8 avril 1987 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'issue de son voyage officiel au Portugal, notamment sur la question du désarmement en Europe, Lisbonne, mercredi 8 avril 1987.

LE PRESIDENT.- Comme je l'ai déjà dit dans mes déclarations publiques, c'était pour moi l'occasion de retrouver le Président de la République portugaise et un certain nombre de personnalités de ce pays, des amis de longue date, que leurs responsabilités actuelles placent aujourd'hui parmi les dirigeants de l'Europe. Il y avait donc, de ce point de vue, indépendamment de l'intérêt que je porte à une bonne et solide entente entre le Portugal et la France, il y avait aussi à débattre entre nous des intérêts communs au niveau même de l'Europe de la Communauté, de son présent et de son avenir. Voilà ce qui a été l'essentiel de cette rencontre, indépendamment de l'agrément que j'y ai trouvé.
- Maintenant, mesdames et messieurs, le plus simple c'est que vous posiez les questions de votre choix. Ainsi vous orienterez vous-mêmes cette conférence de presse. C'est à vous de choisir les sujets. Enfin, je tiens à remercier très vivement le président Mario Soares pour la qualité de son accueil, pour la chaleur de son amitié et par lui-même, comme par vous mesdames et messieurs, je souhaiterais que le peuple portugais pût véritablement savoir une fois de plus que la France est un pays ami. Voilà, alors nous vous écoutons.
- QUESTION.- Une question qui s'adresse aux deux présidents, est-ce que ce voyage a été l'occasion d'échanger d'utiles "tuyaux" sur la cohabitation ?
- LE PRESIDENT.- Je ne pense pas que cette conversation nous soit venue à l'esprit. On se demande pourquoi elle serait venue. Les problèmes du Portugal sont d'un certain ordre, et ceux de la France sont d'un autre. Nos institutions ne sont pas identiques même si, sur des points, elles se ressemblent. Quant à l'action du président Soares, elle tient pour beaucoup à son autorité morale et politique qui lui permet d'arbitrer, de proposer et finalement de jouer un rôle éminent dans la société portugaise ainsi que sur le -plan de la politique extérieure. Pour ce qui me concerne, vous en savez assez. Il est inutile que j'ajoute quelque chose aux informations dont vous disposez. C'est un sujet parisien, ce n'est pas un sujet pour Lisbonne.\
QUESTION.- Quel est le résultat de vos discussions avec M. Soares sur les problèmes de défense européenne ? Avez-vous parlé d'éventuels transferts des bases américaines d'Espagne au Portugal et avez-vous également évoqué la candidature du Portugal à l'UEO ?
- LE PRESIDENT.- Nous avons parlé des problèmes de défense et surtout de désarmement. Le problème de la défense européenne, c'est un débat de fond engagé depuis longtemps qui s'enrichit à tout moment de considérations nouvelles et qui n'est pas près de parvenir à son terme. Telle est l'histoire de l'Europe après deux guerres mondiales. Pour le désarmement, nous nous trouvons devant des échéances précises, des propositions, des débats, des décisions à prendre. Donc, nous en avons en effet beaucoup parlé, comme j'en avais parlé au gré de mes voyages ou de mes rencontres avec Mme Thatcher, avec le chancelier Kohl, avec M. Maertens, avec M. Gonzales. La conversation que j'ai eue avec M. le président de la République portugaise m'a confirmé dans le sentiment que nous partagions vraiment les mêmes sentiments, favorables au désarmement, bien entendu un désarmement contrôlé. La position de la France est une position un peu à part au sein de l'Alliance `Alliance atlantique` puisque, comme vous le savez, nous n'appartenons pas au commandement intégré de l'OTAN, donc sur ce plan-là, si notre appréciation est la même, notre démarche ne peut pas être absolument identique. La France est une puissance nucléaire £ les autres pays, hors la Grande-Bretagne, ne le sont pas. Mais s'il s'agit des grands choix, des grandes orientations, des armements pour garantir la paix, le désarmement contrôlé, simultané, nous pouvons aller plus loin mais chaque étape devant être engrangée. Tout cela n'a pas provoqué entre nous de débat difficile puisque nous avons la même orientation.\
`Suite réponse sur les éventuels transferts des bases américaines d'Espagne au Portugal`
- Les problèmes plus particuliers des bases américaines, ce n'est pas un problème français. Si le Président Soares me fait part de ses propres réflexions, ce n'est pas pour en débattre de pays à pays. Mais s'il veut communiquer ses impressions, c'est à lui de le faire. Le problème se pose également en Espagne. M. Gonzales m'en avait parlé et j'avais eu la même attitude, cela est le domaine de la souveraineté de l'Espagne. Quelles seront les décisions prises par ce pays, les décisions prises par le président américain, je l'ignore. De quelle façon se retournera-t-on de ce côté-ci, vers le Portugal, je l'ignore également. Si j'avais une opinion ou des informations, je laisserais le soin au président de la République portugaise d'apprécier ce qu'il doit en dire. Donc je ne peux pas, et je le regrette, vous répondre sur ce plan-là. Nous avons surtout parlé des dernières propositions de M. Gorbatchev et de l'attitude à avoir selon la situation, les réponses qu'il convient d'apporter dans le -cadre d'une démarche commune. Alors là, je peux vous le dire, je crois que nous sommes tout à fait d'accord.
