11 février 2005 - Seul le prononcé fait foi
Déclarations de MM. Jacques Chirac, Président de la République, et Jose Luis Zapatero, Président du gouvernement du Royaume d'Espagne, en préambule au référendum sur la Constitution européenne, prévu en Espagne le 20 février, sur les apports de cette Constitution, à Barcelone le 11 février 2005.
LE PRESIDENT - Merci, Mesdames, Messieurs. Merci, cher Pasqual MARAGALL, Président de la Généralité de Catalogne. Merci à la Catalogne qui nous accompagne ce soir et merci à Barcelone, Monsieur le Maire, merci à Barcelone, capitale des arts et de la culture où s'expriment, sans aucun doute, l'âme, la fierté, la générosité de tout un peuple.
Barcelone, capitale de la jeunesse. Capitale ouverte sur le monde. Ville où se développe l'exceptionnel dynamisme de l'Espagne. Ville dont les charmes sont unanimement reconnus. Barcelone, symbole de cette Europe confiante dans son avenir et où se mêlent à la fois tradition et modernité. Je suis heureux d'adresser à Barcelone un salut à la fois cordial et fraternel.
Je tiens à remercier chaleureusement mon ami, le Président José-Luis ZAPATERO, pour son initiative, pour son invitation et peut-être, et surtout, pour son engagement au service d'une Espagne forte dans une Europe forte.
Je regrette, bien entendu, l'absence du Chancelier Gerhard SCHROEDER qui est pour nous un partenaire lucide et courageux de la construction européenne et qui est porteur avec nous des idéaux de paix, de démocratie sur notre continent. Il est malheureusement grippé et il paraît que c'est une grippe tout à fait européenne !
Et je veux regretter, moi aussi, l'absence de Silvio BERLUSCONI, le Président du Conseil des ministres de l'Italie. L'Italie, notre soer latine, pays fondateur de l'Union européenne. Je lui adresse naturellement nos voeux les plus sincères de rapide rétablissement.
Le 20 février, l'Espagne votera pour le premier référendum européen sur le Traité constitutionnel. L'Espagne va donc ouvrir la voie. Elle va montrer le chemin. Et je souhaite que le peuple espagnol nous montre ce chemin, de façon éclatante, en participant massivement à cette consultation pour donner l'exemple et pour montrer à quel point l'Espagne est un élément essentiel de la construction européenne de demain. Et bien entendu, en votant massivement " oui " car c'est une affaire européenne, profondément européenne. Cette constitution n'est pas un texte partisan. Elle appartient à chaque nation. Elle appartient à chaque Européen quelle que soit sa sensibilité politique. Elle a été élaborée et approuvée par une Convention dans laquelle étaient représentés des hommes et des femmes qui incarnaient l'ensemble des pays européens, toute allégeance politique confondue. Elle a été approuvée par les vingt-cinq chefs d'Etat et de gouvernement qu'ils soient de droite ou qu'ils soient de gauche. C'est une grande ambition commune.
En effet, depuis des siècles, et dans son message, Gerhard SCHROEDER l'évoquait, l'Europe, hélas, le continent européen a été marqué par les divisions, les guerres, les dictatures. Quand on imagine le sang versé, le nombre de douleurs issues de cette situation, les espoirs anéantis par ces conflits permanents, on voit à quel point ces comportements étaient, hélas, à la fois naturels et humains, mais dramatiques par leurs conséquences et toujours parfaitement injustifiés au plan de la morale, de l'intérêt général ou du respect de l'homme.
Le grand mérite des pères fondateurs de l'Europe a été de vouloir enraciner la paix, la démocratie, les droits de l'Homme sur l'ensemble de nos continents, de façon à créer un système qui ne permette plus de revenir à ces erreurs du passé et aux drames qu'elles avaient engagés. Ils ont voulu enraciner la paix, la démocratie, les droits de l'Homme.
C'était une grande ambition. Cela reste notre ambition car rien n'est jamais gagné et nous avons fait des pas considérables dans cette direction. L'élaboration, ensemble, d'une Constitution qu'ensemble, nous allons voter, créera le cadre dont on ne pourra plus désormais sortir en s'évadant vers les drames du passé.
De même, cette grande ambition européenne a facilité, sans aucun doute, le développement économique et le progrès social, l'affirmation de notre modèle social européen, progrès économique dont, depuis vingt ans, l'Espagne porte un éclatant témoignage, d'autres aussi, bien entendu, et l'ensemble de l'Europe également.
Cette Constitution nous permet en effet de franchir une nouvelle étape qui est une étape politique, avec la confirmation des valeurs et des objectifs qui sont les nôtres. Bien entendu, dans le passé, on a pu avoir des hommes, des régions, des pays parfois, porteurs d'un certain nombre de valeurs, mais isolés. Aujourd'hui, c'est ensemble sur le continent que nous créons un système garantissant ces valeurs et cela, c'est capital pour nos enfants et pour ceux que nous laisserons après nous.
D'abord, des valeurs communes : le respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l'état de droit, des droits de l'Homme, et ceci pour bâtir une société respectueuse du pluralisme, de la tolérance, de la solidarité, de l'égalité entre les femmes et les hommes dont, je dois dire, l'Espagne nous donne aujourd'hui un bel exemple.
