7 juin 2007 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, notamment sur la lutte contre le réchauffement climatique, les relations avec la Russie, la question du Kosovo et sur le traité européen simplifié, à Heiligendamm le 7 juin 2007.

LE PRESIDENT - Mesdames, Messieurs, je vous demande de bien vouloir excuser mon retard, qui est dû à la longueur du dialogue que je viens d'avoir avec Monsieur Poutine. Vous préférez peut-être que je réponde directement à vos questions ?
QUESTION - Monsieur le Président, quelles sont les précisions que vous pourriez nous apporter concernant l'avancée et l'accord qui est intervenu sur le climat ?
LE PRESIDENT - Les avancées sur le climat sont assez significatives puisque nous sommes partis d'un point de départ où le Président Bush disait : «il n'y a pas de problèmes, il n'y a pas de conséquences sur les émissions de carbone et de gaz à effet de serre, l'homme n'a pas de responsabilités. » Premier geste, le Président Bush a dit : « il y a un problème ». Deuxième geste, c'est la responsabilité de l'homme, troisième geste, il faut agir. C'était la situation hier. Hier soir, un autre élément s'est débloqué : le Président Bush a accepté l'idée que la solution de ce problème de dégradation du climat passait par l'ONU, donc par Bali. Ceci ne faisait pas obstacle, de notre point de vue, à une réunion des pays du G8 et des pays émergents pour faire avancer les choses mais la reconnaissance de l'ONU et du rôle de l'ONU était pour nous une ligne rouge car la solution à la dégradation du climat passe par la réduction de la production du gaz à effet de serre mais, en même temps, par l'encouragement des pays, notamment pauvres, qui ont une forêt à la reforestation sachant qu'un arbre, dans sa vie, consomme une tonne de carbone. De ce point de vue, la République du Congo, par exemple, n'est pas émettrice de gaz à effet de serre, compte tenu de sa pauvreté et de son économie, mais, en même temps, c'est la deuxième forêt du monde, et il est du plus grand intérêt qu'elle soit entretenue, développée et préservée. Pendant que l'on réduit les gaz à effet de serre, il faut augmenter la place de la forêt pour consommer du carbone. Ce point -qui était un point très difficile- de la légitimité de l'ONU à agir pour défendre le climat et les équilibres de la planète est un point résolu. Enfin, dernière avancée, en fin de matinée et en début d'après-midi, je tenais beaucoup à ce qu'un chiffre paraisse dans le communiqué final. C'est le fameux chiffre sur la réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2050. C'était l'une des lignes rouges du Président Bush et vous verrez que le communiqué dit que les pays du G8 prennent en compte sérieusement l'objectif des 50 % de réduction. Il faut dire les choses comme elles sont : j'aurais préféré que ce soit un objectif impératif, il y a encore un petit peu de chemin à faire. Mais regardez d'où nous partons, et le terme sérieusement, celui-là, a été arraché en début d'après-midi. Donc, malgré tout, je crois pouvoir dire qu'il y a eu des avancées significatives. J'en avais fait une des priorités de ce G8, on ne peut pas attendre, il faut agir. Ce serait une faute morale impardonnable de ne pas le faire. C'est une priorité de la diplomatie française et, de ce point de vue, ce G8 a conduit à des avancées très significatives sur la question du climat et de la préservation de l'avenir de la planète. Alors, est-ce suffisant ? Je vous laisse le soin d'en débattre à l'infini. Pour moi, ce qui est important, c'est qu'il y ait eu une trajectoire et que l'on progresse sur cette trajectoire. On a progressé et cet objectif des 50 % en 2050 est dans le communiqué. Combien d'entre vous, qui êtes des spécialistes, pensaient que ce serait dans le communiqué ?
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez appelé à une conférence internationale sur le Darfour à Paris. Vous êtes pour une solution politique, pour les couloirs humanitaires, mais est-ce que vous partagez l'avis des Américains d'imposer des sanctions sur le Soudan ?
