17 mars 1987 - Seul le prononcé fait foi

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Interview de M. François Mitterrand, Président de la République, au "Corriere della sera" le mardi 17 mars 1987, sur l'Europe.

QUESTION.- Vous avez dit : "La France est notre patrie. L'Europe est notre avenir". Mais que signifie, aujourd'hui, être Européens ?
- LE PRESIDENT.- Il n'existe dans mon esprit aucune contradiction à aimer profondément son pays en même temps que l'on se sent Européen. Le "chacun pour soi" des pays européens serait une erreur mortelle. S'ils ne s'unissent pas, ils n'auront ni la dimension politique, ni la capacité économique de supporter les concurrences militaire, industrielle, commerciale, technologique. Les guerres civiles européennes de ce siècle ont affaibli l'Europe. Elles l'ont coupé en deux. Mais à l'heure même des pires déchirements des esprits clairvoyants présentaient l'Europe à venir. Ainsi Altiero Spinelli lança-t-il son manifeste pour l'union européenne, alors que le nazisme semblait triompher. Etre Européen c'est doter la Communauté des Douze de structures de plus en plus fortes et ouvrir autant qu'il sera possible la Communauté sur le reste de l'Europe.
- QUESTION.- On dit que l'Europe unie sera possible grâce à la rencontre de plusieurs volontés : celle des gouvernements et celle des citoyens. Quelles sont les volontés qui, aujourd'hui lui font défaut ?
- LE PRESIDENT.- On peut s'irriter des lenteurs de la construction européenne, des querelles de détail ou des batailles de clochers, mais il faut savoir progresser pied à pied, étape par étape. Sans la volonté politique patiente des gouvernements, rien ne se fera. Mais le difficile combat pour l'union de l'Europe sera gagné par l'apport des citoyens et d'abord de la jeunesse. C'est cette conviction qui m'a conduit à proposer l'"Europe des Citoyens", et à faire confier au comité Adonino le soin de proposer les mesures concrètes.
- QUESTION.- Pendant des années, l'élément fédérateur de l'Europe a été l'axe franco-allemand. On a le sentiment aujourd'hui que la construction de l'Europe est en crise du fait même que cet élément fédérateur se trouve lui aussi en difficulté. Peut-on espérer dans une reprise totale du dialogue franco-allemand pour réactiver le moteur de l'Europe ?
- LE PRESIDENT.- Il n'y a pas de crise franco-allemande. Il y a parfois des intérêts divergents qui ont toujours été surmontés. La France et l'Allemagne savent, comme l'a dit le Chancelier Kohl, qu'"elles ne peuvent maîtriser leur avenir qu'ensemble". A plusieurs reprises, depuis trente ans, les initiatives franco-allemandes, c'est vrai, ont fait avancer l'Europe. Cela se produira de nouveau. Mais je considère aussi que chacun des pays d'Europe apporte une contribution décisive à sa construction. L'Europe ne se réduit pas à un dialogue franco-allemand sans lequel rien, à l'origine, n'eût été possible.\
QUESTION.- Vous avez dit, il y a quelques années, que la France au nom de l'Europe aussi, aurait essayé de promouvoir un nouvel ordre monétaire international. S'agit-il d'un projet abandonné ?
- LE PRESIDENT.- Au contraire, ce projet n'a jamais été aussi actuel. Lorsque je l'ai proposé au sommet de Versailles en 1982, je me suis heurté à un grand scepticisme. Mais depuis, l'idée à fait son chemin. Les Etats-Unis eux-mêmes ont fini par reprendre à leur compte certaines des idées françaises. Aujourd'hui, l'accélération de la baisse du dollar ravive les travaux sur ce sujet. Vous avez pu noter que les décisions prises par les ministres des finances, lors de la réunion monétaire qui s'est tenue à Paris le 22 février, sont allées dans le sens que je souhaitais. Je souhaite aussi que les propositions françaises de coopération monétaire à l'intérieur de la Communauté et entre la Communauté et les pays tiers puissent enfin déboucher.
- QUESTION.- La monnaie européenne. C'est un objectif proche ou bien irréalisable ?
