19 avril 1989 - Seul le prononcé fait foi
Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, sur l'histoire de l'exploration de l'espace et les réalisations de l'Agence spatiale européenne, Paris mercredi 19 avril 1989.
Monsieur le Chancelier,
- Monsieur le Premier ministre,
- Monsieur le Directeur général,
- Mesdames et messieurs,
- Je suis très simplement heureux de célébrer avec vous ce 25ème anniversaire de l'Agence spatiale européenne.
- Quoi de plus symbolique et de plus encourageant que de fêter un organisme dont le statut fut, dès l'origine, européen et qui atteint ses objectifs dans un domaine extrêmement compétitif avec un succès qui dépasse même les espérances. Grâce à votre agence, notre Europe est devenue une puissance spatiale respectée, parfois même redoutée par ses concurrents.
- Vous vous souvenez qu'au lendemain de la dernière guerre mondiale, l'Europe scientifique était exsangue. De nombreux savants européens, je citerai Einstein, Fermi, Bethe demeuraient aux Etats-Unis d'Amérique où ils avaient dû émigrer.
- Nos pays d'Europe ont alors décidé d'unir leurs efforts comme cela vient d'être rappelé par d'autres que par moi. Dans trois domaines scientifiques exemplaires : la physique des particules, l'astronomie de l'hémisphère austral et la conquête de l'espace.
- Grâce à ces initiatives, les scientifiques et les techniciens ont obtenu de grandes réussites. Je citerai M. Carlo Rubbia, Prix Nobel de physique et directeur général du Centre européen de recherches nucléaires, le CERN à Genève qui a rappelé le succès de 1983 en physique des particules.
- Ce sont les mêmes savants, M. Pierre Auger, Français, Edoardo Amaldi d'Italie etc... qui sont à l'origine du même CERN et de l'Agence spatiale européenne. Et peu après le lancement du premier spoutnik en octobre 1957 a été créée l'Agence spatiale américaine, la NASA. Dans cette course vers l'espace à laquelle se sont alors livrés Soviétiques, Américains, les Européens ont voulu être présents et c'est pour cela qu'ils ont décidé de travailler en commun à l'exploration de l'espace.
- Je vous rappellerai la première conférence intergouvernementale qui a regroupé 12 pays en novembre 1960 et décidé la mise en place d'une Commission préparatoire européenne pour les recherches spatiales. Les deux organisations européennes qui ont vu le jour, il y a tout juste 25 ans, une organisation scientifique appelée à exercer son activité dans le domaine des satellites et une organisation plus technique destinée à s'occuper du lancement d'engins spatiaux.
- Et c'est en mai 1975, je cite ces dates qui sont dans vos mémoires, pour bien marquer la progression, que ces deux organisations ont fusionné pour donner naissance à l'Agence spatiale que nous célébrons aujourd'hui. Les Etats membres fondateurs de l'agence sont sans doute plusieurs des pays ici rassemblés. La République fédérale d'Allemagne, la France qui représentent 54 % du budget. Mais d'autres pays qui ne sont pas en mesure de fournir autant apportent en qualité ce qu'ils représentent. Et là le calcul deviendrait difficile. Nous nous réjouissons que ces pays soient associés et finalement qu'ils travaillent fraternellement. Je citerai d'abord la Belgique et je salue son Premier ministre que j'ai grand plaisir à retrouver ici depuis les années que nous sommes amenés à nous rencontrer. La Belgique, l'Italie, le Danemark, l'Espagne, l'Irlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse. En 1986, l'Autriche, la Norvège auxquels se sont associés la Finlande, le Canada.\
L'exploration de l'espace, vous l'avez dit, monsieur le directeur général, c'est d'abord une meilleure connaissance de l'univers qui nous entoure. Je citerai un grand responsable politique français, Georges Clémenceau, qui écrivait ceci : "il y a quelque chose de moi dans l'étoile que je ne verrai jamais £ il y a quelque chose d'elle au plus profond de moi".
- Les astronomes ont donné raison à Clémenceau en démontrant que nous sommes fabriqués de la même matière que les étoiles et l'Agence spatiale européenne nous révèle aujourd'hui les étoiles que nos anciens ne voyaient pas.
