13 juin 1990 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Mitterrand, Président de la République, sur les relations franco-mauriciennes et les relations entre la France et les pays de l'Océan indien, Port-Louis, le 13 juin 1990.

Je vous remercie de vos paroles d'accueil. Elles sont élogieuses, mais je les reçois de la manière qui me paraît convenir, comme un hommage aux relations qui vous unissent à la France et à la considération que vous portez à mon pays. Vous avez pu tous constater, mesdames et messieurs les journalistes, l'hospitalité de l'Ile Maurice. On le savait déjà, mais nous l'avons vécue. Nous remercierons donc tous, je veux dire tous ceux qui sont venus de France, nos amis mauriciens et vous voudrez bien transmettre au peuple mauricien notre sentiment de gratitude.
- Nous avons des projets d'avenir, nous en avons parlé. J'ai eu l'occasion de m'exprimer là-dessus. C'est pourquoi je vous parlerai très peu de temps, ayant développé les thèmes que j'entendais communiquer dans mes interventions publiques. Indépendamment du fait que nos relations très anciennes rendaient incompréhensible le fait qu'aucun Président de la République française ne se soit jamais rendu à l'Ile Maurice, ma préoccupation essentielle, au-delà des problèmes économiques qui sont réels, nombreux et sérieux, c'est la francophonie.
- Non pas que le français doive être une langue qui s'organise en concurrence avec les autres, je sais fort bien et après tout, c'est excellent, que je m'adresse à une société pluri-culturelle. Mais comprenez mon souci : et visitant au cours de ce voyage quatre pays francophones, j'y trouve de nouvelles raisons de croire dans l'utilité de notre culture commune.
- Je le répète pour le reste, je me suis suffisamment expliqué. A vous, mesdames et messieurs, de poser les questions qui vous paraîtront les plus utiles.\
QUESTION.- Monsieur le Président, c'est votre première visite officielle aux Iles Seychelles et à l'Ile Maurice. Quel bilan faites-vous de cette visite ?
- LE PRESIDENT.- Un bilan, effectivement, on va le faire. Mais rien ne remplace la présence sur le terrain. Nous entretenions déjà d'excellentes relations dans les rencontres internationales ou dans les rencontres bilatérales tenues à Paris, mais c'était incomplet. Il convenait de rendre à l'Ile Maurice ce qu'elle nous donne et d'établir des relations plus proches, plus réelles, plus vivantes. C'est ce que signifie ce voyage. Nous avons parlé de tout ce qui nous intéressait : des aspects qui touchent à la vie mondiale, à l'économie mondiale, aux relations entre pays dits riches et pays qui le sont moins. Nous avons parlé de l'évolution actuelle de l'Europe qui intéresse beaucoup mes interlocuteurs, puis nous avons parlé de nos relations bilatérales, soit dans le cadre de l'Océan Indien, soit dans le cadre général.
- Je constate que la coopération entre l'Ile Maurice et la France est une coopération active qui promet de nombreux développements. Venant ici, j'ai pu avoir une bonne conversation avec M. le ministre de l'agriculture. La canne à sucre a occupé une grande place dans cette conversation. C'est normal puisqu'il s'agit là d'une ressource primordiale pour la vie des Mauriciens. J'ai pu me rendre compte qu'il y avait beaucoup de projets d'avenir et que la relation franco-mauricienne est insérée dans un ensemble plus vaste. Je pourrais, si vous voulez, étudier avec vous dossier par dossier. Ce serait pour l'instant inutile. Je vous quitterai en ayant une connaissance plus précise de votre pays.
- Je pense que les Mauriciens seront heureux - vous vous en faites les interprètes - d'avoir pu recevoir officiellement, publiquement, une importante délégation française. Nous travaillons déjà très bien ensemble. Les réalisations sont nombreuses, les projets le sont encore plus, les espérances, sans doute, encore davantage, mais nous n'avançons plus pas à pas, nous avançons vite. C'est le sentiment que je rapporte, frappé que je suis au demeurant, de la proximité de nos mentalités, nous qui sommes pourtant si loin par la géographie et si proches par la culture.