- LE PRESIDENT SOARES.- Si vous me permettez, je dirai encore un mot sur ce sujet. Nous avons apprécié depuis longtemps les positions françaises et notamment les positions du Président Mitterrand en matière de défense. Nous avons toujours suivi la position de la France et du Président Mitterrand au sujet des débats militaires américains en Espagne. Les journaux parlent beaucoup mais nous n'avons aucune information s'il y a une intention des Américains de retirer ces bases d'Espagne, ni de l'Espagne. Il y a une négociation normale entre l'Espagne et l'Amérique, nous n'intervenons pas dans cette négociation, et nous ne sommes jamais intervenus ni avec les Américains, ni avec les Espagnols sur ce sujet qui ne nous regarde pas. Pour plusieurs raisons, nous ne pourrions pas parler avec la France d'un sujet qui concerne les Espagnols et les Américains. D'ailleurs en politique de défense, aussi, l'Espagne, comme vous le savez, a des positions très semblables aux positions françaises et à nos propres positions.\
QUESTION.- J'aimerais demander aux deux Présidents si la question de Timor Oriental a été abordée pendant ce voyage ?
- LE PRESIDENT.- Je connaissais déjà les positions du Président Soares, je me souviens qu'il les avait solennellement réaffirmées lors de son investiture au Parlement. Et j'avais entendu de mes deux oreilles ce qu'il avait dit. Ensuite, nous nous en étions entretenus et à la veille de mon voyage en Indonésie, le Président Soares avait tenu à me rappeler les positions du Portugal. J'ai moi-même parlé de ce sujet avec le Président Suharto. Donc, cela aurait été une redite mais le Portugal a à coeur la solution de ce problème et vous savez que dans les discours qui ont été prononcés, le premier discours notamment du Président Soares lors du dîner d'Etat qu'il a offert à la délégation française, il a été encore question de Timor. Vraiment je n'ai plus rien à apprendre à ce sujet. Mon professeur est bon et je ne suis pas forcément un mauvais élève. Je sais très bien de quoi il s'agit. La France dans cette affaire a eu une attitude extrêmement prudente depuis déjà de très longues années, car c'est malheureusement un débat qui dure, qui dure et qui n'approche pas de sa solution. La situation de la France dans le monde l'a amenée à montrer une certaine prudence mais enfin il est quand même clair que le droit pour les populations qui sont là-bas, c'est le droit, on ne peut pas biaiser avec cette notion morale et juridique. C'est donc un sujet que je serai amené à reprendre et nous verrons avec le gouvernement de quelle façon agir.
- LE PRESIDENT SOARES.- Vous permettez que je dise aussi un mot ? Pour nous, la question Timor, c'est une question strictement de droits humains. Le Portugal a fait, depuis la révolution d'avril, une décolonisation courageuse, comme vous le savez. Nous venons de négocier avec la Chine populaire le transfert de la souveraineté de Macao à la Chine, à la fin du siècle.
- Nous n'avons aucune prétention sur le Timor oriental, mais nous ne pouvons pas accepter que, par la force, le Timor oriental soit annexé à un pays qui n'est pas un pays démocratique : l'Indonésie. Et, pour nous, c'est seulement de faire connaître les droits du peuple de Timor oriental à son autodétermination et à son indépendance.
- LE PRESIDENT.- Oui, j'insiste sur ce point. Moi aussi, lorsque je parle du droit, il s'agit du droit des gens là-bas, du droit des personnes qui ont une forme de civilisation, une forme de religion, des usages tout à fait particuliers par -rapport au monde environnant. Sur le -plan de la défense des droits de l'homme, ce serait anormal que cette population soit privée de ce droit.\
QUESTION.- Est-ce que vous allez évoquer une initiative communautaire de la CEE en direction des pays de la ligne de front ?