- Parmi les belles missions de l'Agence, vous avez cité la sonde Giotto, je me souviens du jour où vous êtes venu voir pour me présenter les résultats de vos travaux et j'ai d'ailleurs eu l'occasion de voir depuis un authentique et original tableau de Giotto dont vous vous êtes inspiré pour le logo de votre entreprise sur la comète de Halley. En effet cette sonde s'est approchée, non sans risque, en mars 1986 de la comète de Halley et grâce à cette sonde les astronomes européens ont acquis la meilleure connaissance de la comète qui, depuis des siècles, et à chacun de ses passages, continue de fasciner les hommes.
- C'est vrai que l'univers nous baigne de ses rayonnements. L'ultraviolet dont nous cherchons à nous protéger mais qui est émis par toute étoile chaude et qui est analysé par le satellite ultraviolet international, les rayonnements X et Gamma, utilisés en radiographie, ont été observés grâce à deux autres satellites, Exosat et Cos-B. Quant aux infrarouges, le futur observatoire spatial infrarouge constituera le meilleur moyen de déceler ces rayonnements invisibles depuis le sol.
- Certes l'agence, et elle agit bien, collabore avec les Etats-Unis d'Amérique à la réalisation et à l'exploitation du téléscope spatial qui sera lancé le 11 décembre 1989 et qui évoluera autour de la terre à une orbite haute de 500 kilomètres, lui permettant ainsi d'observer des astres cent fois moins lumineux que ceux que l'on aperçoit aujourd'hui depuis le sol. Alors nous verrons des galaxies très éloignées et donc formées depuis l'origine des temps, ainsi que des planètes qui tournent autour d'autres soleils.
- Voilà ce qui peut émerveiller l'esprit, ce qui peut plaire aux savants et ce qui sera fort utile à l'humanité tout entière dont le destin est de maîtriser tous les aspects de la matière.
- Vous avez, mesdames et messieurs, bien d'autres projets de satellites astronomiques pour explorer les planètes, l'environnement électromagnétique du soleil et je crois que vous donnez le nom de pierres angulaires à ces projets fondamentaux de votre programme scientifique.
- Nous, responsables de nos pays, nous ne pouvons qu'y contribuer, vous encourager et vous donner les moyens d'aboutir.\
Je dirai un mot de la météorologie comme cela vient d'être fait, plus proche des préoccupations quotidiennes de chaque Européen. Les satellites Météosat 1 et 2 sont à l'oeuvre, les climats de l'atmosphère terrestre qui sont surveillés par des satellites qui forment un ensemble très cohérent avec notre programme national Spot. Enfin, la recherche spatiale ne s'arrête pas là et ce n'est pas à vous que je l'apprendrai. Elle inclut la microgravité, la science des matériaux, la physique des fluides, la biologie, la médecine spatiale. Des expériences d'abord réalisées sur la plateforme Spacelab seront entreprises à plus grande échelle sur la station spatiale Colombus à laquelle l'Europe collabore avec les Etats-Unis d'Amérique.
- Voilà un programme ambitieux qui se complète par les programmes de satellites de télécommunications en préparation dont le point culminant actuel est le satellite Olympus.
- L'accès à l'espace ne permet pas seulement de mieux admirer le ciel mais d'améliorer la surveillance de la météorologie, donc des climats terrestres. Et ce que vous avez entrepris en matière de recherches technologiques poussées que vous réalisez dans les meilleurs systèmes de télécommunications et de télévision est un exemple de rigueur de l'esprit.\
Depuis la fusion de l'organisation spécialisée dans la réalisation des lanceurs à l'intérieur de l'agence, celle-ci a établi un programme technologique de réalisation de plateformes et de lanceurs que je crois tout à fait réussi et dont nous sommes très fiers, dont vous êtes j'imagine avec nous très fiers.
- Il s'agit assurément du programme Ariane dont le premier lancement effectué en 1979, succès qui pratiquement est total si l'on compte les quelques déboires qui ont certainement contribué à la connaissance de ces choses comme en matière scientifique cela arrive le plus souvent.
- D'ailleurs on me disait - alors que je venais ici précisément vous rencontrer - que la société Arianespace vient de signer le contrat le plus important de lanceurs avec l'organisation Intelsat de satellites de télécommunications. Voilà un succès nouveau et dont je vous félicite sur lequel je comptais m'arrêter un moment, mais le temps passe.