- Plusieurs fois, on m'a conté de quelle manière des familles étaient venues d'autres continents en trois générations. Le français a été reconnu comme une langue courante, à la fois intellectuelle et véhiculaire, sans que les autres langages aient été pour autant sacrifiés. Il faut considérer que pour la France c'est un très grand motif de satisfaction et d'espérance. Cela prouve qu'en dépit des exigences commerciales qui ont servi d'autres langues ou des événements qui se sont produits depuis les deux guerres mondiales, le français reste un atout maître de la communication et qu'ensemble, vous et nous, nous allons accroître ces chances. J'ai dit : il s'agit là de peuples peu nombreux mais qui disposent de superficies, surtout maritimes, considérables et qui sont des passages obligés. Tout cela donne encore plus de force à mon raisonnement.\
QUESTION.- Vous avez évoqué monsieur le Président avec beaucoup de chaleur la relative réussite démocratique, économique et politique de l'île Maurice depuis son indépendance. Est-ce que vous pensez que ce qui est applicable à l'île Maurice l'est pour la Nouvelle-Calédonie ?
- LE PRESIDENT.- C'est vrai pour tous les peuples. Pour un pays qui a pris du retard, surtout dans le pluralisme des origines et dans la fusion nécessaire entre ces différentes origines, tout ce qui va dans le sens de l'unité sans perdre pour autant son identité est simplement bon et nécessaire. C'est pourquoi nous nous sommes engagés dans cette voie.\
QUESTION.- Nous avons appris que vous avez discuté sur l'Océan Indien durant les discussions d'hier avec le gouvernement mauricien et que la France souhaiterait une nouvelle définition du concept de paix, que le concept aurait paraît-il vieilli depuis 1971. Est-ce que allusion est faite dans ce souhait de la France implicitement à l'émergence de nouvelles puissances dans l'Océan Indien et quelles seraient les grandes lignes de ce nouveau concept que vous souhaitez ?
- LE PRESIDENT.- Ayez l'obligeance de ne pas répondre à ma place, ayant posé la question. Ce qui était en 1971 ne se pose plus dans les mêmes termes. Nous étions dans un regain de guerre froide entre les plus grandes puissances du monde, chacune cherchant à exploiter son avantage là où elle le pouvait. Et il a semblé, à l'époque, que le projet pouvait revêtir cet aspect. Prudentes, les grandes puissances occidentales se sont poliment repliées. Si les conditions ont changé, il faut que le contenu non exprimé le soit. Voilà c'est tout. Ce n'est pas le concept qui a changé : la paix, c'est la paix. Cela veut dire qu'on ne se bat pas, cela veut dire que les rivalités s'expriment démocratiquement, qu'elles sont négociées, cela veut dire que chacun cherche le meilleur par des moyens équitables et honnêtes sans le recours à la force ou à la violence. Ce n'est donc pas le concept qui a changé, mais simplement le contenu de cette notion de zones de paix dans l'Océan Indien. Je suis donc tout à fait disposé à discuter de tout ce que l'on voudra pour que la paix soit mieux garantie encore dans l'Océan Indien. Si cette discussion doit reprendre, ce sera mon état d'esprit. Ce qu'il faut simplement, c'est éviter les faux semblants et savoir de quoi on parle.\
QUESTION.- Pouvez-vous nous dire l'analyse que vous faites des élections algériennes ? Etes-vous inquiet ?
- LE PRESIDENT.- Mais chaque peuple vivant dans un état souverain est libre de ses choix ! Nous accueillerons donc les résultats des élections algériennes comme l'aura voulu la majorité du peuple algérien. Il ne s'agit pas de débattre de ce que sont nos voeux, à nous Français. Il s'agit de savoir ce que désire le peuple algérien. Au demeurant, dans une démocratie et j'espère que nous parlons de démocratie, les opinions changent. C'est le heurt des projets politiques. Cela regarde l'Algérie et les Algériens. Quant à la France, qui entretient de bonnes relations avec l'Algérie, je peux m'exprimer en son nom. La France espère pouvoir poursuivre dans de bonnes conditions sa coopération avec ses voisins algériens.
- Quant à la loi française, celle qui s'applique chez nous, quelles que soient les évolutions de l'opinion algérienne, cette loi continuera de s'appliquer. Je veux dire la loi qui préside aux problèmes de l'immigration. Je n'ai rien d'autre à dire à ce sujet. Il faut accueillir ces résultats comme on les accueille partout là où s'exerce authentiquement la volonté populaire.\
QUESTION.- Les ministres des affaires étrangères mauricien et français se sont-ils penchés sur le dossier de Tromelin ? Je voudrais savoir si cette décision équivaut à un assouplissement de la position française par rapport à Tromelin. Et, est-ce que la France serait disposée à discuter de la rétrocession de Tromelin à l'Ile Maurice ?
- LE PRESIDENT.- Vous savez quel est le droit international pour ce qui touche Tromelin. On y perd son latin... Ce qui est vrai, c'est que le Traité de 1814 ne parle pas de Tromelin, donc n'a pas été de compétence britannique, et par voie d'évolution, de compétence mauricienne.