- LE PRESIDENT.- La monnaie, comme la défense, est au coeur de la souveraineté. C'est pourquoi on ne peut imaginer qu'une monnaie européenne remplace les monnaies nationales existantes à brève échéance. Mais ce qui est possible, c'est de faire de l'écu une grande monnaie internationale qui, à côté des autres monnaies européennes, jouerait un rôle stabilisateur face au dollar et au yen. J'ai dit récemment à Londres "ou bien le SME réussira et l'Europe pourra se faire, ou bien il échouera et l'Europe ne se fera pas". Je le répète ici.\
QUESTION.- Peut-on imaginer une Europe unie et indépendante sans une défense européenne qui ne soit aussi nucléaire ? Pourquoi la France et la Grande-Bretagne ne mettraient-elles pas au service d'une défense européenne autonome leur dissuasion nucléaire ?
- LE PRESIDENT.- J'ai indiqué à Chatham House qu'une défense européenne me paraissait nécessaire à l'achèvement de la construction européenne, en complément logique de l'union politique. Mais ce n'est pas un préalable. La défense européenne s'organisera autour d'une combinaison entre les armes, nucléaires et conventionnelles. Mais bien des progrès peuvent être accomplis dès maintenant, par exemple par la coopération en matière d'armement, dans l'analyse des menaces, dans l'ajustement des stratégies.
- QUESTION.- La création d'un conseil européen pour la sécurité dont tous les pays de la CEE feraient partie est-elle souhaitable ?
- LE PRESIDENT.- La mise en place actuelle d'une nouvelle instance ne ferait sans doute pas avancer la défense européenne. Les situations des différents pays de la Communauté en matière de défense, vis-à-vis même de l'Alliance atlantique, sont diverses. Il faut donc avancer pragmatiquement mais fermement avec ceux qui sont en mesure d'agir plus étroitement ensemble. Un conseil européen consacré plus particulièrement à la sécurité y contribuerait puissamment.\
QUESTION.- Peut-on accepter l'idée que l'Europe soit absente des réunions de ceux qui, en négociant la réduction des armements garantissent la paix ?
- LE PRESIDENT.- N'oublions pas qu'il s'agit d'une négociation entre les Etats-Unis et l'URSS qui a pour but la réduction des armements américains et soviétiques actuellement présents en Europe, mais aussi dans le reste du monde, et la prévention de leur course aux armements dans l'espace. A cet égard, nous n'avons aucune raison - je parle pour la France - de demander à participer à de telles négociations. Qu'y ferions-nous ? Dans le même temps, je souhaite que les deux plus grandes puissances réussissent à réduire leur surarmement, et que, ce faisant, elles ne portent d'aucune façon atteinte aux fondements de la sécurité de l'Europe.
- QUESTION.- Que pensez-vous des dernières propositions de M. Gorbatchev ?
- LE PRESIDENT.- J'ai pris connaissance avec un réel intérêt des dernières propositions de M. Gorbatchev sur les forces nucléaires intermédiaires à longue portée américaines et soviétiques en Europe.
- Je suis favorable à l'ouverture de négociations visant à l'élimination ou à la réduction de ces forces. C'est une demande que les pays occidentaux ont formulée à plusieurs reprises depuis huit ans et, récemment, dans le cadre de l'Alliance atlantique à Bruxelles. Ce n'est pas au moment où les Soviétiques cèdent enfin aux pressions de l'Ouest que nous allons changer d'avis.
- Bien entendu, des précautions sérieuses s'imposent. Les réductions devront être équilibrées, simultanées et contrôlées.
- Quant à la France, elle n'est pas partie prenante à la négociation. Ses armes ne sont pas en cause. Elles relèvent toutes d'un système central de caractère stratégique.
- Je souhaite enfin que sur les questions touchant au désarmement l'Europe affirme son unité de vues.\
QUESTION.- La France pourrait-elle être favorable à la construction d'un bouclier spatial européen ?
- LE PRESIDENT.- Je crois avoir compris que le bouclier spatial auquel pense le Président Reagan aurait pour fonction d'intercepter les missiles dès leur lancement et pendant le vol. S'il était réalisable, ce que les Américains ne savent pas encore, il ne serait donc pas spécifiquement américain ou européen. En revanche, la question qui pourrait se poser serait celle d'une défense ponctuelle terminale. Les Européens veulent-ils coopérer entre eux pour réaliser les radars et les missiles sol-air perfectionnés susceptibles de défendre certains sites européens particulièrement sensibles ? La question mérite d'être posée. Peut-être serait-il plus urgent que l'Europe envisage de se doter d'une véritable capacité militaire d'observation.
