15 octobre 2015 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la crise migratoire et l'Union européenne, à Bruxelles le 15 octobre 2015.

JOURNALISTE :M. le Président, est ce que le but de ce Conseil européen consacré aux migrants c'est d'empêcher l'arrivée de migrants sur les côtes européennes ?
LE PRESIDENT :Oui, l'objectif c'est d'intégrer ceux qui sont déjà là et vous savez que c'est l'Allemagne, l'Autriche, la Suède qui font l'effort principal. La France a pris une part, mais une part très modeste. Nous devons aussi et surtout maintenant faire en sorte que les pays qui accueillent des réfugiés à l'extérieur de l'UE, je pense à la Turquie, à la Jordanie, au Liban, puissent être aidés, parce que sinon nous savons très bien ce qui peut se produire : le mouvement de départ de ces pays viendrait nécessairement vers les côtes européennes avec des drames que je veux éviter.
D'où l'engagement qui va être pris ce soir d'accorder une aide très importante à ces pays. C'est notre intérêt, c'est le leur, c'est celui aussi des réfugiés syriens. Avec la Turquie, il faudra avoir des règles claires pour qu'elle puisse jouer ce rôle. Elle doit non seulement garder les réfugiés qui sont dans les camps et il est nécessaire de l'y aider £ elle doit également éviter qu'il y ait des trafics qui puissent produire des drames et des tragédies supplémentaires.
JOURNALISTE :Sera-t-il question d'exempter de visa les populations actuellement en Turquie ?
LE PRESIDENT :Je suis très attentif à cette question-là. Il ne faudrait pas qu'au prétexte de vouloir que la Turquie aide à retenir des réfugiés qui sont dans son pays, il y ait un mouvement de libéralisation dans n'importe quelles conditions, avec des visas qui pourraient être accordés à des individus dont on ne connaîtrait pas exactement l'identité, ou dont on ne pourrait pas la vérifier. Il y aura donc une démarche qui supposera beaucoup de conditions. Il est normal d'en discuter avec les Turcs mais la France, avec d'autres pays, sera très attentive à ce que les conditions puissent être non seulement posées mais respectées.
JOURNALISTE :Pourquoi les Etats membres ne tiennent pas leurs promesses d'aide financière faites lors de la dernière réunion ?
LE PRESIDENT :Il faut absolument, je le répète ici, que les hotspots, les centres qui ont été prévus, puissent être maintenant réalisés. C'est engagé. J'irai bientôt en Grèce et j'aurai l'occasion de le réaffirmer, et d'avoir, avec le Premier ministre Tsipras, confirmation des politiques qui sont mises en uvre. C'est très important qu'en Italie, en Grèce, nous puissions avoir ces centres « hotspots ».
Je suis aussi très attentif à ce qui se passe dans les Balkans, parce que là encore il y a beaucoup de réfugiés qui ne sont pas véritablement accueillis ou qui le sont dans des conditions d'extrême précarité. C'est pourquoi nous devons aujourd'hui, c'est le sens et l'ordre du jour de ce Conseil européen- après avoir protégé les frontières, créé ces centres « hotspots »- aider les pays qui aujourd'hui accueillent à l'extérieur de l'UE de nombreux réfugiés. Il faut, pour que nous puissions être dignes par rapport à nos engagements, mettre tous les moyens pour que ces pays puissent assurer cette responsabilité.
JOURNALISTE :Est-ce qu'il faudra aider Mme Merkel qui rencontre actuellement des difficultés dans son pays depuis le début de la crise ?
LE PRESIDENT :L'Allemagne a accueilli de nombreux réfugiés. Très nombreux. Je l'ai dit, c'est sans commune mesure avec ce que la France a pu faire. La France n'est pas un pays de destination. Les réfugiés sont allés en Autriche, en Allemagne et dans d'autres pays. Il ne s'agit pas de répartir ces réfugiés, cela a déjà été décidé, notamment pour ceux qui sont dans des situations extrêmement précaires.
Il s'agit de faire en sorte que l'Allemagne puisse maintenant, avec d'autres pays, être sûre que nous pourrons contrôler les frontières extérieures et que nous pourrons aider les pays qui sont tout près de la Syrie, pour éviter qu'il y ait de nouveaux accueils de populations, parce que l'Allemagne ne pourra pas les accueillir et nous devons le comprendre.
Nous avons réparti les réfugiés en Europe. L'Allemagne a fait le plus gros effort, mais aujourd'hui il s'agit d'avoir un mécanisme de protection de nos frontières. Je suis tout à fait solidaire de Mme Merkel. Ce serait trop facile que de ne pas venir en aide aujourd'hui à l'Allemagne au prétexte que ce sont les Allemands qui font la grande partie de l'effort. Il faut aussi être Européen.Merci beaucoup.