- L'argument mauricien consiste à dire que ce n'est pas le seul ilôt qui ait été oublié parce qu'il était trop petit, et que cet oubli n'a pas de valeur juridique. Comme on pourrait discuter à perte de vue et que nous tenons à nos bonnes relations avec l'île Maurice, - Tromelin présente un intérêt réel - mais n'exagérons rien ! !.. Il y avait bien des Mauriciens qui exploitaient le guano et nous avons là un poste d'observation météorologique - pourquoi, après tout, ne ferait-on pas des choses en commun à Tromelin. Moi je ne refuse pas du tout d'examiner, dans le cadre d'une commission mixte, le problème de Tromelin qui semble vous préoccuper dans la mesure où vous avez le sentiment qu'on vous a arraché une fraction de votre patrie. Remarquez que vous avez aussi à regarder du côté du nord-est, je ne sais pas si c'est exactement là ?.. c'est bien le nord-est. Ce n'est pas la France qui vous pose un problème.\
QUESTION.- Monsieur le Président, on connaît l'attachement de la France aux Droits de l'Homme, aux principes démocratiques, et son soutien aux mouvements anti-apartheid. En s'empressant de vendre les armes au Colonel Rapouka, ne pensez-vous pas que la France renie par là-même les principes qu'elle professe ?
- LE PRESIDENT.- Nous sommes là aux Fidji. Je me disais Maurice, l'Océan indien, puis Fidji, sans doute parce qu'il y a des origines communes indiennes j'imagine, parce qu'autrement, ce souci majeur exprimé à propos de Fidji, aurait eu le don de m'étonner. Mais comme vous êtes autant que moi, si ce n'est plus, des partisans fervents des Droits de l'Homme, je vous reconnais le droit de me poser la question. Eh bien, oui, il y a eu un changement assorti d'une sorte de coup de force, qui s'est produit aux Fidji. Je n'en connais pas le détail, et on me dit, - cela mérite d'être vérifié, mais je vous crois sur parole - que la population d'origine indienne se trouve aujourd'hui privée de ses droits civiques. Si tel est le cas, c'est inadmissible, et dans ce cas-là, la France sera du côté de ceux qui protesteront et qui prendront les moyens pour que le droit redevienne le droit aux Fidji. Vous me dites : vous fournissez des armes,... Ecoutez, je l'apprends £ moi je n'en sais rien. Je ne crois pas. Mais enfin, si j'étais démenti, il ne faudrait pas m'en vouloir. Mais vraiment je ne crois pas...
- Je ne vois pas pourquoi nous vendrions des armes au Colonel Rapouka à Fidji £ ce qui est vrai, c'est que nous avons une bonne coopération avec Fidji, et si l'on veut me faire dire que le fait de coopérer avec Fidji est un avantage donné au gouvernement issu de cet événement qu'on pourrait appeler un coup de force, alors là, on mélange les questions. Nous avons l'intention de continuer notre coopération avec les Fidji, quel que soit le gouvernement. Bien entendu, encore faut-il que ce gouvernement se soumette aux Droits de l'homme. Alors, nous allons procéder aux conversations nécessaires. Mais il y a là une imputation qu'a priori je rejette. La France aide les Fidji, c'est normal, et elle n'a pas interrompu ses programmes de coopération au lendemain de ce changement de pouvoir, mais s'il est vrai que la vie quotidienne et civique des Fidji subit ce manquement grave aux droits, vous avez raison dans ce cas-là de rapprocher cela de l'apartheid. La France, bien entendu, ne saurait l'approuver.\
QUESTION.- Monsieur le Président, je parlerai du domaine de l'audiovisuel. Compte tenu de l'audiovisuel de l'Europe en 92, et compte tenu de l'irrigation de notre territoire par les images américaines, est-ce que la France compte faire un effort pour contrebalancer l'image américaine en adoptant par exemple l'irrigation de l'Ile Maurice ou de l'Océan Indien à travers le satellite par les images françaises ?
- LE PRESIDENT.- Nous ferons tout ce qu'il faudra, mais pour l'instant, j'ai l'impression qu'à partir de l'Ile de la Réunion, vous recevez les images, et que ces images, précisément, ne sont pas tout à fait indifférentes au fait que le français ait accompli des progrès dans l'Ile Maurice. Ce n'est déjà pas mal. Si ce n'est pas suffisant, s'il faut intervenir sur le satellite, nous le ferons, pas seulement par rapport à Maurice, mais par rapport à la nécessité de défendre la francophonie.
