18 février 2009 - Seul le prononcé fait foi

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Intervention liminaire de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, lors du sommet avec les partenaires sociaux, sur les mesures à prendre pour promouvoir l'emploi et protéger les victimes de la crise, à Paris le 18 février 2009.

J'ai voulu réunir ici, à la Présidence de la République, les organisations patronales et syndicales les plus représentatives au plan national, en présence du Premier ministre et des ministres concernés.
Vous vous en souvenez, nous avions tenu il y a un an dans le même format, des réunions d'agenda social. C'était une première dans notre pays. Jamais encore le Président de la République n'avait réuni gouvernement et partenaires sociaux pour arrêter ensemble le programme des réformes sociales à mener à bien. De la part de chacun d'entre nous autour de cette table, c'était un geste de confiance dans le dialogue social. Et je crois que nous avons gagné notre pari haut la main car jamais ce dialogue n'a été aussi dense qu'au cours de l'année écoulée.
La réunion que je vous propose aujourd'hui, et que vous avez préparée la semaine dernière avec les ministres, est de nature différente mais son inspiration est la même. La France est confrontée à une crise économique d'une ampleur inédite, qui suscite l'inquiétude légitime des Français. Ils ne savent pas combien de temps elle va durer. Ils ont parfois peur pour leur emploi et pour celui de leurs proches. Certains sont au chômage partiel et se demandent s'ils arriveront à joindre les deux bouts à la fin du mois. Ils ont le sentiment de payer les excès du capitalisme financier, alors qu'ils n'y sont pour rien.
Dans ces circonstances, je crois le dialogue social plus que jamais nécessaire. Vous avez vos convictions, j'ai les miennes. Votre rôle est aussi d'exprimer, sinon d'organiser, les mécontentements et je le comprends. Mais, dans l'intérêt des Français et par-delà nos divergences, nous devons travailler ensemble aux solutions qui permettront de sortir notre pays de la crise.
La situation française est sérieuse mais nous nous en sortons et nous en sortirons mieux que les autres pays.
Oui, notre situation économique est sérieuse : au dernier trimestre 2008, notre produit intérieur brut s'est contracté de 1,2%. C'est la baisse la plus forte enregistrée depuis 35 ans (1974). Sur la même période, nous avons perdu plus de 88 000 emplois.
Mais si la situation française est difficile, elle est encore plus dure chez nos principaux partenaires. Au Japon, l'activité s'est contractée au 4ème trimestre 2008 de 3,3%. C'est la deuxième plus forte baisse trimestrielle depuis la deuxième guerre mondiale. Au Royaume-Uni, la contraction du PIB a été de 1,5% au quatrième trimestre 2008 après 0,6% au troisième. Aux Etats-Unis, 2,6 millions d'emplois ont été détruits en 2008 dont 524 000 sur le seul mois de décembre. L'Espagne a perdu 500 000 emplois au quatrième trimestre 2008, soit 5 fois et demi de plus que la France sur la même période. Le taux de chômage y approche désormais les 14%.
La France est rentrée plus tard que les autres dans la crise et tient mieux le choc que ses partenaires. Je constate d'ailleurs que la consommation des ménages s'est redressée au quatrième trimestre, avec une croissance de 0,5% après +0,1% au troisième trimestre, ce qui est un signe fragile mais encourageant.
Je voudrais également rappeler que notre pays dispose de la couverture sociale la plus généreuse du monde. Elle représente 550 milliards d'euros, soit 31% du PIB. Lorsque des difficultés interviennent, les filets de sécurité et les stabilisateurs automatiques jouent un rôle crucial, bien plus important que dans d'autres pays, par exemple les pays anglo-saxons.
Et nous avons d'ores et déjà décidé, au cours des derniers mois, de très nombreuses mesures sociales en faveur des ménages, et notamment des plus modestes.