LE PRESIDENT - Je pense qu'avec les Etats-Unis d'Amérique, nous avons une position qui est très proche. Je voudrais dire que je me sens proche de tous les pays qui, à travers le monde, considèrent que l'on ne peut pas laisser mourir des gens aux confins du Soudan, du Tchad et de la Centrafrique. Ce n'est pas parce qu'ils sont pauvres et abandonnés, qu'il faut, en plus, les laisser mourir et se faire tuer par des guérillas, par des bandes, par des rebelles dans des conflits où ils ne sont pour rien. Et donc, puisque les Etats-Unis sont favorables à l'action, la France est, de son côté, elle aussi, favorable à l'action. On ne peut rester sans rien dire. Il y a eu quelque chose comme 250 000 morts. Est-ce un génocide ou non ? Je ne pense pas que ce soit un génocide, mais c'est une catastrophe, en tout cas, humanitaire. Alors quelle est la solution que nous proposons ? Nous nous sommes mis d'accord sur une solution. D'abord, il faut, le plus rapidement possible, la force hydride, c'est-à-dire une force militaire d'interposition dans cette partie du monde, composée de soldats de l'Union Africaine et de soldats et de cadres de l'ONU pour éviter que les gens se fassent tuer. Deuxièmement, il faut un règlement politique et il faut que toutes les parties au conflit acceptent de discuter et, de ce point de vue, c'est dans la suite de la conférence de Tripoli. Troisièmement, j'ai demandé à M. Kouchner de faire une tournée dans la région pour qu'il nous fasse le point de la situation pour voir comment renforcer l'aide humanitaire. Nous sommes, vous le savez, pour ne rien simplifier, dans la saison des pluies. Il y a quelque deux cents camps au Soudan et au Tchad, sur un territoire grand comme la France. La notion de corridor humanitaire est une belle idée mais il faut trouver les moyens de la réaliser. Quatrièmement, le 25 juin, se tiendra à Paris une conférence des ministres des Affaires Etrangères du groupe de contact élargi à un certain nombre de pays, dont la Chine dont l'influence sur le Soudan est très positive et l'Egypte. Je recevrai les ministres. Dernier point, si tel ou tel gouvernement que je ne citerai pas, devait s'opposer soit à l'intervention humanitaire, soit à un règlement politique, il va de soi que la communauté internationale serait fondée à proposer des sanctions à l'endroit de ce gouvernement. Cela a fait l'objet de l'unanimité du G8
QUESTION - Comment s'est déroulé votre entretien avec Vladimir Poutine ?
LE PRESIDENT - C'était franc, puisque nous avons évoqué tous les sujets : la Tchétchénie, la journaliste, les droits de l'homme, les droits des homosexuels. Nous l'avons fait calmement, sereinement. Je l'ai fait sans aucune agressivité et nous avons échangé. J'ai trouvé un homme ouvert au dialogue, acceptant la discussion sur ces problèmes complexes. Moi-même, j'ai essayé de comprendre la problématique des Russes qui ont depuis vingt ans, c'est incontestable, eu à affronter bien des crises et bien des difficultés. J'ai dit au Président POUTINE que l'Europe ne voulait pas isoler la Russie. D'ailleurs, comment isoler un pays grand comme un continent ? Je lui ai dit aussi que la France voulait avoir un véritable partenariat de confiance et d'amitié avec la Russie, que la France rassemblait les énergies et, en aucun cas, ne cherchait à diviser. Je crois pouvoir dire que cela s'est bien passé puisque cela a duré beaucoup plus longtemps que prévu. J'ai trouvé un homme très au fait de ses dossiers, très calme, très intelligent et c'était très intéressant d'évoquer tout ceci. Il m'a expliqué en détail la proposition qu'il avait faite au Président BUSH quelques dizaines de minutes auparavant s'agissant de l'affaire du radar et des missiles. Je lui ai proposé que des experts militaires français et russes se réunissent pour voir ce qu'il en était. Je dois vous dire que j'ai eu beaucoup de plaisir et d'intérêt à parler avec le Président POUTINE.
Question - Vous avez parlé avec le Président POUTINE des sujets qui fâchent. Vous avez parlé des assassinats de journalistes, est-ce que vous pouvez rentrer dans le détail et nous expliquer ce qui s'est dit ?
