13 avril 2017 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur l'équipementier aéronautique Zodiac Aérospace, à Niort le 13 avril 2017.


Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Monsieur le maire de Niort,
Monsieur le maire de Chauray,
Madame la Vice-présidente du Conseil régional,
Monsieur le président,
Je salue ici tous les collaborateurs de ZODIAC et notamment ici, à Niort. J'avais de nombreuses raisons de venir dans les Deux-Sèvres. Je connais bien le département mais, aussi paradoxalement que cela puisse apparaître, je n'y étais jamais venu comme Président de la République. Il était donc temps, plus que temps, que je vienne ici vous rencontrer.
J'avais l'embarras du choix, j'aurais pu aller dans une grande mutuelle, il y en a tellement ici dans les Deux-Sèvres. J'aurais pu aller dans une très belle exploitation agricole, il y en a beaucoup, même si certaines souffrent. J'aurais pu aller dans de nombreuses PME, il y en a d'excellentes. J'aurais pu voyager dans le Marais poitevin, bref, j'arrête là ma description du département. J'ai choisi de venir chez un leader mondial parce qu'ici, vous êtes leader mondial. Vous avez ici dans les Deux-Sèvres, plutôt une attitude et un comportement de discrétion. C'est ce qui fait le charme de ce département. Avant que vous ne veniez me voir pour parler de l'avenir de ZODIAC, j'ignorais qu'il y avait ici tout ce qui permet de donner à nos avions la capacité de voler. Comme vous l'avez très bien dit Monsieur le Président, ma vie va basculer. Je ne parle pas de ma vie politique, je parle de ma vie personnelle. De savoir que chaque fois que je prends un avion, Niort m'accompagne. C'est effectivement là une découverte, mais je vais immédiatement la communiquer à beaucoup. C'est donc grâce à vous tous que dans le monde entier nous pouvons emprunter des avions en toute sécurité et en toute confiance. C'est sans doute la raison principale de ma venue, je voulais m'assurer que c'était vraiment en toute sécurité et en toute confiance et vous m'en avez d'ailleurs apporté toutes les preuves parce qu'ici, j'ai vu plusieurs opérateurs s'adonner à cette tâche. Vous vérifiez tout, vous installez tout, car vous n'avez pas le droit à la moindre erreur puisque cette erreur serait fatale. Savoir que tous les avionneurs vous font confiance, savoir que vous êtes capables de fournir à tous les constructeurs d'avions ce dont ils ont besoin, c'est pour vous et c'est pour nous, pour la France, une très grande satisfaction et pour tout dire, une très grande fierté. Comment en arrive-t-on là ? C'est l'histoire, l'histoire industrielle qui parfois tient au hasard des circonstances. Ici, dans cette entreprise, il y avait un homme d'affaires comme l'on dit, qui avait créé sa propre unité, dont l'épouse était niortaise et qui est venu donc s'installer ici. On lui a mis à disposition de nombreux terrains et il a pu développer son activité, être ensuite repris par un autre groupe, INTERTECHNIQUE, puis par ZODIAC. Quand on pense à ZODIAC, on ne pense pas nécessairement à des blocs électriques ou à des installations pour les avions, on pense à des bateaux. Vous avez d'ailleurs eu, dans l'histoire de votre entreprise, à faire ces bateaux. Là encore, vous l'avez rappelé, c'est une histoire - qui remonte à plus d'un siècle - de la première entreprise au monde aéronautique, ZODIAC. C'est une très grande satisfaction pour notre pays, parce que nous nous regardons toujours par rapport aux autres. Nous avons parfois pas moi tendance à nous déplorer, à considérer que nous serions toujours en retard d'un train industriel. Rien n'est plus faux. L'aéronautique française est la première au monde dans toutes ses dimensions, elle était même la première à être créée ici dans le monde et c'est ce que vous apportez comme démonstration. ZODIAC a pu avoir ce développement considérable et notamment ici mais aussi dans la plupart de vos sites en France et à l'étranger. Vous fabriquez et vous vendez pour l'essentiel dans le monde. Ici, vous êtes une entreprise leader mais qui est forcément tournée vers le monde. Si par malheur, il y avait des frontières qui se fermaient, s'il y avait du protectionnisme, si l'on se repliait, même si on donnait à chaque Français l'occasion de voyager davantage en avion, je crains que cela ne suffise pas à satisfaire vos productions. Nous avons besoin du monde, surtout quand nous sommes les meilleurs au monde et vous, vous exportez toute votre production et ce que vous vendez à AIRBUS est aussi d'une certaine façon exporté. Vous contribuez donc à la balance commerciale française et à l'emploi en