- QUESTION.- Que faire pour construire l'Europe de l'espace ?
- LE PRESIDENT.- L'objectif est clair : nous devons, dans ce secteur décisif pour notre avenir, assurer l'autonomie de l'Europe, de manière à ne pas laisser aux Etats-Unis et à l'URSS le monopole de l'espace. Il faut d'abord faire ce qui a été décidé :
- construire un grand lanceur adapté aux missions commerciales des années 90, c'est Ariane 5,
- réaliser un avion spatial pour le travail dans l'espace, c'est Hermès,
- participer, dans des conditions équilibrées, à la station orbitale américaine, c'est Colombus.
- Au-delà, pourquoi ne pas envisager plus tard une station orbitale européenne ? Je l'ai proposé il y a plusieurs années à La Haye. Et pourquoi ne pas engager, dès maintenant, comme je l'ai proposé, entre les pays qui le souhaitent, une coopération pour les satellites militaires d'observation ?\
QUESTION.- Etes-vous de l'avis qu'une réponse unitaire de l'Europe au problème du terrorisme passe aussi par une définition précise des intérêts européens dans certaines zones sensibles, la Méditerranée comme le Moyen-Orient ?
- LE PRESIDENT.- Pour être efficace, une réponse au terrorisme, qui frappe divers pays d'Europe, doit certainement être coordonnée au niveau européen. Elle suppose une coopération sans restriction entre les administrations et les services compétents. Si à cette coopération s'ajoutaient des analyses véritablement communes sur les situations politiques qui sont à l'origine des divers terrorismes et sur les méthodes appropriées pour en tarir la source, cela serait encore mieux.
- QUESTION.- Ne serait-il pas préférable que les exportations d'armes soient réglées par une agence européenne spécifique ?
- LE PRESIDENT.- C'est un objectif intéressant, à considérer. Mais il suppose, nous en avons parlé précédemment, qu'une véritable unité politique et de défense ait été instaurée. Nous en somme loin si j'en juge par la brutalité des compétitions actuelles entre pays européens.\
QUESTION.- Que peut faire l'Europe pour favoriser les "nouvelles tendances" de l'Union soviétique ?
- LE PRESIDENT.- Dès ma première rencontre avec lui, j'ai constaté que M. Gorbatchev était un homme conscient des nécessités de son temps, mu par de grandes ambitions et décidé à rendre son pays plus moderne. Il sait que les responsables français suivent avec beaucoup d'intérêt, et sans a priori, ce qu'il a entrepris. Mais c'est essentiellement sur le plan intérieur qu'il aura à fournir la preuve de sa capacité à aboutir. Tout progrès touchant aux droits de l'homme, à la libre circulation des personnes et des idées, à la démocratie à la base sera suivi par nos opinions occidentales avec la plus grande attention. Toute avancée sérieuse vers la paix devra être accompagnée par nos propres initiatives. Il n'en reste pas moins que le premier juge de ce que vous appelez "les nouvelles tendances" est et restera le système marxiste-léniniste.\
QUESTION.- Le défi technologique. Le programme "Esprit" et les autres programmes gérés par Bruxelles ne sont-ils pas limitatifs par -rapport aux ambitions qu'une Europe unie pourrait avoir ?
- LE PRESIDENT.- Le champ de la coopération scientifique et technologique est immense. Il existe de multiples projets - fusion par laser, exploration planétaire - qui sont le signe de l'extraordinaire vitalité de la science européenne et ils doivent être encouragés. Mais, dans chacun de nos pays, nous butons sur les limites budgétaires. Raisons de plus pour coopérer, pour unir nos efforts et nos moyens.
- "Esprit", "Eurêka", illustrent la montée en puissance de la recherche européenne. Les entreprises ont acquis une sorte de réflexe européen qui me semble annoncer des alliances industrielles prometteuses.
