9 avril 1987 - Seul le prononcé fait foi
Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'occasion du colloque du "Mouvement européen", sur la coopération européenne en matière monétaire, technologique et culturelle, Paris le 9 avril 1987.
Monsieur le Président du Conseil de la Communauté,
- D'abord je vous remercierai pour vos paroles si aimables. Cela fait déjà un certain temps que nous avons l'occasion de nous rencontrer dans des enceintes où il est toujours question de l'Europe et j'ai toujours vu en vous l'un des artisans les plus déterminés et les plus qualifiés pour conduire cette action. Acceptez donc de partager les compliments qui m'ont été adressés, et que je vous retourne largement.
- Vous m'avez déjà, à diverses reprises, saisi des problèmes nombreux, constants, et constamment renouvelés qui contraignent les responsables européens à l'imagination et à la continuité. Mais je me suis réjoui de cette réunion de travail qui, cet après-midi, à l'initiative du "Mouvement européen", a rassemblé de très nombreux et souvent illustres partisans et constructeurs de la cause européenne.
- Après les cérémonies officielles qui ont commémoré le trentième anniversaire, je crois qu'il est important que vous ayiez voulu continuer par le travail et par la réflexion, la célébration du 30ème anniversaire du Traité de Rome. D'après ce que l'on m'en a dit, vous avez fait un travail sérieux, entre personnalités qui savent de quoi elles parlent. Le danger qui est le nôtre c'est d'avoir à nous répéter puisque les progrès sont lents. Il faut pourtant veiller chaque fois à avancer. Et nous, nous avons besoin de vos réflexions pour ne pas nous laisser obnubiler par les difficultés quotidiennes et par la lenteur des progrès, apparente avais-je écrit, mais réelle aussi, inutile de se le dissimuler, pour prendre la mesure du chemin parcouru et pour ne pas perdre de vue l'objectif final qui est l'union politique.\
A Luxembourg, au mois de décembre 1985, l'Europe de la Communauté s'est fixé un nouvel horizon. Ceux qui l'ont vécu savent que cela n'a pas été facile et que généralement dans ce type de rencontre, il faut vraiment, selon une expression connue des téléspectateurs français, il faut vraiment attendre les cinq dernières minutes. Pas plus que, comme téléspectateur je ne sais jamais deviner avant les cinq dernières minutes qui est le coupable, pas davantage je ne savais, ou je ne sais, dans les rencontres qui nous rassemblent, cinq minutes avant quelle sera la conclusion. Celle-ci a été heureuse.
- Lorsque nous nous sommes séparés à Milan en juin 1985, nous avions le sentiment que la conférence inter-gouvernementale serait la signature d'un échec. Il y avait des refus, des résistances, qui ne paraissaient pas pouvoir être dominées. Et, dans les cinq dernières minutes, après de longs débats, de grandes explications, soudain grâce aux quelques personnes, soudain la décision était gagnée. La décision a été prise de faire un marché unique le 31 décembre 1992, ce marché unique, que le Traité de Rome avait décidé il y a trente ans.
- D'ailleurs nous nous réjouissons, nous nous félicitons mutuellement mais enfin cela fait trente ans de retard quasiment. Enfin il faut tenir compte des moeurs, des usages, des habitudes de pensée, on ne construit pas une telle oeuvre sur la base d'une Europe morcelée depuis l'origine, par enchantement. Il ne faut pas s'en indigner. Mais il faudra beaucoup de volonté et de persévérance pour, en cinq ans et même moins de cinq ans désormais, briser les protectionnismes, reporter aux frontières extérieures de la Communauté `CEE` les contrôles qui gênent la libre circulation des personnes, harmoniser les politiques fiscales, les politiques sociales.
- En même temps, ce marché unique, désormais fixé par beaucoup de gouvernants comme le point à atteindre, cela risquerait de nous égarer. On ne peut pas non plus s'en tenir là. Même si c'est une tâche immense dont parfois on peut douter de la réalisation en temps utile quand on aperçoit les retards qui s'accumulent ici et là, les hésitations. Mais on ne peut pas dire que l'Europe sera faite parce qu'on aura fait le marché unique en 1992. C'est nécessaire, ce n'est pas suffisant.\
Songez que l'Europe monétaire lancée il y a déjà neuf ans, est encore fragile et incomplète, tandis que se développent les mouvements sans contrôle du dollar et du yen. Nous n'avons pas, là encore, de véritable monnaie : l'Ecu où en est-il exactement ? L'Europe technologique : de brillants succès, on les cite toujours, Ariane, Airbus, Jet, Eurêka, sur un -plan plus général puisqu'il y a dix-huit pays qui participent, se développent mais il faut aussi décider du programme -cadre de recherche défini par le Président de la Commission, mon ami Jacques Delors.