- QUESTION.- Monsieur le Président, pensez-vous qu'un pays aux ressources aussi limitées que l'Ile Maurice peut placer parmi ses priorités la défense et la sauvegarde de son patrimoine culturel et architectural. Et si oui, quelle serait l'attitude de la France en apprenant qu'un pays donné songe à démolir un bâtiment construit il y a plus deux cents ans par des colonisateurs français ?
- LE PRESIDENT.- Oui, je suis tout à fait au courant pour le bâtiment. Sur le plan général, je ne saurais le dire. Il est évident qu'il faut sauvegarder le patrimoine culturel et architectural.
- Sur le plan architectural cela entraîne, c'est sans doute le sens de votre question, des dépenses sans doute trop lourdes pour la seule Ile Maurice. Je ne sais pas dans quel état se trouvent les dernières conversations : on m'a occupé à beaucoup d'autres choses au cours de cette matinée, et je ne peux pas avoir toutes les quatre minutes un compte rendu parce qu'à ce moment-là, ce sont les Mauriciens qui me parlent de leurs affaires et j'en suis très content £ je ne peux pas avoir une oreille là et une autre là. Ce que je suppose c'est que la France et l'Unesco, mais la France d'abord, ne manqueront pas de donner un coup de main, c'est-à-dire une contribution pour sauvegarder les monuments qui paraîtront le mériter, étant entendu que cela ne peut se faire que si le gouvernement de l'Ile Maurice le souhaite. Nous n'allons pas intervenir par-dessus sa tête.\
QUESTION.- Monsieur le Président il existe en France un certain nombre de travailleurs mauriciens en situation irrégulière. Est-ce que l'on peut s'attendre à une régularisation de la situation du moins de ceux qui sont sur le territoire français depuis de nombreuses années ?
- LE PRESIDENT.- Par situation irrégulière, vous voulez dire qu'ils sont venus clandestinement ? Mais comment est-ce qu'ils ont fait ? On a adopté des mesures très conformes aux droits des gens, en estimant que toute expulsion devait être assortie de conditions de droit. C'est-à-dire que tout individu normalement voué à l'expulsion doit pouvoir s'expliquer avant exécution de la mesure. Sur le plan des principes il est bien normal qu'un pays n'accepte pas l'immigration clandestine alors qu'il a les portes grandes ouvertes pour l'immigration reconnue, officielle, admise, qui en France est extrêmement utile et dont nous sommes satisfaits.
- Comme par définition on ne peut pas en contrôler les flux, comme on ne sait pas exactement qui est là, en plus, comme on ne sais pas toujours exactement comment, il est normal que l'on s'organise pour empêcher l'immigration clandestine et si on ne peut pas l'empêcher pour la réduire. Il faut que les personnes qui se trouvent en situation irrégulière puissent soit retourner dans leur pays si elles le souhaitent, soit trouver un pays refuge si elles redoutent le retour au pays d'origine pour des raisons personnelles ou politiques. Nous avons, chacun le sait, une grande ouverture d'esprit chaque fois qu'il s'agit de l'immigration de caractère politique tout simplement pour sauvegarder les personnes.
- Je ne crois pas que ce soit de ce cas-là que vous me parlez. Vous me parlez davantage des familles qui sont venues depuis longtemps et qui ont fait souche. Nous avons sur ce sujet-là une attitude, je crois, extrêmement souple et humaine et il faut que vous signaliez les cas qui seraient exagérément douloureux. Je pense que l'on trouvera toujours une solution. En raison des dispositions législatives prises au cours de ces dix dernières années, ces personnes ont eu l'occasion de régulariser leur situation. Si tel n'est pas le cas, alors là il faut savoir qu'un pays ne peut pas accepter sans contrôle la venue d'éléments étrangers, même si ce pays est aussi ouvert que l'est la France. Voilà ce que je peux vous répondre.
- Mais l'immigrant admis et reconnu est le bienvenu et doit disposer de tous les droits possibles. Celui qui est venu de son propre chef, de son propre mouvement, je ne veux pas dire qu'il soit coupable humainement mais il n'a pas respecté notre loi. Il est normal que notre loi s'applique.\
QUESTION.- Monsieur le Président, la France n'a pas cessé depuis le Sommet de Cancun en 1981 de se faire le défenseur du tiers monde, mais certaines appréhensions demeurent malgré tout. Pourriez-vous nous expliquer en quoi les pays d'Afrique dont le principal marché d'exportation est l'Europe, bénéficieront de la création du Marché unique européen ?
