16 mars 2009 - Seul le prononcé fait foi

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Lettre de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, et Mme Angela Merkel, Chancelière de la République fédérale d'Allemagne, adressée à MM. Mirek Topolanek, Premier ministre de la République tchèque et Jose Manuel Barroso, Président de la Commission européenne, sur la préparation du Sommet du G20, le 16 mars 2009.

Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Président,
Par la présente lettre, la France et l'Allemagne entendent contribuer à la préparation du Conseil européen de printemps et permettre que s'affirme la voix commune des Européens dans la perspective du G20. Ce n'est qu'ensemble que notre voix sera assez forte pour assurer notre intérêt commun en ramenant nos économies sur la voie du développement durable dans le monde globalisé d'aujourd'hui.
A la veille de réunions importantes, nous sommes profondément convaincus que nous devons saisir la chance historique unique qui nous est offerte de régler les causes profondes de la crise actuelle au sommet du G20 à Londres le 2 avril prochain, telles qu'elles ont été identifiées lors du sommet de Washington. La première priorité est de bâtir une nouvelle architecture financière globale. L'Union européenne doit affirmer une position commune et prendre la tête sur ce sujet.
L'approche coordonnée établie sous les présidences française et tchèque, l'Union européenne et les Etats membres a puissamment contribué à limiter l'impact économique de la récession globale en cours. Avec un total de plus de 400 milliards d'euros (autour de 3,3 % du PNB de l'UE), le programme européen de relance permet d'aider l'économie à traverser la crise. Il génère de nouveaux investissements, il soutient la demande, il préserve des emplois et représente un apport significatif pour raviver l'économie mondiale. Avec ce plan, l'Europe est aux avant-postes dans la lutte contre la récession. Lors du Conseil européen, nous devrions donner à nos citoyens, à nos partenaires et au monde de l'entreprise un message fort de confiance dans la taille et dans l'efficacité de nos plans de relance.
La stabilité et le bon fonctionnement des marchés financiers sont cruciaux pour la croissance et l'emploi. Sur la base de l'acquis du sommet préparatoire de Berlin en février, nous sommes déterminés à obtenir au sommet de Londres des résultats concrets pour le renforcement de la régulation financière internationale et nous attendons que la mise en oeuvre du plan d'action du G20 soit suivie par le FMI et le FSF pour assurer une responsabilité accrue. L'Union européenne doit proposer que tous les hedge funds et autres fonds susceptibles de créer un risque systémique fassent l'objet d'un enregistrement, d'une régulation et d'une supervision appropriés. Nous devons travailler à un mécanisme de sanctions effectif pour se protéger des risques que font courir les juridictions non coopératives qu'il faudra désigner. En outre, nous devrions encourager des politiques salariales transparentes et durables.
L'effet pro-cyclique des exigences actuelles en termes de capitaux amplifie la crise en réduisant encore les capacités des banques à prêter. Les effets sur l'industrie sont particulièrement néfastes. Au-delà de l'accélération de la révision de Bâle II et des règles comptables pour faire en sorte que les banques puissent avoir un volant de ressources supplémentaires le moment venu, l'Union européenne et le G20 devraient appeler à des mesures rapides pour limiter ces effets pro-cycliques. Nous demandons aux différents groupes de travail et institutions actifs dans ce domaine (le FSF, le comité de Bâle sur la supervision bancaire, la Commission européenne) de faire rapidement les propositions ou les recommandations appropriées.
Au niveau du secteur financier, un effort accru de stabilité, de transparence et de supervision est nécessaire. A cet égard, nous accueillons favorablement le rapport Larosière ainsi que la communication de la Commission proposant un ambitieux nouveau programme de réforme pour le secteur financier. Pour contribuer au développement de standards internationaux, l'Union européenne doit agir résolument vers un cadre réglementaire européen sur les bases des recommandations du groupe Larosière. Les premières mesures devront être adoptées d'ici juin.
L'Union européenne devrait soutenir une nouvelle charte de l'activité économique durable comme cadre de travail des Etats et des institutions internationales. Elle devrait être basée sur les principes du marché tout en visant à assurer une économie mondiale stable, socialement équilibrée et respectueuse du développement durable. A terme, elle devrait aboutir à l'établissement d'une structure de gouvernance mondiale.
A court terme, les mesures économiques et financières actuelles peuvent présenter un risque de distorsion de la concurrence et d'entrave à la libre circulation des biens, des services et des investissements. En conséquence, nous demandons à la Commission européenne de suivre attentivement les risques d'atteinte à la compétition loyale au sein du marché intérieur comme à l'égard de nos partenaires internationaux et d'en tenir informé le Conseil. Nous devrions en outre souligner notre engagement à ne pas lever de nouvelles entraves aux échanges, insister auprès de nos partenaires internationaux pour qu'ils renoncent à de telles mesures et conclure rapidement le cycle de Doha.
L'endettement public excessif menace sur le long terme la stabilité globale. Des finances publiques saines demeurent ainsi cruciales pour la crédibilité et la stabilité de l'Union européenne. Nous devons nous engager à consolider nos finances publiques en appliquant le pacte de stabilité et de croissance. La consolidation des efforts devra être accélérée au fur et à mesure que l'économie se redressera, pour assurer la réduction rapide des déficits sous la valeur de référence. Tout en reconnaissant que nous devons faire face à des défis croissants, nous devons renouveler notre engagement à revenir aussi tôt que possible, conformément au Pacte et en rythme avec le rétablissement de l'économie, à nos objectifs budgétaires de moyen terme.
La solidarité et la responsabilité sont des notions clés de l'Union européenne. Dans cet esprit, la France et l'Allemagne se félicitent que l'Union européenne ait montré sa disponibilité et sa capacité à aider les Etats membres en difficulté. Les deux pays réaffirment que la zone euro n'est pas un club fermé.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Président, l'expression de ma haute considération.