En septembre 2008, les pensions de 15 millions de retraités ont été revalorisées de manière anticipée de 0,8% £ une nouvelle hausse interviendra en avril, au vu de l'inflation. En novembre 2008, la prime exceptionnelle de fin d'année a été portée de 152 à 220 euros pour 1,5 millions de titulaires du RMI ou de l'allocation de solidarité spécifique. En janvier 2009, 6 millions de familles ont bénéficié d'une hausse de 3% des prestations familiales - sans précédent depuis longtemps - et 5,7 millions de locataires ont vu leurs aides au logement progresser de 2,95%. En avril 2009, 3,8 millions de ménages modestes recevront une prime de solidarité active de 200 euros, dans l'attente de la mise en place du revenu de solidarité active en juillet 2009. A compter d'avril 2009, une hausse de 4,6% de l'allocation aux adultes handicapés bénéficiera à 820 000 personnes et le minimum vieillesse augmentera de 6,9% pour 400 000 retraités isolés et défavorisés.
Je crois que le rappel de ces quelques chiffres n'est pas inutile dans la période actuelle.
Ce que nous avons mis en oeuvre jusqu'à présent.
Je voudrais, avant d'en venir à l'objet de notre réunion, vous dire l'état d'esprit qui inspire les mesures que nous avons mises en oeuvre jusqu'à présent. Je ne suis pas un dogmatique. Savoir si la relance est une affaire d'offre ou de demande, de consommation ou d'investissement, n'a pas beaucoup d'intérêt. Franchement, la prime à la casse, est-ce que c'est une politique de l'offre ou de la demande ? La construction de 100 000 logements supplémentaires, c'est de la consommation ou de l'investissement ? La seule vraie question est de savoir si c'est efficace et si cela a un effet sur l'emploi. C'est l'objet même des 26 Mdseuros du plan de relance. J'entends parfois : "Nicolas SARKOZY, c'est un pragmatique". Je ne suis pas certain que dans l'esprit de ceux qui le disent, ce soit un compliment. Pour moi, c'en est un. Une solution efficace, une solution qui marche, c'est une bonne solution.
Le plan que nous mettons en oeuvre défend l'emploi par un vaste effort d'investissements publics de plus de 10 Mdseuros, qui profiteront directement aux carnets de commandes de nos entreprises, créeront des emplois et amélioreront la vie quotidienne des Français. La création d'emplois, c'est aussi du pouvoir d'achat.
Notre plan défend l'emploi par un soutien à la trésorerie des entreprises, en particulier des PME. Il ne faut pas ajouter aux difficultés des entreprises avec les banques en retardant le règlement des dettes que l'Etat doit aux entreprises. C'est la clé pour que les entreprises ne fassent pas faillite et pour qu'elles continuent d'embaucher et investir.
Notre plan défend l'emploi en soutenant directement deux secteurs essentiels de notre économie : l'automobile et le logement. Il défend l'emploi en supprimant toute charge sociale pour l'embauche d'un salarié pour les entreprises de moins de 10 salariés.
Ces dernières semaines enfin, l'Etat et les partenaires sociaux ont adopté, chacun pour ce qui les concerne, de premières mesures pour protéger les plus fragiles, ceux qui, à cause de la crise, risquent d'être les plus menacés dans leur travail, de se trouver durablement éloignés du marché de l'emploi ou de voir leurs revenus diminuer. Je pense à la relance des contrats aidés, aux mesures déjà adoptées pour donner plus de souplesse à l'activité partielle et en revaloriser l'indemnisation pour les salariés. Je pense au contrat de transition professionnelle et à la convention de reclassement personnalisé, que vous avez renégociée, dans l'intérêt des salariés licenciés économiques. Je pense à vos accords sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, l'assurance chômage ou encore la formation professionnelle.
Sur tous ces sujets, nous avons avancé ensemble, à un rythme soutenu.
Objectifs de la réunion
A mes yeux, notre réunion poursuit quatre objectifs. Pour chacun d'entre eux, je vais vous dire les propositions que je mets sur la table.
Premier objectif, l'emploi et ce que nous pouvons faire pour protéger les victimes de la crise, que sont les chômeurs, les travailleurs en activité partielle, les salariés précaires en contrat à durée déterminée ou d'intérim, et les jeunes.