- LE PRESIDENT.- La création de la Communauté a représenté une chance nouvelle pour les pays d'Afrique. Si je vous disais d'une façon très concrète la nature des projets qui sont soutenus par la France - ce sont les plus nombreux - mais aussi par la Communauté européenne, vous en seriez étonné. Ce qui est vrai c'est que la Communauté a beaucoup de charges puisqu'elle entend prendre part aux développements des pays d'Europe centrale et orientale, question qui ne se posait pas en fait dans les années précédentes.
- Nous avons décidé de ne pas réduire l'aide apportée aux pays africains. Je peux vous dire que je veillerai au nom de la France à ce que cet engagement soit tenu. Mais l'Acte unique ne changera rien à la nature de la Communauté, il se contentera de mettre en forme, dans tous les domaines, l'engagement pris en 1985 à Luxembourg de faire disparaître nos frontières intérieures et d'en tirer les conséquences logiques. Cela n'a pas d'effet par rapport aux pays africains. La Communauté restera disponible pour aider tous les projets qui paraîtront utiles à l'Afrique.\
QUESTION.- Monsieur le Président, depuis l'assassinat du Président Abdallah, il y a une augmentation de la présence des effectifs militaires français dans ce pays, est-ce que cette présence se justifie toujours ?
- LE PRESIDENT.- J'espère que non. D'ailleurs il n'y a aucune intervention militaire française aux Comores. Il se trouve qu'il y avait des mercenaires et que ces mercenaires ont tenu le pays. Il y avait certainement des Français parmi eux, mais ils ne relevaient pas du tout de l'autorité publique française. Nous n'avons donc pas à les connaître.
- Il y a eu un moment difficile, il pouvait y avoir de graves violences. Notre premier réflexe, c'est toujours d'intervenir pour protéger nos concitoyens, nos compatriotes. Mais nous ne voulons pas du tout déborder de cette mission-là, que chacun comprendra : la solidarité nationale. Nous ne voulons pas déborder.
- Les soldats français n'ont pas le moins du monde à intervenir dans les affaires intérieures des Comores. Et si, une fois passé le moment difficile, il se révèle, en effet, que ces troupes, comme vous venez de le dire - mais je ne peux pas vous l'affirmer, enfin je vais voir ça, puisque j'y serai ce soir - étaient trop nombreuses dès lors que le calme est revenu et qu'il n'y a pas eu de menace nouvelle sur les Français, il n'y a aucune difficulté pour aligner la présence française sur cette nouvelle réalité. Mais il ne faut pas que vous oubliiez, au moment de l'assassinat du Président Abdallah et dans les jours qui ont suivi, les menaces de prises d'otages sur les Français qui ont été importantes et multiples et qui ont justifié notre réaction.\
QUESTION.- Monsieur le Président, vous avez rencontré la semaine dernière Nelson Mandela à Paris. Puis-je savoir quelle sera la politique du chef de la France vis-à-vis de l'Afrique du Sud eu égard notamment de la demande du Président Frédérik de Klerk pour que les sanctions économiques imposées contre son pays soient levées ?
- LE PRESIDENT.- C'est une affaire délicate. Nous encourageons les efforts du Président De Klerk qui, indiscutablement, a considérablement infléchi la politique de son pays et qui a rempli les premières conditions posées avec la levée d'état de siège et la libéralisation des prisonniers politiques. On voudrait encourager cet effort, mais c'est un problème d'appréciation du moment. Et il me semble qu'il n'y a pas eu d'actes assez déterminants pour la liquidation de l'apartheid. Le moment n'est donc pas encore tout à fait venu. C'est tout. C'est une question d'opportunité, de compréhension de la situation. Il ne faut pas qu'après la levée des sanctions on puisse considérer qu'après tout l'apartheid peut continuer sans dommage et en même temps, c'est vrai, il ne faut pas que les efforts du Président De Klerk soient vains. Voilà le problème. C'est un problème d'appréciation politique délicat. Nous n'avons pas pour l'instant levé ces sanctions.\
QUESTION.- Monsieur le Président, comme vous le savez certainement, le gouvernement mauricien a mené pendant les cinq ou six dernières années un combat acharné contre le trafic de la drogue. Nous savons, également, que la France est à l'avant-garde de ce combat contre le trafic international de la drogue. Est-ce qu'il est possible qu'éventuellement il y ait un accord entre la France et l'Ile Maurice justement pour mieux combattre le trafic international de la drogue ?
- LE PRESIDENT.- Sûrement si vous y êtes disposés. C'est un combat primordial, un des plus importants dans l'histoire du monde contemporain. Nous sommes donc tout disposés à traiter avec vous de ce qui vous paraîtra nécessaire.\