n'importe quelle institution financière qui soutiennent votre initiative, qui y participent, qui vont faciliter les prêts pour les femmes en Afrique ou qui même donnent financièrement pour cette initiative ? Merci.

Emmanuel MACRON

Peut-être président ADESINA puisque c'est ce qu'il a commencé à expliquer dans son propos sur tout ce qui va être mis en place.

Akinwumi ADESINA

Merci Monsieur le Président. Comme vous avez expliqué, ce partenariat c’est un partenariat conjoint avec le Fond de garantie africain qui est aujourd'hui l'institution financière avec la notation double A, la Banque africaine de développement nous avons les notations triple A et ils ont la notation double A. Et ils travaillent aujourd'hui avec plus de 105 à 140 institutions financières en Afrique, déjà ils travaillent beaucoup avec l’institution qui fait les financements pour les petites et moyennes entreprises. Avec cette initiative je peux vous dire on va engager toutes les institutions financières pour l'Afrique. Comme vous avez expliqué, c’est une question d’être sûr que toutes ces institutions-là vont travailler et doit se rendre compte, comme vous avez dit, aux femmes. C'est ça qui compte, ça ce n'est pas simplement un projet,  ça c'était quelque chose systémique pour transformer comment le système financier en Afrique engage et finance les acteurs de femmes.

Emmanuel MACRON

Très bien, merci beaucoup. En tout cas je pense c'est une étape très importante et comme cela a été dit les montants qui ont été donnés sont ceux qui permettront de lever beaucoup plus et donc d'accorder des prêts à des conditions qui sont des bonnes conditions. Et tout ce qui va être fait, c'est pour ça que la Banque africaine de développement qui est cette structure faîtière, c'est de le faire avec tous ces partenaires nationaux, privés et publics, parce qu'ils vont constituer la bonne connaissance du risque. Nous on a regardé au début pour le faire avec des structures européennes, c'était un très mauvais choix parce que ça coûte tout de suite très cher parce que la connaissance du risque est mauvaise. Et donc nous c'est notre part notre agence de développement qu'on va apporter nos 135 millions à la Banque africaine, elle-même elle a ses structures existantes en place qu'elle va cibler pour pouvoir donner des prêts donc aux femmes qui souhaitent avoir un projet, enfin qui ont un projet entrepreneurial, mais il va à la fois activer tout un réseau de banques africaines qui connaissent le risque pour leur permettre de bénéficier de rehausseur de crédit, d'avoir des mécanismes de garantie pour accorder des prêts au meilleur marché. Et derrière surtout c'est tout le mécanisme de transparence qu'on va mettre en place, d'index comme l'a dit le président ADESINA, qui va mettre en quelque sorte en évidence un vrai rating des banques et des structures en fonction de cela. Donc c'est un mécanisme à plusieurs étages mais autour de la Banque africaine de développement.

Oui ?

Angelique KIDJO

Désolé mais je suis là pour les femmes. Pour l'instant les institutions financières telles qu'on les connaît en Afrique sont les grandes villes. Les femmes qui ont le plus besoin de crédits sont dans les zones rurales. Est-ce qu'il y a dans le programme de la Banque africaine de développement d'avoir des antennes proches des zones rurales, c'est-à-dire dans une région prendre un village qui peut accueillir quatre ou cinq villages et que les femmes n'aient pas à prendre la tête un taxi pour aller en ville pour aller, pour faire le business localement, pour aller vers, pour vraiment transformer ? Ce qui se passe ici moi de mon expérience, c’est ce que j'ai entendu, c'est que les femmes ne sont pas les bienvenues dans les banques, elles n'ont pas confiance aux institutions bancaires. Comment est-ce qu'on arrive à faire que ces femmes comprennent ce que nous sommes en train d'essayer de faire venir vers les banques si on ne va pas d'abord dans un premier temps vers elles ? Est-ce qu'on a un le mécanisme en place pour parler le même langage que les femmes du marché ou les femmes les plus pauvres dans les zones rurales pour les mettre en confiance pour qu'elles comprennent vraiment ce qu'on est en train de faire ? Et si on arrive à faire ça je vous assure on aura un succès incroyable.

Akinwumi ADESINA

Merci Angélique. Je pense que, comme vous avez dit, cette initiative par exemple ce n'est pas une initiative simplement pour les grandes entreprises, ça commence avec les petites avec le crédit à 100 cent dollars jusqu'à 10 000 dollars, jusqu’à 2 millions. Ça dépend de l’entreprise. Je peux vous dire qu’on va engager toutes les écosystèmes, le système financier en Afrique dans les villes, dans les villages, comment dire, l'instruction qui (inaudible). Mais aussi on va profiter de la situation de port mobile

Emmanuel MACRON

(inaudible)

Akinwumi ADESINA

parce qu'avec les dirigeants financières

Emmanuel MACRON

Mobile banking.

Akinwumi ADESINA

C'est plus facile pour le faire. Dans ce cas-là l’argent peut passer très facilement aux femmes, je peux vous dire parce que je pense que les femmes aujourd'hui la route la plus facile pour eux c'est à travers le port mobile.