LE PRESIDENT - Ecoutez, j'ai évoqué ces questions sans la volonté de donner des leçons, et ce n'est pas à moi de faire ou de dire les réponses du Président POUTINE, ni d'expliquer les difficultés qui étaient les siennes, ni ce qu'il m'a dit sur le sujet. J'ai dit au Président POUTINE que le monde avait besoin de la Russie pour assurer sa stabilité et que c'est très important. Vous savez que l'influence de la Russie sur un dossier aussi complexe par exemple que celui de l'Iran, est quelque chose qui compte. Nous avons parlé longtemps du Kosovo et j'ai fait une proposition que je peux vous détailler. J'ai également indiqué que, nous aussi, les démocraties plus anciennes, nous pouvions avoir aussi des leçons à recevoir sur la question des droits de l'homme, que j'acceptai parfaitement d'en parler moi-même et que mon idée n'était pas de blesser le sentiment national russe. Mon idée était de comprendre et d'attirer l'attention. Et c'est d'une façon très apaisée que nous l'avons fait. Sur le Kosovo, j'ai fait la proposition suivante : d'abord, je crois que cela serait une situation très difficile que de présenter une motion, une délibération au conseil de sécurité et de s'opposer au veto russe. En effet, à partir de ce moment-là, j'attire votre attention sur le fait que nous retrouverons dans la situation d'avoir des centaines d'hommes sur le terrain sans savoir quel serait leur statut juridique. C'est-à-dire avec certains pays qui reconnaîtraient l'indépendance du Kosovo et d'autres qui la contesteraient. Je pense qu'il faut éviter d'aller au conflit tout de suite. Et la proposition que j'ai faite, c'est que le Président POUTINE reconnaisse -les mots ont un sens- la perspective inéluctable de l'indépendance du Kovoso. Pendant six mois, on assurerait la pérennisation des effets juridiques de la résolution 1244 pour donner un mandat aux soldats qui sont sur le terrain £ on pousserait Belgrade et Pristina à discuter et à dialoguer ensemble. Et, au bout de six mois, soit Belgrade et Pristina ont trouvé un meilleur statut, et, dans ce cas-là, c'est celui-là qui s'applique, soit ils ne l'ont pas trouvé et, dans ce cas-là, c'est la solution AHTISAARI qui s'appliquerait. Ceci aurait l'avantage de permettre à Monsieur Poutine d'avoir un peu de temps et d'obliger les Serbes et les Kosovars à discuter. Sans statut juridique, les violences risquent de reprendre et je ne vois pas bien ce que l'on aurait à y gagner. Alors, il y a eu une discussion avec le Président BUSH, Tony BLAIR, le Président POUTINE. Si c'était simple, cela se saurait. Il n'est pas absurde qu'on discute, qu'on réfléchisse, et que cela pose des problèmes à chacun. Mais il me semble que ceci pourrait être une voie médiane dont je ne dis pas qu'elle est parfaite pour, en tout cas, éviter le drame que serait une division. J'ajoute que je ne verrai que des avantages à permettre à Monsieur POUTINE qui craint, par-dessus tout, l'élargissement à d'autres situations, de lui donner un peu de temps. Je crois que ce serait bon pour l'équilibre de la région.
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez rencontré aujourd'hui le Premier Ministre Tony BLAIR. Vous lui avez parlé de l'avenir du Traité institutionnel et, au sortir de cette réunion, vous avez déclaré que vous vous êtes mis d'accord sur ce que pourrait être le cadre de ce Traité. Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails sur cet accord ? Et est-ce que Monsieur BLAIR, Monsieur BROWN ont exactement la même vue sur ce sujet ?
LE PRESIDENT - D'abord, avec Tony BLAIR, nous avions prévu de nous voir pour parler du Traité simplifié et nous nous sommes mis d'accord pour dire que ce que nous voulions : c'est un nouveau Traité et pas une petite Constitution. Là aussi, les mots ont un sens. Je parle devant des spécialistes, vous comprendrez la différence.
Nos conseillers en charge des Affaires européennes travaillent ensemble pour se mettre d'accord sur le détail mais je ne suis pas sûr que le cadre du G8 soit le mieux adapté pour parler de cela et ce, alors même que j'aurai d'autres rendez-vous dès la semaine prochaine puisque je me rends en Pologne. Je pourrai peut-être faire d'autres déplacements. Il y en aura un qui répondra à la question que vous venez de me poser. S'agissant de Gordon BROWN, c'est un homme que je connais bien puisque j'ai été Ministre des Finances en même temps qu'il l'était lui-même. C'est un homme que j'apprécie beaucoup, et j'aurai l'occasion, dans les jours qui viennent, de montrer que la position que je discute avec la Grande-Bretagne est une position commune, naturellement, aux deux hommes.
QUESTION - Je voudrais revenir un instant sur ce que vous avait répondu le Président POUTINE à votre proposition sur le Kosovo.
LE PRESIDENT - Ce n'est pas une proposition que j'ai faite au Président POUTINE, c'est une proposition que j'ai faite à la Présidente du G8, en présence du Président POUTINE et du Président BUSH et de tous les participants. Nous avons convenu que ce soir, les sherpas et les directeurs politiques se réuniraient, parce que finalement ils n'ont pas passé une si petite nuit que cela la nuit dernière ! Ils ont encore un peu de marge pour cette nuit, pour voir comment, éventuellement, on pourrait mettre cela en forme. Si vous regardez la mine de Monsieur LEVITTE, il est même assez déçu qu'on ne lui en demande pas plus, il pourrait faire beaucoup mieux encore !