- Je ne continuerai pas sur cette lancée. Ariane, lequel d'entre nous n'a pas rêvé de mener plus loin ce type d'expérience. Ce qui est, représente déjà un acquis. Voilà que 25 ans après la création des deux organismes que j'ai cités, qui après devaient fusionner dans l'agence, voilà que nous pouvons constater l'excellence d'une activité scientifique et technologique et qui nous permet de dire que l'Europe est désormais au premier rang de l'exploration spatiale.
- Il faut bien se rendre compte que l'Europe n'est pas simplement une collection de pays avec chacun sa culture, son langage, ses moeurs spécifiques, unis par une communauté réduite à des intérêts économiques et commerciaux. Ceux qui s'imaginent cela font fausse route car il faut bien qu'ils se convainquent que si c'était cela, cela ne tiendrait pas. Ils seraient floués dans leur volonté de cantonner l'Europe. C'est une affaire de civilisation.
- Mesdames et messieurs, vous avez contribué à développer, à faire naître cette civilisation. C'est à dire vous avez projeté les capacités de l'intelligence et de l'imagination et de la compétence humaine sur l'immensité de l'espace.
- Les scientifiques, les ingénieurs, les techniciens de cette agence travaillent un peu partout dans des lieux aussi divers que Paris, Noordwich aux Pays-Bas, Darmstadt en Allemagne fédérale, Frascati en Italie, Kourou en Guyane française, etc... Je voudrais les saluer tous, les remercier tous et chacun. Nous leur devons beaucoup et il faut qu'ils le sachent même si l'on sait qu'ils reprendront demain matin leur travail sans plus s'occuper des compliments, mais avec le sentiment que leur devoir est tout tracé.\
Je visitais hier en compagnie de quelques-unes des personnes que j'aperçois ici une exposition qui se déroule actuellement à la Villette, à la Cité des Sciences et de l'Industrie, qui se nomme "La Science et la Révolution". Et j'étais absolument stupéfait, j'aurais dû le savoir, je le savais sans doute, mais je n'y avais pas suffisamment réfléchi, à quel point les dix dernières années du siècle du XVIIIème ont été - je parle pour mon pays, pas le seul - prodigieuse floraison de découvertes scientifiques et de réalisations techniques. J'aurais pu citer au cours de cette exposition une vingtaine des plus grands noms de notre histoire scientifique accumulés simplement sur cette courte période, peut-être aussi parce que l'effervescence intellectuelle, les aspirations de liberté de grands mouvements de pensée a une valeur d'entraînement dans tous les domaines de l'esprit.
- Là je ne peux que rêver que la construction de l'Europe puisse provoquer un choc, d'un autre ordre sans doute, mais une valeur de persuasion, d'entraînement, de contagion, une volonté victorieuse dans les dix dernières années de ce siècle. Les savants sont là, les techniciens, nous les possédons. Ce qui manque peut-être c'est l'élan. L'élan qui est générateur de la volonté, étant entendu que la volonté scientifique ne peut pas se passer de la volonté politique puisque c'est ainsi que se décide le sort des nations.
- Et, ne croyez-vous pas qu'il se décide ce sort-là dans des domaines trop souvent ignorés ou délaissés que l'on appelle la culture et la science. Moi, j'ai cette conviction. Tout le reste est bien, tout le reste est nécessaire. Le ciment de l'Europe, ce sera le développement de la science associée à la culture. Bref, toutes les fonctions de l'esprit. Vu de l'espace, l'Europe agit de telle sorte que l'exemple est montré.
- Je pense que tout Européen ne peut que s'en convaincre. Et le fait que ce soient des savants, que ce soient des techniciens, des chercheurs, que ce soient des femmes et des hommes qui ont décidé de consacrer leur existence à des recherches souvent éprouvantes, parsemées de déceptions avec de temps à autre la merveilleuse joie d'une réussite qui n'est qu'un accident et que vous n'avez pu réussir qu'en créant la chaîne entre vous. La chaîne à travers le temps, mais la chaîne à travers l'espace. L'espace européen qui se confond désormais avec l'espace universel. Tout cela montre bien que l'on a raison de croire en l'avenir. Mesdames et messieurs croyons-y en cette heure ou nous sommes ensemble. Merci.\
- Monsieur le Premier ministre,
- Monsieur le Directeur général,
- Mesdames et messieurs,
- Je suis très simplement heureux de célébrer avec vous ce 25ème anniversaire de l'Agence spatiale européenne.