France. Parfois, on s'interroge et on doit vous interroger : Pourquoi aussi avez-vous des sites industriels à l'étranger ? Pourquoi vous ne faites pas tout en France et je n'ose pas dire tout à Niort ? Parce que si on veut conquérir le monde, il faut aussi être capable de satisfaire le client là où il est et de lui fournir les pièces nécessaires à ce qu'il demande et c'est pourquoi vous avez rappelé que vous aviez des sites partout dans le monde mais que la plupart de vos emplois sont ici, en France. Comment expliquer une telle réussite, la vôtre et ici, à Niort ? La première raison de cette réussite, est que votre groupe est capable d'investir massivement dans la recherche et dans le développement. Si on n'arrive pas à inventer les produits de demain, notamment liés aux grands programmes aéronautiques et il y en aura d'autres puisqu'on sait qu'on va faire maintenant des avions qui vont recourir de plus en plus à l'électricité - pas encore l'avion complètement électrique, mais bientôt on est dépassé. Donc, il faut être capable d'inventer, d'innover et d'anticiper. Vous avez compris qu'il fallait avoir un centre de recherche et de développement, ici, à Niort, ici pour que nous puissions fabriquer ce qu'il y a de mieux au monde et de le faire avec l'idée que cela va aller encore plus vite, pas simplement les avions, mais les technologies qui vont être incorporées.La deuxième condition du succès, est l'investissement. Il ne faut jamais opposer l'investissement à l'emploi. Je dirais même que l'investissement est la condition de l'emploi. Si cette entreprise, la vôtre au plan global, mais ici à Niort, a pu trouver tout son développement, c'est parce que vous avez constamment investi. Vous m'avez montré d'ailleurs les différentes étapes de l'investissement, qui exige beaucoup de capitaux. C'est un des sujets : comment faire pour avoir les capitaux nécessaires pour cet investissement. Nous avons voulu et cela a été le choix que j'ai fait dès 2012 que les entreprises puissent avoir les moyens d'investir pour l'emploi, parce que chaque fois que l'on met en place des technologies, même des robots, cela a des effets favorables sur l'emploi. Les robots ne suppriment pas l'emploi, ils améliorent l'emploi et ils en créent d'autres.D'ailleurs, j'ai vu beaucoup de jeunes qui étaient sans doute entrés dans l'entreprise ces dernières années et qui ont été ici formés à ces nouvelles technologies. C'est la troisième condition de la réussite. Il faut de la formation. Par rapport aux pays qui sont à faibles coûts de main-d'uvre, -il y en a,- et qui peuvent aussi avec des investissements, acquérir des connaissances et des technologies, qu'est-ce qui va faire la différence ? Ce n'est pas de baisser les salaires, ce serait contre-indiqué sur le plan social mais même sur le plan économique. C'est au contraire d'avoir les meilleurs salariés, les mieux formés, les mieux qualifiés et c'est ce que vous avez fait avec notamment l'alternance, avec la formation et c'est ce que nous avons voulu faire avec le compte personnel d'activité. Je ne suis pas sûr que beaucoup sachent ce que c'est, mais chacune et chacun d'entre vous a un Compte Personnel d'Activité. Vous allez rentrer chez vous, vous allez dire : « Tiens, on a vu le Prsident de la République qui nous disait qu'on a un compte. On va aller vérifier ce qu'il y a dessus. Peut-être qu'il nous a réservé une bonne surprise, peut-être qu'il a mis quelque chose sur le compte. ». Oui, ce qu'il y a sur votre compte, ce sont finalement les droits à la formation que vous avez déjà acquis et qui sont d'autant plus importants que vous êtes dans l'entreprise depuis longtemps et surtout, que vous avez moins de qualifications au départ et ce qui permet à tous les salariés de pouvoir se requalifier, de se former, de connaître des promotions et bien sûr avec l'entreprise, de pouvoir élever encore le niveau de performance de ce groupe. Voilà pourquoi il est si important qu'on puisse se former. Enfin il y a des choix industriels qui parfois amènent une grande entreprise comme la vôtre à rechercher des alliances. C'est ce qui d'ailleurs a fait l'histoire de votre entreprise : par acquisition ou par absorption quelquefois vous avez créé un grand groupe. Est-ce qu'il est possible de vous associer à un autre grand groupe, en l'occurrence SAFRAN ? C'est une question qui a été posée à SAFRAN, qui est posée à ZODIAC et la position que j'ai prise comme Président de la République, avec le gouvernement, c'est de dire : si les deux entreprises arrivent à se mettre d'accord, cela peut être un beau projet, à la condition que ce soit en faveur