Ces valeurs sont au bénéfice d'objectifs partagés, d'objectifs communs : qu'il s'agisse d'améliorer la situation du travail et de l'emploi, qu'il s'agisse du progrès social et de conforter en permanence notre modèle social européen, qu'il s'agisse de la lutte contre l'exclusion et contre les discriminations ou du respect de plus en plus évidemment nécessaire de l'environnement ou de la diversité culturelle.
L'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans la Constitution est un pas considérable fait pour ancrer et respecter l'ensemble de ces objectifs et de ces valeurs, puisque, dorénavant, la Charte leur donne une valeur contraignante et pouvant, le cas échéant, permettre de déférer en justice.
Cette Constitution donnera également à l'Union des règles meilleures pour fonctionner de manière plus efficace. Bien entendu, lorsque nous étions ensemble, six, sans expérience, nous avions bâti un système qui a été efficace et qui nous a permis de progresser, mais ce système s'est usé finalement avec le temps et avec l'élargissement. Il fallait aujourd'hui le reconsidérer, l'adapter, donner à l'Europe les moyens de se gouverner de façon moderne et plus efficace. Cette Constitution a cet objectif.
D'abord, pour la première fois, la Constitution dira qui fait quoi. Il est vrai que souvent nos concitoyens s'interrogeaient sur ce point en se demandant qu'elle était la véritable responsabilité, où est-ce qu'elle se situait dans les régions, dans les Etats, à l'Europe, à Bruxelles ? Parfois, le disaient-ils d'ailleurs avec regret ou avec crispation. On dit cette fois-ci qui fait quoi. Et c'est ce qu'on appelle le principe de subsidiarité. Ceci sera vérifié par les parlements nationaux. Ce sont les parlements nationaux qui pourront dire si tel ou tel domaine constitutionnellement est de la responsabilité de la région, du pays ou de l'Europe. C'est essentiel et cela nous permettra de progresser avec beaucoup plus d'efficacité.
De la même façon, la Constitution permettra aux Européens d'être plus efficaces grâce à des institutions renforcées. Tout à l'heure, on l'a évoqué, c'est vrai, qu'il s'agisse de la Présidence, du Conseil européen, de la Commission, qu'il s'agisse du Parlement européen, qu'il s'agisse de la politique des affaires étrangères, ces institutions modernisées et renforcées permettront à l'Europe d'assumer mieux ces responsabilités.
Enfin, nous avons besoin de l'Europe pour agir plus efficacement dans beaucoup de domaines. Tout à l'heure, Gerhard SCHROEDER évoquait la lutte contre le terrorisme. Dieu sait que c'est un problème sensible pour des pays comme l'Espagne ou comme la France qui, certes, ont bien compris que, là encore, il faut s'unir si l'on veut être efficace. Les relations, de ce point de vue, entre l'Espagne et la France pour la lutte contre le terrorisme sont, je dois le dire, aussi bonnes qu'il est possible, pour ne pas dire exemplaires. Mais ce n'est pas suffisant.
C'est au niveau de l'Europe tout entière que doivent être élaborées les politiques et mis en oeuvre les moyens nécessaires pour lutter contre le terrorisme. Il en va de même pour d'autres sujets. Nous avons présent à l'esprit les drames qu'ont causé un certain nombre de voyous des mers, et qui ont eu des conséquences terribles sur nos côtes. La sécurité maritime est évidemment un sujet qui nous est particulièrement sensible. Là encore, nous avons besoin ensemble de mettre en commun notre expérience et notre volonté pour pouvoir aller de l'avant et faire respecter nos intérêts dans un domaine aussi sensible et qui touche à notre environnement.
Enfin, la Constitution renforcera nos moyens dans des domaines essentiels, comme la justice, la défense, la sécurité.
Pour la première fois, cette Constitution affirme en réalité une grande ambition sociale et donne sa justification et son cadre au modèle social européen ce qui a d'ailleurs été souligné très clairement par la Confédération européenne des syndicats. Elle renforce les droits des citoyens sur l'ensemble du territoire concerné, c'est-à-dire de nos vingt-cinq pays aujourd'hui, un peu plus demain, je l'espère, et elle garantit la paix, la démocratie.
Voilà, l'essentiel de ce que représente cette Constitution. Mais lorsqu'on l'intègre dans l'histoire de l'Europe, que j'évoquais tout à l'heure, on se rend compte de tout ce que cela peut représenter comme legs positifs pour ceux qui nous suivront sur le continent européen.
Et puis, elle permet aussi et surtout à l'Europe de peser davantage dans le monde multipolaire qui se développe et de mieux faire face ainsi aux défis de la mondialisation. On parle beaucoup de la mondialisation. Elle est inéluctable. Elle comporte des dangers comme elle comporte des avantages à condition, naturellement, qu'elle soit maîtrisée. Nous la maîtriserons si nous sommes unis, déterminés et si nous allons ensemble vers un objectif bien clair. Sinon, nous serons les victimes de la mondialisation, comme sont les victimes, hélas, de ce phénomène la plupart des pays en développement ou sous-développés.
De la même façon, chacun voit bien que le monde évolue vers une situation multipolaire. On voit l'importance croissante de l'Asie, notamment de la Chine, demain de l'Inde, celle après-demain de l'Amérique latine, sans aucun doute. On voit la puissance de l'Amérique du nord. Comment peut-on imaginer que demain nous ayons la possibilité de défendre nos intérêts, nos valeurs, si nous ne sommes pas également unis pour être forts et puissants ?