- Quoi de plus symbolique et de plus encourageant que de fêter un organisme dont le statut fut, dès l'origine, européen et qui atteint ses objectifs dans un domaine extrêmement compétitif avec un succès qui dépasse même les espérances. Grâce à votre agence, notre Europe est devenue une puissance spatiale respectée, parfois même redoutée par ses concurrents.
- Vous vous souvenez qu'au lendemain de la dernière guerre mondiale, l'Europe scientifique était exsangue. De nombreux savants européens, je citerai Einstein, Fermi, Bethe demeuraient aux Etats-Unis d'Amérique où ils avaient dû émigrer.
- Nos pays d'Europe ont alors décidé d'unir leurs efforts comme cela vient d'être rappelé par d'autres que par moi. Dans trois domaines scientifiques exemplaires : la physique des particules, l'astronomie de l'hémisphère austral et la conquête de l'espace.
- Grâce à ces initiatives, les scientifiques et les techniciens ont obtenu de grandes réussites. Je citerai M. Carlo Rubbia, Prix Nobel de physique et directeur général du Centre européen de recherches nucléaires, le CERN à Genève qui a rappelé le succès de 1983 en physique des particules.
- Ce sont les mêmes savants, M. Pierre Auger, Français, Edoardo Amaldi d'Italie etc... qui sont à l'origine du même CERN et de l'Agence spatiale européenne. Et peu après le lancement du premier spoutnik en octobre 1957 a été créée l'Agence spatiale américaine, la NASA. Dans cette course vers l'espace à laquelle se sont alors livrés Soviétiques, Américains, les Européens ont voulu être présents et c'est pour cela qu'ils ont décidé de travailler en commun à l'exploration de l'espace.
- Je vous rappellerai la première conférence intergouvernementale qui a regroupé 12 pays en novembre 1960 et décidé la mise en place d'une Commission préparatoire européenne pour les recherches spatiales. Les deux organisations européennes qui ont vu le jour, il y a tout juste 25 ans, une organisation scientifique appelée à exercer son activité dans le domaine des satellites et une organisation plus technique destinée à s'occuper du lancement d'engins spatiaux.
- Et c'est en mai 1975, je cite ces dates qui sont dans vos mémoires, pour bien marquer la progression, que ces deux organisations ont fusionné pour donner naissance à l'Agence spatiale que nous célébrons aujourd'hui. Les Etats membres fondateurs de l'agence sont sans doute plusieurs des pays ici rassemblés. La République fédérale d'Allemagne, la France qui représentent 54 % du budget. Mais d'autres pays qui ne sont pas en mesure de fournir autant apportent en qualité ce qu'ils représentent. Et là le calcul deviendrait difficile. Nous nous réjouissons que ces pays soient associés et finalement qu'ils travaillent fraternellement. Je citerai d'abord la Belgique et je salue son Premier ministre que j'ai grand plaisir à retrouver ici depuis les années que nous sommes amenés à nous rencontrer. La Belgique, l'Italie, le Danemark, l'Espagne, l'Irlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse. En 1986, l'Autriche, la Norvège auxquels se sont associés la Finlande, le Canada.\
L'exploration de l'espace, vous l'avez dit, monsieur le directeur général, c'est d'abord une meilleure connaissance de l'univers qui nous entoure. Je citerai un grand responsable politique français, Georges Clémenceau, qui écrivait ceci : "il y a quelque chose de moi dans l'étoile que je ne verrai jamais £ il y a quelque chose d'elle au plus profond de moi".
- Les astronomes ont donné raison à Clémenceau en démontrant que nous sommes fabriqués de la même matière que les étoiles et l'Agence spatiale européenne nous révèle aujourd'hui les étoiles que nos anciens ne voyaient pas.