- Il faut qu'on ait vraiment inscrit dans la tête qu'il est absolument nécessaire, si l'on ne veut pas se laisser distancer pour un demi-siècle et peut-être davantage, d'aboutir sur l'Europe technologique.
- Il ne faut pas non plus oublier ce que l'on appelle la cohésion. Il faut absolument que se rapprochent les régions pauvres et les régions riches. Ce ne sera pas non plus aisé, on n'aboutira pas à des résultats sensibles d'un seul coup £ il faut un minimum de crédits indispensables. Comme vous l'avez dit, monsieur le Président du Conseil de la Communauté, lorsqu'on connaît les équilibres qui s'établissent entre les douze pays de la Communauté, l'un n'ira pas sans l'autre : à la fois la sauvegarde du Traité de Rome fondé sur un certain type de société, un certain type d'exploitation familiale agricole, un certain paysage de l'Europe fidèle à ses traditions, tout en tenant compte, bien entendu, des transformations du temps moderne, puis l'ouverture sur d'autres politiques. Je l'ai dit tout à l'heure : approfondir et perfectionner le système monétaire £ c'est tout de suite l'Europe technologique, c'est tout de suite l'Europe régionale, l'Europe structurelle. Ou bien telle ou telle des parties prenantes considérera qu'elle n'a plus qu'à exercer sa pression, sans autre esprit que d'obtenir sa part, dénuée de tout esprit communautaire. Nous aurions une Communauté à douze où chacun joue sa partie sans s'occuper des autres.\
Mais je sais que vous n'avez pas borné vos travaux à l'Europe économique, vous avez traité de l'Europe de la culture, de l'éducation. Je pousse moi aussi un cri d'alarme chaque fois que j'en ai l'occasion et je me suis arrangé pour que les occasions fussent nombreuses au cours de ces derniers temps. Il est incroyable que l'on ne soit pas encore arrivé à restituer à nos étudiants les capacités qu'ils avaient au Moyen-Age. Ils ne peuvent pas aller d'une université à l'autre, ils n'en ont pas les moyens, on ne leur en donne pas les moyens : aller d'une université à l'autre, commencer dans l'une poursuivre dans une deuxième, terminer dans une troisième, à leur gré, comme ils voudront. Il faudrait que l'Université soit un lieu où les frontières de toutes sortes auraient véritablement disparu.
- Cela ne coûte pas cher. J'aperçois que les plus grands pays - par grands pays, je n'entends pas valeur, mais par le nombre des habitants, par le pouvoir d'achat, par leur revenu national - sont d'une timidité qui me fait, oui je le répète, élever la voix. J'espère que cela sera compris. L'apprentissage des langues, faut-il insister ? Vous avez dû en parler, j'imagine, beaucoup. C'est vrai qu'il faut se comprendre. Dans le mouvement général des idées, les travaux qui s'exécutent sur le -plan scientifique, littéraire ou simplement commercial, plus encore dans le langage commun, vous savez à quel point l'Europe ne se bâtira que si on peut se comprendre. Vous me pardonnerez ces redites, mais, enfin, plus on le saura à l'extérieur, mieux cela vaudra.\
Je crois que l'Europe se fera. Si je n'y croyais pas, j'agirais quand même dans ce sens en pensant que l'oeuvre d'une génération serait un jour reprise par une autre génération, que l'échec d'un siècle serait un jour réparé par la réussite d'un autre siècle. Mais enfin si l'on attend l'autre siècle, cela devient un calcul imprudent pour un certain nombre d'entre vous. Il vaudrait donc mieux dès maintenant conjuguer nos efforts pour réussir dès maintenant. L'Europe se fera si elle garde foi en elle-même. Le "Mouvement européen" y contribue éminemment. Ceux qui sont sur la brèche depuis l'origine méritent un grand merci et la gratitude de l'Europe.