- LE PRESIDENT.- La question c'est : est-ce que nous allons parler d'une politique disons commune, à l'égard des problèmes des pays de l'Afrique australe dont vous avez parlé vous-même, lors de votre discours initial, en évoquant précisément le Mozambique et l'Angola ?
- LE PRESIDENT SOARES.- Si vous voulez. Oui, vous savez que le Portugal a beaucoup d'intérêts sur ce problème et ça nous préoccupe énormément. Nous avons condamné, tout le temps, d'une façon très claire, la politique de l'apartheid qui à nos yeux est responsable de la perturbation de cette zone du monde. De même que les interventions qui ont été faites par l'Afrique du Sud tant au Mozambique qu'en Angola. La situation en Namibie nous préoccupe aussi, parce que ce n'est pas possible de faire respecter les droits de ce peuple à son autodétermination et les résolutions des Nations unies qui ont été prises à ce sujet n'ont pas été respectées par l'Afrique du Sud. Alors, nous trouvons que la situation est chaque jour plus préoccupante, même la situation interne dans l'Afrique du Sud. Nous craignons qu'il puisse arriver une explosion raciale dans cette région du monde qui aurait des conséquences terribles non seulement pour la région mais aussi pour toute l'Afrique, même pour le monde.
- Nous avons, comme vous le savez, beaucoup de ressortissants portugais en Afrique du Sud, à peu près 600000, et nous devons aussi protéger nos compatriotes portugais en Afrique du Sud. C'est pour cela que nous avons pris les mesures pour justement pouvoir maintenir un contact permanent et un appui à ces Portugais qui travaillent et vivent en Afrique du Sud.
- LE PRESIDENT.- Pour nous, en France, les principes sont très simples à définir : nous réprouvons et nous condamnons l'apartheid. Nous optons pour l'indépendance de la Namibie. Telle a été notre position constante au sein du groupe des Cinq, dit "groupe de contact". Nous souhaiterions que les pays qui se trouvent dans cette région d'Afrique s'éloignent ou se dégagent des ingérences extérieures. Nous entretenons des relations diplomatiques qui sont bonnes avec les gouvernements de ces pays. Voilà, une fois qu'on a dit ça, on a expliqué les votes et les positions de la France dans les institutions internationales.\
QUESTION.- Monsieur le Président, je dois vous poser une question sur les relations entre la France et l'Union soviétique. Depuis vingt-quatre heures, il semble qu'on soit un peu nerveux à Moscou, à l'égard de la France, et qu'on emploie des termes un petit peu excessifs. Vous pensez que c'est simplement un coup de colère, que ça peut éventuellement remettre en cause le voyage du Premier ministre `Jacques Chirac`, ou, au contraire, c'est l'usage, dans les relations diplomatiques, que l'on connaisse des hauts et des bas ?
- LE PRESIDENT.- Je rentre ce soir et je vais me faire communiquer toutes les pièces de ce dossier. Ce qui est vrai, c'est que lorsque des affaires d'espionnage sont révélées - elles le sont toujours par les polices qui cherchent à défendre les secrets militaires, industriels de toutes sortes - il est d'usage que ces personnes, celles qui se livrent à cette industrie, soient renvoyées chez elles. Il est d'usage aussi, il faut l'admettre, bien que ce ne soit pas absolument constant, que le pays qui se trouve ainsi dénoncé applique des mesures de rétorsion ou similaires. Donc, c'est ce qui m'a permis de dire que c'était un déroulement classique jusqu'à ce que j'apprenne hier soir, comme vous, cette déclaration d'un officiel soviétique, qui a monté le ton et dépassé cette sorte de rythme traditionnel des affaires d'espionnnage avec leur suite diplomatique. J'apprécierai en connaissance de cause de quoi se plaint exactement l'Union soviétique, d'avoir été en somme "indûment" - je mets ces termes entre guillements - mise en cause dans une affaire qui serait constestée. Deuxièmement, l'URSS se plaindrait - c'est ce que vous m'avez dit monsieur Pinto, vous-même, puisque nous en avons parlé - de la façon dont les expulsions se seraient accomplies. Je ne suis pas en mesure, ici, à Lisbonne, de vous donner une appréciation à ce sujet. Je souhaite que les relations entre l'Union soviétique et la France se déroulent normalement, que ces relations soient bonnes, dans la franchise, parfois brutale, des affirmations politiques ou militaires. C'est tout à fait le rôle des grands pays que d'agir de cette façon mais sans vouloir détériorer le climat nécessaire de la négociation £ et aujourd'hui, l'Occident est engagé dans une négociation avec l'Union soviétique, je l'espère vers la paix. Il faudrait veiller à ne pas troubler ces choses, étant entendu que tout ce qui touche aux politiques intérieures ou à ce mécanisme permanent qu'est la -recherche de l'information - c'est l'un ou c'est l'autre - ne vienne pas brouiller un jeu déjà assez compliqué. Personnellement, je souhaite vivement que, s'il y a des informations à échanger sur l'incident dont vous me parlez, nous le fassions.