C'est cette Union européenne que facilite considérablement la Constitution qui nous permettra d'exister demain.
Alors, voilà, je terminerai en disant simplement, selon un vieux proverbe, que c'est l'union des Européens qui fera leur force et rien d'autre. Sans union, ils disparaîtront. Sans une organisation, ils ne résisteront pas. Cette Constitution leur donne cette organisation dans le respect de ce que sont nos ambitions sociales, économiques, environnementales, politiques.
Je ne doute pas que l'Espagne, qui est un partenaire essentiel de l'Europe, le 20 février, nous montrera la voie en disant : " oui ", mais un " oui " massif. Un " oui " qui ne chipote pas. Un " oui " qui rassemble et qui exprime une volonté unanime et qui donne l'exemple de l'Espagne à l'ensemble de l'Europe pour la suite de cette construction.
Je ne doute pas que l'Espagne montrera la voie en disant : " oui " au Traité constitutionnel en disant : " oui " à l'Europe.
Je vous remercie.
M. JOSE-LUIS RODRIGUEZ ZAPATERO - Merci beaucoup. J'aimerais tout d'abord exprimer une satisfaction double, intime et profonde, pour l'organisation de cet événement.
Ma première satisfaction et mes remerciements sincères s'adressent, pour sa présence ici, parmi nous, au Président de la République française, Jacques CHIRAC. C'est pour moi un grand honneur de le recevoir et de partager avec lui un événement tel que celui-ci, c'est-à-dire un événement pour la défense de l'Europe, pour la défense de son traité constitutionnel et pour la défense du "oui" au référendum du 20 février prochain. Et je crois que le Président Chirac représente dignement son pays, une nation qui est la patrie de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Un pays voisin et ami, un pays voisin et un allié pour le projet de construction européenne. Un pays décisif pour la naissance£ puis le développement et la construction de l'Union européenne.
Je crois qu'il y a très peu d'images aussi éloquentes de ce que représente l'Union européenne que cette relation franco-espagnole. Une entente entre les peuples £ le fait que nous ayons étendu la liberté, amélioré le dialogue, que nous exprimions le souhait de partager la reconnaissance de celui qui ne partage pas la même langue, la même histoire, et pourtant la volonté d'écrire l'histoire ensemble pour qu'elle soit plus forte, au bénéfice des générations à venir. Je crois que cet événement est un exemple de l'identité, de ce que nous appelons l'Union européenne. Cette union que nous voulons consolider encore aujourd'hui, grâce à sa Constitution.
Nous sommes ici, le Président de la République française et le Président du gouvernement espagnol, deux pays qui ont une longue histoire commune, avec des moments excellents ou plus difficiles. Mais aujourd'hui nous partageons quelque chose d'essentiel et c'est l'Europe. Nos deux peuples sont maintenant unis pour très longtemps, grâce au projet européen. Nous avons ici un leader politique, le Président de la République, Monsieur Jacques CHIRAC, de centre-droite, et un Président socialiste, qui défendent avec le même enthousiasme et la même force le "oui" à la Constitution européenne.
Je crois que c'est cela l'Europe, c'est l'unité, au-delà des peuples, des territoires et des clivages. Il est vrai que certains pourront se demander si Jacques CHIRAC est effectivement ou non un leader de centre-droite... Je le dis tout simplement lorsque l'on doit le comparer avec d'autres leaders politiques que nous connaissons bien. Quoi qu'il en soit, permettez-moi de profiter de cette cérémonie en faveur de la Constitution européenne pour reconnaître publiquement la position digne et courageuse de Jacques CHIRAC lorsqu'il s'est prononcé contre la guerre et en faveur de la paix au nom de toute l'Europe.
Mon second motif de satisfaction, c'est que cet événement se tient ici, en Catalogne, dans la ville de Barcelone. Jacques, nous sommes ici sur une terre, parmi un peuple, qui sont plus européens que quiconque au monde. Nous sommes sur une terre et face à un peuple qui a toujours été largement une référence en matière de vocation européenne, et qui démontré sa notion de la valeur du travail, de l'esprit d'entreprise, de la soif de culture, d'une vocation à la solidarité. C'est pourquoi cette terre et ce peuple ont écrit de très belles pages de l'Histoire, et ils sont la meilleure manifestation de ce que signifie l'Europe. Merci à la Catalogne et aux Catalans.
Aujourd'hui, je répète quelque chose qui pourrait paraître évident pour tous les citoyens de notre pays, quelque chose que nous ne devons pas oublier si nous voulons être justes envers le passé récent : l'Europe et son unité ont permis, bien plus que tout autre élément, de consolider la paix et la démocratie. La paix et la démocratie en Europe, mais également en Espagne. La paix et la démocratie pour un nombre de pays de plus en plus important, pour des millions de citoyens et de citoyennes, et qui nous ont permis, enfin, d'éradiquer une fois pour toute, la guerre et les dictatures sur le continent européen.