S'agissant de l'activité partielle, je pense que nous pouvons aller au-delà des mesures qui ont déjà été prises ces dernières semaines. Nous pourrions améliorer encore l'indemnisation pour la porter, par exemple, jusqu'à 75% du salaire brut. Il n'est pas question dans mon esprit de vous demander de renégocier les accords que vous venez de signer. Je crois en revanche que nous pourrions procéder par voie de conventions ad hoc entre l'Etat et les branches ou des entreprises données, comme nous l'avons fait pour l'automobile. Dans la mesure où l'activité partielle permet d'éviter les licenciements, et donc de peser sur les comptes de l'UNEDIC, j'aimerais savoir si vous seriez prêts à ce qu'une convention Etat-UNEDIC permette de répartir ce surcoût entre l'entreprise, l'Etat et l'assurance chômage. Nous pourrions également mobiliser la formation professionnelle pour prévenir l'activité partielle ou l'accompagner. Enfin, certains d'entre vous ont indiqué aux ministres qu'il faudrait permettre aux salariés en activité partielle de bénéficier d'une modulation de leurs échéances pour le remboursement de leurs emprunts immobiliers. Cette situation n'est en effet pas prévue par les contrats d'assurance et peut plonger des familles entières dans de grandes difficultés. Je crois que c'est une bonne idée.
Aujourd'hui, la crise fragilise un certain nombre de salariés précaires, en particulier les jeunes, qui sont les plus exposés sur le marché du travail. C'est ainsi qu'au cours du dernier trimestre, l'essentiel des destructions d'emplois ont eu lieu dans l'intérim (près de 77 000 au dernier trimestre 2008). La nouvelle convention d'assurance chômage que vous avez négociée prévoit une ouverture de droits à indemnisation dès quatre mois de cotisations. C'est un progrès pour les salariés par rapport à la situation antérieure (six mois). Mais je crois qu'en ces circonstances difficiles nous pouvons faire plus. Je vous propose, qu'à titre exceptionnel, soit attribuée une prime à tous les salariés pouvant justifier entre deux et quatre mois de travail. Cette prime pourrait être de 400 ou 500 euros. Son financement relèverait de la solidarité nationale et serait assuré par l'Etat.
S'agissant des jeunes, qui seront évidemment les premiers concernés par la prime que je viens d'évoquer, je crois que nous devons mobiliser tous nos efforts car ils sont particulièrement touchés par la crise. Je pense en particulier à des efforts ciblés de formation pour ceux qui sont sans qualification. Je pense au développement des formules en alternance, qui associent emploi et formation, et ont fait la preuve de leur efficacité (par exemple, le contrat de professionnalisation). Il est également nécessaire que le service public de l'emploi renforce son suivi des jeunes et leur propose une offre de services spécifique. Enfin, pourquoi ne pas imaginer demander aux entreprises, qui bénéficient des crédits du plan de relance, de recruter et de former des jeunes ?
J'aimerais que Laurent WAUQUIEZ et Martin HIRSCH mènent ces chantiers ensemble et que Martin HIRSCH ouvre rapidement la concertation que je lui ai demandé de lancer sur la jeunesse.
Je sais aussi que plusieurs d'entre vous souhaitent un meilleur contrôle des aides publiques aux entreprises et des contreparties qui leur sont associées. Nous en avons parlé ensemble lors de la réunion que nous avions tenue sur les restructurations le 13 janvier dernier.
Une piste possible serait que, lorsqu'une aide directe est attribuée, qu'il s'agisse d'une aide de l'Etat, de l'Union européenne ou d'une collectivité locale, elle fasse immédiatement l'objet d'une information-consultation du comité d'entreprise. Ce dernier pourrait ainsi émettre un avis sur cette aide ainsi que les éventuelles conditions qui y sont associées et en assurer le suivi.
Toujours en matière d'emploi, j'ai compris que certaines organisations syndicales souhaitaient être mieux associées en amont aux opérations de restructuration et plus largement, à la stratégie économique des entreprises. J'ai également compris que la partie patronale aimerait, quant à elle, offrir aux entreprises plus de sécurité juridique sur ces questions. Je souhaiterais donc que vous m'indiquiez si vous envisagez d'ouvrir entre vous des discussions préalables pour voir si vous êtes prêts à négocier sur ces thèmes.