- Il faut avoir le courage des idées fortes. Il faut créer une économie capable de supporter la compétition. Il faut développer la recherche de pointe. Il faut mettre en oeuvre une monnaie commune. J'ai dit à l'instant, échanger les langues et les cultures, créer une solidarité plus forte qu'elle ne l'est dans tous les domaines avec une ambition, un objectif. Je termine comme j'ai commencé, par ce qui s'impose : l'union politique et ses attributs évidents, c'est-à-dire une politique étrangère et une défense, les moyens de la sécurité.
- Quand on prend l'-état de l'Europe tel qu'il est, quarante ans et un peu plus après la deuxième guerre mondiale, on voit combien la tâche est complexe. Il ne faut pas se payer de mots. Il ne faut pas confondre les objectifs et les itinéraires. L'objectif est facile à définir, le moyen d'y parvenir est beaucoup plus complexe. On ne peut pas nier les réalités d'aujourd'hui. Mais je crois qu'avec le sentiment profond qui nous habite tous, celui de l'attachement à notre patrie, la projection de nos patries, donc de nos identités, la projection au sein de l'Europe n'est à mon sens qu'une façon de les valoriser, de les porter à une dimension supérieure.
- Je veux que vous sachiez, mesdames et messieurs, que vous êtes ici les bienvenus. Si j'ai pris l'initiative de vous réunir, sachant que seraient rassemblées dans cette salle tant de familles de pensées différentes, si différentes, tant de pays, tant de régions de ce pays, je pensais que dans ce lieu, où la République exerce ses plus grands desseins depuis qu'elle est la République, c'était important que de sentir, que vous sentiez, comme je le sens, le sentiment qu'on éprouve de bâtir ensemble. Bâtir quoi ? J'ai déjà cité bien souvent, et vous me pardonnerez de reprendre la même image, mais elle est belle, l'histoire de ces deux ouvriers du Moyen-Age : un passant d'un autre pays qui interroge £ ils mettent comme cela des pierres l'une sur l'autre. Au premier ouvrier - que faites-vous ? - il répond, eh bien, vous voyez bien, je mets les pierres l'une sur l'autre. Au deuxième ouvrier - que faites-vous - : je bâtis une cathédrale. Eh bien, c'est toute la différence. Il s'agit de bâtir l'Europe, c'est notre avenir commun. Monsieur le Président du Conseil de la Communauté, mesdames et messieurs, je vous remercie.\
- D'abord je vous remercierai pour vos paroles si aimables. Cela fait déjà un certain temps que nous avons l'occasion de nous rencontrer dans des enceintes où il est toujours question de l'Europe et j'ai toujours vu en vous l'un des artisans les plus déterminés et les plus qualifiés pour conduire cette action. Acceptez donc de partager les compliments qui m'ont été adressés, et que je vous retourne largement.
- Vous m'avez déjà, à diverses reprises, saisi des problèmes nombreux, constants, et constamment renouvelés qui contraignent les responsables européens à l'imagination et à la continuité. Mais je me suis réjoui de cette réunion de travail qui, cet après-midi, à l'initiative du "Mouvement européen", a rassemblé de très nombreux et souvent illustres partisans et constructeurs de la cause européenne.
- Après les cérémonies officielles qui ont commémoré le trentième anniversaire, je crois qu'il est important que vous ayiez voulu continuer par le travail et par la réflexion, la célébration du 30ème anniversaire du Traité de Rome. D'après ce que l'on m'en a dit, vous avez fait un travail sérieux, entre personnalités qui savent de quoi elles parlent. Le danger qui est le nôtre c'est d'avoir à nous répéter puisque les progrès sont lents. Il faut pourtant veiller chaque fois à avancer. Et nous, nous avons besoin de vos réflexions pour ne pas nous laisser obnubiler par les difficultés quotidiennes et par la lenteur des progrès, apparente avais-je écrit, mais réelle aussi, inutile de se le dissimuler, pour prendre la mesure du chemin parcouru et pour ne pas perdre de vue l'objectif final qui est l'union politique.\
A Luxembourg, au mois de décembre 1985, l'Europe de la Communauté s'est fixé un nouvel horizon. Ceux qui l'ont vécu savent que cela n'a pas été facile et que généralement dans ce type de rencontre, il faut vraiment, selon une expression connue des téléspectateurs français, il faut vraiment attendre les cinq dernières minutes. Pas plus que, comme téléspectateur je ne sais jamais deviner avant les cinq dernières minutes qui est le coupable, pas davantage je ne savais, ou je ne sais, dans les rencontres qui nous rassemblent, cinq minutes avant quelle sera la conclusion. Celle-ci a été heureuse.