L'Europe et son union nous ont mené sur la voie de la prospérité et de la solidarité. Personne ne mettra en doute le fait que nous vivons bien mieux au sein de l'Union européenne. L'expérience de l'Espagne constitue certainement un magnifique exemple à cet égard. Grâce à notre adhésion, nous avons assis des bases solides de stabilité économique et de progrès social. Et nous devons dire aujourd'hui à tous les citoyens que ces bases économiques solides et cette garantie de démocratie, cette tranquillité que donne la paix, vont être renforcées grâce à la Constitution européenne £ une Constitution qui nous donne une identité commune et qui, de plus et c'est là que se place sa grandeur, permet de sentir l'identité propre à chacun et chacune. Par exemple l'identité catalane, la profonde identité catalane, qui a vocation à se développer, à grandir. Sachez que tous ceux qui veulent développer cette identité catalane dans le cadre de l'Union européenne peuvent compter sur moi.
L'âme européenne, représentée par cette Constitution est forgée dans les droits des citoyens et des citoyennes, qui sont stipulés dans la Charte des droits fondamentaux et dans les principes essentiels de notre coexistence. Il y a parmi ceux-ci des principes, des aspirations, des conquêtes, qui ont demandé bien du temps pour apparaître dans les textes normatifs, dans les lois qui réglementent notre coexistence, telles que la non-discrimination, dans toutes les situations. Donc, non-discrimination de qui que ce soit : le temps de la non-discrimination des droits de toutes ces personnes est arrivé, indépendamment de leur condition. Le moment de la non-discrimination est venu et quand je parle de non-discrimination, je parle de l'Union européenne, et cela veut dire Constitution européenne.
En ce qui concerne la tolérance : l'Union européenne est une grande école de tolérance, où se rejoignent vingt-cinq pays, de nombreuses langues, et le catalan dans peu de temps, dans laquelle on trouve des pays qui représentent des cultures et des peuples bien différents. Et le principe directeur de notre façon d'être et d'agir, c'est le principe de tolérance. C'est un principe essentiel pour forger les meilleurs destins de cette coexistence : non discrimination, égalité entre hommes et femmes, justice, tolérance. Tout cela est formulé dans le texte constitutionnel de façon moderne, de manière profonde, et surtout avec des garanties pour l'efficacité de leur mise en oeuvre auprès de tous les citoyens et citoyennes de l'Union européenne.
Cette Constitution consacre également l'idée d'une Europe unie dans la diversité sans imposer de caractère uniforme, avec un respect considérable et express de la richesse culturelle, des singularités, des options et des intérêts pluriels qui existent au sein de l'Europe. Avec ce traité constitutionnel, on reconnaît et on part du point de vue que cette diversité se trouve dans la nature même de cette Europe. Donc la reconnaître, la préserver, c'est garantir le succès et la force de l'Union.
En Europe, il y a de la place pour tous et toutes, même si nous sommes nombreux : vingt-cinq Etats, quatre cent cinquante millions d'habitants qui veulent mettre en place un grand système de liberté, de démocratie, de solidarité, et de cohésion entre l'Etat et le citoyen. Une Europe qui recherche une croissance équilibrée pour tous ses membres, une Europe engagée vers un modèle social qui lui est propre, et qui est incomparable avec tout autre modèle social d'aucune autre région du monde £ un modèle social qui cherche à être le plus juste et le plus avancé du monde, orienté vers le plein-emploi et vers le développement durable.
C'est le grand projet que nous propose la Constitution européenne, voilà la chance à saisir, une chance historique qui s'offre à nous. Nous sommes témoins de cette chance historique et nous en sommes également les acteurs. Cette opportunité, qui nous lance un appel, pour que nous lui apportions notre espoir, qui doit nous permettre de voir comment nous allons refonder cette histoire pour la renforcer, comment nous allons nous unir un peu plus et faire que d'autres peuples du monde disposent de cette voix de l'Europe comme voix de référence pour leur propre développement.
Je crois qu'il s'agit donc que l'Europe soit réellement nôtre, de combler le fossé entre le projet européen et la réalité quotidienne des citoyens, que nous nous nous sentions partie prenante à ce projet de coexistence, qui a défendu par le passé au mieux les valeurs de progrès et les aspirations des citoyens.
Le vote sur la Constitution européenne est un acte de reconnaissance des succès auxquels l'Europe est parvenue jusqu'ici, et c'est aussi un vote d'espoir dans l'approfondissement d'un projet commun, ambitieux et digne. Un projet qui porte ses fruits, dont nous portons la responsabilité et que nous devons projeter vers l'avenir, pour les générations actuelles mais surtout pour les suivantes. C'est pour cela que nous sommes aujourd'hui réunis pour parler de Constitution européenne, avec toute la charge symbolique que cela suppose.
C'est également pour cette raison qu'ici aujourd'hui à Barcelone, côte-à-côte avec le Président CHIRAC, je vous demande de participer avec enthousiasme à ce référendum. Je suis intimement convaincu qu'il s'agit d'un moment unique pour exprimer notre appui inconditionnel au projet de l'Union européenne, et légitimer ainsi le projet constitutionnel. Je suis donc certain que le mieux à faire, c'est d'obtenir une participation maximale à ce processus électoral. Comme nous avons pu le constater, comme on a pu le démontrer tout au long de cette réunion à Barcelone avec le Président CHIRAC, il ne s'agit pas d'une question partisane, parce que la décision que nous allons prendre le 20 février, n'est pas la décision de partis, mais la décision de pays. C'est la décision de partager l'avenir avec les autres peuples d'Europe, afin que nous puissions tous connaître un XXIe siècle, qui ne soit pas un siècle de guerre et de dictatures, mais de paix et de liberté.