- Il y a donc un terrain favorable pour passer à la vitesse supérieure. Je souhaite que les ressources de la Communauté affectées à la recherche augmentent et je me suis réjoui des initiatives prises dans ce domaine par Jacques Delors.\
QUESTION.- Le dernier message qui nous parvient de Bruxelles est celui du "marché unique avant 1992". Certes, l'objectif est important, mais l'Europe risque une fracture sociale. C'est-à-dire que le marché unique pourrait rendre plus riche les régions riches et plus pauvres les régions pauvres. En outre, avec l'actuelle dotation du budget assigné à la CEE, il est impossible de créer des politiques communes de solidarité. Ne serait-il pas nécessaire d'essayer de corriger cette tendance ?
- LE PRESIDENT.- Il est clair que les douze pays de la Communauté et, au sein de ces pays, les régions, n'ont pas atteint un même stade de développement. La construction de l'Europe suppose que l'on s'attache à corriger les déséquilibres régionaux et sociaux. Le marché intérieur, en cinq ans, c'est une immense -entreprise. Mais la poursuite des politiques traditionnelles (PAC, politique régionale ou sociale) et le développement de politiques communes dans les nouveaux domaines (recherche, coopération universitaire, échange de jeunes), conduiront à augmenter les ressources de la Communauté. Les résistances qui s'affirment sur ce point peuvent faire craindre un report des délais. J'espère qu'il n'en sera rien.\
QUESTION.- Le Parlement européen, tel qu'il ressort aujourd'hui sur la scène communautaire, apparaît comme une institution coûteuse et d'une utilité collective assez faible. Ne vaudrait-il pas mieux lui attribuer un rôle constituant afin de définir le nouveau contrat européen pour le XXIème siècle ?
- LE PRESIDENT.- Le Parlement européen joue bien le rôle qui lui est attribué par les traités et qui a été accru par l'Acte unique. On devra à nouveau considérer les compétences législatives du Parlement, notamment en matière de ressources communautaires, lorsque sera achevé le grand marché intérieur. Le rôle du Parlement européen se développera au fur et à mesure que se fera l'intégration de l'Europe, je n'ai pas de doute là-dessus. Quant à un pouvoir constituant, je ne crois pas les Douze prêts à y souscrire.
- QUESTION.- Dans le discours que vous avez tenu récemment à Londres, vous avez dit être favorable à la nomination, et plus tard à l'élection d'un président du Conseil européen pour une période supérieure aux six mois actuels. Quelle devrait être la tâche et quels pourraient être les pouvoirs de ce président de l'Europe ?
- LE PRESIDENT.- J'ai dit que je n'étais pas hostile à l'idée d'une présidence de l'Europe car la pratique actuelle n'est pas satisfaisante : tous les six mois, la présidence du Conseil change. La nomination et l'élection d'un président durable clarifierait la situation, mais il faudra beaucoup de réflexions en commun pour déterminer ce que seront son mode de désignation, ses pouvoirs, ses attributions.\
QUESTION.- Les jeunes attendent de l'Europe une réponse à leurs inquiétudes : le chômage, l'absence de contrôle d'une société qui court plus vite que l'instruction donnée par leurs universités. L'Europe, aujourd'hui peut-elle apporter une réponse qui lui soit propre ?
- LE PRESIDENT.- Comme ce type de problème est partout posé, l'esquisse de solutions comparables d'un pays à l'autre, méditées et, le cas échéant, décidées en commun ne peut qu'être souhaitée. Il y faudra beaucoup de détermination. Le choix européen est aussi un choix de civilisation.
- QUESTION.- Peut-on tirer une leçon européenne des manifestations étudiantes qui ont eu lieu en France, en Italie, en Espagne, en Allemagne fédérale ?
- LE PRESIDENT.- Responsabilité, liberté, égalité des chances oui, on entend partout cet appel de la jeunesse. Nos sociétés se ressemblent. Elles ne peuvent faire l'impasse sur leur jeunesse. L'Europe unie sera en soi un début de réponse commune.
- En tout cas, la jeunesse européenne veut être plus et mieux formée. Elle réclame l'accès à l'enseignement supérieur pour tous ceux qui le souhaitent. Elle veut obtenir des diplômes de qualité augmentant les chances de trouver un travail, et une formation générale élevée favorisant l'accomplissement personnel.