- Parmi les belles missions de l'Agence, vous avez cité la sonde Giotto, je me souviens du jour où vous êtes venu voir pour me présenter les résultats de vos travaux et j'ai d'ailleurs eu l'occasion de voir depuis un authentique et original tableau de Giotto dont vous vous êtes inspiré pour le logo de votre entreprise sur la comète de Halley. En effet cette sonde s'est approchée, non sans risque, en mars 1986 de la comète de Halley et grâce à cette sonde les astronomes européens ont acquis la meilleure connaissance de la comète qui, depuis des siècles, et à chacun de ses passages, continue de fasciner les hommes.
- C'est vrai que l'univers nous baigne de ses rayonnements. L'ultraviolet dont nous cherchons à nous protéger mais qui est émis par toute étoile chaude et qui est analysé par le satellite ultraviolet international, les rayonnements X et Gamma, utilisés en radiographie, ont été observés grâce à deux autres satellites, Exosat et Cos-B. Quant aux infrarouges, le futur observatoire spatial infrarouge constituera le meilleur moyen de déceler ces rayonnements invisibles depuis le sol.
- Certes l'agence, et elle agit bien, collabore avec les Etats-Unis d'Amérique à la réalisation et à l'exploitation du téléscope spatial qui sera lancé le 11 décembre 1989 et qui évoluera autour de la terre à une orbite haute de 500 kilomètres, lui permettant ainsi d'observer des astres cent fois moins lumineux que ceux que l'on aperçoit aujourd'hui depuis le sol. Alors nous verrons des galaxies très éloignées et donc formées depuis l'origine des temps, ainsi que des planètes qui tournent autour d'autres soleils.
- Voilà ce qui peut émerveiller l'esprit, ce qui peut plaire aux savants et ce qui sera fort utile à l'humanité tout entière dont le destin est de maîtriser tous les aspects de la matière.
- Vous avez, mesdames et messieurs, bien d'autres projets de satellites astronomiques pour explorer les planètes, l'environnement électromagnétique du soleil et je crois que vous donnez le nom de pierres angulaires à ces projets fondamentaux de votre programme scientifique.
- Nous, responsables de nos pays, nous ne pouvons qu'y contribuer, vous encourager et vous donner les moyens d'aboutir.\
Je dirai un mot de la météorologie comme cela vient d'être fait, plus proche des préoccupations quotidiennes de chaque Européen. Les satellites Météosat 1 et 2 sont à l'oeuvre, les climats de l'atmosphère terrestre qui sont surveillés par des satellites qui forment un ensemble très cohérent avec notre programme national Spot. Enfin, la recherche spatiale ne s'arrête pas là et ce n'est pas à vous que je l'apprendrai. Elle inclut la microgravité, la science des matériaux, la physique des fluides, la biologie, la médecine spatiale. Des expériences d'abord réalisées sur la plateforme Spacelab seront entreprises à plus grande échelle sur la station spatiale Colombus à laquelle l'Europe collabore avec les Etats-Unis d'Amérique.
- Voilà un programme ambitieux qui se complète par les programmes de satellites de télécommunications en préparation dont le point culminant actuel est le satellite Olympus.
- L'accès à l'espace ne permet pas seulement de mieux admirer le ciel mais d'améliorer la surveillance de la météorologie, donc des climats terrestres. Et ce que vous avez entrepris en matière de recherches technologiques poussées que vous réalisez dans les meilleurs systèmes de télécommunications et de télévision est un exemple de rigueur de l'esprit.\
Depuis la fusion de l'organisation spécialisée dans la réalisation des lanceurs à l'intérieur de l'agence, celle-ci a établi un programme technologique de réalisation de plateformes et de lanceurs que je crois tout à fait réussi et dont nous sommes très fiers, dont vous êtes j'imagine avec nous très fiers.
- Il s'agit assurément du programme Ariane dont le premier lancement effectué en 1979, succès qui pratiquement est total si l'on compte les quelques déboires qui ont certainement contribué à la connaissance de ces choses comme en matière scientifique cela arrive le plus souvent.
- D'ailleurs on me disait - alors que je venais ici précisément vous rencontrer - que la société Arianespace vient de signer le contrat le plus important de lanceurs avec l'organisation Intelsat de satellites de télécommunications. Voilà un succès nouveau et dont je vous félicite sur lequel je comptais m'arrêter un moment, mais le temps passe.