Nous, les Espagnols, Monsieur le Président CHIRAC, amis de la France et de toute l'Europe, nous savons quelle sera notre réponse : oui, nous voulons un avenir de liberté et de progrès, et nous le dirons le 20 février à voix haute et intelligible, pour que tous puissent nous suivre en Europe. Merci.
Barcelone, capitale de la jeunesse. Capitale ouverte sur le monde. Ville où se développe l'exceptionnel dynamisme de l'Espagne. Ville dont les charmes sont unanimement reconnus. Barcelone, symbole de cette Europe confiante dans son avenir et où se mêlent à la fois tradition et modernité. Je suis heureux d'adresser à Barcelone un salut à la fois cordial et fraternel.
Je tiens à remercier chaleureusement mon ami, le Président José-Luis ZAPATERO, pour son initiative, pour son invitation et peut-être, et surtout, pour son engagement au service d'une Espagne forte dans une Europe forte.
Je regrette, bien entendu, l'absence du Chancelier Gerhard SCHROEDER qui est pour nous un partenaire lucide et courageux de la construction européenne et qui est porteur avec nous des idéaux de paix, de démocratie sur notre continent. Il est malheureusement grippé et il paraît que c'est une grippe tout à fait européenne !
Et je veux regretter, moi aussi, l'absence de Silvio BERLUSCONI, le Président du Conseil des ministres de l'Italie. L'Italie, notre soer latine, pays fondateur de l'Union européenne. Je lui adresse naturellement nos voeux les plus sincères de rapide rétablissement.
Le 20 février, l'Espagne votera pour le premier référendum européen sur le Traité constitutionnel. L'Espagne va donc ouvrir la voie. Elle va montrer le chemin. Et je souhaite que le peuple espagnol nous montre ce chemin, de façon éclatante, en participant massivement à cette consultation pour donner l'exemple et pour montrer à quel point l'Espagne est un élément essentiel de la construction européenne de demain. Et bien entendu, en votant massivement " oui " car c'est une affaire européenne, profondément européenne. Cette constitution n'est pas un texte partisan. Elle appartient à chaque nation. Elle appartient à chaque Européen quelle que soit sa sensibilité politique. Elle a été élaborée et approuvée par une Convention dans laquelle étaient représentés des hommes et des femmes qui incarnaient l'ensemble des pays européens, toute allégeance politique confondue. Elle a été approuvée par les vingt-cinq chefs d'Etat et de gouvernement qu'ils soient de droite ou qu'ils soient de gauche. C'est une grande ambition commune.
En effet, depuis des siècles, et dans son message, Gerhard SCHROEDER l'évoquait, l'Europe, hélas, le continent européen a été marqué par les divisions, les guerres, les dictatures. Quand on imagine le sang versé, le nombre de douleurs issues de cette situation, les espoirs anéantis par ces conflits permanents, on voit à quel point ces comportements étaient, hélas, à la fois naturels et humains, mais dramatiques par leurs conséquences et toujours parfaitement injustifiés au plan de la morale, de l'intérêt général ou du respect de l'homme.
Le grand mérite des pères fondateurs de l'Europe a été de vouloir enraciner la paix, la démocratie, les droits de l'Homme sur l'ensemble de nos continents, de façon à créer un système qui ne permette plus de revenir à ces erreurs du passé et aux drames qu'elles avaient engagés. Ils ont voulu enraciner la paix, la démocratie, les droits de l'Homme.
C'était une grande ambition. Cela reste notre ambition car rien n'est jamais gagné et nous avons fait des pas considérables dans cette direction. L'élaboration, ensemble, d'une Constitution qu'ensemble, nous allons voter, créera le cadre dont on ne pourra plus désormais sortir en s'évadant vers les drames du passé.
De même, cette grande ambition européenne a facilité, sans aucun doute, le développement économique et le progrès social, l'affirmation de notre modèle social européen, progrès économique dont, depuis vingt ans, l'Espagne porte un éclatant témoignage, d'autres aussi, bien entendu, et l'ensemble de l'Europe également.
Cette Constitution nous permet en effet de franchir une nouvelle étape qui est une étape politique, avec la confirmation des valeurs et des objectifs qui sont les nôtres. Bien entendu, dans le passé, on a pu avoir des hommes, des régions, des pays parfois, porteurs d'un certain nombre de valeurs, mais isolés. Aujourd'hui, c'est ensemble sur le continent que nous créons un système garantissant ces valeurs et cela, c'est capital pour nos enfants et pour ceux que nous laisserons après nous.
D'abord, des valeurs communes : le respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l'état de droit, des droits de l'Homme, et ceci pour bâtir une société respectueuse du pluralisme, de la tolérance, de la solidarité, de l'égalité entre les femmes et les hommes dont, je dois dire, l'Espagne nous donne aujourd'hui un bel exemple.
Ces valeurs sont au bénéfice d'objectifs partagés, d'objectifs communs : qu'il s'agisse d'améliorer la situation du travail et de l'emploi, qu'il s'agisse du progrès social et de conforter en permanence notre modèle social européen, qu'il s'agisse de la lutte contre l'exclusion et contre les discriminations ou du respect de plus en plus évidemment nécessaire de l'environnement ou de la diversité culturelle.