- Cela ne devrait pas être, disons du même niveau, que la visite d'un chef de gouvernement de la République française en Union soviétique qui se situe sur un tout autre -plan. En tout cas, pour l'instant, je vous exprime des souhaits et je ne porte pas d'opinion sur une réalité que j'ai besoin d'approfondir.\
QUESTION.- Monsieur le Président, la France acceptera des négociations sur la réduction de ses forces nucléaires ou va poursuivre le programme de développement de ses forces ?
- LE PRESIDENT.- Mais la France a bien l'intention de maintenir sa politique et elle n'est pas du tout en cause dans les négociations entre Américains et Soviétiques. Elle n'a rien à y voir. Cela nous intéresse en tant que peuple de 55 millions de personnes, comme cela intéresse le Portugal. Bien entendu, nos populations seraient concernées par la guerre et donc s'intéressent à tout moment et souvent s'inquiètent des relations entre les deux plus grands pays du monde. Mais, sur le -plan de l'armement, la France n'a pas de missiles intermédiaires. Elle n'est donc pas concernée par la discussion en cours sur le missile intermédiaire à longue portée qui est, comme vous le savez, d'après la définition que se donnent entre eux de façon arbitraire les Américains et les Russes, d'une portée comprise entre 1000 et 4000 ou 4500 kilomètres. Le système central nucléaire français est par -nature stratégique, comme le système central soviétique. Quand on va dans le sens Paris à Moscou on se demande pourquoi on deviendrait intermédiaire, tandis que de Moscou à Paris on serait stratégique. Ce sont les mêmes définitions qui doivent s'imposer pour qualifier le type d'armement dont on dispose. Il n'est pas question que la France se mêle des réductions d'armement ou alors il faudrait, comme je l'ai dit à la tribune des Nations unies, que la réduction russe et américaine soit telle que passant des quelques 13000 américaines et des quelques 11000 charges nucléaires soviétiques, on se rapproche des 150 dont la France dispose ou des 90, ou à peu près, anglais... Etant bien entendu que nous avons en effet l'intention d'accroître par la multiplication des têtes cet armement. Mais même en l'accroissant, nous serons très très loin - on pourrait dire 450 par -rapport à 11000 et 13000 -. Alors quand les deux plus grandes puissances auront réduit leur armement, il en est question, paraît-il, à un niveau plus raisonnable, nous ne refuserons pas la discussion. Mais nous n'y sommes pas et, contrairement à un certain nombre d'hommes politiques importants français, j'ai eu l'occasion de le dire récemment dans une émission de télévision, personnellement je ne regrette pas que nous ne soyons pas à la table de négociation : je ne le regrette pas et si on me le demandait, je refuserais, car nous ne parlons pas des mêmes choses.\
QUESTION.- Ma question s'adresse aux deux Présidents. Est-ce que les pays où il y a cohabitation sont finalement gouvernés plus au centre, notamment en raison du rôle qu'y joue le Président ?
- LE PRESIDENT.- Il s'agit d'un commentaire et le commentaire vous appartient. Vous voudriez que je vous confie mes impressions. Lorsque nous serons à Paris, je le ferai le cas échéant. J'ai des impressions parfois mélangées mais au total, je respecte les institutions de la République. Je pense que le président Soares en fait autant.
