22 janvier 2010 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Lettre de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, adressée à M. Moshe Kantor, Président du Congrès juif européen, à l'occasion du 65ème anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau, le 22 janvier 2010.


Monsieur le Président,
Regrettant de ne pouvoir être présent à l'occasion du troisième Forum international de l'Holocauste du Congrès juif européen qui se tient ce 27 janvier à Cracovie, je tenais à souligner combien la tenue de ce Forum est importante.
Auschwitz-Birkenau est devenu le symbole de la Shoah, parce qu'il fut le plus grand des camps de la mort et qu'il devint, au printemps 1942, le lieu de l'assassinat des Juifs de toute l'Europe. C'est en ce lieu qu'un système monstrueux perpétra le meurtre de masse avec des installations érigées à Birkenau pour tuer par les gaz et faire disparaître les corps. Auschwitz apparaît bien comme le Symbole du Mal absolu inscrit au fer rouge dans la conscience humaine.
Deux siècles après les Lumières, Auschwitz-Birkenau aurait pu paraître inconcevable dans notre Europe, pétrie d'humanisme et qui se considérait comme l'avant-garde de la civilisation.
Auschwitz est le seul des camps d'extermination à avoir conservé les traces visibles de l'assassinat de masse organisé par les Nazis. Mais n'oublions ni Belzec, ni Sobibor, ni Treblinka, ni Chelmno.
Les derniers témoins vivants de l'Holocauste, peu à peu, nous quittent et avec eux le souvenir concret de l'horreur des camps. De nouvelles générations arrivent qui n'auront plus ce lien vécu avec la tragédie.
Cette mémoire est un devoir d'humanité. C'est une exigence, une mission sacrée de restituer leur dignité humaine et leurs traits singuliers à ces enfants, ces femmes, ces hommes, qui affrontèrent ici l'indicible, l'inconcevable.
Aujourd'hui, à Auschwitz, écoutons la voix des victimes déportées de toute l'Europe, de Bordeaux à Varsovie, d'Amsterdam à Thessalonique.
C'est un cri qui monte vers nous. Il nous dit l'enfer, mais aussi la soif de justice et de fraternité qu'éprouve chaque homme. Il nous dit aussi qu'aucune idéologie, aucun totalitarisme ne sauraient réduire cette part d'humanité qui est notre part sacrée.
Construisons la paix, affermissons la stabilité entre les nations, renforçons l'Europe parce qu'Auschwitz nous oblige, aujourd'hui et pour l'avenir. L'Europe, en tant que construction organisée, doit assumer la responsabilité de ce devoir historique envers les victimes. C'est l'hommage le plus digne et le plus authentique que nous puissions rendre à celles et ceux qui ont disparu ici.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de ma haute considération.