L'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans la Constitution est un pas considérable fait pour ancrer et respecter l'ensemble de ces objectifs et de ces valeurs, puisque, dorénavant, la Charte leur donne une valeur contraignante et pouvant, le cas échéant, permettre de déférer en justice.
Cette Constitution donnera également à l'Union des règles meilleures pour fonctionner de manière plus efficace. Bien entendu, lorsque nous étions ensemble, six, sans expérience, nous avions bâti un système qui a été efficace et qui nous a permis de progresser, mais ce système s'est usé finalement avec le temps et avec l'élargissement. Il fallait aujourd'hui le reconsidérer, l'adapter, donner à l'Europe les moyens de se gouverner de façon moderne et plus efficace. Cette Constitution a cet objectif.
D'abord, pour la première fois, la Constitution dira qui fait quoi. Il est vrai que souvent nos concitoyens s'interrogeaient sur ce point en se demandant qu'elle était la véritable responsabilité, où est-ce qu'elle se situait dans les régions, dans les Etats, à l'Europe, à Bruxelles ? Parfois, le disaient-ils d'ailleurs avec regret ou avec crispation. On dit cette fois-ci qui fait quoi. Et c'est ce qu'on appelle le principe de subsidiarité. Ceci sera vérifié par les parlements nationaux. Ce sont les parlements nationaux qui pourront dire si tel ou tel domaine constitutionnellement est de la responsabilité de la région, du pays ou de l'Europe. C'est essentiel et cela nous permettra de progresser avec beaucoup plus d'efficacité.
De la même façon, la Constitution permettra aux Européens d'être plus efficaces grâce à des institutions renforcées. Tout à l'heure, on l'a évoqué, c'est vrai, qu'il s'agisse de la Présidence, du Conseil européen, de la Commission, qu'il s'agisse du Parlement européen, qu'il s'agisse de la politique des affaires étrangères, ces institutions modernisées et renforcées permettront à l'Europe d'assumer mieux ces responsabilités.
Enfin, nous avons besoin de l'Europe pour agir plus efficacement dans beaucoup de domaines. Tout à l'heure, Gerhard SCHROEDER évoquait la lutte contre le terrorisme. Dieu sait que c'est un problème sensible pour des pays comme l'Espagne ou comme la France qui, certes, ont bien compris que, là encore, il faut s'unir si l'on veut être efficace. Les relations, de ce point de vue, entre l'Espagne et la France pour la lutte contre le terrorisme sont, je dois le dire, aussi bonnes qu'il est possible, pour ne pas dire exemplaires. Mais ce n'est pas suffisant.
C'est au niveau de l'Europe tout entière que doivent être élaborées les politiques et mis en oeuvre les moyens nécessaires pour lutter contre le terrorisme. Il en va de même pour d'autres sujets. Nous avons présent à l'esprit les drames qu'ont causé un certain nombre de voyous des mers, et qui ont eu des conséquences terribles sur nos côtes. La sécurité maritime est évidemment un sujet qui nous est particulièrement sensible. Là encore, nous avons besoin ensemble de mettre en commun notre expérience et notre volonté pour pouvoir aller de l'avant et faire respecter nos intérêts dans un domaine aussi sensible et qui touche à notre environnement.
Enfin, la Constitution renforcera nos moyens dans des domaines essentiels, comme la justice, la défense, la sécurité.
Pour la première fois, cette Constitution affirme en réalité une grande ambition sociale et donne sa justification et son cadre au modèle social européen ce qui a d'ailleurs été souligné très clairement par la Confédération européenne des syndicats. Elle renforce les droits des citoyens sur l'ensemble du territoire concerné, c'est-à-dire de nos vingt-cinq pays aujourd'hui, un peu plus demain, je l'espère, et elle garantit la paix, la démocratie.
Voilà, l'essentiel de ce que représente cette Constitution. Mais lorsqu'on l'intègre dans l'histoire de l'Europe, que j'évoquais tout à l'heure, on se rend compte de tout ce que cela peut représenter comme legs positifs pour ceux qui nous suivront sur le continent européen.
Et puis, elle permet aussi et surtout à l'Europe de peser davantage dans le monde multipolaire qui se développe et de mieux faire face ainsi aux défis de la mondialisation. On parle beaucoup de la mondialisation. Elle est inéluctable. Elle comporte des dangers comme elle comporte des avantages à condition, naturellement, qu'elle soit maîtrisée. Nous la maîtriserons si nous sommes unis, déterminés et si nous allons ensemble vers un objectif bien clair. Sinon, nous serons les victimes de la mondialisation, comme sont les victimes, hélas, de ce phénomène la plupart des pays en développement ou sous-développés.
De la même façon, chacun voit bien que le monde évolue vers une situation multipolaire. On voit l'importance croissante de l'Asie, notamment de la Chine, demain de l'Inde, celle après-demain de l'Amérique latine, sans aucun doute. On voit la puissance de l'Amérique du nord. Comment peut-on imaginer que demain nous ayons la possibilité de défendre nos intérêts, nos valeurs, si nous ne sommes pas également unis pour être forts et puissants ?
C'est cette Union européenne que facilite considérablement la Constitution qui nous permettra d'exister demain.
Alors, voilà, je terminerai en disant simplement, selon un vieux proverbe, que c'est l'union des Européens qui fera leur force et rien d'autre. Sans union, ils disparaîtront. Sans une organisation, ils ne résisteront pas. Cette Constitution leur donne cette organisation dans le respect de ce que sont nos ambitions sociales, économiques, environnementales, politiques.