Enfin, vous avez proposé la création d'un fonds d'investissement social, qui pourrait permettre de coordonner les efforts en matière d'emploi et de consolider différentes sources de financements, qu'elles viennent de l'Etat ou des partenaires sociaux. Ce fonds pourrait atteindre entre 2,5 et 3 Mdseuros. L'Etat pourrait en prendre à sa charge la moitié. Outre les financements déjà disponibles (plan de relance, fonds d'expérimentation en faveur de la jeunesse, fonds social européen, soit un total de 730 Meuros), l'Etat pourrait abonder les crédits Emploi du plan de relance jusqu'à 800 Meuros supplémentaires, soit une participation au fonds d'un peu plus d'1,5 Mdseuros. Je crois que vos organisations souhaitent également que ce fonds puisse être piloté par une cellule de veille, associant les différentes parties. Le principe de ce fonds me paraît bon et je serais heureux d'entendre la manière dont vous l'envisagez. Bien entendu, je souhaite vous préciser d'emblée que chacun conservera la responsabilité des fonds qu'il apporte.
Deuxième objectif de notre réunion : la justice.
C'est tout d'abord à mes yeux les questions du partage de la valeur ajoutée et du profit. Vous le savez, je suis profondément attaché à ces questions car je crois en un capitalisme plus juste, qui bénéficie à tous.
C'est pourquoi j'ai été très attentif au vote de la loi en faveur des revenus du travail, le 3 décembre dernier. Ce texte a permis :
- d'encourager puissamment l'intéressement, par un crédit d'impôt de 20% sur le surcroît des sommes distribuées (qui par ailleurs ne sont pas assujetties à cotisations sociales patronales) £
- d'inciter les entreprises à négocier ou renégocier rapidement leur accord d'intéressement par la possibilité qui leur est donnée de verser une prime à leurs salariés au premier semestre 2009 bénéficiant des mêmes avantages. Je demande aux entreprises d'utiliser très largement cette disposition, dont un bilan devra être établi avant la fin du premier semestre pour savoir si d'autres dispositions, plus contraignantes, sont nécessaires £
- de conditionner le bénéfice des allègements généraux de charges sociales ("allègements FILLON") à, d'une part, l'ouverture de négociations salariales annuelles dans les entreprises, et, d'autre part, des minima de branche au moins au niveau du SMIC.
Mais je pense qu'il est possible d'aller encore plus loin en raisonnant de manière large sur les parts respectives qui vont aux salariés, aux actionnaires et à l'entreprise elle-même au travers de l'investissement. C'est pourquoi je vous propose deux pistes.
Premièrement, j'aimerais confier à une personne dont les travaux sur le sujet sont reconnus - je pense à Jean-Philippe COTIS - le soin d'animer une mission d'analyse et de concertation, qui vous associerait, sur le partage de la valeur ajoutée dans notre pays et son évolution, tant pour le secteur privé que pour les entreprises publiques.
Deuxièmement, je crois que le temps est venu d'amener les entreprises à aborder la question du partage du profit avec leurs salariés. Cette année, les dividendes des entreprises du CAC 40 devraient être légèrement supérieurs à 54 Mdseuros. Bien sûr, il ne s'agit que de quarante grandes entreprises. Bien sûr, les profits à la source de ces dividendes n'ont pas tous été réalisés en France, loin de là. Bien sûr, quand on est une entreprise mondiale, il faut aussi penser aux salariés qui sont hors de France et il ne faut pas négliger d'investir pour préparer l'avenir. Mais je comprends que ces chiffres choquent nos concitoyens dans la période actuelle.
Je vous demande donc d'engager entre vous, patronat et syndicats, des discussions sur les thèmes du partage de la valeur - sur la base de l'analyse que Jean-Philippe COTIS me remettra sous deux mois - et du partage du profit.
Toujours avec à l'esprit cet objectif de justice, je voudrais vous proposer une mesure d'exemplarité s'agissant des rémunérations des dirigeants. Cela me paraît particulièrement nécessaire dans la période actuelle. Il n'est pas normal qu'en bas de l'échelle, on souffre, et qu'en haut, alors qu'on a des responsabilités éminentes, rien ne change.