- Cette demande se conjugue avec un besoin considérable d'élever la formation des personnels employés dans les entreprises. Faire rencontrer cette demande et ce besoin est un enjeu essentiel pour le progrès et l'avenir de l'Europe. L'Europe de la jeunesse veut exister. A nous de créer pour elle l'Europe de la formation et de la culture.\
QUESTION.- Les directeurs de journaux disent que l'Europe ennuie le public. La conjuration du silence des médias sur les problèmes de l'Europe n'est que le reflet de cette perception. Ne s'agit-il pas là d'un élément inquiétant du cadre communautaire ?
- LE PRESIDENT.- Je ne vois pas de quels directeurs de journaux vous parlez quand vous affirmez qu'ils sont convaincus que "l'Europe ennuie le public". C'est à mon avis plutôt une question de présentation : quand les responsables européens se chamaillent sur les montants compensatoires à Bruxelles, quand ils démontrent une relative incapacité à s'accorder sur une position politique commune à Luxembourg, quand la cacophonie règne entre les groupes parlementaires à Strasbourg, bref quand il s'agit de difficultés, ces actualités sont présentées à l'opinion sous l'étiquette "Europe".
- En revanche, les réussites - qui sont nombreuses - deviennent des sujets à traiter dans d'autres rubriques : Airbus par les spécialistes de l'aéronautique, Eurêka par les journalistes spécialisés en finances ou technologie, Ariane devient un sujet de gloire et d'intérêt pour les responsables de la rubrique "espace", etc...
- Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que l'opinion trouve rébarbatifs les sujets présentés sous le terme générique des affaires européennes. Pour ma part, j'ai la certitude que les opinions de nos différents pays continuent à croire à l'Europe.\
QUESTION.- Six ans se sont écoulés depuis votre élection à la présidence de la République française. Y aurait-il eu quelque chose que vous auriez voulu faire pour l'Europe, mais que vous n'avez pas réussi à faire ?
- LE PRESIDENT.- Bien sûr, je l'ai dit, je souhaiterais que les choses aillent plus vite. Mais j'observe que beaucoup a été fait depuis six ans : l'Europe bleue, c'est-à-dire l'Europe de la pêche £ l'Europe technologique avec Eurêka et le développement de programmes comme Ariane ou Airbus, l'élargissement de la Communauté à l'Espagne et au Portugal, l'Europe des citoyens £ enfin, l'Acte unique européen qui fixe une date, 1992, pour la réalisation du marché intérieur, avec pour corollaire une extension du Traité de Rome vers la monnaie, l'Europe sociale, la recherche, la technologie, l'environnement, la coopération en matière de politique étrangère, le vote à la majorité, une plus vaste association du Parlement européen à la décision. Si nous faisons ce qui a été décidé par l'Acte unique, nous aurons accompli des progrès aussi décisifs que le Traité de Rome, il y a trente ans.\
QUESTION.- Quel est votre message européen à l'Italie et aux Italiens ?
- LE PRESIDENT.- Le peuple italien adhère profondément à l'Europe, et est l'un des plus engagés dans cette construction. J'ai toujours trouvé l'Italie en pointe lorsqu'il s'est agi d'accomplir un progrès pour l'Europe. Cela m'a incité à resserrer plus encore les liens entre la France et l'Italie : nous parlons vraiment le même langage. Dans le concret à côté de coopérations brillantes dans le domaine de la science et de la technologie - le CERN, Superphenix ou le programme spatial - je pense que l'Italie pourrait participer plus encore. Ainsi, je ne me résous pas à voir la construction aéronautique italienne rester en dehors d'Airbus qui est un symbole de coopération industrielle réussie. J'espère qu'en Italie, comme ailleurs, les forces de cohésion l'emporteront sur les forces de dissociation d'un espace européen qui reste toujours à consolider malgré les succès déjà remportés. On ne peut se passer de vos savants, de vos experts, de vos ingénieurs, de vos chefs d'entreprise, de vos travailleurs. Ils ont placé votre pays très haut dans l'échelle mondiale. De ce pays en plein essor j'attends qu'il s'affirme plus encore un pays d'avant-garde pour l'Europe.\