- LE PRESIDENT SOARES.- Vous savez que la situation portugaise constitutionnelle est un peu différente de la situation française. D'abord parce que les pouvoirs des deux présidents sont différents et la pratique constitutionnelle des deux pays n'est pas non plus pareille. Moi je fais une lecture de la Constitution portugaise qui est plutôt parlementaire, cela veut dire que je considère que le centre vital de la démocratie, c'est le Parlement. Le gouvernement portugais est un gouvernement minoritaire et c'est pour cela que justement il vient d'avoir contre lui une motion de censure des partis de l'opposition qui a été votée favorablement et le gouvernement est tombé. Mais selon les règles de la Constitution portugaise, le gouvernement tombe mais il reste en exercice jusqu'à ce que le Président de la République exonère le Premier ministre et cette exonération se produit seulement quand le Président nomme un autre Premier ministre. Selon les règles de la Constitution, cette nomination n'est pas libre pour le Président. Le Président doit nommer le Premier ministre en tenant compte des résultats des élections, ce qui rend très difficile une nomination d'un Premier ministre qui ne soit pas du parti disons qui a gagné les dernières élections. Mais, évidemment comme il n'y a pas un parti majoritaire, il y a seulement des partis avec une majorité relative, la situation est encore plus difficile. Comme vous le savez maintenant, je suis en train de faire des consultations, je suis en train d'entendre les partis politiques, les leaders politiques et les hommes responsables après j'entendrai le Conseil de la Révolution, pardon de l'Etat et, seulement après les avoir entendus, je prendrai une décision.
- LE PRESIDENT.- Ce que vous appelez la cohabitation monsieur Artz c'est une pratique politique qui découle des rapports de force électoraux. Mais cette pratique politique ne peut s'exercer que dans le -cadre des institutions et de ces institutions, je suis le gardien. En général, quand nous parlons de cela, nous ne parlons pas du même sujet.\
QUESTION.- Monsieur le Président de la République française, est-ce que la découverte par la police de terroristes liés à l'ambassade d'Iran est de -nature à terme à remettre en cause la normalisation des relations de la France avec ce pays ?
- LE PRESIDENT.- Si telle est la réalité, je ne pense pas que cela favorise exagérément des relations confiantes, mais l'objectif est, autant qu'il est possible, d'établir des relations tout à fait pacifiques avec tous les pays de cette région du monde. Ce n'est pas facile, on le constate tous les jours. Nous avons à prendre en compte le sort des otages français détenus aujourd'hui au Liban, à tenir compte des échéances qui s'exercent dans cette région complexe. La suite vous sera dite par les faits et moi, je ne prononcerai aucun mot qui puisse compliquer ce qui l'est déjà assez.\
QUESTION.- Dans le -cadre des propositions Gorbatchev vous avez parlé de démarche commune. Hier...
- LE PRESIDENT.- Commune ? Portugal et nous-mêmes ? Non, nous avons...
- QUESTION.- Justement je voudrais comprendre le mot démarche.
- LE PRESIDENT.- Nous avons la même démarche mais nous ne faisons pas de démarche diplomatique particulière en commun. QUESTION.- Dans le -cadre d'une interview qu'il a bien voulu nous accorder hier soir, M. Mario Soares a rappelé que le Portugal s'était prononcé pour le fait que le Conseil européen se saisisse du sujet. Est-ce que l'on en est arrivé à un point où l'on peut dire que le Conseil européen pourrait traiter de ces questions ?
- LE PRESIDENT.- Ecoutez, ne tombons pas trop dans le formalisme. Je dois faire remarquer que le Conseil européen n'a pas compétence pour traiter de ce sujet. Ce que je regrette. C'est un des progrès que je voudrais voir réaliser par l'Europe que de pourvoir saisir le Conseil européen de tous les sujets qui tendent à l'unité politique des Douze. Donc, si l'on adopte un point de vue formel, le Conseil européen n'a pas de qualité pour débattre de ce type de sujet qui n'appartient pas aux définitions du Traité de Rome. Voilà, c'est comme cela. Maintenant le Conseil européen a pris l'habitude de discuter de beaucoup de questions qui relèvent de la politique internationale. Il exprime une opinion sur l'Afrique australe sur les problèmes du Proche et du Moyen-Orient, sur l'Afghanistan, quelquefois, j'aimerais qu'il en prononçât sur l'Amérique centrale etc... Donc, il ne peut pas s'interdire à lui-même d'avoir une idée sur le devenir de la sécurité en Europe, mais enfin formellement il suffirait qu'un ou plusieurs pays fissent obstacle à ce type de discussion pour que nous n'ayons pas qualité. Voilà le problème. Je suis bien convaincu que les douze pays représentés, en tout cas un certain nombre d'entre eux, seront naturellement conduits à traiter de la défense.\