J'ai déjà demandé aux dirigeants des banques qui bénéficient d'aides publiques pour faire face à la crise, qu'ils renoncent à leur rémunération variable, c'est-à-dire leur bonus. Je souhaite que les mandataires sociaux des entreprises fassent de même lorsque leurs entreprises recourent massivement à du chômage partiel ou décident un licenciement économique d'ampleur.
Troisième objectif de notre réunion : la protection des plus modestes au sein de la classe moyenne.
Ces dernières sont en effet souvent touchées par la crise et également trop souvent au-dessus des seuils qui leur permettraient de bénéficier des prestations sociales destinées aux plus démunis.
J'ai évoqué, le 5 février dernier, plusieurs pistes concernant les dispositions que nous pourrions prendre. A mon avis, je crois que nous devons toutes les mobiliser mais j'attends vos réactions sur ce point.
La première piste consiste en la suppression d'une partie de l'impôt sur le revenu pour les personnes assujetties à la première tranche d'imposition, c'est-à-dire, celle à 5,5% (revenus fiscaux compris entre 5 850 et 11 670 euros).
La matière fiscale, vous le savez, concerne au premier chef le Parlement. Avant que la proposition du gouvernement ne lui soit soumise, je souhaite connaître votre avis sur trois points :
- limite-t-on la mesure à un seul tiers provisionnel, celui payable au 15 mai, ou aux deux tiers provisionnels restant à payer en 2009. A titre indicatif, le gain moyen par ménage est de 100 euros pour chacun de ces tiers £
- quels sont les ménages bénéficiaires : soit les seuls 2 millions de ménages qui payent effectivement un impôt dans la première tranche £ soit également ceux qui sont théoriquement dans la première tranche mais qui, en raison d'une réduction ou d'un crédit d'impôt, ne payent pas d'impôt. Cela représenterait alors un total de plus de 4 millions de bénéficiaires. Pour vous donner un ordre de grandeur, la suppression des deux derniers tiers de l'année 2009 pour la première catégorie (les personnes payant effectivement un impôt) représenterait un coût pour les finances de l'Etat de 400 Meuros et pour les 4 millions de foyers dont je parlais à l'instant, 800 Meuros £
- ne faut-il pas éviter les effets de seuil pour les ménages dont les revenus dépassent légèrement les limites de la première tranche d'imposition? Un mécanisme de crédit d'impôt permettrait de le faire en réduisant l'impôt de 2 millions de ménages supplémentaires pour un coût de 300 millions d'euros.
La seconde piste concerne les familles. Je ne suis pas favorable à une mesure qui concernerait les allocations familiales car ce serait une mesure générale, qui bénéficierait aussi aux plus hauts revenus. Je vois en revanche deux options possibles.
La première consisterait à verser une prime aux 900 000 familles nombreuses, c'est-à-dire de trois enfants et plus, qui bénéficient du complément familial. Ce complément, qui est aujourd'hui de 161 euros par mois, pourrait être doublé dès le mois de juin prochain, pour un coût total de 140 Meuros.
La deuxième option, qui a ma préférence, consiste en un ciblage plus large, celui des 3 millions de familles qui ont des enfants scolarisés et qui bénéficient aujourd'hui de l'allocation de rentrée scolaire. Une prime de 150 euros par famille pourrait être envisagée pour un coût total de 450 Meuros.
La troisième mesure que j'avais évoquée le 5 février, et qui, je crois, a intéressé plusieurs de vos organisations, consisterait en la possibilité de bons d'achat de services à la personne (aide à domicile, garde d'enfant, soutien scolaire, ménage). Là encore, plusieurs catégories de bénéficiaires sont envisageables :
- les 660 000 ménages bénéficiant de l'allocation personnalisée d'autonomie à domicile, et qui ont besoin d'aide à la maison £
- les 470 000 familles bénéficiaires du complément mode de garde gagnant moins de 43 000 euros par an, qui ont besoin d'aide pour faire garder leur enfant £
- les 140 000 foyers qui ont un enfant handicapé £
- je pense enfin aux demandeurs d'emploi qui retrouvent du travail et ont besoin de solutions temporaires pour faire garder leurs enfants. Une enveloppe de ces bons d'achats pourrait être confiée à Pôle Emploi à leur intention.