Je ne doute pas que l'Espagne, qui est un partenaire essentiel de l'Europe, le 20 février, nous montrera la voie en disant : " oui ", mais un " oui " massif. Un " oui " qui ne chipote pas. Un " oui " qui rassemble et qui exprime une volonté unanime et qui donne l'exemple de l'Espagne à l'ensemble de l'Europe pour la suite de cette construction.
Je ne doute pas que l'Espagne montrera la voie en disant : " oui " au Traité constitutionnel en disant : " oui " à l'Europe.
Je vous remercie.
M. JOSE-LUIS RODRIGUEZ ZAPATERO - Merci beaucoup. J'aimerais tout d'abord exprimer une satisfaction double, intime et profonde, pour l'organisation de cet événement.
Ma première satisfaction et mes remerciements sincères s'adressent, pour sa présence ici, parmi nous, au Président de la République française, Jacques CHIRAC. C'est pour moi un grand honneur de le recevoir et de partager avec lui un événement tel que celui-ci, c'est-à-dire un événement pour la défense de l'Europe, pour la défense de son traité constitutionnel et pour la défense du "oui" au référendum du 20 février prochain. Et je crois que le Président Chirac représente dignement son pays, une nation qui est la patrie de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Un pays voisin et ami, un pays voisin et un allié pour le projet de construction européenne. Un pays décisif pour la naissance£ puis le développement et la construction de l'Union européenne.
Je crois qu'il y a très peu d'images aussi éloquentes de ce que représente l'Union européenne que cette relation franco-espagnole. Une entente entre les peuples £ le fait que nous ayons étendu la liberté, amélioré le dialogue, que nous exprimions le souhait de partager la reconnaissance de celui qui ne partage pas la même langue, la même histoire, et pourtant la volonté d'écrire l'histoire ensemble pour qu'elle soit plus forte, au bénéfice des générations à venir. Je crois que cet événement est un exemple de l'identité, de ce que nous appelons l'Union européenne. Cette union que nous voulons consolider encore aujourd'hui, grâce à sa Constitution.
Nous sommes ici, le Président de la République française et le Président du gouvernement espagnol, deux pays qui ont une longue histoire commune, avec des moments excellents ou plus difficiles. Mais aujourd'hui nous partageons quelque chose d'essentiel et c'est l'Europe. Nos deux peuples sont maintenant unis pour très longtemps, grâce au projet européen. Nous avons ici un leader politique, le Président de la République, Monsieur Jacques CHIRAC, de centre-droite, et un Président socialiste, qui défendent avec le même enthousiasme et la même force le "oui" à la Constitution européenne.
Je crois que c'est cela l'Europe, c'est l'unité, au-delà des peuples, des territoires et des clivages. Il est vrai que certains pourront se demander si Jacques CHIRAC est effectivement ou non un leader de centre-droite... Je le dis tout simplement lorsque l'on doit le comparer avec d'autres leaders politiques que nous connaissons bien. Quoi qu'il en soit, permettez-moi de profiter de cette cérémonie en faveur de la Constitution européenne pour reconnaître publiquement la position digne et courageuse de Jacques CHIRAC lorsqu'il s'est prononcé contre la guerre et en faveur de la paix au nom de toute l'Europe.
Mon second motif de satisfaction, c'est que cet événement se tient ici, en Catalogne, dans la ville de Barcelone. Jacques, nous sommes ici sur une terre, parmi un peuple, qui sont plus européens que quiconque au monde. Nous sommes sur une terre et face à un peuple qui a toujours été largement une référence en matière de vocation européenne, et qui démontré sa notion de la valeur du travail, de l'esprit d'entreprise, de la soif de culture, d'une vocation à la solidarité. C'est pourquoi cette terre et ce peuple ont écrit de très belles pages de l'Histoire, et ils sont la meilleure manifestation de ce que signifie l'Europe. Merci à la Catalogne et aux Catalans.
Aujourd'hui, je répète quelque chose qui pourrait paraître évident pour tous les citoyens de notre pays, quelque chose que nous ne devons pas oublier si nous voulons être justes envers le passé récent : l'Europe et son unité ont permis, bien plus que tout autre élément, de consolider la paix et la démocratie. La paix et la démocratie en Europe, mais également en Espagne. La paix et la démocratie pour un nombre de pays de plus en plus important, pour des millions de citoyens et de citoyennes, et qui nous ont permis, enfin, d'éradiquer une fois pour toute, la guerre et les dictatures sur le continent européen.
L'Europe et son union nous ont mené sur la voie de la prospérité et de la solidarité. Personne ne mettra en doute le fait que nous vivons bien mieux au sein de l'Union européenne. L'expérience de l'Espagne constitue certainement un magnifique exemple à cet égard. Grâce à notre adhésion, nous avons assis des bases solides de stabilité économique et de progrès social. Et nous devons dire aujourd'hui à tous les citoyens que ces bases économiques solides et cette garantie de démocratie, cette tranquillité que donne la paix, vont être renforcées grâce à la Constitution européenne £ une Constitution qui nous donne une identité commune et qui, de plus et c'est là que se place sa grandeur, permet de sentir l'identité propre à chacun et chacune. Par exemple l'identité catalane, la profonde identité catalane, qui a vocation à se développer, à grandir. Sachez que tous ceux qui veulent développer cette identité catalane dans le cadre de l'Union européenne peuvent compter sur moi.