QUESTION - Ma question porte sur l'engagement du G8 2005 à l'accès universel au traitement contre le SIDA d'ici 2010. Comme vous le savez, depuis 2005 l'engagement n'a pas encore été traduit financièrement par les pays membres du G8, et d'ailleurs l'ONUSIDA a noté un doublement, paradoxalement, du manque de financement de la lutte contre le SIDA. Mardi matin, vous vous engagiez à proposer à vos collègues du G8 de lancer des négociations pour se mettre d'accord sur qui va payer et combien de la charge financière que représente cette promesse. Quand pensez-vous avoir l'occasion de soulever ce point et quel est votre pronostic ?
LE PRESIDENT - C'est demain matin que l'on va évoquer cette question importante. C'est tout le problème des rencontres avec la presse au fur et à mesure, parce que vous savez, j'ai l'impression que, depuis hier, la montre a tourné très vite. Nous n'avons pas une minute entre deux sujets, entre deux réunions et on est d'ailleurs en permanence en réunion. Nous sommes même sans aucun collaborateur pendant les déjeuners. Nous avons ainsi une discussion très franche, très libre, très rapide, très attentive, et je vous assure que nous n'avons pas perdu de temps.
Ce soir, on a le cycle de DOHA et l'OMC, vous imaginez la problématique. Demain, nous nous réunissons avec un certain nombre de chefs d'Etat africains, et c'est demain que se posera la question. Je l'ai dit, je me suis engagé sur l'accès universel au traitement du SIDA en 2010. Je me suis engagé pour que l'on fasse plus pour la santé des Africains. Et, à la question qui m'était posée l'autre jour d'une contribution, si vous vous en souvenez, proportionnelle à la richesse, je vous rappelle que la France finance 10% du total des dépenses sur le programme SIDA, paludisme, tuberculose, etc. Donc, il n'est pas question de dire cela pour dire : « cela suffit ». Au contraire, nous sommes prêts à faire davantage, mais voilà les données des problèmes que nous évoquerons demain.
QUESTION - Puis-je vous poser une question sur le bouclier anti-missiles ? Vous avez parlé de discussions entre les militaires français et les militaires russes, mais est-ce que vous pensez que ce sujet pourrait être traité dans un cadre multilatéral qui ne soit pas seulement G8 ? Si oui, est-ce que c'est dans le cadre de l'Union européenne ou est-ce que cela pourrait être dans le cadre de l'OTAN ou du Conseil OTAN-RUSSIE. Est-ce que vous envisagez ce type de discussions ?
LE PRESIDENT - Il y a débat là-dessus. D'abord, il y a un cadre qui est le cadre OTAN-RUSSIE, puisqu'on est quand même dans le cadre de décisions qui ont été prises par les Etats-Unis avec la Pologne et la Tchéquie, dans le cadre de l'OTAN. Le cadre naturel est donc le cadre OTAN-RUSSIE.
Mais si je veux être totalement honnête intellectuellement, la facilité pour moi serait de dire que c'est une affaire bilatérale. Dans un premier temps, c'est une affaire entre les Etats-Unis et les Russes, mais ce n'est pas satisfaisant. Dans un deuxième temps, je pourrais même dire, c'est une affaire OTAN-RUSSIE. C'est d'ailleurs ce que nous conseille la diplomatie. Mais si j'ai le droit de m'octroyer une part de liberté, une toute petite, c'est aussi un problème européen. Parce que, quand même, deux pays européens ont pris une décision et c'était leur droit. Il faut aussi comprendre leur histoire et les souvenirs de l'histoire. Mais ce n'est jamais satisfaisant quand l'Europe n'est pas unie. A partir du moment où le Président POUTINE m'a donné, en détail, les éléments de sa proposition par l'intermédiaire de l'AZERBAÏDJAN et de la station radar qui s'y trouve et si la France veut jouer un rôle pour rassembler les énergies, pour apaiser les tensions, pour être un pont, pour être un facteur d'unité de paix, et pour éviter qu'il y ait des malentendus, pour éviter de revenir à une période dont nous ne voulons plus -la période de la guerre froide- je ne vois vraiment pas pourquoi je n'aurais pas saisi cette occasion pour proposer de comprendre la proposition de Monsieur POUTINE.