- Lorsque nous nous sommes séparés à Milan en juin 1985, nous avions le sentiment que la conférence inter-gouvernementale serait la signature d'un échec. Il y avait des refus, des résistances, qui ne paraissaient pas pouvoir être dominées. Et, dans les cinq dernières minutes, après de longs débats, de grandes explications, soudain grâce aux quelques personnes, soudain la décision était gagnée. La décision a été prise de faire un marché unique le 31 décembre 1992, ce marché unique, que le Traité de Rome avait décidé il y a trente ans.
- D'ailleurs nous nous réjouissons, nous nous félicitons mutuellement mais enfin cela fait trente ans de retard quasiment. Enfin il faut tenir compte des moeurs, des usages, des habitudes de pensée, on ne construit pas une telle oeuvre sur la base d'une Europe morcelée depuis l'origine, par enchantement. Il ne faut pas s'en indigner. Mais il faudra beaucoup de volonté et de persévérance pour, en cinq ans et même moins de cinq ans désormais, briser les protectionnismes, reporter aux frontières extérieures de la Communauté `CEE` les contrôles qui gênent la libre circulation des personnes, harmoniser les politiques fiscales, les politiques sociales.
- En même temps, ce marché unique, désormais fixé par beaucoup de gouvernants comme le point à atteindre, cela risquerait de nous égarer. On ne peut pas non plus s'en tenir là. Même si c'est une tâche immense dont parfois on peut douter de la réalisation en temps utile quand on aperçoit les retards qui s'accumulent ici et là, les hésitations. Mais on ne peut pas dire que l'Europe sera faite parce qu'on aura fait le marché unique en 1992. C'est nécessaire, ce n'est pas suffisant.\
Songez que l'Europe monétaire lancée il y a déjà neuf ans, est encore fragile et incomplète, tandis que se développent les mouvements sans contrôle du dollar et du yen. Nous n'avons pas, là encore, de véritable monnaie : l'Ecu où en est-il exactement ? L'Europe technologique : de brillants succès, on les cite toujours, Ariane, Airbus, Jet, Eurêka, sur un -plan plus général puisqu'il y a dix-huit pays qui participent, se développent mais il faut aussi décider du programme -cadre de recherche défini par le Président de la Commission, mon ami Jacques Delors.
- Il faut qu'on ait vraiment inscrit dans la tête qu'il est absolument nécessaire, si l'on ne veut pas se laisser distancer pour un demi-siècle et peut-être davantage, d'aboutir sur l'Europe technologique.
- Il ne faut pas non plus oublier ce que l'on appelle la cohésion. Il faut absolument que se rapprochent les régions pauvres et les régions riches. Ce ne sera pas non plus aisé, on n'aboutira pas à des résultats sensibles d'un seul coup £ il faut un minimum de crédits indispensables. Comme vous l'avez dit, monsieur le Président du Conseil de la Communauté, lorsqu'on connaît les équilibres qui s'établissent entre les douze pays de la Communauté, l'un n'ira pas sans l'autre : à la fois la sauvegarde du Traité de Rome fondé sur un certain type de société, un certain type d'exploitation familiale agricole, un certain paysage de l'Europe fidèle à ses traditions, tout en tenant compte, bien entendu, des transformations du temps moderne, puis l'ouverture sur d'autres politiques. Je l'ai dit tout à l'heure : approfondir et perfectionner le système monétaire £ c'est tout de suite l'Europe technologique, c'est tout de suite l'Europe régionale, l'Europe structurelle. Ou bien telle ou telle des parties prenantes considérera qu'elle n'a plus qu'à exercer sa pression, sans autre esprit que d'obtenir sa part, dénuée de tout esprit communautaire. Nous aurions une Communauté à douze où chacun joue sa partie sans s'occuper des autres.\
Mais je sais que vous n'avez pas borné vos travaux à l'Europe économique, vous avez traité de l'Europe de la culture, de l'éducation. Je pousse moi aussi un cri d'alarme chaque fois que j'en ai l'occasion et je me suis arrangé pour que les occasions fussent nombreuses au cours de ces derniers temps. Il est incroyable que l'on ne soit pas encore arrivé à restituer à nos étudiants les capacités qu'ils avaient au Moyen-Age. Ils ne peuvent pas aller d'une université à l'autre, ils n'en ont pas les moyens, on ne leur en donne pas les moyens : aller d'une université à l'autre, commencer dans l'une poursuivre dans une deuxième, terminer dans une troisième, à leur gré, comme ils voudront. Il faudrait que l'Université soit un lieu où les frontières de toutes sortes auraient véritablement disparu.