L'âme européenne, représentée par cette Constitution est forgée dans les droits des citoyens et des citoyennes, qui sont stipulés dans la Charte des droits fondamentaux et dans les principes essentiels de notre coexistence. Il y a parmi ceux-ci des principes, des aspirations, des conquêtes, qui ont demandé bien du temps pour apparaître dans les textes normatifs, dans les lois qui réglementent notre coexistence, telles que la non-discrimination, dans toutes les situations. Donc, non-discrimination de qui que ce soit : le temps de la non-discrimination des droits de toutes ces personnes est arrivé, indépendamment de leur condition. Le moment de la non-discrimination est venu et quand je parle de non-discrimination, je parle de l'Union européenne, et cela veut dire Constitution européenne.
En ce qui concerne la tolérance : l'Union européenne est une grande école de tolérance, où se rejoignent vingt-cinq pays, de nombreuses langues, et le catalan dans peu de temps, dans laquelle on trouve des pays qui représentent des cultures et des peuples bien différents. Et le principe directeur de notre façon d'être et d'agir, c'est le principe de tolérance. C'est un principe essentiel pour forger les meilleurs destins de cette coexistence : non discrimination, égalité entre hommes et femmes, justice, tolérance. Tout cela est formulé dans le texte constitutionnel de façon moderne, de manière profonde, et surtout avec des garanties pour l'efficacité de leur mise en oeuvre auprès de tous les citoyens et citoyennes de l'Union européenne.
Cette Constitution consacre également l'idée d'une Europe unie dans la diversité sans imposer de caractère uniforme, avec un respect considérable et express de la richesse culturelle, des singularités, des options et des intérêts pluriels qui existent au sein de l'Europe. Avec ce traité constitutionnel, on reconnaît et on part du point de vue que cette diversité se trouve dans la nature même de cette Europe. Donc la reconnaître, la préserver, c'est garantir le succès et la force de l'Union.
En Europe, il y a de la place pour tous et toutes, même si nous sommes nombreux : vingt-cinq Etats, quatre cent cinquante millions d'habitants qui veulent mettre en place un grand système de liberté, de démocratie, de solidarité, et de cohésion entre l'Etat et le citoyen. Une Europe qui recherche une croissance équilibrée pour tous ses membres, une Europe engagée vers un modèle social qui lui est propre, et qui est incomparable avec tout autre modèle social d'aucune autre région du monde £ un modèle social qui cherche à être le plus juste et le plus avancé du monde, orienté vers le plein-emploi et vers le développement durable.
C'est le grand projet que nous propose la Constitution européenne, voilà la chance à saisir, une chance historique qui s'offre à nous. Nous sommes témoins de cette chance historique et nous en sommes également les acteurs. Cette opportunité, qui nous lance un appel, pour que nous lui apportions notre espoir, qui doit nous permettre de voir comment nous allons refonder cette histoire pour la renforcer, comment nous allons nous unir un peu plus et faire que d'autres peuples du monde disposent de cette voix de l'Europe comme voix de référence pour leur propre développement.
Je crois qu'il s'agit donc que l'Europe soit réellement nôtre, de combler le fossé entre le projet européen et la réalité quotidienne des citoyens, que nous nous nous sentions partie prenante à ce projet de coexistence, qui a défendu par le passé au mieux les valeurs de progrès et les aspirations des citoyens.
Le vote sur la Constitution européenne est un acte de reconnaissance des succès auxquels l'Europe est parvenue jusqu'ici, et c'est aussi un vote d'espoir dans l'approfondissement d'un projet commun, ambitieux et digne. Un projet qui porte ses fruits, dont nous portons la responsabilité et que nous devons projeter vers l'avenir, pour les générations actuelles mais surtout pour les suivantes. C'est pour cela que nous sommes aujourd'hui réunis pour parler de Constitution européenne, avec toute la charge symbolique que cela suppose.
C'est également pour cette raison qu'ici aujourd'hui à Barcelone, côte-à-côte avec le Président CHIRAC, je vous demande de participer avec enthousiasme à ce référendum. Je suis intimement convaincu qu'il s'agit d'un moment unique pour exprimer notre appui inconditionnel au projet de l'Union européenne, et légitimer ainsi le projet constitutionnel. Je suis donc certain que le mieux à faire, c'est d'obtenir une participation maximale à ce processus électoral. Comme nous avons pu le constater, comme on a pu le démontrer tout au long de cette réunion à Barcelone avec le Président CHIRAC, il ne s'agit pas d'une question partisane, parce que la décision que nous allons prendre le 20 février, n'est pas la décision de partis, mais la décision de pays. C'est la décision de partager l'avenir avec les autres peuples d'Europe, afin que nous puissions tous connaître un XXIe siècle, qui ne soit pas un siècle de guerre et de dictatures, mais de paix et de liberté.
Nous, les Espagnols, Monsieur le Président CHIRAC, amis de la France et de toute l'Europe, nous savons quelle sera notre réponse : oui, nous voulons un avenir de liberté et de progrès, et nous le dirons le 20 février à voix haute et intelligible, pour que tous puissent nous suivre en Europe. Merci.