Je ne suis pas un spécialiste des affaires d'armement, et donc voilà, Monsieur VERNET, je crois que j'ai été très franc et je me suis autorisé une liberté. J'espère donc que la diplomatie française ne m'en voudra pas. Mais je pense que l'on a toujours intérêt à être franc, je pense que l'on a toujours intérêt à être direct. Je n'ai voulu donner de leçons à personne, je n'ai voulu être arrogant avec personne. J'ai essayé de comprendre, mais je veux que dans cet effort de compréhension, les autres comprennent aussi pour nous.
Je pense que ce n'est pas parce que c'est de l'international, ce n'est pas parce que c'est de la diplomatie que cela doit être abscons pour l'ensemble des gens qui écoutent, qui regardent et qui se demandent ce que l'on fait, de quoi on parle, ce qui se passe. Peut-être qu'en se parlant franchement, on peut trouver des solutions plus rapidement qu'en faisant tellement de contours, en utilisant tellement de codes qu'à la fin on se quitte, chacun étant sûr d'avoir écouté ou entendu quelque chose de différent. Je ne dis pas que j'ai raison, mais, en tous cas, mes propos sont sans ambiguïté. Encore une fois, je peux comprendre la position de la Pologne, de la Tchéquie, des Russes et des Etats-Unis. Je vois des malentendus mais essayons d'avancer. La communauté internationale n'a pas fait tout ce chemin pour en venir à la guerre froide. On ne va pas regarder cela simplement, et accepter la guerre froide, cela n'a pas de sens.
Pour vous dire les choses, je ne pense pas que le Président POUTINE, au fond de lui-même, la souhaite. Mon analyse est que tout cela est plus un problème politique qu'un problème militaire. Alors, ne laissons pas dériver les choses et trouvons des solutions politiques.
QUESTION - Je voudrais parler de votre prochaine visite à Varsovie avec le Président KACZYNSKI ?
LE PRESIDENT - KACZYNSKI, SARKOZY, cela rime mais ils sont deux ! Je viendrai sans mon frère, mais je viendrai quand même !
Mon idée est très simple. D'abord, j'ai toujours pensé que la Pologne était un grand pays d'Europe et ceux qui me suivent, savent parfaitement que j'ai toujours pensé cela. Quand j'ai créé le G5 des Ministres de l'Intérieur, je n'ai eu de cesse de le transformer en G6 pour y intégrer la Pologne parce que la Pologne a plus de 40 millions d'habitants. C'est un pays qui compte en Europe. C'est un grand pays d'Europe, c'est un pays dont la population est égale ou équivalente à celle de l'Espagne. Je veux aller voir nos amis polonais pour leur dire qu'ils ont toute leur place dans l'Europe, mais je veux aussi leur dire que, nous tous, nous devons apprendre la culture du compromis.
Vous savez que je tiens beaucoup au Traité simplifié. Pas pour des raisons de satisfaction personnelle mais parce que c'est la seule façon de sortir l'Europe de l'immobilisme et du blocage institutionnel.
En quinze jours, je crois que j'ai vu l'Italie, le Portugal, l'Espagne, la Belgique, le Parlement européen, la Commission, l'Allemagne, avec la Chancelière. J'aurai bientôt vu la Pologne. J'essaie de rassembler les énergies pour que la Présidence allemande puisse, les 21 et 22 juin, faire la meilleure proposition possible.
J'ai eu au téléphone M. BALKENENDE, le Premier Ministre néérlandais, M. Jean-Claude JUNCKER, le Premier Ministre luxembourgeois. J'aurai vu beaucoup de monde pour que l'on arrive à rassembler. Cela progresse mais on n'est pas arrivés. Les Polonais ont un rôle à jouer mais l'Europe, c'est aussi l'apprentissage du compromis. Si chacun d'entre nous veut avoir raison de son côté, on ne peut pas débloquer la situation. Chacun doit faire des efforts. L'Espagne qui a voté oui a plus de 70% au référendum accepte le principe d'un Traité simplifié. La France a voté non, elle accepte le principe d'une avancée institutionnelle. Si on n'arrive à la table du Conseil européen en disant : « j'ai raison », on n'avance pas. Et surtout et je l'ai vu en recevant à déjeuner M. SOCRATES, Premier Ministre portugais et prochain Président de l'Union, c'est qu'il fallait agir vite. On aura une solution d'autant plus facilement que l'on agira vite et je veux m'inscrire en faux à l'endroit de tous ceux qui pensent que l'Europe a le temps et que le temps arrange les choses. Moi, je pense que le temps les complique.
Mesdames et Messieurs, merci beaucoup