Angélique KIDJO

Dans les pays anglophones, pas dans les pays francophones.

AKinwumi ADESINA

On va (inaudible)

Angélique KIDJO

Il faut qu'il y ait du réseau déjà, pour commencer, il y a des femmes qui m'ont dit “Moi je ne me sens pas en confiance de mettre mon argent sur mon téléphone. Si on me vole mon téléphone je fais quoi ?” Donc c'est pour ça que cette solution elle est bien là où ça marche, et il faut toujours avoir, l'Afrique est complexe, vous le savez aussi bien que moi, et il n'y a pas une seule solution pour tout le continent. Donc si on fait le internet banking il faut avoir aussi quelque chose pour celles qui ne savent pas lire.

Emmanuel MACRON

C’est pour ça je pense qu’il y aura plusieurs solutions et que ce sera très décentralisé.

Angélique KIDJO

Voilà, exactement ce que je voulais dire.

Emmanuel MACRON

On prend une dernière question avant de devoir filer ?

Intervenant non identifié

Les fonds français ils viennent de l’AFD ou du Trésor ou des deux ?

Emmanuel MACRON

C’est des fonds qu’on a  rajouté sur l'aide et je pense qu’ils seront versés techniquement par l'Agence française de développement, mais l'Agence française de développement elle est abondée par le budget de l'Etat donc c'est à peu près la même chose. Mais techniquement je pense que ça passera à travers, par le biais de contributions de l'AFD à la BAD. En tout cas je veux vraiment insister sur l'importance à mes yeux de cette initiative comme d'ailleurs une des initiatives très concrètes de ce G7. Je sais que beaucoup attendent cela : concrète, pensée je l'ai dit par une Africaine, des Africaines, opérées par une institution africaine avec des tas de choses derrière qui vont — notre discussion le montre bien — devant être développées au plus près du terrain et de manière très pragmatique, et donc c'est un objet qui va se transformer à travers le temps. Moi je prends aujourd'hui un engagement financier, on donne de la visibilité à cette initiative mais on va continuer à la porter dans le temps à la fois avec exigence pour être sûr que ça répond aux besoins du terrain et que s'installe notre crédibilité collective.

Angélique KIDJO

Absolument.

Emmanuel MACRON

Ça répond au défi parce que je pense que c'est un investissement car tous les chiffres le montrent, ils m'étaient rappelés encore il y a quelques jours : quand une femme gagne de l'argent en Afrique, elle réinvestit 90 % de cet argent gagné — je parle sous le contrôle de Vanessa — dans la santé et dans l'éducation.

Angélique KIDJO

Absolument.

Emmanuel MACRON

Quand c'est un homme c'est entre 30 et 40 %.

Angélique KIDJO

Et encore…

Emmanuel MACRON

Donc c'est un bon investissement parce qu'il y a un effet retour pour le total de l'économie qui est très bon. Un dernier mot avant de vous quittez pour remercier parce que je vois Denis MUKWEGE qui est là avec Phumzile et ils ont l'humilité tous les deux d’être présents dans cette salle mais je veux vraiment qu'on le salue leur travail ainsi que celui de Nadia MURAD. C'était les trois représentants du Conseil consultatif pour l'égalité femmes-hommes qui ont tout à leur rapporter devant les leaders et qui ont fait beaucoup. Et donc nous avons sur, au-delà de ce sujet AFAWA, sur le sujet de l'égalité femmes-hommes pris des décisions, celle du bouquet législatif et donc un gros travail a été fait par le Conseil consultatif pour soumettre les législations de tous les pays, et on s'est engagé chacun à prendre au moins une législation mieux disante que nous à un autre pays. Moi je l'ai fait pour la France sur l'entrepreneuriat féminin justement. On a un point de rendez-vous sur l'autorité de Phumzile à l'été prochain à Paris parce que nous aurons ce rendez-vous sous l'égide de l'ONU et coprésidé par la France et le Mexique, et donc ONU Femmes sera là pour regarder justement l'avancée de l'agenda féministe et en particulier de ce qui a été décidé aujourd'hui. Et donc on pourra faire un point d'étape sur les initiatives AFAWA dans ce cadre-là en France. Et puis nous avons décidé d'abonder au fonds de nos prix Nobel et en particulier donc à cette initiative qui est l'inspiration de toute une vie, cher docteur, cher Denis, et je veux vous en remercier qui est donc un fonds pour pouvoir assister les victimes des violences en particulier dans les crises et les guerres, qu'il s'agisse d'ailleurs de les assister physiquement comme psychologiquement, de répondre aux traumatismes, de réparer ces femmes avec d’ailleurs des mots très émouvants et des cas très émouvants que vous avez cités tout à l'heure. La France évidemment a décidé de contribuer à la création de ce fonds, plusieurs autres pays et structures s'y sont engagés tout à l'heure tant et si bien qu'il pourra être effectivement lancé cet automne avec dès cet automne des résultats concrets et une action qui permettra de démultiplier ce qu’avec beaucoup de courage vous faites dans votre pays et dans la région depuis des décennies. Donc bravo à vous deux et à Nadia MURAD pour qui j'ai une pensée. Merci à vous, merci Messieurs Dames.

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