des sites industriels, de l'emploi, de l'activité, de l'investissement, de la recherche et que ce ne soit pas au détriment de l'un ou de l'autre et c'est le sens des discussions, des négociations qui se poursuivent et qui doivent se faire vraiment dans le souci de l'intérêt général pour rester et même devenir à ce moment-là le premier groupe aéronautique - ou le second, on verra bien - mondial. C'est cela l'enjeu. Je fais confiance donc aux discussions et je sais qu'il y a parfois - vous l'avez dit, je n'aurais pas osé aller jusque-là - des intérêts financiers, des groupes financiers, la finance anonyme qui vient contrarier des projets, mais vous saurez résister car ce qui doit compter, c'est l'industrie. Ce qui doit compter, c'est l'investissement. Ce qui doit compter, c'est l'avenir et donc c'est le groupe qui est le vôtre et demain si vous en décidez, avec SAFRAN. J'ai visité beaucoup d'unités du groupe SAFRAN. C'est une très belle entreprise qui a réussi elle aussi par des acquisitions à devenir leader sur son marché, qui ne fait pas la même chose que vous. C'est bien l'intérêt pour qu'il y ait une complémentarité et que vous soyez plus forts ensemble. Mais c'est vous qui en déciderez. Voilà, je veux terminer pour vous dire que vous êtes ici dans une entreprise qui n'a pas de problème, mais qui a forcément
à régler des problèmes, parce que rien n'est acquis, rien n'est jamais acquis. Il est tellement facile de faire croire que tout sera plus difficile après, tout ira de moins en moins bien, quitte à ce que le doute s'installe dans les esprits alors que vous êtes la preuve exactement contraire, c'est que lorsqu'il y a de la technologie, de l'excellence, de la formation, du savoir-faire, qu'il y a de l'excellence française, nous pouvons réussir. C'est ce que je veux que vous puissiez retenir de ma visite, c'est que la France, elle a non pas simplement des fleurons industriels, comme si l'on disait qu'il y avait simplement quelques entreprises, elle a une belle industrie, elle a une capacité qui nous est enviée à l'extérieur. J'ai beaucoup voyagé, moi, pendant ces cinq ans et pas simplement en France. Maintenant, je sais grâce à qui j'ai pu voyager et j'en suis revenu. D'ailleurs, la première fois que j'ai pris l'avion comme Président de la République, j'ai eu la foudre qui est tombée sur l'avion. Alors j'ai interrogé le pilote. Je venais d'être Président de la République, j'allais voir Madame MERKEL qui m'attendait déjà depuis une heure. Je dis au pilote : continuons. Il me dit : « Non, il faut qu'on fasse la vérification. » Ce qui prouve que le Président de la République ne se fait pas obéir par un pilote - et heureusement. Mais si j'avais pu savoir, si j'étais venu dans les Deux-Sèvres plus tôt et que j'avais dit : mais c'est bien Niort qui a équipé l'avion ? Là, je lui aurais dit : alors on peut continuer, on n'a pas besoin de faire un retour vers l'aéroport. Mais ce que je voulais vous dire, j'ai beaucoup voyagé, je me suis beaucoup déplacé et chaque fois que l'on parle de la France, bien sûr, on parle de ce que nous faisons dans le monde, de notre action internationale, ce que nous avons fait pour l'Afrique, ce que nous devons faire pour le Moyen-Orient, de la lutte que nous devons mener contre le terrorisme. On parle de la France, de sa capacité. On parle de la France pour aussi, c'est vrai, la gastronomie, la liberté qui est la nôtre, le mode de vie et c'est très important parce que c'est nous. Ce n'est pas chez nous, c'est nous, ce n'est pas pareil. Nous, on se donne au monde, on parle au monde, on n'est pas simplement repliés sinon nous ne sommes plus la France. Mais on nous regarde aussi beaucoup pour l'excellence de notre travail, pour la qualité de nos productions, et pour notre aéronautique. J'étais dans un dernier voyage que j'ai fait en Malaisie et on faisait devant les autorités malaisiennes une démonstration du Rafale et d'autres avions, aussi de l'A400M. Nos pilotes et nos industriels étaient là et cela a été une prouesse extraordinaire parce qu'il pleuvait et je n'y étais pour rien. Vous pouvez en témoigner d'ailleurs ici, à Niort. J'ai compris que l'aéronautique française, vous, avec tout ce que vous pouvez incorporer dans l'aéronautique, diversité de technologie, vous êtes reconnus partout dans le monde. Alors, dites-le autour de vous parce que moi, je le dirai chaque fois que j'en aurai l'occasion : ici, à Niort, partout en France, nous avons une belle industrie, nous avons de grands ingénieurs, nous avons de bons ouvriers et nous sommes capables de réussir tous ensemble.
Vive la République et vive la France !