- Je ne continuerai pas sur cette lancée. Ariane, lequel d'entre nous n'a pas rêvé de mener plus loin ce type d'expérience. Ce qui est, représente déjà un acquis. Voilà que 25 ans après la création des deux organismes que j'ai cités, qui après devaient fusionner dans l'agence, voilà que nous pouvons constater l'excellence d'une activité scientifique et technologique et qui nous permet de dire que l'Europe est désormais au premier rang de l'exploration spatiale.
- Il faut bien se rendre compte que l'Europe n'est pas simplement une collection de pays avec chacun sa culture, son langage, ses moeurs spécifiques, unis par une communauté réduite à des intérêts économiques et commerciaux. Ceux qui s'imaginent cela font fausse route car il faut bien qu'ils se convainquent que si c'était cela, cela ne tiendrait pas. Ils seraient floués dans leur volonté de cantonner l'Europe. C'est une affaire de civilisation.
- Mesdames et messieurs, vous avez contribué à développer, à faire naître cette civilisation. C'est à dire vous avez projeté les capacités de l'intelligence et de l'imagination et de la compétence humaine sur l'immensité de l'espace.
- Les scientifiques, les ingénieurs, les techniciens de cette agence travaillent un peu partout dans des lieux aussi divers que Paris, Noordwich aux Pays-Bas, Darmstadt en Allemagne fédérale, Frascati en Italie, Kourou en Guyane française, etc... Je voudrais les saluer tous, les remercier tous et chacun. Nous leur devons beaucoup et il faut qu'ils le sachent même si l'on sait qu'ils reprendront demain matin leur travail sans plus s'occuper des compliments, mais avec le sentiment que leur devoir est tout tracé.\
Je visitais hier en compagnie de quelques-unes des personnes que j'aperçois ici une exposition qui se déroule actuellement à la Villette, à la Cité des Sciences et de l'Industrie, qui se nomme "La Science et la Révolution". Et j'étais absolument stupéfait, j'aurais dû le savoir, je le savais sans doute, mais je n'y avais pas suffisamment réfléchi, à quel point les dix dernières années du siècle du XVIIIème ont été - je parle pour mon pays, pas le seul - prodigieuse floraison de découvertes scientifiques et de réalisations techniques. J'aurais pu citer au cours de cette exposition une vingtaine des plus grands noms de notre histoire scientifique accumulés simplement sur cette courte période, peut-être aussi parce que l'effervescence intellectuelle, les aspirations de liberté de grands mouvements de pensée a une valeur d'entraînement dans tous les domaines de l'esprit.
- Là je ne peux que rêver que la construction de l'Europe puisse provoquer un choc, d'un autre ordre sans doute, mais une valeur de persuasion, d'entraînement, de contagion, une volonté victorieuse dans les dix dernières années de ce siècle. Les savants sont là, les techniciens, nous les possédons. Ce qui manque peut-être c'est l'élan. L'élan qui est générateur de la volonté, étant entendu que la volonté scientifique ne peut pas se passer de la volonté politique puisque c'est ainsi que se décide le sort des nations.
- Et, ne croyez-vous pas qu'il se décide ce sort-là dans des domaines trop souvent ignorés ou délaissés que l'on appelle la culture et la science. Moi, j'ai cette conviction. Tout le reste est bien, tout le reste est nécessaire. Le ciment de l'Europe, ce sera le développement de la science associée à la culture. Bref, toutes les fonctions de l'esprit. Vu de l'espace, l'Europe agit de telle sorte que l'exemple est montré.
- Je pense que tout Européen ne peut que s'en convaincre. Et le fait que ce soient des savants, que ce soient des techniciens, des chercheurs, que ce soient des femmes et des hommes qui ont décidé de consacrer leur existence à des recherches souvent éprouvantes, parsemées de déceptions avec de temps à autre la merveilleuse joie d'une réussite qui n'est qu'un accident et que vous n'avez pu réussir qu'en créant la chaîne entre vous. La chaîne à travers le temps, mais la chaîne à travers l'espace. L'espace européen qui se confond désormais avec l'espace universel. Tout cela montre bien que l'on a raison de croire en l'avenir. Mesdames et messieurs croyons-y en cette heure ou nous sommes ensemble. Merci.\