Selon les solutions que nous retiendrons, le coût de ces mesures sera compris entre 850 Meuros et 1,850 Mdseuros. Si l'on ajoute la contribution supplémentaire de l'Etat au fonds d'investissement social (800 Meuros), le total de mes propositions s'élève pour l'Etat à une somme qui pourrait être comprise entre 1,650 Mdseuros et 2,650 Mdseuros.
Le quatrième et dernier objectif de notre réunion est de placer l'année 2009 sous le signe du dialogue social.
Tout d'abord je souhaite que soit créé avec les partenaires sociaux un comité d'évaluation et de suivi de la crise et des politiques économiques et sociales qui sont mises en oeuvre pour lutter contre celle-ci. J'en présiderai la première réunion. Ensuite, je souhaite m'entretenir avec vous, à une date que je vous proposerai prochainement, des mesures que la France et ses partenaires proposeront au G20 de Londres le 2 avril prochain.
Par ailleurs, la cellule de veille du fonds d'investissement social permettra également d'associer étroitement toutes les parties prenantes aux politiques de l'emploi.
Enfin, je veux que nous évoquions l'agenda social 2009. Cet agenda, j'en ai conscience, est moins en prise avec l'actualité et revêt donc moins un caractère d'urgence. Nous pouvons je crois cependant utilement en dire quelques mots, afin que les travaux puissent être lancés. Brice HORTEFEUX a évoqué avec vous trois séries de thèmes :
- d'abord ceux relatifs aux négociations déjà en cours ou qui doivent se tenir d'ici mi-2009. Je pense aux négociations sur les retraites complémentaires AGIRC/ARRCO £ au dialogue social dans les très petites entreprises (prolongement de votre position commune sur la représentativité) et à la médecine du travail £
- ensuite, de nouveaux thèmes de négociation qui pourraient être envisagés : par exemple, la gouvernance d'entreprise, qui pose la question de la place des représentants des salariés dans la prise de décision, mais aussi la modernisation des institutions représentatives du personnel £
- enfin, des thèmes qui pourraient donner lieu à concertation (et non négociation) avant un projet de loi ou une décision des pouvoirs publics : il s'agirait de l'égalité de rémunérations entre les hommes et les femmes et de la modernisation des élections prud'homales (pour tirer les enseignements du faible taux de participation aux élections de décembre dernier (25%)).
Le déroulement de la réunion.
Je vous propose donc que nous structurions notre réunion en deux séquences. Si vous en êtes d'accord, chacune sera l'occasion d'un tour de table.
Le premier bloc de thèmes que je souhaite aborder concerne les mesures que nous pourrions prendre pour continuer à promouvoir l'emploi et protéger les victimes de la crise. Le second bloc de thèmes porterait d'une part sur les mesures de justice qui pourraient être mises en oeuvre et, d'autre part, sur le programme d'agenda social pour le reste de l'année.
Sur la base de nos échanges, j'aimerais, à la fin de notre réunion, être en mesure d'annoncer un certain nombre d'actions concrètes pour nos concitoyens. Bien entendu, d'autres sujets demanderont un supplément d'instruction et nous poursuivrons nos travaux dans les semaines qui viennent. J'ajoute que sur les thèmes qui intéressent la fonction publique, ils seront évoqués dès la semaine prochaine à l'occasion de réunions bilatérales entre les ministres concernés, Eric WOERTH et André SANTINI, et les fédérations de fonctionnaires. Enfin, j'ajoute que je réunirai demain les parlementaires ainsi que les présidents des exécutifs régionaux et départementaux d'Outre-Mer pour faire avec eux un point sur la situation de ces territoires dans le contexte de la crise économique et aborder les perspectives de rénovation des politiques publiques en Outre-Mer.
Si cela vous convient, je vous laisse maintenant réagir sur le premier bloc de mesures.