- Cela ne coûte pas cher. J'aperçois que les plus grands pays - par grands pays, je n'entends pas valeur, mais par le nombre des habitants, par le pouvoir d'achat, par leur revenu national - sont d'une timidité qui me fait, oui je le répète, élever la voix. J'espère que cela sera compris. L'apprentissage des langues, faut-il insister ? Vous avez dû en parler, j'imagine, beaucoup. C'est vrai qu'il faut se comprendre. Dans le mouvement général des idées, les travaux qui s'exécutent sur le -plan scientifique, littéraire ou simplement commercial, plus encore dans le langage commun, vous savez à quel point l'Europe ne se bâtira que si on peut se comprendre. Vous me pardonnerez ces redites, mais, enfin, plus on le saura à l'extérieur, mieux cela vaudra.\
Je crois que l'Europe se fera. Si je n'y croyais pas, j'agirais quand même dans ce sens en pensant que l'oeuvre d'une génération serait un jour reprise par une autre génération, que l'échec d'un siècle serait un jour réparé par la réussite d'un autre siècle. Mais enfin si l'on attend l'autre siècle, cela devient un calcul imprudent pour un certain nombre d'entre vous. Il vaudrait donc mieux dès maintenant conjuguer nos efforts pour réussir dès maintenant. L'Europe se fera si elle garde foi en elle-même. Le "Mouvement européen" y contribue éminemment. Ceux qui sont sur la brèche depuis l'origine méritent un grand merci et la gratitude de l'Europe.
- Il faut avoir le courage des idées fortes. Il faut créer une économie capable de supporter la compétition. Il faut développer la recherche de pointe. Il faut mettre en oeuvre une monnaie commune. J'ai dit à l'instant, échanger les langues et les cultures, créer une solidarité plus forte qu'elle ne l'est dans tous les domaines avec une ambition, un objectif. Je termine comme j'ai commencé, par ce qui s'impose : l'union politique et ses attributs évidents, c'est-à-dire une politique étrangère et une défense, les moyens de la sécurité.
- Quand on prend l'-état de l'Europe tel qu'il est, quarante ans et un peu plus après la deuxième guerre mondiale, on voit combien la tâche est complexe. Il ne faut pas se payer de mots. Il ne faut pas confondre les objectifs et les itinéraires. L'objectif est facile à définir, le moyen d'y parvenir est beaucoup plus complexe. On ne peut pas nier les réalités d'aujourd'hui. Mais je crois qu'avec le sentiment profond qui nous habite tous, celui de l'attachement à notre patrie, la projection de nos patries, donc de nos identités, la projection au sein de l'Europe n'est à mon sens qu'une façon de les valoriser, de les porter à une dimension supérieure.
- Je veux que vous sachiez, mesdames et messieurs, que vous êtes ici les bienvenus. Si j'ai pris l'initiative de vous réunir, sachant que seraient rassemblées dans cette salle tant de familles de pensées différentes, si différentes, tant de pays, tant de régions de ce pays, je pensais que dans ce lieu, où la République exerce ses plus grands desseins depuis qu'elle est la République, c'était important que de sentir, que vous sentiez, comme je le sens, le sentiment qu'on éprouve de bâtir ensemble. Bâtir quoi ? J'ai déjà cité bien souvent, et vous me pardonnerez de reprendre la même image, mais elle est belle, l'histoire de ces deux ouvriers du Moyen-Age : un passant d'un autre pays qui interroge £ ils mettent comme cela des pierres l'une sur l'autre. Au premier ouvrier - que faites-vous ? - il répond, eh bien, vous voyez bien, je mets les pierres l'une sur l'autre. Au deuxième ouvrier - que faites-vous - : je bâtis une cathédrale. Eh bien, c'est toute la différence. Il s'agit de bâtir l'Europe, c'est notre avenir commun. Monsieur le Président du Conseil de la Communauté, mesdames et messieurs, je vous remercie.\